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Cette classe de matériaux englobe principalement le charbon actif,a les matériaux organiques basés sur l’association de molécules ou de capsules organiques via des interactions faibles comme la liaison hydrogène,18, 19 et les polymères organiques fondés sur l’établissement de liaisons covalentes entre des entités monomériques, qu’ils soient amorphes ou cristallins.20-23 Cette dernière classe de solides est de loin celle qui a été la plus étudiée au cours des dernières années : les polymères organiques poreux trouvent des applications dans les domaines du stockage de gaz, de la séparation24, 25 et de la filtration,26-28 comme agents

d’encapsulation de principes actifs,29, 30 en catalyse (comme catalyseurs ou supports de

catalyseurs), 31, 32 dans les membranes échangeuses d’ions 33, 34 et en chromatographie,35-38

comme revêtements intelligents,39, 40 entre autres applications… Selon les méthodes de

synthèses utilisées pour les préparer, ces matériaux peuvent présenter des porosités sur mesures et bien ordonnées, allant de la microporosité à la macroporosité et/ou des porosités hiérarchiques, avec des distributions de tailles de pores relativement étroites si nécessaire. Des surfaces spécifiques bien plus élevées que celles des zéolithes (supérieures 6000 m2·g-1) ont

aussi été décrites.41, 42 En revanche, ces polymères sont en règle générale beaucoup moins

robustes que leurs analogues inorganiques en raison de leur nature organique.

L’examen de la littérature permet de dégager deux grandes méthodes de préparation pour accéder à ces matériaux organiques. La première implique la synthèse directe du polymère poreux, ce qui nécessite l’utilisation de monomères aux caractéristiques structurales et chimiques bien définies pour obtenir la porosité recherchée. 41, 42 La deuxième est basée sur

l’utilisation de « patrons sacrificiels », autour desquels le matériau polymère est formé. Ces patrons sont éliminés a posteriori, une fois que la polymérisation a été réalisée, pour générer la porosité.43, 44 Ce rôle de patron peut être joué par une matrice inorganique comme une membrane45 ou des cristaux colloïdaux,46 par une partie du monomère qui sera éliminé du matériau par traitement chimique, irradiation, ou lors du vieillissement de celui-ci (approche dite de l’ « auto-assemblage de copolymère blocks »),47, 48 ou par de l’eau et des tensio-actifs,

a Le charbon actif est un composé obtenu par calcination de bois, noix de coco, charbon, lignite, tourbe ou tout

composé organique en général, suivie d’une étape d’activation. L’activation supprime les structures carbonées désorganisées. La structure interne du composé ainsi obtenu est constituée d’un assemblage aléatoire de « cristallites » élémentaires de graphite. L’espace entre ces cristallites constitue la microporosité du charbon actif. (réf : Thèse Inhar Imaz, Université Bordeaux 1, 2005)

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quand on effectue la polymérisation d’émulsions hautement concentrées, ou HIPE (on qualifie alors les matériaux formés de polyHIPEs).b

Les polyHIPEs les plus largement étudiés sont obtenus à partir de styrène et de divinylbenzène (DVB). Dans ce cas bien précis, la HIPE est formée par addition lente d'une solution aqueuse à une solution de styrène, de DVB (agent réticulant), d'un tensioactif non ionique et d’un amorceur radicalaire, sous agitation, comme illustré dans la figure 1.4-a.

