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Chapitre III: Ecrire/ décrire l’hybride : stratégies d’hétérogénéité

I.1. La pluri-vocalité : voies/voix du chaos

I.1.2. La pluri-vocalité : Le je/jeu des voix

A lřinstar de Bachi, Delaume présente son roman comme un texte où la voix principale et les multiples sous-voix chantent en chœur. En effet, Delaume favorise également dans

Dans ma maison sous terre une co-énonciation plurielle partagée entre deux pôles : Chloé

et Théophile étant le pôle principal, et le second est représenté par la voix des morts « ressuscités ».

La première voix qui apparaît dans Dans ma maisons sous terre est celle du personnage Théophile504qui semble co-énoncer le récit, à part égale, avec la voix principale de lřauteure-narratrice Chloé. En effet, cette voix semble être celle du guide et du psychanalyste, une voix sage et réconfortante, accompagnant lřauteure-narratrice dans sa quête de soi et de la vérité au sein dřun cimetière quasi-fantastique et aux dispositifs numériques. La voix de Théophile est présente tout au long du texte entretenant des dialogues avec lřauteure-narratrice ; dřailleurs Delaume lui consacre trois parties du récit quřelle intitule ainsi : « Vie Théophile1 », « Vie Théophile2 », « Vie Théophile3 » et « Vie Théophile fin ».

Cřest cette même voix qui oriente et définit les règles de la narration au sein dřun cimetière inconnu en orientant lřauteure-narratrice vers la voie du pardon : « Préservez la grand-mère, enterrez le passé, soignez la narration. Digérez votre mère, aussi. Sa parole je vous en prie505». Cette voix co-principale incite lřauteure-narratrice à abandonner la voie de la vengeance puisquřelle est souvent stérile :

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Nous avons consacré une étude détaillée à ce personnage dans la deuxième partie.

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On ne se venge pas des morts et encore moins sur eux. Aucune prise possible. Non aucune prise, Chloé. Les morts, ils nous échappent, même quand on vit avec. Même quand on les comprend, surtout quand on est seul à entendre leur chant. Nous serons toujours victimes de leurs premiers secrets506.

Théophile lui conseille alors de transformer son désir de vengeance en un jeu avec les morts et installe dès le début du roman un principe de pluri-vocalité où le « je » entre en jeu avec les « je » de morts au sein dřune symphonie sombre :

Le jeu des morts a été inventé par Soazick D. en novembre 81, afin dřagrémenter le trajet. Choisir une sépulture ; détailler les indices, offrandes, plaques, inscriptions. Puis composer une vie, cinq étapes plus la fin. Maman était très douée, moi je trichais souvent, ils se suicident tous. Théophile préférait que jřy joue à nouveau. Avec les autres morts, avec les morts des autres. Comme ça on serait certain dřimaginer des choses et ce serait plus léger, me chuchote Théophile, ça changerait du plomb qui corne vos intentions. Une variation du jeu des morts, une narration inoffensive507.

Ce nřest pas moi quřil faut battre, vous vous trompez de carte, il est temps de piocher au jeu de cette famille508.

Lřauteure-narratrice décide alors de sřadonner à ce jeu, et engage au début de son récit un dialogue avec une voix-absente, celle de la mort, en lui envoyant une lettre, intitulée « Correspondance », et sřadressant à elle en ces termes :

Chère Madame la Mort,

Nous ne nous sommes pas quittées en très bons termes, ce que je regrette sincèrement. Votre refus de valider ma treizième tentative de suicide lors de lřhiver 2004 mřavait laissée aussi désemparée que stupéfaite.(….)Vous mřavez forcée à survivre, et cela depuis le début509.

Lřoriginalité de Delaume, à ce niveau, est le fait de créer un dialogue, certes univoque, mais avec une voix off, celle de la mort. Cette correspondance fait justement exister une voix absente et imprévisible au cœur de la diègèse, en lui donnant une dimension substantielle. En tentant de se suicider à treize reprises mais sans succès, lřauteure-narratrice finit par se familiariser avec cette présence-absence personnifiée : « vous mřêtes si familière que je pourrais vous dire tu510 ».

