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DE LA DIVISION SOCIALE DE L’ESPACE

Chapitre 1 : De l’importance des classes sociales

III) La division sociale de classes

« Nier la lutte des classes, ce serait nier la lumière du jour » Paul Faure, dans Le Populaire, 1938

1) L’importance des classes sociales

Depuis les rationalistes, le découpage est devenu une méthode incontournable dans l’analyse d’un objet. Groupes, communautés, classes, ethnies, populations sont non seulement des outils de découpage social mais également des concepts qui renvoient à des structures de pensée. De tels concepts ne sont pas neutres : ils renvoient à des façons d’appréhender le collectif soit en somme d’individus (individualisme) soit en ensembles construits et structurés (structuralisme, holisme).

Dans la conception individualiste, la tradition weberienne appréhende les classes sociales comme des groupes d’individus délimités par des critères identiques, de perspectives (“chances de vie”) similaires, même si ces individus ne sont pas forcément conscients de cette dynamique (Weber, 1923). Les épigones de cette tradition auront par la suite une certaine facilité à abandonner l’appellation de classes au bénéfice de catégories moins marquées politiquement.

Par contre, la conception holiste voit la classe comme une totalité, qui va au-delà de l’addition de ses membres puisqu’elle leur est à la fois indépendante et surplombante. La situation des individus est ainsi déterminée par à une dynamique lourde par rapport à laquelle, selon les conceptions ou nuances, soit ils sont soumis, soit ils entretiennent avec elle un rapport dialectique de lutte permanente23. Selon le propos de Fossaert (1980, p 10), « […] les

classes sociales préexistent à l’idée que les hommes s’en font et aux actions qu’ils accomplissent ».

La tradition weberienne ou néo-weberienne distingue trois dimensions de stratification : le pouvoir politique, la classe économique, le status social. La question de l’inégalité repose sur la richesse économique mais aussi sur la condition statutaire, le prestige, bref sur les éléments conférant une position de pouvoir. Pour cette “école”, l’inégalité sur fondement économique n’est pas prépondérante, les inégalités culturelles et institutionnelles sont tout aussi importantes sinon plus, surtout dans la société post-industrielle : « Dans les sociétés

post-industrielles, les inégalités sociales sont définies en terme de différences d’accès à des récompenses sociales déterminées associées à la détention, de la part d’un individu ou d’un groupe social, d’une position hiérarchique donnée soit dans la structure économique soit

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« Les hommes font leur propre histoire, mais ils ne la font pas arbitrairement, dans les conditions choisies

dans la structure culturelle soit dans la structure politique et institutionnelle »24. Ainsi, ce sont les combinaisons de ressources qu’il faut chercher pour expliquer la stratification d’une formation sociale ; Bourdieu et ses épigones, dans l’héritage de Coleman, déclinent le terme de “capital” (social, scolaire, culturel), dans un sens non marxien (ce que le philosophe J. Bidet résume en « dotations différentielles »).

Les sociologues A. Bihr et R. Pfefferkorn (1999, 2003) insistent sur le « caractère

systémique » des inégalités. Les inégalités face aux revenus, au patrimoine, à l’emploi, aux

conditions de travail, à la santé et la mortalité, au logement, la scolarité, les qualifications professionnelles, la consommation, les loisirs, les espaces et styles de vie, etc., « s’engendrent

les unes les autres ; elles constituent un processus cumulatif, au terme duquel les privilèges s’accumulent à l’un des pôles de l’échelle sociale tandis qu’à l’autre pôle se multiplient les handicaps ; et, elles tendent à se reproduire dans le cours des générations » (2003, p 356). Le

processus de reproduction du système de hiérarchie des « situations de classe »25 constitue une tendance lourde qui assure le maintien de l’édifice social, pour laquelle chacune des ressources s’inscrit dans des rapports de classes comme dynamique sociale totale (Mauss) afin de perpétuer les inégalités de génération en génération.

