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La place de l’immigré dans le marché du travail

DE LA DIVISION SOCIALE DE L’ESPACE

Chapitre 2 : Espace, capital et migrations

III) La place de l’immigré dans le marché du travail

« Nous voulions des bras, nous avons eu des hommes » Max Frisch « Mamadou m’a dit, on a pressé le citron, on peut jeter la peau » François Béranger

1) Les immigrés et le marché du travail local a) L’accueil de la force de travail immigrée

L’extension du mode de production capitaliste à l’échelle mondiale permet d’augmenter la force de travail susceptible d’être exploitée, à la surpopulation latente des formations sociales périphériques. Dans ce sens, l’immigration représente l’importation de cette surpopulation au sein d’une formation sociale centrale. Le plus souvent, la main-d’œuvre étrangère est sur-représentée dans les secteurs d’activité qui sont plus sensibles aux aléas conjoncturels, comme le bâtiment et le commerce, et sont plus concentrés dans les catégories sociales et professionnelles les plus basses. Les risques du sous-emploi et de précarité sont en général plus importants pour les immigrés que pour les nationaux.

L’insertion du travail immigré est fonction des formations sociales d’accueil et de la place que celles-ci lui réserve dans la phase de développement capitalistique. Durant la période fordiste, en France, le travail étranger a été intégré (après des campagnes de recrutement in situ) dans les grandes entreprises industrielles, tandis que cette fonction a été remplie en Italie par l’immigration de nationaux en provenance du Mezzogiorno au bénéfice employé dans la plupart des pays africains » (Daniel, 2008, p 209). Pour les Asiatiques (Pakistanais, Indiens,

du Triangle Industriel du nord-ouest de la Péninsule. Pour les deux pays, c’est l’industrie et son besoin de main d’œuvre qui a généré l’immigration, bien que les provenances et les échelles soient différentes pour des raisons historiques. En Italie, la principale différence avec l’immigration étrangère en France est qu’elle est plus tardive, et a concerné une demande de travail différente.

La période post-fordiste présente l’hypothèse du recours à la force de travail étrangère dans deux principaux secteurs d’activité : 1) dans le tertiaire inférieur, 2) dans des secteurs traditionnels d’emplois non délocalisables, comme dans l’agriculture et le bâtiment. Généralement, la main d’œuvre étrangère est demandée dans les métiers traditionnels intensifs en main-d’œuvre [labour intensive] : ils effectuent les travaux les moins prisés, les plus durs, les plus dangereux, les moins rémunérés, non pourvus par la main-d’œuvre locale, selon le modèle des “3 D” [dirty, dangerous, demanding] ou des “5 P” [pesanti, pericolosi,

precari, poco pagati, penalizzati socialmente]. Quoi qu’il en soit, la place de la main d’œuvre

immigrée se trouve structurellement au bas de l’échelle sociale et professionnelle. C’est la deuxième génération, ou les générations successives, qui offrent l’occasion de la mobilité sociale ascendante, si les obstacles juridiques et politiques sont levés.

b) Concurrence et segmentation du marché du travail

Quel rapport les forces de travail locale et immigrée entretiennent-elles ? S’agit-il d’une concurrence ou d’une complémentarité ? En fait, cette vision dichotomique est limitée. Au niveau théorique, la concurrence au sein de la main-d’œuvre est un principe important du rapport de domination et d’exploitation, elle permet au capitaliste de faire baisser les coûts du travail en recourant à l’arme du chantage. Dans le cadre néo-classique de concurrence pure et parfaite, une main-d’œuvre exogène apporterait une baisse du coût du travail, cela profiterait à la croissance, et « tout le monde y trouve son compte ». Une thèse courante est que la concurrence entre les travailleurs immigrés et autochtones entraînerait une baisse des salaires généralisée, puis assurément une remise en cause des droits du travail et des droits sociaux. C’est la raison pour laquelle les syndicats ouvriers se sont parfois montrés hostiles envers l’immigration (Pugliese, 2000). La mise en concurrence entre catégories de travailleurs fait partie des stratégies de division de la part du patronat afin de baisser le coût du travail, notamment par la délocalisation d’entreprises ou l’investissement dans des activités de travail intensif dans les pays où les coûts salariaux sont moindres.