506 Ibid., 201. 507 Ibid., p.21. 508 Ibid., p.36. 509 Ibid., p.15. 510 Ibid., p.16.

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Ensuite, le jeu avec les morts est enclenché : « Cřest alors que lřhistoire sřest mise à commencer511 ». Delaume consacre six chapitres aux voix des défunts qui racontent tour à tour leurs histoires. Nous retrouvons dřabord la sous-voix de Clotilde Mélisse512

qui ne sřexprime cependant pas avec le pronom personnel « je », mais son histoire est plutôt rapportée par les co-énonciateurs principaux, Chloé et Théophile qui lřont téléchargée sous forme de vidéo. Cette sous-voix exprime sa passion pour la musique au point de vouloir accompagner sa biographie de défunte dřune note musicale : « elle aurait préféré Clotilde quřil y est de la musique, sa musique intérieure513

». Clotilde Mélisse est aussi écrivain et « ses textes sont accessibles partout. A un clic du client, à égalité avec les auteurs formatés (…) dans nřimporte quelle librairie, elle est téléchargeable. Clotilde a fini libre, totalement autonome514». Cette sous-voix est celle dřun moi ambitieux de lřauteure-narratrice auquel elle voudrait faire face dans un futur inconnu.

La deuxième sous-voix que nous présente lřauteure-narratrice est celle de Mlle B. (-), une morte inconnue sans inscription sur sa tombe : « La pierre est érodée. Ci gît Mlle B., cřest tout ce quřon lit. On ne sait pas qui cřest, me susurre Théophile. Ses mots restent en suspens, prisonniers dans un chant de givre515 ». Au côté de Théophile, lřauteure narratrice écoute la chanson de cette morte non identifiée :

Je ne suis personne On m’a oubliée Quand vient l’automne Aux tombes éventrées Je suis la fille du réverbère

Mes joues sont vernies roses poussière Je ne suis personne

On m’a oubliée Soustraite en somme Parenthèse rouillée

Je suis un voyage à Cythère Réduite à une croix en fer Je ne suis personne Le vent est glacé516.

La répétition de lřexpression « je ne suis personne » fait transparaître un vécu très familier chez lřauteure-narratrice qui représente à travers cette sous-voix un état dřâme qui pèse lourd sur son existence, celui de la perte dřidentité. La voix principale est à cet effet

511

Ibid., p.13.

512

Nous avons consacré une étude détaillée à ce personnage dans la deuxième partie.

513

DELAUME, Ch., Dans ma maison sous terre, op. cit., p.26.

514 Ibid., p.29. 515 Ibid., p.37. 516 Ibid., p.38.

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disséminée sous cette sous-voix inconnue, et cette méconnaissance accorde justement à cette sous-voix un aspect énigmatique et mythique.

La troisième sous-voix qui émerge dans le texte de Delaume, est celle de la chanson Un

scandale dans la famille de Sacha Distel, en passant par sa tombe « Sacha

Distel(1933-2004)517 » Chloé et Théophile écoutent sa chanson racontant lřhistoire dřun jeune homme qui ne parvenait pas à se marier car son père lui révèle que toute les filles de son village sont ses sœurs et même celles du village à proximité le sont aussi ; accablé par cette nouvelle, il raconte son malheur à sa mère :

Sa mère se met à rire Et lui dit : Ne t’en fais pas Ton père n’est pas ton père Mais ton père ne l’sait pas Oh Mama, quel bonheur Quel grand bonheur pour moi Oh Mama quel scandale Si papa savait ça518.

Cette sous-voix figure dans un chapitre qui à la différence des cinq autres chapitres évoquant la vie du défunt, ne comporte que la mention des auteurs, « Scandale dans la famille. Paroles : Maurice Tézé. Musique : Slim Henri Brown et Huon Donaldson.1965. Titre original: Shame and Scandal in the Family », et la citation intégrale des paroles de la chanson.

