vectoriels et alg´ ebrisation I : cas g´ eom´ etrique
2.2 Pente maximale asymptotique relative et positivit´ e
Dans ce sous-paragraphe, sauf mention explicite du contraire, toutes les vari´et´es alg´ebriques sont suppos´ees sur Speck, C d´esigne une courbe alg´ebrique projective lisse sur k qui est de genreget η le point g´en´erique deC.
Rappel sur le domaine de d´efinition d’une application rationnelle
SoientSun sch´ema etXetY deuxS-sch´emas ; on rappelle qu’uneS-application rationnelle de X vers Y est par d´efinition une classe d’´equivalence de S-morphismes de sous-sch´emas ouverts denses de X vers Y (cf. [50] chap. I §8). Sif est une S-application rationnelle de X vers Y, on note f : X //Y . Si S est le spectre d’un corps k, si X est int`egre et si Y est localement de type fini sur Speck, alors lesk-morphismes rationnels deX versY s’indentifient auxk-points deY `a valeurs dansk(X).
SoientS un sch´ema etf : X //Y uneS-application rationnelle. On dit quef estd´efinie au pointx∈X s’il existe un morphismeg:U →Y dans la classef tel quex∈U. On appelle domaine de d´efinitiondef le sous-ensemble deX des points o`uf est d´efinie. C’est un ouvert dense dansXqui peut donc ˆetre consid´er´e comme un sous-sch´ema ouvert deX. SiXest r´eduit et si Y est s´epar´e sur S, alors il existe un unique morphisme du domaine de d´efinition de f versY qui est dans la classef.
D’apr`es [50] I.8.2.12, si les conditions suivantes sont v´erifi´ees : 1) X est r´eduit et localement noeth´erien,
2) l’ensembleN des pointx∈X o`uX n’est pas r´egulier est de codimension≥2 dans X, 3) le morphisme structuralY →S est s´epar´e et universellement ferm´e,
alors l’ensemble des points deX o`u f n’est pas d´efinie est de codimension au moins 2.
En particulier siSest le spectre d’un corpsk, siXest une courbe r´eguli`ere sur une extension Kdek, et siY est une vari´et´e propre sur Speck, alors toutk-point deY `a valeurs dansK(X) se prolonge de fa¸con unique en un morphisme dek-sch´emas deX versY.
Pente maximale asymptotique relative d’un module inversible
Lemme 2.2.1 Soit π:X →C un morphisme propre et surjectif d’une vari´et´e alg´ebrique X vers la courbe alg´ebriqueC. Alors il existe une extension de type fini et purement transcendante k0 dek, une courbe alg´ebrique non-singuli`ere C0 sur k0, un morphisme fini p: C0 → Ck0, et un k-morphisme dominant f : C0 → X tels que πf = qp, o`u q : Ck0 → C est la projection canonique.
C0 f //
p
X
π
Ck0 q //
C
Speck0 //Speck
D´emonstration. Soient K (resp. K0) le corps des fonctions m´eromorphes sur C (resp. X).
