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Partie I: Cadre théorique et problématique de recherche

4. Problématique de recherche

4.1 Habiter un ensemble HBM socialement mixte

Le partage avec d’autres d’un espace de vie comprenant des parties collectives – notamment les espaces intermédiaires dont il a déjà été question dans ce travail de bachelor – mais aussi des interférences entre les parties privatives que sont les logements – dues notamment aux bruits et aux odeurs – impliquent des relations, des interactions plus ou moins fréquentes avec les voisins, ces « inconnus à tête connue » dont parle La Mache (2003, p. 481). Comme l’écrivent de Gourcy & Rakoto-Raharimanana (2008), « (…) entre la forte mobilisation des uns et le défaut de participation des autres, l’éventail des possibles est large et ne s’explique pas

simplement par la durée de présence dans les lieux. Tout se passe comme si habiter un espace résidentiel mettait à l’épreuve une certaine conception du vivre-ensemble (…) ».

La conception du vivre-ensemble peut évidemment différer selon les personnes, quand ce n’est pas selon les périodes de vie qu’elles traversent. Les questions de bruit, de propreté, de savoir-vivre, de respect des espaces communs font l’objet de représentations diverses, et parfois bien sûr divergentes. Des différences analogues peuvent exister en ce qui concerne la place qui est faite aux enfants dans la famille, dans l’immeuble, dans le quartier. Qu’on pense aux regards variés portés sur la façon dont des parents surveillent et contrôlent leurs enfants, ou aux façons qu’ils ont de sanctionner des transgressions.

Ces différences de conception peuvent bien sûr correspondre à des différences individuelles, mais aussi à des valeurs et à des attentes divergentes selon les groupes sociaux. Les lignes qui suivent sont consacrées à quelques aspects de ces différences et à leur origine éventuelle.

4.1.1 Le quartier, entre fuite et résidence

Une dimension fondamentale du vivre-ensemble porte sur le potentiel de vie quotidienne qu’offre le quartier de résidence. La partie théorique a abordé ce thème en empruntant à Authier (2005, p. 208) l’existence de deux discours opposés sur le quartier, qui correspondent à deux façons contrastées d’y vivre. Pour les uns, le quartier est « l’instance sociétale de proximité » qui va permettre de traiter les questions d’exclusion économique et d’appartenance sociale (Genestier, 1999, Tissot, 2002, cités dans Authier, 2005, p. 208). Pour les autres, la vie de quartier disparaît (Dubois-Taine & Chalas, 1997, cité dans Authier, 2005, p. 208), du fait que les habitants se partagent essentiellement entre leur logement et la ville (Ascher, 1998, cité dans Authier, 2005, p. 208), ne faisant en quelque sorte que transiter dans leur quartier. En se référant à l’enquête « Rapports résidentiels » (Authier, Bensoussan, Grafmeyer, Lévy & Lévy-Vroelant, 1997, cité dans Authier, 2005, pp. 208-209), Authier relève cependant que les habitants restent très attachés à leur quartier, plus même qu’à leur logement (2005, p. 210). Il l’explique notamment par l’offre de commodités de proximité : commerces, activités sportives, sociales ou culturelles, lieux de rencontre collective, restaurant, etc. Par ailleurs, neuf habitants sur dix ont des relations avec des voisins. Authier (2005, p. 215) constate que seul un enquêté sur cinq correspond au citadin mobile qui n’a qu’un très faible usage du quartier. Parmi les autres, une majorité (le double d’enquêtés) utilise le quartier comme « un espace ouvert sur le cosmopolitisme de la vie urbaine » (sorties le soir dans le quartier avec des personnes autres que les voisins ou les proches) plutôt que comme « espace de proximité » (usage « traditionnel » du quartier où l’on fréquente les commerces et où l’on sort avec des voisins ou des proches). Ce dernier type d’usage du quartier est surtout le fait des femmes, des couples avec enfants, des adultes entre 40 et 60 ans, des personnes peu diplômées, d’employés et d’ouvriers, de chômeurs et inactifs (Authier, 2005, p. 216). C’est bien sûr aussi le fait des personnes très attachées à leur quartier et de celles qui y passent leur weekend.

