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Partie I: Cadre théorique et problématique de recherche

5. L’enquête de terrain

5.4 Population enquêtée et démarche de terrain

Comme indiqué précédemment, la population cible de l’enquête de terrain est constituée par les habitants adultes des immeubles HBM de Champ-Joly. L’objectif était d’atteindre tous les adultes des ménages. Il peut s’agir de conjoints ou de concubins, mais également, par exemple, d’une tante ou d’un des grands-parents résidant dans l’appartement. Lorsqu’un ménage ne comporte pas de deuxième adulte, le second questionnaire pouvait potentiellement être rempli le cas échéant par un des enfants du ménage âgé de plus de 20 ans.

Ce principe de distribution du questionnaire est identique à celui adopté pour le monitoring sociologique «Programme de logements d’utilité publique : opération pilote HBM 199 Tambourine sur la mixité sociale » (Battaglini, Christe, Chuard & Wicht, 2011) afin de d’avoir des données comparables. Pour éviter d’alourdir un travail déjà important, le questionnaire n’a pas été distribué aux résidents des immeubles en loyers libres de Champ-Joly. Ce sont donc uniquement les opinions, attitudes et comportements d’habitants adultes des appartements HBM qui sont étudiés.

5.4.1 Processus de distribution du questionnaire

Afin de maximiser les retours, les questionnaires ont été remis et repris en main propre dans chaque ménage. Ces opérations se sont déroulées entre le 18 janvier et le 22 février 2010. Plusieurs passages ont été nécessaires pour la plupart des ménages pour pouvoir donner le questionnaire en main propre et le reprendre une fois complété.

L’étude elle-même et la distribution des questionnaires ont été annoncées dans une lettre du propriétaire, la Fondation HBM Emma Kammacher. Ce courrier précisait que l’étude fait partie d’un dispositif de recherche plus vaste mené par la Haute école de travail social de Genève, englobant d’autres immeubles de la fondation et visant à évaluer la qualité de vie dans les immeubles et la cohabitation entre locataires. Un accent particulier a été mis sur le caractère indépendant et anonyme de la recherche. La lettre a été mise dans toutes les boîtes à lettres des logements sociaux de Champ-Joly quatre jours avant le début de l’enquête de terrain. Ce courrier d’introduction s’est avéré fort utile. Une grande majorité des locataires avaient lu cette lettre avant de recevoir le questionnaire, ce qui épargné de longues explications et des justifications. L’implication du propriétaire a probablement motivé bon nombre d’habitants à participer à l’enquête.

C’est sans doute pour cette raison que seules quatre personnes ont déclaré lors de la remise du questionnaire qu’elles ne voulaient pas le remplir, faute de temps. Au total, seuls sept

habitants ont explicitement refusé de le faire. De plus, douze habitants n’avaient pas rempli le questionnaire au moment de mettre un terme à la collecte des questionnaires, alors qu’ils avaient affirmé à plusieurs reprises qu’ils allaient le faire. Ils ont finalement reçu une lettre avec une enveloppe timbrée pour remplir le questionnaire à leur convenance et le retourner par voie postale, mais aucun ne l’a fait.

A leur demande, j’ai aidé trois habitants à compléter le questionnaire, car leurs connaissances de français n’étaient pas suffisantes. Contrairement à d’autres résidents, ces personnes ne bénéficiaient pas d’un soutien dans leur famille, de la part de proches ou de voisins pour les aider.

L’accueil lors de la remise et de la reprise du questionnaire a été le plus souvent bon. Quelques locataires invitaient à boire un verre, alors que quelques autres se sont montrés plus méfiants et ont à peine entrouvert leur porte. Très peu de personnes ont demandé des précisions supplémentaires sur l’étude ou ont fait des commentaires oraux. L’un des habitants s’est montré réticent à remplir le questionnaire parce qu’à ses yeux les études n’aboutissent jamais à des améliorations concrètes (mais il l’a finalement quand même fait). Un autre a fait part d’un conflit avec son voisin de palier. Un des destinataires du questionnaire a insisté sur l’importance d’entretenir de bonnes relations de voisinage et de participer à la vie du quartier. A l’opposé, un locataire a affirmé qu’il évitait autant que possible d’avoir des relations avec ses voisins. Une personne à la retraite a dit se sentir un peu seule. Une ressortissante helvétique a expliqué qu’il n’avait pas été évident pour elle de s’adapter à la grande diversité de nationalités présentes dans les immeubles et au petit nombre de Suisses qui y résident. Plusieurs locataires se sont plaints du chauffage insuffisant et des problèmes d’isolation thermique du bâtiment, alors qu’à l’extérieur un grand froid sévissait, renforcé par la bise et les chutes de neige.

Dans ce processus comme dans la rédaction du rapport de recherche, la dimension éthique est une préoccupation constante. L’anonymat des personnes qui ont rempli le questionnaire doit être préservé, en évitant que les résultats publiés permettent d’identifier des personnes ayant des caractéristiques spécifiques. Pour les quelques entretiens réalisés, les personnes concernées ont donné l’autorisation de les citer. Dans la distribution des questionnaires, l’écoute est restée passive afin d’éviter d’être pris dans des conflits de voisinage ou avec la régie. La liberté de remplir le questionnaire a été sauvegardée, même si bien sûr tout a été mis en œuvre pour obtenir le taux de réponse le plus élevé possible. Chaque répondant a été aussi autorisé à ne pas répondre à des questions qu’il jugerait trop indiscrètes.