Au niveau pratique, le principe de la concurrence entre travailleurs locaux et immigrés est ambivalent. Pour l’O.C.D.E., « la majorité des études qui ont procédé à des estimations

empiriques concluent généralement à l’existence d’une relation de complémentarité plutôt que de substituabilité entre la main-d’œuvre étrangère ou immigrée et la main-d’œuvre autochtone » (2001, p 197). Par définition, la segmentation du marché du travail tend à

répartir les différentes forces de travail selon les secteurs d’activités et les professions, selon les caractéristiques de la demande et de l’offre de travail (qualifications, expérience d’un côté, besoins de l’autre). Cela signifie qu’il faut tenir compte d’une part des caractéristiques de la

force de travail étrangère qui sont fonction de la formation sociale de provenance, avec son propre marché du travail, son système de formation, etc., et d’autre part des filtres institutionnels permettant la reconnaissance de l’offre de travail étrangère sur le marché du travail local. Ainsi, au-delà de la rencontre entre offre et demande de travail, celles-ci ne se rencontrent donc pas forcément en fonction du système institutionnel de la formation sociale hôte : soit il permet soit il pose des obstacles au recrutement de personnes issues d’un système institutionnel différent, peu performant voire inexistant. Dans le marché primaire, la nécessité de présenter des qualifications ou des diplômes représente souvent un obstacle à beaucoup d’étrangers provenant de pays pauvres. Cependant, la non-reconnaissance institutionnelle des qualifications et diplômes étrangers peut être un instrument de protection de professions nationales voire de relégation des requérants étrangers hors du marché primaire. Au contraire, le marché secondaire est par définition moins regardant, il est plus accueillant mais ouvert à l’économie informelle et à la concurrence « libre et non faussée » et donc à l’absence de droits du travail.

A première vue, dans la segmentation du marché du travail, la main d’œuvre immigrée peut ainsi répondre à la demande de travail locale et combler un vide fondé sur les carences de cette offre : elle se trouve alors être complémentaire de la force de travail locale. Mais cette segmentation peut aussi entretenir les différences - et donc les divisions - entre travailleurs, et peut entraîner une relégation des travailleurs dans certains secteurs d’activité. En outre, la dualité de la segmentation du travail n’est pas apparue avec la main d’œuvre immigrée : la précarité de l’emploi et la dévalorisation des contrats de travail concernent la partie la plus fragile de la main d’œuvre autochtone (chômeurs, femmes, jeunes). En Italie, l’importance de l’économie informelle est antérieure à l’immigration étrangère.

La force de travail immigrée se charge des fonctions de moins en moins occupées par la main d’œuvre locale, soit parce que celle-ci, au sein de son environnement social, estime ne plus correspondre aux critères d’exploitation acceptables par elle et par conséquent fuit ces conditions de travail, soit parce que le patronat propose ces conditions sur le marché de l’emploi de telle sorte qu’elles ne seront acceptées que par une population pouvant les supporter. La dévalorisation du travail manuel, la détérioration de l’image socio-symbolique de certaines fonctions, mais aussi la pénibilité, la faiblesse des rémunérations ou bien encore des obstacles à l’accès aux emplois (numerus clausus, emplois fermés, obstacles à la formation) feront que la main d’œuvre locale s’éloigne de certaines fonctions. Sous couvert de pénurie de main d’œuvre, une politique de l’emploi peut ainsi la créer. En miroir, cette politique de l’emploi organise une limitation à l’accès d’emplois pour la main d’œuvre immigrée (stéréotypes professionnels, non-reconnaissance des diplômes étrangers, nécessité du permis de séjour), de façon à les orienter vers les emplois subalternes devenus vacants ou vers la sphère de l’économie informelle.