Cette étude montre que l’usage d’un quartier ne dépend pas seulement de ce qu’il offre sur le plan des infrastructures. Comme pour le vivre-ensemble entre voisins spatialement très proches, différents usages d’un même quartier peuvent exister parmi ses habitants. Dansereau & Germain (2002, cité dans Authier, 2005, p. 217) font des constats analogues à propos d’un quartier multiethnique ; pour une majorité des habitants domine l’ouverture sur le cosmopolitisme de la ville, pour d’autres leur quartier est vécu « (…) comme un espace clos autosuffisant ou un espace de construction d’une identité communautaire. ». Quel que soit ce rapport, le quartier n’occupe jamais qu’une place marginale dans la vie sociale de ses habitants, estime Authier (2005, p. 218), même s’il n’est pas systématiquement l’espace privilégié de proximité au sens social (et non spatial) du terme. Il réside toujours, semble-t-il, des relations de voisinage actives, au moins minimales.

La caractérisation du rapport des personnes enquêtées dans le cadre de ce travail de bachelor au quartier qu’ils habitent reposera tout d’abord sur une analyse de l’offre du quartier en termes de commerces de différentes natures, y compris cafés et restaurants, sur les lieux d’activités sportives et culturelles collectives, sur les espaces verts etc. Cette analyse du quartier comprendra évidemment une analyse de la zone d’habitat visée par l’enquête. L’enquête auprès des habitants s’intéressera de son côté aux usages qu’ils font de ces commodités locales, comme aussi aux usages de commodités existant en-dehors. Les analyses de données s’intéresseront entre autres aux caractéristiques des enquêtés qui correspondent à différents modes d’usage du quartier (modèle espace de proximité ‘traditionnel’ ou modèle plus ouvert sur le cosmopolitisme

de la vie urbaine).

4.1.2 Mobilité résidentielle, pendularité et investissement local

La partie théorique de ce travail de bachelor a mis en évidence que le lieu où l’on réside est de moins en moins le lieu où se concentrent les relations sociales importantes. « Habiter n’est plus synonyme de résider », affirment Viry, Kaufmann, & Widmer (2009, p. 91). Lefeuvre exprime un point de vue proche lorsqu’elle constate que dans la plupart des cas, les personnes expérimentent et combinent à la fois la mobilité et la proximité (Lefeuvre, 2005, p. 90). Ces rappels confirment l’expérience courante d’une séparation géographique entre différents lieux de vie, notamment entre la vie professionnelle (lieu de travail) et la vie privée (résidence), mais aussi entre lieu de résidence et lieux de nombreuses activités de la vie quotidienne, achats de diverses natures, détente, sport, culture.

Dans la recherche empirique, nous essaierons de vérifier comment se présente la tension entre mobilité spatiale et résidence, notamment selon l’existence d’un travail et la présence d’enfants dans le ménage, mais également en fonction de la mobilité résidentielle antérieure, de l’usage du quartier évoqué dans la partie précédente et de l’éloignement géographique du réseau primaire, soit le proche entourage. On peut ainsi faire l’hypothèse que l’échange de soutien avec le réseau personnel tend à diminuer avec la distance ou la durée du déplacement pendulaire vers le lieu de travail, mais que les relations d’aide ou de solidarité dans le voisinage restent importantes, du fait que les pendulaires jouissent d’un réseau important en nombre, mais où dominent les liens de type faible. Une conséquence relevée par Viry, Kaufmann, & Widmer (2009, p. 84) est que ces liens tendent à se virtualiser chez les pendulaires, c’est-à-dire qu’ils sont davantage potentiels qu’actifs. Il doit être possible de vérifier cette affirmation en étudiant la fréquence et la nature des relations de voisinage relevant de l’entraide.

Dans une autre contribution scientifique, Pattaroni, Thomas & Kaufmann précisent bien l’importance de la mobilité pour la vie quotidienne et le réseau de relation en affirmant que « (…) organiser sa vie autour des transports publics ou de la voiture a des conséquences en matière de localisation des lieux où se déroulent les activités quotidiennes (courses, loisirs, travail, etc.) ou encore des formes de développement du réseau d’amis et de connaissances, etc. » (Pattaroni, Thomas & Kaufmann, 2009, p. 9). Nous allons de ce point de vue examiner la situation en termes de transports publics et prendre en compte la possession d’une ou de plusieurs voitures par les ménages étudiés.