La sous-voix de Sacha Distel avec son intertexte chansonnier, résume dřune façon ironique et même ludique lřhistoire familiale tragique de lřauteure-narratrice, dřailleurs Sacha Distel est le chanteur préféré de sa mère qui, en voulant naturaliser son mari (le père de la narratrice), lui propose le prénom Sacha, mais que lřadministration française finit par refuser. Lřauteur-narratrice pensait que sa mère aurait pu tout lui dire : « Elle me doit des explications, peut-être juste une chanson519 » car selon elle « maman, elle, elle savait. Ton

père n’est pas ton père elle le savait très bien. Quřelle mřait appris cette chanson, celle-là

plutôt quřune autre, une autre de Sacha Distel, je trouve déjà ça très suspect520

». Et de 517 Ibid., p.51. 518 Ibid., p.53. 519 Ibid., p.137. 520 Ibid., p.75.

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cette chanson lřauteure-narratrice tirera la ritournelle « Ton père n’est pas ton père et ton

père ne l’sait pas » qui va scander tout le récit.

Cette sous-voix de lřintertexte chansonnier renvoie lřauteure-narratrice à son enfance où les paroles de cette chanson résonnaient dans tous les coins de sa maison, en la présence même de son père ; ce souvenir est, toutefois, tellement flou que la narratrice se demande si ce nřest pas un faux souvenir : « Est-ce une scène inventée ou pas, je suis petite et nous sommes trois à reprendre Scandale dans la famille. Est-ce une scène inventée ou pas, du temps de Selim ou de Sacha mais pas de Sylvain nous rions, rions à gorge déployée521 », et elle ajoute : « Ton père n’est pas ton père entonné par nous trois mais quel âge avais-je donc, puis-je en être certaine, comment me certifier que jřai vraiment tout vu, que rien nřest fabriqué pour la cause fictionnelle 522

». Le doute qui envahit la narratrice émane du fait, quřenfant, elle ne comprenait pas les paroles :

Jřai très nettement la sensation que je ne saisis pas les paroles, je les répète mécaniquement, il sřagit dřune imitation. Je singe le ressenti des grands, je partage avec mes parents lřhilarité engendrée par une grosse blague colonialiste. Le chaloupé du calypso = une danse collective dans le salon. Je crois que nous sommes à Beyrouth. Peut-être en banlieue parisienne523.

La mémoire de lřauteure-narratrice, malgré la confusion, se fixe alors sur un souvenir : « le duo jřen suis sûre, cřest précis dans mon crâne, ma cervelle restitue le chant clair de la mère, jřy perçois aujourdřhui une ironie pointue, tranchante aux entournures524

». Son père chantait aussi avec eux, une scène qui montre lřironie du destin :

Selim chante un peu faux, sa voix est dřun rauque velouté, il a encore au timbre cet accent libanais quřil perdra par la suite. Ton père nřest pas ton père et ton père ne lřsait pas, il fait la chute en chœur et la mère sřen amuse, elle détache chaque syllabes, cřest un instant très gai, une vraie complicité525

.

La sous-voix de Sacha Distel, énoncée à travers la chanson, est ainsi lřune des pierres angulaires autour de laquelle se tissent tous les questionnements de lřauteure-narratrice au sujet de son identité bafouée. Elle est donc une voix-déclic qui permet à lřauteure- narratrice de rembobiner la ficelle vers son passé et de chercher des détails sur la vérité qui a provoqué son drame familial.

521 Ibid., p.75. 522 Ibid., p.76. 523 Ibid., p.75. 524 Ibid., p.76. 525 Ibid., p.77.

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Ainsi, en poursuivant sa quête identitaire et sa conquête de la vérité, toujours au sein du cimetière, lřauteure-narratrice croise, une sous-voix dřun enfant mort très jeune, Tom (2000-2004)526 : « Je suis Tom. Je suis mort. Parfois je pense avec mes mots à la culpabilité rosse qui doit tenailler ma maman. Je suis tombé de haut parce quřelle dormait un peu. (…) jřai quatre ans et demi mais pour lřéternité 527

». La sous-voix de Tom se présente comme une représentation renversée de lřhistoire dramatique de lřauteure-narratrice, car en effet dans le cas de Tom ce nřest pas lřenfant qui perd ses parents comme cřest le cas du personnage autodiégétique Chloé, mais cřest ce sont plutôt les parents qui sont amputés de leur enfant : « Quand je suis mort ma mère a perdu bien des choses et elle lřa raconté. Le cheminement du deuil, elle sřest penchée dessus528

».