Commeπest un morphisme de type fini,K0 est une extension de type fini deK, donc est une extension finie d’une extension purement transcendante deK. Soitdde degr´e de transcendance deK0 surK, et soitk0 une extension purement transcendante de degr´eddek. On d´esigne par (Ti)1≤i≤d une base de transcendance de k0 sur k. Le corps K00 des fonctions rationnelles sur
Ck0 =C×kSpeck0 est une extension purement transcendante de degr´ed de K. On d´esigne parq:Ck0 →C la projection canonique. En choisissant une base de transcendance (xi)1≤i≤d de K0 sur K on obtient un homomorphismeϕ de K00 dans K0 qui associe `a Ti l’´el´ement xi. On peut donc considererK0 comme une extension finie de K00 (via ϕ). Le corps K0 est une extension de degr´e de transcendance 1 surk0. SoitC0 une courbe projective normale surk0 de corps de fonctions m´eromorpheK0 (C’est unique `a un uniquek-isomorphisme pr`es). L’homo-morphismeϕ:K00→K0 d´efinit un point g´eom´etrique deCk0 `a valeur dansK0 au-dessus du point g´en´erique de Ck0 (pour la notation cf. [44] I.3.4.5), donc d´etermine une k0-application rationnelle deC0 versCk0 (cf. [44] I.7.1.2 et I.7.1.16). Celle-ci prolonge de fa¸con unique en un k0-morphisme p : C0 → Ck0. Le morphisme p est fini car K0 est une extension finie de K00. D’autre part, commeX et C0 ont le mˆeme corps des fonctions m´eromorphesK0, l’automor-phisme Id : K0 → K0 d´efinit une k-application rationnelle de C0 vers X `a valeur dans K0 au-dessus du point g´en´erique du sch´emaX (cf. [44] I.7.1.16) qui se prolonge de fa¸con unique en unk-morphismef deC0 versX. Le morphismef est dominant car son image contient le point g´en´erique deX. Enfin, on aπf =qppuisqu’ils correspondent au mˆemek-point de C `a
valeurs dansK0. 2
Remarque 2.2.2 Dans le lemme pr´ec´edent, Sik(X) est une extension s´eparable dek(C), on peut choisir K00 tel que ϕ : K00 → K0 soit une extension s´eparable. La courbe C0, de corps de fonctionK0, r´eguli`ere, et finie sur Ck0, construite dans la d´emonstration ci-dessus, est alors g´en´eriquement ´etale sur Ck0. Si de plus la courbe C sur k est g´eom´etriquement r´eduite, la courbeC0 surk0 est aussi g´eom´etriquement r´eduite.
Proposition 2.2.3 Soient π : X → C un k-morphisme propre, surjectif et s´eparable d’une vari´et´e alg´ebrique projective X sur k vers C, L un OX-module inversible. Si π∗L admet un sous-OC-module inversible ampleM, alors (X, L)satisfait aux conditionsP2 etP3.
D´emonstration. Avec les notations du lemme 2.2.1, on a un morphisme dominant f d’une courbeC0 sur une extension purement transcendant dek, versX, tel quew=πf =qp.
Comme M est un sous-OC-module inversible de π∗L,π∗L⊗M∨ ∼=π∗(L⊗π∗M∨) a une section non-nulle au-dessus deC. Par cons´equent,L⊗π∗M∨a une section non-nulle au-dessus deX. Comme f est dominant, on sait quef∗(L⊗π∗M∨) =f∗L⊗w∗M∨ admet une section non-nulle au-dessus deC0. Par cons´equent, on a
degC0(f∗L⊗w∗M∨) = degC0(f∗L)−degC0(w∗M)≥0
puisquef∗Lest unOC0-module inversible. CommeM est ample surC,w∗M est ample surC0 carqest un changement de base par un morphisme de sch´emas affines etpest un morphisme fini. Par cons´equent, degC0(w∗M)>0, et a fortioridegC0(f∗L)>0. Commef∗L est de rang 1, il est ample. Donc (X, L) satisfait `a la condition P2, et a fortiori la condition P3 (cf. la
proposition 2.1.32). 2
Corollaire 2.2.4 Soientπ:X →Cun morphisme propre, surjectif et s´eparable d’une vari´et´e alg´ebrique X vers C etL unOC-module inversible ample. Alors (X, π∗L)satisfait aux condi-tionsP2 etP3.
D´emonstration. D’apr`es l’adjonction des foncteurs π∗ et π∗, on a π∗π∗L = π∗(OX)⊗L.
Comme Γ(C, π∗(OX)) = Γ(X,OX)6= 0,L est un sous-fibr´e inversible de π∗π∗L. Cela montre que (X, π∗L) satisfait aux conditionsP2et P3 puisqueL est ample surC. 2
Proposition 2.2.5 Soient π : X → C un morphisme projectif et surjectif d’une vari´et´e alg´ebrique X vers C, F un OX-module sans torsion et L un OX-module inversible. Alors il existe une constantee1(F)dansRtelle que, pour tout tel entiern >0, on ait µmax(π∗(F ⊗ L⊗n))≤e1(F)n.
D´emonstration. La vari´et´eX est projective surk. On choisit unOX-module inversible ample L surX. En plongeantF dans une somme directe de faisceaux inversibles, on voit qu’il suffit d’´etablir la proposition lorsqueF est lui-mˆeme inversible, ce que nous supposerons d´esormais.