La séparation entre emploi et résidence est également abordée par Pattaroni, Thomas & Kaufmann dans la même publication. Ils constatent en effet que, comme raison de déménager, le « (…) changement d’emploi est très peu cité (10% de l’échantillon). Ceci semble confirmer pour partie la séparation croissante de la mobilité résidentielle et des trajectoires professionnelles (sociales et spatiales). » (Pattaroni, Thomas & Kaufmann, 2009, p. 18). Les travailleurs acceptent désormais une pendularité plus importante et ne déménagent pas forcément lorsqu’ils changent de lieu géographique de travail. La question de la mobilité résidentielle, abordée dans le tour de la littérature scientifique, joue sans doute un rôle important dans la façon d’habiter le

quartier. Nous pouvons saisir des dimensions relativement objectives de la mobilité résidentielle, en interrogeant les personnes enquêtées sur les raisons qui les ont amenées à quitter leur logement précédant et à prendre ce logement-ci, ainsi que sur l’évaluation de leur situation de logement actuel. Ces informations renvoyant directement à la mobilité résidentielle peuvent être complétées par d’autres, plus indirectes et d’ordre social, portant par exemple sur le statut socio-économique de la personne et du ménage, ainsi que sur leur perception de l’avenir. Des appréciations sur le logement et le quartier jouent également un rôle, comme le rappellent encore Pattaroni, Thomas & Kaufmann (2009, p. 63) : « Indépendamment de la disposition ou non d’une automobile, se sentir bien dans un quartier incite à y rester, pour son temps libre notamment. » On relèvera également que la mobilité résidentielle antérieure joue un rôle sur l’éloignement spatial du réseau de relations sociales (Viry, Kaufmann, & Widmer, 2009, p. 80), qui peut à son tour influencer le volume et la nature des relations de voisinage.

Comme le montrent ces quelques rappels des travaux de recherche, il vaut la peine de s’attarder sur les raisons de déménager du logement précédent et d’emménager dans le quartier étudié dans le cadre de la partie empirique de ce travail de bachelor, comme également sur celles, directes ou indirectes, de vouloir quitter l’appartement occupé au moment de l’enquête. On peut en particulier reprendre la classification de ces raisons entre sensibles, sociales et fonctionnelles (Pattaroni, Thomas & Kaufmann, 2009, pp. 13-14). Dans son étude, « très rares sont les familles qui déclarent avoir déménagé uniquement pour des raisons ‘sensibles’ (4%). » (Pattaroni, Thomas & Kaufmann, 2009, p. 18) ; mais ces raisons sont citées par une personne sur trois comme ayant fondé, avec d’autres motivations, leur décision de changer de logement. Quoi qu’il en soit, la notion de choix est relativisée par Pattaroni, Thomas & Kaufmann lorsqu’ils concluent que « (…) la majorité des déménagements des familles ne découle pas simplement d’ajustements mécaniques à la taille du logement mais qu’ils sont liés (…) à la quête d’un logement de qualité dans le cadre des opportunités offertes par un marché tendu. » (2009, p. 18). Dans le cadre du logement social, cette liberté de choix est encore plus limitée, ce qui ne permet sans doute pas d’entrer dans toutes les subtilités objectives des raisons de déménager. Ce constat ne fait que rendre plus importante la comparaison entre les raisons de déménager et d’emménager, et plus pertinentes les appréciations sur le logement occupé.

La mobilité résidentielle et les raisons, positives ou négatives, d’habiter à tel endroit, dans tel appartement, influencent également les rapports que l’on entretien avec ses voisins, comme le souligne Baudin en se référant au célèbre article de Chamboredon & Lemaire (1970) « (…) la cohabitation dans un même quartier ou la même cage d’escalier, varie en fonction de la signification accordée par chaque habitant sur le fait d’habiter (à) tel ou tel endroit : cela peut être pour lui une situation transitoire, espérée ou relégatrice et dévalorisée. » (Baudin, 1999, p. 10). En ce qui concerne la recherche de terrain, il devrait être possible d’identifier, à partir des raisons de déménager et d’emménager, le type de situation de résidence, transitoire, espérée ou encore relégatrice et dévalorisée. Ces deux dernières situations concernent en particulier les personnes en mobilité sociale descendante, dont un des indicateurs peut être le passage d’un logement antérieur en loyer libre au logement HBM du quartier dans lequel est conduite la recherche empirique. Ici également, l’appréciation subjective du logement et de l’immeuble peut compléter ou nuancer cette première information.