Figure 1.4. a) Principe de préparation des matériaux de type polyHIPE à partir d'une HIPE E/H. b) Morphologie poreuse typique d'un matériau polyHIPE.49

Au terme de la polymérisation radicalaire, un polymère hautement poreux, friable et de basse densité est obtenu après élimination de la phase interne puis séchage sous vide à température modérée. L'élimination de la phase dispersée laisse apparaître des cavités sphériques de dimensions comprises entre 2 et 20 µm. Les parois de ces cavités sont percées de nombreux trous d'interconnexion de diamètre compris entre 0,1 et 2 µm situés là où la fine enveloppe de polymère a été rompue (Figure 1.4-b). Un certain nombre de facteurs influencent la taille des gouttes de la phase dispersée. Dans un polyHIPE à base de styrène et de DVB, la taille des cavités décroît avec l'augmentation du taux de DVB, en accord avec le caractère hydrophobe de cette molécule. L'addition de sels minéraux peut aussi contribuer à la réduction de la taille des cavités d'un ordre de grandeur. L’utilisation de solvants « porogènes » (comme le diméthylformamide et diéthylformamide) au moment de la formation du HIPE permet d’accéder à des surfaces spécifiques de l’ordre de 700 m2.g-1 pour

ces matériaux. En outre, la surface des polyHIPE est susceptible d'être fonctionnalisée, et les

b Une émulsion est considérée comme hautement concentrée lorsque le volume de la phase interne (Φ)

représente plus de 74 % du volume total. Ce seuil correspond au volume maximal occupé par des gouttes d'eau sphériques uniformes et rangées de telle sorte qu'elles ne subissent pas de déformation. Au-delà de 74 %, les gouttes se déforment pour occuper le plus d'espace possible. Ces émulsions concentrées sont par la suite nommées selon leur acronyme anglais de HIPE (High Internal Phase Emulsion).

19 propriétés du polymère modifiées en mettant en œuvre les différents outils de la synthèse organique. La fonction chimique présente à la surface du matériau final peut être introduite dès la formulation de la HIPE, ou a posteriori (on parle alors de post-fonctionnalisation). Dans le premier cas, l'approche la plus employée concerne la copolymérisation d'un monomère fonctionnel avec le styrène et le DVB. Pour la post-fonctionnalisation du polymère, il est possible d'utiliser les groupes vinyliques pendants présents à la surface de polyHIPE de départ provenant de molécules de DVB incomplètement polymérisées.

Figure 1.5. Représentation de la structure bidimensionnelle du COF « HHTP-DPB », résultant de la condensation entre un diacide boronique (en bleu) et un triscatechol (en vert).50

Alors que les polymères mentionnés ci-dessus affichent un caractère amorphe marqué, les premiers exemples de polymères organiques poreux présentant une structure cristalline ont été décrits par Yaghi et al. en 2005 sous l’acronyme COF (pour Covalent Organic Frameworks). Ces polymères sont le résultat de réactions de polycondensation opérant sous contrôle thermodynamique. Ces conditions autorisent la formation réversible de liaisons covalentes, favorisant par la même la correction d’éventuels défauts structuraux pouvant intervenir lors de la formation des liaisons (on parle "d'auto-réparation"), ce qui permet leur cristallisation. Les molécules utilisées pour obtenir des COFs possèdent un cœur rigide et sont dans la majorité des cas fonctionnalisées par des groupements acide boronique. Ces derniers

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peuvent s'auto-condenser pour former des motifs boroxine, ou se condenser avec des alcools ou des amines portés par des modules complémentaires pour former des motifs ester boronique ou leurs analogues azotés, respectivement.

Un exemple est donné dans la figure 1.5. Les COFs présentent des architectures lamellaires (2D) ou tridimensionnelles (3D). En comparaison aux polymères amorphes, ils présentent des tailles de pores pouvant atteindre près de 5 nm,50 et des surfaces spécifiques

pouvant avoisiner les 4500 m2.g-1 dans certains cas.51 Si ces caractéristiques sont en deçà de

celles présentées par les polymères amorphes, ces matériaux sont particulièrement intéressants car ils présentent, en accord avec leur caractère cristallins, des pores de taille unique et aux caractéristiques parfaitement établies. Pour l’heure, des propriétés remarquables en stockage de gaz,23 adsorption,52 optoélectrique 53 et catalyse 53, 54 ont été mises en évidence pour ces

matériaux purement organiques.