La segmentation du marché du travail est également corroborée par l’autonomie entre le chômage et la présence immigrée. Les pays européens méditerranéens proposent ainsi à la fois le tableau d’un chômage, d’un sous-emploi et/ou d’une population inactive élevés, et d’une présence immigrée croissante. Démontrer que des baisses de salaires sont dues aux

immigrés est dans ce cas quelque peu difficile à soutenir, à moins de verser dans l’idéologie politique ; si une concurrence est produite, ce ne sera pas du fait d’un mécanisme étroitement économique mais en raison de l’anticipation d’une concurrence dans un contexte social structurellement hiérarchique (Moulier-Boutang, 1997, 2004).

En fait, il faut dépasser le principe de concurrence, afin de soutenir que la segmentation du marché du travail organise l’assignation des différentes forces de travail selon les besoins de la sphère d’exploitation. Cette segmentation repose sur l’organisation de l’inégalité des garanties sociales. Historiquement, depuis le XIXè siècle, les luttes sociales dans les pays du Centre ont cherché d’une part à obtenir des compensations vis-à-vis du rapport d’exploitation, qui a trouvé son apogée avec le compromis keynésien, et d’autre part à assurer l’égalité entre les forces de travail afin que le patronat ne puisse jouer de la division entre elles. Les institutions, avec l’Etat social [Welfare State], sont devenues garantes des droits des travailleurs. Mais ces garanties sont incomplètes, en premier lieu en raison des différentes histoires nationales dans les pays du Centre, conférant une diversité au marché du travail européen (Lefresne, 2008), en deuxième lieu par la non-prise en compte – car historiquement plus tardive – du travailleur immigré par le mouvement ouvrier, en troisième lieu par le pouvoir des capitalistes à lutter contre les avancées sociales, rapport de force qui leur est favorable depuis l’avènement de la mondialisation libérale et qui leur permet de réduire progressivement la portée de l’Etat social.

La segmentation du marché du travail distingue un marché primaire, stable et protégé, relativement bien rémunéré, pour les autochtones, d’un marché secondaire, hors normes sociales, flexible, de faible qualité d’emploi, pour les immigrés. Des obstacles divers – surtout juridiques – empêchent le passage du second au premier. S’il y a une concurrence entre travailleurs, ce sera surtout là où les protections sont les plus faibles, donc a fortiori plus entre immigrés qu’entre immigrés et autochtones, voire entre immigrés et force de travail subalterne (jeunes, femmes, non qualifiés). Il faut se situer à l’échelle sociale pour constater que la prise d’emplois par les immigrés s’accompagne d’une ascension sociale des autochtones : à son corps défendant, l’immigration participe à la stratification sociale de la formation sociale d’accueil.

Les remises en cause des garanties légales ne sont possibles que si les institutions désertent ce secteur, et que les politiques de l’emploi ont permis cet état de fait. Si, comme le dit Girard (2004), « l’impact de l’immigration sur les salaires est, au pire, marginal », c’est en raison des réglementions sociales, et notamment de l’établissement d’un salaire minimum107 ou de la réglementation centrale des salaires. Les conditions d’une concurrence réelle entre travailleurs immigrés et autochtones ne sont donc possibles que si les droits des immigrés sont discriminatoires par rapport au droit commun. La sphère de l’économie informelle représente l’archétype du sous-marché du travail organisant la subalternéité d’une partie de la force de travail, celle qui sera la moins protégée et par conséquent la plus vulnérable. La position du travail immigré dépendra des garanties qui lui seront assurées sur

107 Ce n’est pas un hasard si les organisations patronales et le F.M.I. tirent à vue sur le salaire minimum,

le marché du travail général, la non-mise en concurrence des travailleurs est tributaire des protections au sein du cadre institutionnel. C’est ainsi que la réalité historique a pu montrer pour le Nord-Est italien que les attaques contre les salaires étaient antérieures aux vagues migratoires, et qu’elles n’avaient été possibles qu’en raison de la faiblesse (grandissante) de la résistance des travailleurs et des organisations syndicales (Pugliese, 2000).

