• Aucun résultat trouvé

La prise en compte des compétences initiales : l’exemple du portfolio

La place de l’écriture et des écrits dans les formations professionnelles

3. Effets d’une didactique centrée sur le sujet

3.2. Des facteurs déterminants dans les apprentissages

3.2.2. La prise en compte des compétences initiales : l’exemple du portfolio

Nous présentons ci-dessous une démarche d’évaluation centrée sur les compétences initiales des apprenants.

Cette pratique d’évaluation, basée sur l’usage du portfolio, a été mise en place par le réseau des ateliers de formation de base de Haute-Normandie : le Groupe régional de lutte contre l'illettrisme (GRLI, 2003). Le portfolio rassemble des documents variés qui reconstituent le curriculum de l’apprenant : diplômes, certifications, attestations de compétences professionnelles et d’autres traces écrites des expériences professionnelles.

L’évaluation consiste donc à recenser les compétences des apprenants, dès leur entrée en formation, à l’aide du portfolio. Cela permet ensuite de mesurer la progression par l'évolution du degré de maîtrise des compétences. Les auteurs soulignent qu’il s’agit d'effectuer une lecture positive des besoins de formation, en opposition à une approche qui vise à repérer des lacunes et des manques au regard de la norme scolaire. Le portfolio peut donc constituer un support qui permet d’établir un lien entre la formation et les lieux dans lesquels les compétences empiriques sont élaborées.

La démarche d'évaluation présentée par le Groupe Régional de Lutte contre l'Illettrisme (GRLI) s'appuie sur des référentiels linguistiques édités par le Centre Université-Économie d'Éducation Permanente (CUEEP & FAS, 1996) et par le Ministère de l'emploi (Dartois, C. & Thiry, C., 2000). Ainsi, les compétences sont évaluées à partir des savoirs listés dans ces référentiels linguistiques. Cette démarche se situe donc au carrefour du domaine scolaire et de la formation continue. Les auteurs précisent qu’elle est basée sur l’évaluation de compétences à partir des savoirs listés dans les référentiels, comme l’expression orale, écrite, le calcul et la résolution de problème. Dans la mesure où il s’agit d’une lecture positive (notion de compétence et d'évaluation participative) des besoins de formation contrairement au repérage des manques, elle s’inscrit dans une visée moins normative.

Dans cette même perspective, l'évaluation est participative, car elle implique le formateur et l'apprenant. Elle est menée à l’aide de fiches individuelles de progrès qui constituent une trace des différentes étapes de la formation. Focalisés sur le repérage des progrès individuels, les référentiels sont utilisés comme des bases de données à partir desquelles des compétences sont formulées. Les auteurs soulignent que la démarche d’évaluation basée sur l’usage du portfolio a pour objectif la reconnaissance des acquis à titre personnel, institutionnel et professionnel. Cet outil peut ainsi mettre en valeur les compétences empiriques qui ont été identifiées par l’apprenant. Les compétences langagières sont délimitées pour être évaluées et la progression des apprentissages est inscrite dans les fiches de progrès à partir d'indicateurs observés. Les nouveaux savoirs acquis sont ainsi mesurés en contexte, lorsqu'ils sont mobilisés. Notons toutefois que l'usage de ces fiches ne tient pas compte des situations dans lesquelles les apprentissages vont être réinvestis, au moment où les personnes en auront besoin, ni de l'environnement qui permettra une mise en œuvre favorable ou pas.

Utilisé dans la démarche d’évaluation formative décrite par le GRLI (2003), le portfolio suppose une distinction entre les notions de tâche et d'activité. La tâche résulte de la planification de l'action de formation. Elle comprend un ensemble d'éléments qui encadrent l'action : les objectifs opérationnels, la durée de la séquence, les consignes et les supports (p. 33). L'activité est représentée par la manière dont la tâche est mise en œuvre par l'apprenant.

Cette distinction permet de repérer les progrès, par la mise en œuvre de l’observation et de l’entretien d’explicitation. Ainsi, pour être extraite du contexte, les auteurs précisent que l'activité peut être observée par le formateur qui observe et tente de repérer des attitudes, des gestes et des comportements pendant que l'apprenant agit. Ce regard extérieur peut favoriser la mise en lumière de « savoirs cachés de l'apprenant » (p 33). L’activité peut aussi être appréhendée au moyen d'un entretien d'explicitation qui conduit l'apprenant à verbaliser ce qu'il a compris de la consigne, comment il a réalisé ce qui lui est demandé, ce qu'il pense avoir réussi et saura faire dans une nouvelle situation. Nous avons déjà évoqué la méthodologie de l’entretien comme une technique permettant de faire émerger les connaissances cachées. La démarche du portfolio favorise donc une attitude réflexive sur le processus d'appropriation des nouveaux savoirs, notamment à partir des compétences existantes. Cet exemple montre qu’il peut s’appliquer aux formations les moins qualifiantes.

Conclusion partielle

Après avoir examiné les effets d’une didactique centrée sur le sujet, nous retenons que l’environnement a un impact sur les apprentissages et sur la construction du rapport à l’écrit de l’apprenant. Ainsi, notre recherche centrée sur une meilleure connaissance des compétences empiriques en situation professionnelle peut contribuer à repérer des éléments favorables au transfert des nouveaux savoirs.

Les objectifs de l’apprenant déterminent également son engagement dans la formation. Comme nous l’avons évoqué, l’implication dans la formation dépend de l’écart qui sépare l’apprenant de leur réalisation. Il convient donc d’identifier les objectifs et de déterminer avec l’apprenant leur réalisation. L’usage de l’écrit réflexif, et en particulier du portfolio, peut favoriser la verbalisation des objectifs. Toutefois une observation du poste de travail peut favoriser l’émergence des compétences ignorées et donc non mentionnées dans le portfolio. Notre terrain d’étude se situe dans le milieu professionnel et peut donc apporter des informations complémentaires sur les compétences qui peuvent être repérées par les formateurs.

Conclusion du chapitre

Ce chapitre consacré à l’étude de la place de l’écriture dans les formations montre que cette place de l'écrit varie en fonction des niveaux de qualification. L'étude des métiers de la santé, à travers quatre niveaux de qualification, met en avant l’écart entre l’usage de l’écriture et le niveau de qualification professionnelle.

Pourtant, l'usage de l'écriture favorise les apprentissages. Il est donc utile de lui accorder une place plus importante dans les contenus de formation des salariés de premiers niveaux de qualification.

Pour augmenter la part de l'écrit dans ces formations, on peut prendre appui sur le contexte, comme les situations de travail dans lesquelles les personnes ont déjà développé des compétences. De plus, cela permet d'ancrer les apprentissages dans les situations réelles et de développer de nouveaux savoirs généraux et transversaux.

Il existe peu de recherches qui prennent en considération le contexte extérieur à la formation. Notre étude contribue à une meilleure connaissance du terrain dans lequel les savoirs sont contruits et réinvestis. Ainsi, l'étude du langage au travail envisagée sous l'angle de la littéracie élargie à la raison graphique et orale peut contribuer à appréhender les savoirs

construits en dehors du cadre de la formation. Comme nous l’avons évoqué aux chapitres II et III, il s'agit des compétences visibles ou non qui permettent de prendre part à la vie sociale et professionnelle, que l'on maîtrise ou non l'écrit.

CHAPITRE VI

La formation à l’écrit dans le secteur professionnel de la

Outline

Documents relatifs