Posons d= dimX et K le corps des fonctions rationnelles sur C. Oberservons que l’on a l’´egalit´e dans le groupe de Chow CH1(C) :
π∗(c1(L)d−1) = (degLKXK)[C].
Supposons que M soit un OC-module inversible et que ϕ : M → π∗(F ⊗L⊗n) soit un homomorphisme injectif. On d´esigne parϕe:π∗M → F ⊗L⊗n le morphisme de OX-modules qui correspond `aϕpar adjonction. Ce dernier s’identifie `a une section non-identiquement nulle deπ∗M∨⊗ F ⊗L⊗n, dont le diviseur divϕeest effectif. On a donc
degX
c1(L)d−1[div(ϕ)]e
≥0.
Or [divϕ] =e −π∗c1(M) +c1(F) +nc1(L) dans CH1(X), donc
degX
c1(L)d−1[div(ϕ)]e
= degX
(−π∗c1(M) +c1(F) +nc1(L))c1(L)d−1
=−degC
c1(M)π∗(c1(L)d−1)
+ degX(c1(F)c1(L)d−1) +ndegX(c1(L)c1(L)d−1).
Par cons´equent,
degC(M)≤ degX(c1(L)c1(L)d−1) degL
KXK +degX(c1(F)c1(L)d−1) degL
KXK .
Enfin, d’apr`es la comparaison que l’on a ´etabli dans la proposition 1.3.15, on d´eduit la majo-ration lin´eaire enndeµmax(π∗(F ⊗L⊗n)) annonc´ee. 2
Proposition 2.2.6 Soient π: X →C un morphisme surjectif d’une vari´et´e alg´ebrique pro-jective X vers C et E1 et E2 deux OX-modules localement libres de rang fini et non-nuls. Si π∗(E1)etπ∗(E2)sont non-nuls, alors on a
µmax(π∗(E1⊗E2))≥µmax(π∗E1) +µmax(π∗E2)−2a(C), o`ua(C) est la constante d´ependant deC dans la proposition 1.3.15.
D´emonstration. Commeπ∗(E1) etπ∗(E2) sont non-nuls, il en est de mˆeme deπ∗(E1⊗E2).
D’apr`es la proposition 1.3.15, il existe deuxOC-modules inversiblesM1 et M2 ainsi que deux homomorphisme injectifs
M1−→π∗(E1), M2−→π∗(E2) tels que
degM1≥µmax(π∗E1)−a(C), degM2≥µmax(π∗E2)−a(C).
Comme M1∨⊗π∗(E1) et M2∨⊗π∗(E2) ont des sections non partout nulles au-dessus de C, π∗(M1)∨⊗E1 et π∗(M2)∨ ⊗E2 ont des sections non partout nulles au-dessus de X. Par cons´equent,
H0(X, π∗(M1⊗M2)∨⊗(E1⊗E2)) =H0(C,(M1⊗M2)∨⊗π∗(E1⊗E2))6= 0.
Donc
0≤µmax((M1⊗M2)∨⊗π∗(E1⊗E2)), et donc
µmax(π∗(E1⊗E2))≥degM1+ degM2≥µmax(π∗(E1)) +µmax(π∗(E2))−2a(C).
2 Proposition 2.2.7 Soientπ:X →C un morphisme surjectif d’une vari´et´e projectiveX vers CetLunOX-module inversible ample relativement `aπ. Alors la suite(µmax(π∗(L⊗n))/n)n≥1 admet une limite dans R.
D´emonstration. On note an = µmax(π∗(L⊗n)) si π∗(L⊗n) 6= 0 ce qui a lieu d`es que n est suffisamment grand. D’apr`es la proposition 2.2.5, il existe une constantec >0 tel quean≤cn pour n suffisamment grand. D’autre part, la proposition 2.2.6 montre que, pour tous entiers m, nsuffisamment grands,
am+n≥am+an−2a(C).
D’apr`es le corollaire 1.5.3, la suite (an/n)n≥1 admet une limite dansR. 2
Remarque 2.2.8 La proposition pr´ec´edente reste vraie si, au lieu de l’amplitude de L rela-tivement `a π, on suppose seulement que Γ(XK, L⊗nK ) est non-r´eduit `a 0 pour nsuffisamment grand.