5.4.2 Statistique de distribution et de retour des questionnaires

Selon la définition de la population enquêtée exposée plus haut, 185 personnes auraient dû remplir un questionnaire, dont quatre enfants de plus de 20 ans (cf. tableau de distribution des questionnaires, annexe A2). Comme un seul a été rempli par un enfant et s’est révélé inexploitable, on ne traite plus que les adultes, soit 181. Sur ce total, 176 ont pu être effectivement atteints. Cinq ne pouvaient pas être interrogée (absence de longue durée ou en train d’emménager et encore sans contacts avec les voisins), sept ont d’emblée refusé de remplir un questionnaire. Ce sont donc 164 questionnaires qui ont été déposés dans les ménages, dont 23 n’ont pas pu être récupérés (refus de remplir, questionnaires non retournés pas poste comme c’était promis), et 7 se sont révélés inexploitables (qualité de remplissage insuffisante). Ce sont donc finalement 134 questionnaires qui peuvent être exploitées, soit les 72.4% de la population visée. Ce taux peut être considéré comme très élevé, surtout si on ajouter que le 82.3% des ménages ont rempli au moins un questionnaire exploitable3. Ces pourcentages élevés sont

certainement dus au mode de distribution adopté pour le questionnaire : remettre et reprendre les questionnaires en main propre dans chaque ménage. Plusieurs passages auprès de la plupart des ménages ont été nécessaires, tant pour pouvoir donner le questionnaire que pour pouvoir le reprendre une fois complété. La lettre adressée aux habitants par le propriétaire des immeubles (la Fondation HBM Emma Kammacher) a certainement joué aussi un rôle positif, notamment en limitant le nombre de refus.

Les taux de réponses des questionnaires qui devaient être remplis par le « 2e adulte » des ménages sont nettement inférieurs à ceux qui concernent le « 1er adulte » (respectivement environ 60% vs 80%). Cette différence s’explique entre autres parce que la personne rencontrée dans le ménage a souvent estimés qu’un seul questionnaire suffisait, le conjoint ayant semble-t-il les mêmes opinions. En général, les arguments pour convaincre la deuxième personne de remplir également un questionnaire n’ont pas porté.

Le fait que seuls sept questionnaires remplis par des adultes aient dû être considérés comme inexploitables (env. 5% des questionnaires récupérés) indique que les répondants se sont donné beaucoup de peine, malgré le temps nécessaire et les éventuelles limites dans la maîtrise du français. Le grand nombre de remarques et de commentaires faits en fin de questionnaire (près d’une personne sur quatre) va dans le même sens.

5.4.3 Saisie et contrôle des données

Les données ont été saisies informatiquement à l’aide du logiciel libre EpiData4. Des contrôles ont permis de supprimer les questionnaires insuffisamment remplis pour être exploitables (cf. plus haut). Plusieurs contrôles de fiabilité des réponses ont été effectués. Lorsque deux questionnaires avaient été remplis dans un même ménage, les réponses concernant les données du ménage (p. ex. âges des enfants, revenu du ménage, etc.) ont été comparées. Si l’un des répondants avait omis certaines informations, elles ont été introduites en utilisant les réponses de l’autre personne du ménage. Dans les cas où des réponses étaient contradictoires (p. ex. estimations différentes des revenus du ménage), aucune correction n’a été apportée.

Un autre type de vérification a porté sur la cohérence de certaines réponses. A titre d’exemple, il a été vérifié que les personnes ayant répondu que leurs enfants vont chez des voisins ont effectivement des enfants. Si cela n’était pas le cas, la réponse a été corrigée et libellée comme erronée. Un autre genre de contrôle a consisté à vérifier que les réponses « ouvertes » ne pouvaient pas figurer comme réponses dans les items « fermés » proposés, comme l’illustre l’exemple suivant. Une personne écrit sous forme de réponse « ouverte » qu’elle a quitté son ancien appartement car il était trop exigu alors qu’elle aurait pu simplement cocher l’item « logement trop petit ». Dans ce cas, la correction apportée est d’ajouter comme réponse « logement trop petit ».

Au total, plus d’une trentaine de contrôles ayant pour but de vérifier et de corriger la cohérence des informations ont été effectués. Ces contrôles ont relevé une relativement bonne fiabilité des réponses, puisqu’il n’a fallu procéder qu’à un maximum d’une dizaine de corrections pour une même question soit au plus 7.5% d’erreurs).

Enfin, quelques personnes ont parfois coché entre deux réponses proposées parce qu’elles étaient indécises (p. ex. une croix mise entre « rarement » et « jamais »). Pour chacune des questions concernées par ce problème, une systématique a été déterminée afin de corriger cela tout en cherchant à préserver le sens et le poids des réponses apportées. Par exemple, si deux habitants avaient répondu à la même question par une croix entre « souvent » et « parfois », pour l’un la correction a consisté à mettre « souvent » et pour l’autre à mettre « parfois ».

4 J’ai reçu pour cela l’aide du directeur de mémoire, Etienne Christe, que je remercie pour ses appuis constants tout au long de mon travail de bachelor.