Remarquons également que cette sous-voix évoque seulement la relation enfant/mère et fait passer sous silence la présence de la figure paternelle, et cřest là encore un point commun avec lřhistoire de lřauteure-narratrice qui commence sa quête par la tombe de sa mère et qui tout au long du récit nřattend que lřémergence de la voix maternelle au milieu dřune multitude de voix de défunts, une voix qui a le pouvoir de tout lui expliquer au sujet de son identité bafouée : « Ce que je fais ici, cřest rester sur cette tombe,(…) dedans il y a ma mère, et le grand-père dessus529 ».

Le deuxième renversement opéré par Delaume, est le fait que dans lřhistoire de Tom, cřest la maman qui écrit une histoire sur la mort de son enfant au sein dřun univers de vivants et non pas lřenfant (lřauteure-narratrice) qui écrit lřhistoire de la perte de ses parents au milieu de morts : « Parce quřil nřy a pas de mots pour désigner une femme amputée de son enfant, beaucoup en font des livres. Maman vit dans celui écrit par une vivante entourée de vivants. Certains voudraient quřelle crève de nřêtre pas réelle 530

». La sous-voix de Tom est à cet effet la voix du renversement des situations, une manière que Delaume de faire de lřautofiction expérimentale. En effet, cette sous-voix lui permet de se projeter dans une situation créée et dřimaginer dřune part lřamertume dřune mère perdant son enfant, et de lřautre le sort de cet enfant arraché à la vie précocement, Delaume pense alors quřil serait plutôt heureux :

526 Ibid., p.59. 527 Ibid., p.59. 528 Ibid., p.60. 529 Ibid., p.7. 530 Ibid., p.60.

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Ici je suis heureux, bien plus heureux quřavant. Ici je peux dire et faire ce qui me plaît. Alors mon rire sřaccroche aux cheveux du fossoyeur, il traverse les haies, secoue doucement le buis, soulève la jupe dřune veuve, caresse la joue dřune quelconque orpheline. Je suis Tom, je suis mort. Et à jamais ici je fais le saut de lřange531

.

La vie de Tom après la mort est donc une projection autofictionnelle de soi qui permet à la narratrice dřexpérimenter la mort avant le jour J, où elle découvre que toute son identité nřétait quřune fiction. Dřailleurs, la date du décès de Tom est en 2004 qui est la date même où elle apprend, par le biais dřune cousine, la nouvelle qui a tout changé dans sa vie :

2004. Cřétait quelque chose comme Avril, le rendez-vous était sur les Champs-Elysées(…) ma cousine maternelle, je mřen étais débarrassée comme jřavais fait avec les autres(…) ma cousine, donc, alors mřa informée avec un sourire désarmant de bonne foi quřelle avait eu, par la grand-mère, une bonne nouvelle

qui va te faire plaisir. Il est vrai Théophile que tout est flou après. Sylvain n’est pas ton père = une bonne nouvelle qui va te faire plaisir532.

Imaginer une mort précoce de soi-même (représenté par Tom) avant la découverte de la nouvelle dramatique révèle ainsi les souhaits inconscients (ou consciemment construits) de lřauteure-narratrice de changer certains détails dans sa vie, seule lřécriture hybride des possibles impossibles pourrait alors lui assurer une telle expérience.

Delaume révèle alors, au travers des propos de Théophile, que les sous-voix des morts sont sélectionnées selon les points communs quřelles entretiennent avec le vécu de lřauteure-narratrice, lorsquřelle introduit la voix du personnage Mérédith P. (1914-1942)533 :

Elle est de votre race me promet Théophile, vous avez, vous verrez, beaucoup de points communs. De lřamour de sa mère sřest faite une chanson qui fut très populaire lřannée où elle est morte. Emportée par la foule ou bien par une grosse corde, ce nřest pas précisé mais elle repose ici534

.