D´efinition 2.2.9 Soitπ:X→C un morphisme projectif et surjectif d’une vari´et´e alg´ebrique X versC. Pour toutOX-module inversibleLample relativement `a π, on d´esigne parµπmax(L) la limite
µπmax(L) := lim
n→∞
µmax(π∗(L⊗n))
n ,
appel´eela pente maximale asymptotique deL relativement `aπ.
Proposition 2.2.10 Soitπ:X →Cun morphisme projectif et surjectif d’une vari´et´e alg´ebrique X versC.
1) SiL est unOX-module inversible ample relativement `aπ, alors pour tout entiern≥1, on a
µπmax(L⊗n) =nµπmax(L).
2) SiLest un OX-module inversible ample relativement `aπet siM est unOC-module inver-sible, alors
µπmax(L⊗π∗M) = degM +µπmax(L).
3) SiL1 etL2 sont deuxOX-modules inversibles amples relativement `aπ, alors µπmax(L1⊗L2)≥µπmax(L1) +µπmax(L2).
4) SoientL1 etL2deuxOX-modules inversibles amples relativement `aπ. S’il existe un homo-morphisme non-nulϕ:L1→L2 deOX-modules, alorsµπmax(L1)≤µπmax(L2).
D´emonstration. 1) est imm´ediat d’apr`es la d´efinition deµπmax. 2) On a pourn0,
µmax(π∗(L⊗n⊗π∗M⊗n)) =µmax(π∗(L⊗n)⊗M⊗n) =µmax(π∗(L⊗n)) +ndegM.
D’o`u
n→∞lim 1
nµmax(π∗(L⊗n⊗π∗M⊗n)) = degM+ lim
n→∞
1
nµmax(π∗(L⊗n)) 3) Pour tout entiern0,
µmax(π∗(L⊗n1 ⊗L⊗n2 ))≥µmax(π∗(L⊗n1 )) +µmax(π∗(L⊗n2 ))−2a(C).
Donc
µmax(π∗(L⊗n1 ⊗L⊗n2 ))
n ≥ µmax(π∗(L⊗n1 ))
n +µmax(π∗(L⊗n2 ))
n −2a(C)
n . Par passage `a la limite on obtient
µπmax(L1⊗L2)≥µπmax(L1) +µπmax(L2).
4) Pour tout entier n ≥ 1 on a un homomorphisme injectif ϕ⊗n : L⊗n1 → L⊗n2 . En prenant l’image directe on obtient un homomorphisme injectif de π∗(L⊗n1 ) vers π∗(L⊗n2 ).
Par cons´equent, on a µmax(π∗(L⊗n1 ))≤ µmax(π∗(L⊗n2 )). Par passage `a la limite on sait que
µπmax(L1)≤µπmax(L2). 2
D´efinition 2.2.11 Soient π : X → C un morphisme projectif et surjectif d’une vari´et´e alg´ebrique versC,LunOX-module inversible,L unOX-module inversible ample relativement
`
aπ. D’apr`es [45] chap II, 4.6.13, il existe un entiern0(L,L)>0 tel queL⊗L⊗n soit ample relativement `a π pour tout entier n ≥ n0(L,L). On d´efinit pour tout entier n ≥ n0(L,L) An(L,L) =µπmax(L⊗L⊗n)−nµπmax(L).
Proposition 2.2.12 Avec les notations de la d´efinition 2.2.11.
1) La suite (An(L,L))n≥n0(L,L)est croissante et converge vers une limite dans R.
2) Si M est un OC-module inversible, on a An(L,L ⊗π∗M) = An(L,L) pour tout n ≥ n0(L,L).
3) Si on d´esigne parΞ(resp.Ξπ) l’ensemble desOX-modules inversibles amples (resp. amples relativement `aπ), alors
Linf∈Ξ lim
n→+∞An(L,L) = inf
L0∈Ξπ
n→+∞lim An(L,L0). (2.3) 4) SiL est unOX-module ample relativement `aπ, alors la valeur (2.3) est ´egale `aµπmax(L).
5) SiLest de la formeπ∗M, o`uM est unOC-module inversible, alors la valeur (2.3) est ´egale
`
adegC(M).
D´emonstration. 1) D’apr`es la proposition 2.2.10 3), pour tout entiern≥n0(L,L), µπmax(L⊗L⊗(n+1))≥µπmax(L⊗L⊗n) +µπmax(L).