Même si elles sont plus anciennes, les recherches de Pinçon (1981) apportent quelques précisions sur le rapport entre la mobilité résidentielle analysée ici et la dimension sociale. Il relie ainsi les projets de déménagement à la difficulté de concrétiser son mode de vie dans le cadre actuel, tout en précisant que « (…) la cohabitation, dans ces conditions, ne peut être que synonyme de luttes et de tensions. » (Pinçon, 1981, p. 541). Dans notre recherche de terrain, les questions de rapport aux règles d’usage locatif et aux situations de conflits devront être mises en rapport avec l’intention éventuelle de déménager du quartier étudié. Pinçon rattache cette problématique à des questions touchant au milieu social et à l’âge. En ce qui concerne le milieu

social, il estime que « Parmi les ménages les plus modestes qui n'envisagent pas de partir, même à longue échéance, nombreux sont ceux qui ne font en fait que subir un habitat qu'ils n'ont pas choisi et auquel ils ont plus ou moins conscience de ne pouvoir échapper ». (Pinçon, 1981, p. 544). Envisager sérieusement un déménagement peut donc dépendre des possibilités économiques à disposition (revenu, fortune, etc.). Il a par ailleurs constaté que « (…) d'être dans l'obligation de se satisfaire de ce que l'on est obligé de vivre croît avec l'âge. » (Pinçon, 1981, p. 544). En ce qui concerne l’effet âge, il précise que cela ne tient pas seulement aux possibilités économiques qui se réduisent avec la vieillesse mais aussi à « (…) la somme des expériences passées qui, pour les ménages les plus âgés et les plus modestes, est la somme des espoirs déçus, des coups du sort, de l'expérience des limites vite atteintes qu'il est vain et dangereux de vouloir franchir. » (Pinçon, 1981, p. 544). Il y a donc une tendance à la résignation, qui pourrait être constatée dans les rapports entre catégorie socio-professionnelle, revenu, âge et intentions de déménager.

4.1.3 Espaces intermédiaires et occasions de contacts

L’analyse de la littérature scientifique a mis en évidence l’importance des espaces intermédiaires entre l’espace privatif qu’est le logement et l’espace public qu’est le quartier du point de vue du vivre-ensemble. Comme l’écrivent De Gourcy & Rakoto-Raharimanana (1998), « (…) l’exercice de la vigilance témoigne du type de qualification de l’espace : très marqué pour les alentours du logement, l’attention se relâche au fur et à mesure d’un gradient allant du privé au public. »

En ce qui concerne notre champ de recherche, nous nous intéresserons notamment aux velléités de contrôle, notamment à d’éventuelles caméras de surveillance, mais aussi à différentes prises de position sur les attitudes renvoyant au contrôle de voisinage. Ces conceptions de contrôle des espaces intermédiaires seront notamment rapportées à la distance croissante entre le logement et l’espace public proprement dit, lorsqu’on passe de la cage d’escalier à la rue en passant par l’entrée et les cours ou places de l’ensemble d’immeubles étudié. Les familles avec enfants sont particulièrement intéressées par des zones intermédiaires proposant un environnement de qualité, favorisant notamment une autonomie croissante des enfants avec l’âge : lieux préservés de la circulation et permettant de les surveiller, cheminements piétonniers qu’ils peuvent emprunter seuls, par exemple sur le chemin de l’école (Pattaroni, Thomas & Kaufmann, 2009, p. 25). Pour les adolescents, les parents sont intéressés à la proximité d’espaces publics qui leur conviennent, ainsi qu’à des transports publics facilement accessibles (Pattaroni, Thomas & Kaufmann, 2009, p. 25).

La multiplication des occasions de contact dans ces lieux intermédiaires comme dans des commodités de différentes sortes plus ou moins régulièrement fréquentées par les habitants favorisent non seulement la fréquence des relations de voisinage, mais également leur qualité (voir par exemple l’étude « Voisinage », Publitest, Förderverein Nachbarschaftshilfe Zürich & PricewaterhouseCoopers Suisse, 2006a, p. 2). Deux facteurs importants peuvent contribuer à l’augmentation des contacts.