La tradition marxienne (issue de l’économie classique) pointe du doigt le rapport fondateur de la stratification sociale, et donne le premier rôle à l’économique considéré comme base ou infrastructure, la « dernière instance ». Les ressources dont peuvent disposer un individu ou un groupe social ne sont pas à mettre sur le même plan, il y a un rapport social fondamental au sein d’une structure hiérarchique, un rapport de production reposant sur le rapport d’exploitation, le procès d’extorsion de survaleur irradiant tout le système social. L’erreur serait cependant d’isoler la position de cette instance, de la considérer comme étroitement hégémonique et de l’isoler de la totalité sociale, suivant un économisme étroit. Tenir compte de toutes les ressources sans nier la prédominance du rapport social fondamental peut faire l’objet d’une approche syncrétique26 où est reconnue soit une « unité

contradictoire à dominante » (Vakaloulis, 2001, p 142), soit un facteur « surdéterminant » par

rapport aux autres, afin de cerner la réalité de la structure inégalitaire d’une formation sociale, et où un « procès global de reproduction du capital » se distinguerait et à la fois engloberait un « procès immédiat de reproduction comme valeur en procès » qui en serait son fondement (Bihr, 2001, t2).

En sciences sociales, la tradition marxienne s’inscrit dans cette conception holiste. La classe sociale est ainsi un ensemble d’individus ou de groupes dont la position par rapport à d’autres se définit par le rapport social fondamental qui, dans une formation sociale reposant sur le mode de production capitaliste, est basée sur le conflit central qui est la répartition du fruit du travail. En bref, 1) une classe sociale ne se définit pas par elle-même mais par rapport

24 Carboni, Pacinelli, “I regni della disuguaglianza. Note per una teoria ed una metodologia sulle disuguaglianze

sociali”, in Palumbo (dir)(1993), p 181. Cf aussi Schizerotto, “Problemi concettuali e metodologici nell’analisi delle classi sociali”, in Palumbo, (dir)(1993), pp 47-75.

25 … pour reprendre une expression weberienne (Weber, 1923, éd. 1971, p 309).

26 Cf Salamone, “Analisi della stratificazione e analisi delle classi sociali : una convergenza possibile”, in

aux autres ; 2) ce rapport se situe en liaison avec l’instance économique, qui est l’instance fondamentale régissant les rapports de production (“la dernière instance”) ; 3) il fait l’objet d’un conflit permanent et multiforme, la lutte des classes.

Trop souvent en sciences sociales, on tend à séparer l’individu de la société, comme si le premier pouvait exister en dehors de la seconde. L’individualisme méthodologique se contente de décliner les besoins des individus en fonction de la recherche de satisfaction de leurs intérêts propres, les plaçant de fait en consommateurs dans un contexte de marché abstrait et fétichisé fonctionnant sur une logique comptable qui mesure les “avantages” et les “inconvénients” envisagés. La « liberté » du « choix » motiverait les actions des individus, la combinaison de motivations individuelles obéissant à un calcul, une rationalité qui orienterait les actions individuelles (rhétorique de « l’acteur »). A ce sujet, on peut dire deux choses sur la tradition marxienne. Premièrement, elle insiste sur l’importance de la division du travail, comme c’est souligné dans L’idéologie allemande de Marx et Engels : à partir du moment où la place des hommes dans une formation sociale est déterminée par leur rôle dans la production des moyens d’existence, dans la production de la vie réelle, la vie en société est déterminée par la division sociale du travail. Deuxièmement, la séparation de l’individu vis-à- vis de la société relève d’une myopie : ils ne se situent pas au même niveau d’analyse, l’individu étant au niveau le plus concret, la société au niveau du collectif et de l’institutionnel. Dans ce sens, on considère 1) que les “choix” individuels sont tributaires de la structuration sociale, 2) qu’un degré de liberté peut être envisageable (principe de tendance), considérant qu’il est proportionnel à la position de l’individu au sein de la hiérarchie sociale (choix social(isé)).