Donc on aAn+1(L,L) ≥An(L,L). D’autre part, comme L est ample relativement `a π, il existe unOC-module inversibleM tel queL ⊗π∗M soit ample (lemme 2.1.15). Donc il existe un entierm >0 et un homomorphisme injectif deLvers (L ⊗π∗M)⊗m. Par cons´equent, on a
µπmax(L⊗L⊗n)≤µπmax((L ⊗π∗M)⊗m⊗L⊗n) = (m+n)µπmax(L) +mdeg(M), i.e., An(L,L) ≤ m(µπmax(L) + deg(M)). Par cons´equent, la suite An(L,L))n≥n0(L,L) est croissante et born´ee sup´erieurement, donc converge dansR.
2) Si L⊗L⊗n est ample relativement `a π, il en est de mˆeme de L⊗(L ⊗π∗M)⊗n = L⊗L⊗n⊗π∗M⊗n ([45] chap II, 4.6.5), et
µπmax(L⊗(L ⊗π∗M)⊗n) =µπmax(L⊗L⊗n) +ndegM.
Par cons´equent,
An(L,L ⊗π∗M) =µπmax(L⊗L⊗n) +ndeg(M)−nµπmax(L ⊗π∗M) =An(L,L).
3) L’´egalit´e (2.3) est une cons´equence imm´ediate de 2) et de la proposition 2.1.16.
4) Pour toutOX-module inversibleL ample relativement `aπ, d’apr`es la proposition 2.2.10, on a
µπmax(L⊗L⊗n)−nµπmax(L)≥µπmax(L) +µπmax(L⊗n)−nµπmax(L) =µπmax(L).
Donc on a inf
L∈Ξ lim
n→+∞An(L,L)≥µπmax(L). D’autre part, comme Lest ample relativement `a π,
infL lim
n→+∞An(L,L)≤ lim
n→+∞An(L, L) = lim
n→+∞
µπmax(L⊗L⊗n)−nµπmax(L)
=µπmax(L).
Donc on a l’´egalit´e.
5) SiL=π∗M, o`uM est unOC-module inversible, alors pour toutOX-module inversible ample relativement `aπ, et tout entiern >0,
An(L,L) =µπmax(π∗M⊗L⊗n)−nµπmax(L) = deg(M) +µπmax(L⊗n)−nµπmax(L) = deg(M).
2
D´efinition 2.2.13 Soitπ:X →Cun morphisme projectif et surjectif d’une vari´et´e alg´ebrique X versC. Pour toutOX-module inversibleLon d´efinit
µπmax(L) = inf
L lim
n→+∞
µπmax(L⊗L⊗n)−nµπmax(L)
, (2.4)
o`u L parcourt tous lesOX-modules inversibles amples relativement `aπ. C’est un ´el´ement de [−∞,+∞[. Il est fini et co¨ıncide avec la d´efinition 2.2.9 lorsqueL est ample relativement `aπ (cf. la proposition 2.2.12 4)).
Proposition 2.2.14 Soitπ:X →Cun morphisme projectif et surjectif d’une vari´et´e alg´ebrique X versC.
1) Pour tous OX-modules inversiblesL1 etL2, on a
µπmax(L1⊗L2)≥µπmax(L1) +µπmax(L2).
2) Pour tout OX-module inversible Let tout entier n >0 on a µπmax(L⊗n) =nµπmax(L).
3) SiL1 etL2 sont deuxOX-modules inversibles et s’il existe un homomorphisme non-nul de L1 vers L2, alors µπmax(L1)≤µπmax(L2).
4) Pour tout OX-module inversible Let toutOC-module inversible M on a µπmax(L⊗π∗M) =µπmax(L) + deg(M).
D´emonstration. 1) Pour toutOX-module inversibleL ample relativement `aπet tout entier nsuffisamment grand,
µπmax(L1⊗L2⊗L⊗2n)≥µπmax(L1⊗L⊗n) +µπmax(L2⊗L⊗n),
d’o`uA2n(L1⊗L2,L)≥An(L1,L)+An(L2,L). Par passage `a la limite on sait queµπmax(L1⊗ L2)≥µπmax(L1) +µπmax(L2).