Le premier est la maîtrise de la langue française (dans notre cas), qui devrait influencer favorablement le nombre et le type de relations de voisinage. Mais cet effet peut être nuancé sur la base des travaux de Rose & Iankova, qui écrivent à cet égard que « si le partage d’une langue commune est un préalable (…) à l’établissement de rapports de sociabilité entre voisins, ce facteur est de toute évidence insatisfaisant pour promouvoir des contacts interethniques au-delà des ‘bonjour’ et ‘comment ça va’ ?’ » (Rose & Iankova, 2005, p. 146).

Le second facteur est la présence d’enfants dans le ménage. Rose & Iankova relèvent également que « (…) l’un des facteurs qui permet ‘de briser la glace’ entre résidants de différentes origines ethniques ou sociales est le tissage spontané des liens entre jeunes enfants

dans des aires de jeux des parcs. » (Rose & Iankova, 2005, p. 146). Ce constat devrait être relativement facile à vérifier dans le cadre de l’enquête de terrain.

La partie empirique de ce travail de bachelor comprendra une présentation de la zone d’habitation choisie pour l’enquête, notamment sous l’angle des espaces intermédiaires, ainsi qu’une série de questions touchant aux différentes dimensions qui viennent d’être évoquées. Faute de comparaison avec d’autres quartiers, il sera difficile de mesurer directement le

neighborhood effect évoqué par exemple par Pattaroni, Thomas & Kaufmann (2009, p. 20), soit

notamment l’effet de composition sociale du quartier qui influence la perception de la qualité de l’habitat, mais un lien entre les raisons de déménager et diverses appréciations sur la qualité de l’habitat devraient nous en fournir quelques indices. Selon Lefeuvre (2005, p. 94), la représentation que l’on a du lieu où on habite ne dépend pas seulement de la représentation des gens qui l’occupent, mais également de celle qui vient de l’extérieur. On a ici affaire à une image, qui implique la prise en compte de multiples dimensions qualitatives. Dans le cadre de la recherche de terrain, elle ne pourra toutefois reposer que sur les avis des habitants eux-mêmes. 4.1.4 Vivre ensemble dans un contexte de mixité sociale

Le terrain de recherche de ce travail porte sur l’ensemble d’immeubles de Champ-Joly, qui comporte une certaine mixité sociale (cf. chapitre 6.1.1, « Les habitants de logements sociaux de Champ-Joly »). Un des intérêts de notre étude est de mettre à l’épreuve d’un cas particulier les objectifs visés par les politiques de mixité sociale, qu’elles soient publiques ou privées, en vérifiant notamment dans quelle mesure la mixité débouche sur des relations effectives entre habitants de différents milieux sociaux. Nous pouvons supposer a priori que les relations les plus fréquentes seront entre personnes et ménages des loyers subventionnés, plutôt qu’avec les habitants d’immeubles en loyer libre. Cette hypothèse fondamentale repose sur les recherches vues dans les parties 2 et 3 de ce travail de bachelor, notamment celles de Rose & Iankova (2005), Chamboredon & Lemaire (1970), Pinçon (1981) et autres. Citant une recherche de Briggs (1998) effectuée dans le contexte du relogement d’habitants pauvres dans des logements sociaux insérés au sein de quartiers habités en majorité par la classe moyenne américaine, Kirszbaum souligne « (…) que les liens établis par les nouveaux arrivants sont restés confinés aux autres habitants du logement social ; les enfants résidant dans ces petites unités de logements sociaux, en particulier, ont noué des liens entre eux, sans en créer de nouveaux avec les autres enfants du quartier » (Kirszbaum, 2008, p. 80). Ce thème fera partie des questions à poser aux habitants interrogés.

Comme la partie théorique de ce travail l’a montré, la notion de mixité sociale est très vague ; aucune définition n’est partagée par l’ensemble des chercheurs. Pour la rendre opérationnelle au niveau de la partie empirique de la recherche, il est important de préciser le sens qu’elle y prendra. Selod (2004) propose une définition qui, par son ouverture à différentes formes de