Il faut ajouter que dorénavant le nivellement par le bas des normes sociales, la concurrence des systèmes sociaux et fiscaux permettant le dumping social, etc., sont organisés à l’échelle de l’Union européenne afin d’établir un marché du travail plus flexible (Math, Spire, 2004b ; Lefresne, 2008). Le jeu des différences de statuts nationaux du travailleur permet une concurrence des forces de travail qui n’est plus jugé suffisant au sein des systèmes sociaux nationaux. Ainsi, le statut du “travailleur détaché”, soumis au droit du travail du pays de provenance, représente-t-il une mise en concurrence des travailleurs par leur mobilité internationale. A l’échelle du continent, cette concurrence est ainsi mise en place non pas directement sur le plan des salaires mais par le contournement légal des garanties sociales. La sous-traitance en cascade représente l’archétype de l’exploitation des salariés (le plus souvent sur les chantiers de grandes infrastructures). La mise en concurrence des entreprises organise le moins-disant social, et met ainsi en place un nivellement par le bas des conditions de travail.

c) La question de la division ethnique du travail

L’ethnicisation de la division du travail est le plus souvent un constat : telle activité ou telle profession se retrouve particulièrement occupée par des travailleurs immigrés, ou bien par un ou quelques groupes nationaux précis108. Ces groupes nationaux sont ainsi perçus comme spécialisés pour ces activités : « L’expression “spécialisation ethnique” décrit

précisément le phénomène par lequel les immigrés d’une nationalité ou d’une appartenance ethnique déterminée se dirigent, de préférence, vers un certain secteur de l’économie du pays d’immigration, contribuant éventuellement à la connoter fortement vue leur présence importante voire leur hégémonie » (Zanfrini, 2007a, p 158).

En tant qu’immigrés, la place des groupes nationaux dans la formation sociale hôte est sociale. L’ethnicisation de la division du travail ne relève donc pas tant de choix culturels ou naturels que de processus d’assignation fonctionnelle des populations étrangères. A l’encontre du déterminisme culturel, tel ou tel groupe national n’est pas culturellement destiné à telle ou telle activité professionnelle. Son activité professionnelle dans la formation sociale hôte

108

Nous avons vu, à titre d’exemple, une émission télévisée consacrée aux entrepreneurs français en Californie : le patron était français, le contremaître coréen, le comptable du sous-continent indien, et les ouvriers mexicains. La spécialisation ethnique du travail a été très étudiée par les économistes et sociologues états-uniens, surtout sur la côte ouest (cf Wright, Ellis, 2000). E.W. Burgess évoque aussi « les policiers irlandais, les glaciers grecs, les

blanchisseries chinoises, les garçonsd’hôtel noirs, les portiers belges, etc. », même s’il déclare “exotiquement”

qu’ « on peut l’expliquer [la sélection professionnelle… par nationalité] plus par le tempérament de la race ou

par les circonstances que par l’héritage économique du Vieux Monde » (in Grafmeyer, Joseph, 1984, p 140). Cf

aussi le tableau livré par M. Halbwachs (ibid., pp 311-313) qui révèle la relation entre hiérarchie professionnelle, occupation d’origine et ordre d’arrivée.

dépendra certes de ce qu’il porte comme héritage de sa formation sociale de provenance, mais aussi des modalités d’accueil de la formation sociale hôte notamment sur le marché du travail national ou local.