2) Pour toutOX-module inversibleL ample relativement `aπet tout entiermassez grand, on a
µπmax(L⊗n⊗L⊗mn) =nµπmax(L⊗L⊗m).
Par cons´equent, on aAmn(L⊗n,L) =nAm(L,L). Par passage `a la limite, on aµπmax(L⊗n) = nµπmax(L).
3) Pour toutOX-module inversibleL ample relativement `aπet tout entiernsuffisamment grand, on a un homomophisme injectif de L1⊗L⊗n vers L2⊗L⊗n. Par cons´equent, on a µπmax(L1⊗L⊗n)≤µπmax(L2⊗L⊗n), i.e.,An(L1,L)≤An(L2,L). Par passage `a la limite, on aµπmax(L1)≤µπmax(L2).
4) Pour toutOX-module inversibleL ample relativement `aπet tout entiernsuffisamment grand, on a
An(L⊗π∗M,L) =An(L,L) + deg(M).
Par passage `a la limite on obtientµπmax(L⊗π∗M) =µπmax(L) + deg(M). 2
Corollaire 2.2.15 Soient π : X → C un morphisme projectif et surjectif d’une vari´et´e alg´ebrique X versC,L unOX-module inversible.
1) Siµπmax(L)>0, alors µπmax(L∨)<0.
2) Siµπmax(L)<0, alors H0(X, L) = 0.
3) SiL est ample, alorsµπmax(L)>0.
D´emonstration. 1) On aµπmax(OX) =µπmax(π∗OC) = deg(OC) = 0, doncµπmax(L)+µπmax(L∨)≤ 0.
2) Si H0(X, L) 6= 0, alors il existe un homomorphisme non-nul de OX vers L, d’o`u µπmax(L)≥µπmax(OX) = 0.
3) Soit M unOC-module inversible tel que deg(M)>0. CommeL est ample, il existe un entier n ≥ 1 tel que π∗M∨⊗L⊗n ait une section non identiquement nulle au-dessus de X.
D’apr`es 2), on a
µπmax(π∗M∨⊗L⊗n) =nµπmax(L) + deg(M∨)≥0,
Doncµπmax(L)≥deg(M)/n >0. 2
Th´eor`eme 2.2.16 Soient π : X → C un morphisme projectif et surjectif d’une vari´et´e alg´ebrique vers C et L un OX-module inversible. Si µπmax(L∨) < 0, alors (X, L) satisfait `a la conditionP3. La r´eciproque est vraie lorsque L∨ est ample relativement `aπ.
D´emonstration. “=⇒” : Si µπmax(L∨) < 0, alors il existe une constante ε > 0 et un OX -module ample L tels que, pour tout entier m suffisamment grand, Am(L∨,L) ≤ −ε. En prenant une puissance tensorielle deL, on peut supposer que µπmax(L∨⊗L)≤µπmax(L)−ε.
Soitλ > ε−1µπmax(L) une constante. Pour tout entierd≥1 et tout entiern≥λd, on a d’apr`es la proposition 2.2.14
(n−d)µπmax(L)+µπmax(L∨⊗n⊗L⊗d)≤µπmax((L∨⊗L)⊗n) =nµπmax(L∨⊗L)≤n(µπmax(L)−ε).
Par cons´equent, on a
µπmax(L∨⊗n⊗L⊗d)≤dµπmax(L)−nε <0.
DoncH0(X, L∨⊗n⊗L⊗d) = 0. Ainsi (X, L) satisfait `a la conditionP3.
“⇐=” : On suppse que L∨ soit ample relativement `a π et que la condition P3(X, L) soit v´erifi´ee. SoitM unOC-module inversible ample. Comme (X, L) satisfait `a la conditionP3, il existeλ >0 tel que, pour tout entierd > λ et tout entiern > λd, on ait
H0(X, L∨⊗n⊗π∗M⊗d) = 0.
D’apr`es le lemme 1.3.13, on a
µmax(π∗(L∨⊗n⊗π∗M⊗d)) =ddegM +µmax(π∗(L∨⊗n))≤g−1.
On prend une suite (dn)n≥1 telle que i) pour tout entiern≥1,dn > λ, ii) pournsuffisamment grand,dn< n/λ, iii) lim
n→∞
n dn
=λ.