La notion de division du travail a pour principe la séparation, la spécialisation, la fragmentation des rôles afin de mener à bien le procès de production. Pour le mode de production capitaliste, la division fondamentale du travail repose sur la séparation entre les tâches d’exécution d’une part, et les tâches de conception et d’organisation d’autre part27. Du point de vue spatial, la division du travail se décline aussi suivant des divisions régionales et internationales en fonction de la spécialisation et de la concentration des fonctions et des moyens de production, en général entre économies régionales ou nationales de main d’œuvre (pays de la Périphérie) et économies de décision et de conception (pays du Centre). La tradition marxiste utilisait l’image de la séparation entre la ville et la campagne pour illustrer cette division du travail. Le lien établi entre le stade de développement, la division du travail et la forme de propriété, implique que l’augmentation de la division du travail est inhérente à la maturation du mode de production capitaliste. La conception marxienne de l’histoire, qui voit le développement du mode de production capitaliste comme une augmentation des formes de séparation entre les éléments de la vie des hommes – parcellisation des tâches, valeur d’usage / valeur d’échange, acte / responsabilité, travail manuel / travail intellectuel, production / consommation, producteur / terre, etc - ne peut qu’interpeller les actes des

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individus contemporains quant à la maîtrise de leur vie en société28. A. Bihr y voit également un mouvement de « substitution de rapports impersonnels de dépendance et de domination

[…] aux rapports personnels de dépendance propres aux rapports précapitalistes de production » (2001, t2, p 218). Le développement de la division sociale du travail trouve sa

finalité dans le contrôle social et la perpétuation de la hiérarchie sociale (Gorz, 1973).

La méthode matérialiste consiste à se départir du paysage social superficiel pour révéler la structure cachée qui conditionne les actes des hommes : les conditions réelles d’existence, la position dans la division sociale dans le rapport de production. Cette démarche, qui regarde d’en haut les mises en scène, permet de distinguer le processus de l’événement, également la structure de classes des actes individuels ou collectifs.

2) Divisions de classes

Le concept de “classe sociale”, de même que la division de la société en classes antagoniques, est antérieur à la tradition marxienne. On peut cependant avancer qu’actuellement, toute référence à cette appellation peut sous-entendre un lien implicite, ou du moins une scorie d’héritage, à cette vision du monde qui a pu se diluer dans le champ intellectuel. A contrario, la disparition des “classes sociales” dans les sciences sociales contemporaines au bénéfice d’une neutralité a-théorique est caractéristique de l’idéologie de notre temps (Dubar, 2004 ; Chauvel, 2004 ; Lacascade, 2004 ; Vakaloulis, 2001). L’interprétation de rapports sociaux fondés sur le rapport d’exploitation a laissé la place à d’autres critères de différenciation comme le genre, l’ethnie ou l’âge.

D’une part, à un niveau d’interprétation supérieure, les classes sociales sont des catégories théoriques. D’autre part, elles ne se définissent pas de manière substantielle, essentialiste, mais au sein d’un rapport social historiquement donné29 : une classe sociale se définit par rapport à une autre, et ce dans un contexte donné. Une classe sociale est un ensemble dont on ne percevra que l’homogénéité apparente, car en son sein règnent des divisions d’intérêts et de fonctions qui lui donnent un caractère dynamique, changeant et multiforme, et donc le plus souvent peu visible, selon les conjonctures historiques et géographiques. Toutes ces limites font que la division en classes n’apparaîtra jamais sous sa forme pure, mais pourra sans doute s’en rapprocher pour les formations sociales où la polarisation est la plus poussée (Bihr, 2001, t2, p 216). C’est à un niveau d’interprétation

28 Cf. Marglin (1973), “Origine et fonctions de la parcellisation des tâches. A quoi servent les patrons ?”, in Gorz

(dir)(1973), Critique de la division du travail, Le Seuil, pp 43-92. Marglin et Gorz placent au centre de l’apparition du capitalisme non l’apparition de la fabrique en tant qu’innovation technologique pour la rationalisation de la production, mais l’apparition d’une plus grande spécialisation des tâches conduisant à l’aliénation du travailleur-producteur : « La technologie capitaliste et la division capitaliste du travail ne se sont

donc pas développées en raison de leur efficacité productive prise en elle-même, mais en raison de leur efficacité dans le contexte du travail aliéné et forcé, c’est-à-dire d’un travail assujetti à un but qui lui est étranger » (Gorz, p 95).