Le premier point commun entre Mérédith P. et lřauteure-narratrice est celui du rapport quřentretiennent toutes les deux avec la mère par le biais de lřécriture et de la composition. En effet, lřauteure-narratrice écrit un livre qui, en apparence, veut se venger de sa grand-mère mais qui est en réalité un appel à retrouver la grand-mère, ce livre est dřailleurs celui des chants des morts c'est-à-dire que la musique est un élément nodal dans son écriture ; de même Mérédith P. écrira une chanson parlant de lřamour quřelle porte à sa mère. Et le chant de Mérédith P. fait transparaître ce manque de la mère :

531 Ibid., p.60. 532 Ibid., p.42-45. 533 Ibid., p.79. 534 Ibid., p.79.

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Maman a trop dansé au parquet du pavé Rutilante sous ses eaux fut la piste Maman m’a avorté à force de tournoyer Ça tricote sévère chez les artistes

Maman s’est érodée sous les notes orchestrées J’suis la fille de l’accordéoniste

Maman s’est effondrée et toute seule m’a laissée Je déteste les boites à musique535

Le deuxième point commun est celui du rapport de Mérédith P. avec son père, dominé par le rejet, la violence et la colère :

Papa a trop joué pistons et gueulescassé Balançant son dernier tour de piste Papa m’a éructée fond de vulve laminée C’est souvent si précoce les artistes Papa a explosé ses bras en sont tombés J’suis la fille de l’accordéoniste Papa a guerroyé le cœur désaccordé Je déteste les boites à musique

A travers la sous-voix de Mérédith P. lřauteure-narratrice chante douloureusement son rapport très perturbé avec ses parents, cette sous-voix exprime sa colère et sa souffrance face à un vécu amer : « Quelque chose de très triste, et puis de la colère qui agit comme un drone. Ça fait ça dans ma tête pendant que je lřécoute, pendant que je lřentends, la chanson de cette morte amputée jusquřà son nom de famille536

». Suivant les conseils de son guide spirituel, Théophile, en tentant de faire le deuil et de retrouver la paix à travers lřhistoire des autres morts, lřauteure-narratrice aperçoit la difficulté dřune telle thérapie « Je dis à Théophile que maintenant jřai trop froid, que le malheur des autres nřest pas un cataplasme. Au moins elle connaissait son père. Théophile tique un peu, peut-être espérait-il me faire réaliser que moi jřétais vivante. Mais tellement incomplète537 ».

Au cœur de ce chant de souffrance lřauteure-narratrice parvient à entendre une sous-voix qui nřappartient pourtant pas au monde des morts mais bien au contraire à celui des vivants, cřest donc une exception faite au pacte tissé entre Théophile et elle, celui dřécouter exclusivement les chants des morts. En effet, en arrivant à la tombe dřune certaine

535 Ibid., p.80. 536 Ibid., p.81. 537 Ibid., p.81.

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« Marguerite Duchambron (1949-2005) 538», lřauteure narratrice nřentend aucun chant de la défunte :

Lorsque je tends lřoreille, cřest la plainte de celle qui lui a survécu qui sřagrippe aux tympans jusquřà les transpercer. Un cancer du sein droit a mangé Marguerite, Ursula reste seule amputée de son amour. Alors son chagrin la garrotte, un chagrin devenu sec, les larmes ont tant coulé que ses yeux sont plus pâles (…)539

.

La narratrice autodiégétique de Dans ma maison sous terre entend donc la voix dřUrsula, une femme vivante qui était liée dřamour avec la défunte Marguerite : « La douleur dřUrsula résonne dans le cimetière, jřignorais jusquřalors quřil pouvait être possible dřouïr le chœur déchirant de ceux restés en vie, seule la voix des morts venait à moi, lors de toutes ces promenades à travers leur maison 540». La sous-voix dřUrsula est celle du cri