Alors pournsuffisamment grand, on a :
deg(M)dn+µmax(π∗(L∨⊗n))≤g−1, c’est-`a-dire :
deg(M)dn
n +µmax(π∗(L∨⊗n))
n ≤g−1 n .
Par passage `a la limite, on obtientµπmax(L∨)≤ −λ−1degM <0. 2
Corollaire 2.2.17 Soient π : X → C un morphisme projectif et surjectif d’une vari´et´e alg´ebrique vers C et L un OX-module inversible. Si µπmax(L) > 0, alors (X, L) satisfait `a la conditionP3.
D´emonstration. D’apr`es le corollaire 2.2.15, µπmax(L∨) < 0. Le corollaire r´esulte donc du
th´eor`eme 2.2.16. 2
Pente maximale asymptotique relative d’un module localement libre
D´efinition 2.2.18 Soitπ:X →Cun morphisme projectif et surjectif d’une vari´et´e alg´ebrique X versC. SiE est unOX-module localement libre de rang fini et non-nul et sip:P(E)→X est le morphisme canonique, on d´efinit
µπmax(E) =µπpmax(OE(1)).
Remarque 2.2.19 SiEest ample relativement `aπ, alorsOE(1) est ample relativement `aπp.
Dans ce cas-l`a on a
µπmax(E) = lim
n→∞µmax(π∗(SnE)).
Th´eor`eme 2.2.20 Soient π : X → C un morphisme projectif et surjectif d’une vari´et´e alg´ebriqueX versC,EunOX-module localement libre de rang fini et non-nul. Siµπmax(E∨)<
0, alors (X, E)satisfait `a la conditionP3. La r´eciproque est vraie lorsqueE∨ est ample relati-vement `aπ.
D´emonstration. “=⇒” : Soient p:P(E∨)→X le morphisme canonique etf =πp. Comme µfmax(OE∨(1)) =µπmax(E∨) on a µfmax(OE∨(1))<0. Donc on a P3(P(E∨),OE∨(−1)) compte tenu du th´eor`eme 2.2.16. D’apr`es la proposition 2.1.17, on a P3(X, E).
“⇐=” : Si on a P3(X, E), alors P3(P(E∨),OE∨(−1)) est v´erifi´ee d’apr`es la proposition 2.1.17. Si de plusE∨ est ample relativement `aπ, alors OE∨(−1) est ample relativement `a f.
Le th´eor`eme 2.2.16 implique queµfmax(OE∨(1))<0, i.e.,µπmax(E∨)<0. 2
Un exemple de calcul des pentes maximales asymptotiques On d´esigne parK le corps des fonctions m´eromorphes surC.
Soient π:A →C un sch´ema ab´elien de dimension relative d, Lun faisceau inversible sur A. On d´esigne parε:C→A la section nulle et parTπ le fibr´e tangent relatif.
Proposition 2.2.21 Si Lest ample relativement `aπ, on a µ(π∗L) = 1
d+ 1
deg(π∗(c1(L)d+1∩[A])) degLK(AK) +1
2degε∗Tπ; si de plus Lest sym´etrique, alors
µ(π∗L) = 1
2degε∗Tπ+ degε∗L.
D´emonstration. 1) On a un isomorphisme de OA-modules π∗ε∗Tπ ' Tπ (autrement dit, le OA-module Tπ “provient de la base”). D’apr`es le th´eor`eme de Riemann-Roch-Grothendieck, on a ch(Rπ∗L) = π∗(ch(L) Td(Tπ)). Comme L est ample relativement `a π, on a ch(π∗L) = π∗(ch(L) Td(Tπ)). Donc
deg(π∗L) = degπ∗(Td(π∗ε∗Tπ) ch(L))
= deg Td(ε∗Tπ)π∗(ch(L)) = deg
1 + 1
2c1(ε∗Tπ)
π∗(ch(L))
= 1
(d+ 1)!deg(π∗(c1(L)d+1∩[A])) + 1
2d!degLK(AK) deg(ε∗Tπ).