29 Dès la préface de La situation de la classe laborieuse en Angleterre, Engels précise le sens des mots utilisés :

l’expression “classe moyenne” (“middle class”) équivaut à “bourgeoisie” ou “classe possédante” (p 33). Il met ainsi en garde le lecteur à propos du piège des appellations au détriment de leur sens défini dans le cadre de leur réalité historique.

moyen (méso), que nous utilisons des appellations taxinomiques créées par l’académie et les institutions – les catégories socio-professionnelles ou professions et catégories sociales – qui ne sont que des outils – imparfaits mais nécessaires - de l’analyse de la réalité sociale (Cherkaoui, Lindsey, 1977 ; Chauvel, 2001 ; Desrosières, Thévenot, 1996 ; Bihr, Pfefferkorn, 1999)30.

Dans le brouillon qu’est le dernier chapitre – LII - du Capital qu’il consacre aux classes, Marx établit pour son époque « trois grandes classes » liées aux sources de revenu et au type de revenu, à partir de la « formule trinitaire »31 - capital-profit, terrain-rente foncière, travail- salaire. Il n’en distingue pas moins des « strates intermédiaires et transitoires »32. Son travail de systématisation s’arrêtera là, vu que personne n’est immortel. D’après Lénine, la classe définie au sein de rapports de production capitaliste, est composée « de vastes groupes

d’hommes qui se distinguent par la place qu’ils tiennent dans un système historiquement défini de la production sociale ; qui se distinguent par leur rapport (la plupart du temps fixé par la loi orale et écrite) aux moyens de production, par leur rôle dans l’organisation sociale du travail, et donc par les moyens d’obtention et la grandeur des richesses de la part sociale dont ils disposent. Les classes sont des groupes d’hommes dont l’un peut s’approprier le travail de l’autre par suite de la différence de place qu’ils tiennent dans un régime déterminé de l’économie sociale »33. Cette définition souligne le caractère fondamental de la division sociale, à savoir le rapport de production. La réalité de la division de classes se complique cependant avec les dimensions politiques, culturelles et idéologiques (rapport à la mémoire, à la ville, à l’éducation, à la famille, etc) qui sont certes secondaires du rapport fondamental mais qui peuvent se révéler déterminants selon les contextes et conjonctures. Toutes les formations sociales historiquement données se caractérisent par des rapports de domination, inhérents aux rapports de production qui configurent le mode de production en acte. Ces rapports de domination, ces rapports hiérarchiques, soulèvent la question de leur relation aux rapports d’exploitation déterminés qui sont au fondement des rapports de production des formations sociales du mode de production capitaliste : on réserve communément l’appellation et le sens de “classes” à la division sociale issue de ces rapports, aux sociétés capitalistes34.

En distinguant les rapports d’exploitation des rapports de domination, on a bien à l’esprit que la structure de classe n’est pas le seul principe de domination sociale. La domination raciale ou ethnique, comme la domination masculine (de sexe ou de genre)35 ou encore la domination juridique à l’égard des étrangers (droits de séjour et de citoyenneté), sont des formes de domination qui ne sont pas apparues avec la naissance et l’avènement du mode de production capitaliste. Elles ont des degrés, des intensités, des ampleurs, variables selon les formations sociales historiquement et géographiquement données. La co-existence

30 « La classification est une condition de la connaissance, elle n’est pas la connaissance même, et la

connaissance détruit à son tour toute classification », in Horkheimer, Adorno (1974), p 233.