Ainsi, à l’échelle de la pratique concrète, il faut tenir compte du rôle de la circulation de l’information pour le recrutement des groupes nationaux de la part des employeurs : par chaînes de recrutement, par image socio-symbolique, par relation inter-personnelle, ces modalités peuvent se compléter réciproquement (De Rudder, 1987, pp 118-120 ; Zanfrini, 2007a, p 161 ; Ambrosini, 2008a, pp 76-77). Les chaînes de recrutement mettent d’une part en relation employeurs et travailleurs immigrés, et d’autre part les travailleurs immigrés entre eux qui feront circuler l’information par relations inter-personnelles sur une base co-nationale, montrant l’importance stratégique des réseaux de relations [reti sociali] dans la capacité de s’en sortir109. Car l’enjeu pour les employeurs est la facilitation et l’efficacité du recrutement, basées sur la confiance tacite, cela évitant pour lui de perdre du temps et de l’argent (Jounin, 2006). De manière complémentaire, à échelle collective, le recrutement fait aussi appel à l’image socio-symbolique du groupe national construite par l’environnement d’accueil, voire un préjugé culturel : telle ou telle communauté sera étiquetée comme plus apte à remplir telle ou telle fonction. Par exemple, en Italie, les Sénégalais seront perçus comme vendeurs ambulants ou comme durs au labeur industriel, les Sri Lankais comme destinés aux services domestiques, les Albanais comme maçons, les Chinois dans la restauration, etc. . Cette image collective est aussi sexuée : les femmes seront orientées vers les soins aux personnes à domicile [badanti]. A la fois fruit et moteur de la réalité, cette image socio-symbolique est performative, quitte, de fait, à créer des “pièges professionnels” [trappole] par une sorte de “déterminisme de réseau”, contraignant les groupes nationaux – parfois selon leur sexe – à devoir accepter, dans un processus de contrainte économique et sociale, des tâches qui peuvent les rebuter110, voire même une « discrimination statistique » à l’égard de tout individu appartenant à une communauté étrangère cataloguée de manière négative. De fait, pour les travailleurs immigrés, toute une série de mécanismes et de filtres, légaux comme informels, tacites comme consciemment construits, existent dans les sociétés d’accueil (Zanfrini, 2007a, pp 162-166).

En arrière-plan, il faut tenir compte du fait que la corrélation apparente entre division sociale et division ethnique repose sur la question des droits – c’est-à-dire des non-droits - dont peut disposer la main d’œuvre étrangère sur le marché du travail hôte : « Les politiques

migratoires – ou les “non-politiques” – constituent une première modalité à travers laquelle il est possible de maintenir les migrants dans une position subordonnée » (Zanfrini, 2007a,

p 161).

109 « Si les immigrés ne pouvaient même pas compter sur les réseaux ethniques, ils seraient encore plus faibles,

marginalisés et exploités. Bien que les liens sociaux dont ils disposent les dirigent vers des postes de travail à faible statut social et concourent à produire des ghettos de l’emploi [ghettizzazioni occupazionali], l’alternative prévisible ne serait pas une insertion meilleure et plus diversifiée, mais un plus grand risque d’exclusion et de chute dans les circuits illégaux » (Ambrosini, 2008a, pp 95-96).

110 Närse (2006) rapporte ces Sri-Lankais contraints d’effectuer un travail domestique [colf] alors qu’ils en ont

honte, ou à l’inverse ces hommes ukrainiens qui voudraient pratiquer des soins à domicile [badanti] comme les femmes de leur nationalité, mais qui doivent se résoudre à aller travailler dans le bâtiment.

d) « Immigration choisie »

Devant la contradiction entre les besoins de main-d’œuvre et la politique inhospitalière envers les immigrants (Simon, 2008, pp 217-218), le thème de l’ « immigration choisie » a eu le vent en poupe dans les débats en France comme en Italie. Le concept d’ « immigration

choisie » est pervers car le « choix », porté aux nues par le langage libéral comme synonyme

de liberté, est posé par le pouvoir discrétionnaire en position de puissance vis-à-vis de populations en position de subir ; la liberté dont il est question est celle confisquée par les puissants. L’« immigration choisie » consiste à considérer, de la part des autorités du pays d’accueil, que celui-ci ne doit ouvrir ses portes qu’aux individus sélectionnés en fonction de compétences professionnelles ou de diplômes qui correspondent aux besoins du pays, aux places vides voire inoccupées par la main-d’œuvre locale. Ce mode de pensée utilitariste revient à ne considérer, mêlant racisme et intérêt économique, la réalité des immigrants que comme une marchandise force de travail, leur niant leur part d’être humain possédant les mêmes aspirations existentielles que les autochtones. Fondamentalement, une telle approche remet sans complexe à l’ordre du jour le principe de l’exploitation et de la domination des étrangers de pays pauvres dans la lutte des classes mondiale.

L’« immigration choisie » revient également à reconnaître et à entériner la “fuite des cerveaux”, ces migrations de diplômés dont le savoir est capté par les pays riches, notamment