D’autre part, on a
rgπ∗L= dimH0(AK, LK) = 1
d!degLKAK. Donc
µ(π∗L) = 1 d+ 1
deg(π∗(c1(L)d+1∩[A])) degLK(AK) +1
2degε∗Tπ. 2) D’apr`es la formule d’adjonction, on a
µ(π∗(L⊗π∗ε∗L∨)) =µ(π∗(L)⊗ε∗L∨) =µ(π∗L)−degε∗L.
D’autre part, on a
ε∗(L⊗π∗ε∗L∨) =ε∗L⊗ε∗L∨=OA.
Donc on est ramen´e au cas o`u ε∗L est trivial. Comme L est sym´etrique et ε∗L =OA, pour tout entiern, [n]∗[L] = [L⊗n2] dans Pic(A). Par cons´equent,
[n]∗(n2d+2c1(L)d+1∩[A]) = [n]∗(c1([n]∗L)d+1∩[A])
=c1(L)d+1∩n∗[A] =n2dc1(L)d+1∩[A]
car [n] :A →A est une isog´enie de degr´en2d. Par cons´equent, on a n2deg(π∗(c1(L)d+1∩[A])) = deg(π∗(c1(L)d+1∩[A])),
i.e., deg(π∗(c1(L)d+1∩[A])) = 0 si on prendn >1. 2 Par ailleurs, la “th´eorie alg´ebrique des fonctions th´eta” de Mumford [71] — qui d´ecrit l’es-paceH0(AK, LK) des sections deLsur la fibre g´en´erique g´eom´etrique deA →C comme une repr´esentation projective irr´eductible du sous-groupe H(LK)⊂A(K) de Mumford — admet comme cons´equence (cf. [8] pour l’analogue dans la situation arithm´etique plus compliqu´ee o`u l’on s’int´eresse `a un fibr´e inversible hermitien cubiste sur un sch´ema ab´elien sur le spectre de l’anneau des entiers d’un corps de nombres) :
Proposition 2.2.22 Si L est ample relativement `a π et si k est de caract´eristique 0, alors π∗L est semi-stable, et doncµmax(π∗L) =µ(π∗L).
Corollaire 2.2.23 Si Lest ample relativement `aπet si kest de caract´ersitique 0, on a µπmax(L) = 1
d+ 1
deg(π∗(c1(L)d+1∩[A])) deg(c1(LK)d∩[AK]) ; si de plus Lest sym´etrique,
µπmax(L) = deg(ε∗L).
Si Lest unOA-module inversible quelconque et siL est unOA-module inversible ample relativement `aπ. On suppose quenest un entier positif tel queL⊗n⊗Lsoit ample relative-ment `a π. D’apr`es le corollaire 2.2.23, on sait calculerAn(L,L) (cf. la d´efinition 2.2.11). Plus pr´ecis´ement, on a
µπmax(L⊗L⊗n) = 1 d+ 1
deg(π∗((c1(L) +nc1(L))d+1) deg((c1(LK) +nc1(LK))d)
= 1
d+ 1
deg(π∗(c1(L)d+1)nd+1+ (d+ 1) deg(π∗(c1(L)c1(L)d))nd+o(nd) deg(c1(LK)d)nd+ddeg(c1(LK)c1(LK)d−1)nd−1+o(nd−1) .
(2.5)
D’autre part, on a
µπmax(L) = 1 d+ 1
deg(π∗(c1(L)d+1))
deg(c1(LK)d) . (2.6)
On d´eduit de (2.5) et (2.6) que
n→+∞lim An(L,L) =deg(π∗(c1(L)c1(L)d)) deg(c1(LK)d) − d
d+ 1
deg(c1(LK)c1(LK)d−1) deg(π∗(c1(L)d+1)) deg(c1(LK)d)2 .
(2.7) Si LetL sont l’un et l’autre sym´etriques, on a pour tout entiernsuffisamment grand
An(L,L) = deg(ε∗L).
En particulier, siLest sym´etrique,µπmax(L)≤deg(ε∗L).
Proposition 2.2.24 Pour tout OA-module inversible Lon a µπmax(L) = inf
L
deg(π∗(c1(L)c1(L)d)) deg(c1(LK)d) − d
d+ 1
deg(c1(LK)c1(LK)d−1) deg(π∗(c1(L)d+1)) deg(c1(LK)d)2
, (2.8) o`uL parcourt tous les OA-module inversible ample relativement `aπ.