31

Cf Marx (1867, 1969), Le Capital, L3, t3, chap XLVIII

32 Marx (1867, 1969), Le Capital, L3, t3, chap LII, p 258. 33 cité par E. Balibar, in Bensussan, Labica, 1982, p 173 34 Cf Marx (1867, 1969), Le Capital, L1, t1, chap VI, p 172. 35

de ces formes de domination pose la question de leur articulation avec la domination de classes. Comme le dit Vakaloulis, « En déterminant l’accès aux différentes ressources

sociales, la structure de classe joue un rôle décisif comme principe d’organisation qui circonscrit l’espace social dans lequel les autres formes de domination se développent. Elle délimite ainsi les capacités d’action des différents groupes contre les rapports de domination non “classistes”. Même si les intérêts ou les motivations de ces groupes ne relèvent pas du facteur “classe”, « les conditions requises pour faire aboutir ces intérêts “non classistes” sont

fondamentalement structurés par des relations de classe » [E.O.Wright, 1983, p23] » (2001, p 144). C’est ainsi que l’immigré et/ou la femme auront tendance à se retrouver au bas de l’échelle sociale ou à sa périphérie. Nous partons ainsi de l’hypothèse que, tendanciellement, c’est la structure de classe qui impose la domination fondamentale, à savoir la domination sociale, a fortiori pour les formations sociales soumises au mode de production capitaliste ; les autres formes de domination n’en seront pas moins puissantes et réelles, selon le moment et le lieu : elles peuvent accompagner la domination sociale en se présentant comme fondamentales.

Également, les mutations économiques et sociales soulèvent la question de la reproduction des classes sociales entre les générations (Chauvel, 1999, 2001, 2004b). Le passage des “Trente glorieuses”, le “fordisme” basé sur le compromis keynésien, à la restauration de l’ordre libéral des années 1980, a creusé un fossé en ce qui concerne les conditions de vie objectives des jeunes générations vis-à-vis de la génération précédente : alors que les générations précédentes ont bénéficié d’une conjoncture de développement en tant que meilleure distribution de la part salariale, et consolidé des acquis et des droits sociaux, les nouvelles générations se sont trouvées dans une rupture de rythme qui a remis en cause la dynamique de mobilité sociale ascendante intergénérationnelle. Le sociologue L. Chauvel (1999, p 47) insiste sur ce concept de « générations sociales » qui connaissent des destins collectifs spécifiques et distincts les uns des autres.

En plus de la question générationnelle, le jeu des phases historiques renvoie à la pertinence des outils d’évaluation des conditions de classes. En effet, la répartition des richesses est souvent mesurée par le revenu salarial, d’autant plus facilement évalué par l’appareil d’Etat (services statistiques) quand celui-ci en est le distributeur (cas des emplois publics), alors que les revenus patrimoniaux ou financiers sont peu mesurés. Cette méconnaissance de la richesse des classes sociales dominantes, qui n’est pas nouvelle, ne peut qu’être le fruit d’une volonté politique. Depuis, on sait que d’une part les inégalités d’accumulation patrimoniale se sont accrues depuis le début de la phase néolibérale, et que d’autre part l’inégalité patrimoniale est très supérieure à l’inégalité salariale. Ainsi, la répartition des revenus patrimoniaux révèle – et c’est un schéma qu’on peut se permettre de généraliser – une grande masse de population sans ou disposant peu de cette richesse, avec une minorité se réduisant progressivement proportionnellement à la détention de revenus et de patrimoine. Aurait-on une « société patrimoniale » (Chauvel, 2001, p 333) succédant à une société salariale ?

3) Classes en soi / classes pour soi

La “classe en soi” est définie d’après les rapports de production, d’après la position de la classe dans l’échelle des rapports sociaux du mode de production dominant. Superficiellement, on peut voir ce type de classe en fonction de sa situation économique au sein du mode de production capitaliste : c’est à la fois exact et insuffisant car il faut la situer au sein des rapports de domination et d’exploitation. La “classe en soi” est aussi appelée classe “objective” ou “objectivée”, ou bien “classe-statut”.

La “classe pour soi” - ou classe “subjective”, ou encore “classe-identité” - fait appel à la conscience et la représentation – cet inconscient de classe - qu’ont les individus ou les collectifs de leur situation de classe et de leurs intérêts propres au sein des rapports de domination et d’exploitation. Elle renvoie donc aux sphères politique, culturelle et idéologique, et elle peut engendrer une identité collective pouvant déboucher sur un “sujet