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P ROCESSUS COMME CONDUITES DIRECTEMENT OU INDIRECTEMENT OBSERVABLES

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 105-109)

4 PROCESSUS PSYCHOLOGIQUE ET EFFICACITE DU CONSEIL EN ORIENTATION

4.2 P ROCESSUS COMME CONDUITES DIRECTEMENT OU INDIRECTEMENT OBSERVABLES

Gaudron et Croity-Beltz (2005) font un état des travaux de recherche empiriques et théoriques sur les processus psychologiques en jeu dans la démarche du bilan de compétences. Les recherches empiriques recensées évaluent pour la plupart, les effets positifs du bilan de compétences sur l’image de soi, l’estime de soi, les sentiments d’efficacité personnelle, la connaissance de soi, etc. Ces variables proviennent essentiellement des grandes théories "vocationnelles" nord-américaines telles que celles de Donald Super sur le rôle de l’image de soi dans la formation des préférences professionnelles, la théorie sociale cognitive de Bandura relative au sentiment d’efficacité personnelle, etc. Nous proposons de présenter deux de ces variables pour étayer l’analyse des processus comme conduites directement ou indirectement observables : l’image de soi et les sentiments d’efficacité personnelle.

4.2.1 L’image de soi

Donald Super est l’un des premiers auteurs à avoir souligné le rôle de l’image de soi dans la construction du projet professionnel (Gaudron, 2005). Il montre que l’image de soi occupe une place centrale dans les processus d’exploration des futurs professionnels et des décisions : les individus projettent dans leur projet l’image qu’ils ont d’eux-mêmes. Dans cette perspective théorique, « le processus de développement vocationnel consiste essentiellement à développer et à actualiser une image de soi » (Vroom, 1964, p. 72, cité par François, 2007, p. 54). Le choix professionnel est donc le résultat d’une ressemblance perçue entre le soi et la profession. C’est une transcription en termes professionnels de l’idée que l’individu se fait de lui-même.

La construction de cette perception de soi est influencée par la variation des contextes dans lesquels évolue l’individu. L’image de soi comporte donc plusieurs dimensions que François (2007) qualifie de « système des images de soi » (p. 55). Il s’agit notamment du soi comme travailleur, comme citoyen, comme membre d’une famille etc. A ce système peuvent être associées des méta-dimensions comme « l’estime de soi, le réalisme, la clarté des images », etc. (François, 2007, p. 55).

Levy-Leboyer (1993) souligne l’importance de cette théorie de Super pour la pratique du bilan de compétences. Selon elle, le rôle du bilan de compétences consiste à aider les bénéficiaires à mieux intégrer les divers aspects de leur self : l’image de soi (self concept) et l’estime de soi (self esteem). L’image de soi correspond à ce qui donne à chacun une identité. Elle est « composée d’une variété de représentations cognitives et affectives, elle est complexe, dynamique, évolutive et relativement malléable » (Levy-Leboyer, 1993, p.

34). L’estime de soi renvoie à « la dimension évaluative et auto-évaluative de la représentation de soi » (Gaudron, 2005, p. 104). Elle peut se rapporter au soi global ou à un aspect spécifique du soi : le soi social, le soi scolaire etc. Selon Levy-Leboyer (1993), il y a un lien étroit entre l’estime de soi et la capacité de l’individu à se construire des formes d’anticipation de soi et à mettre en œuvre des stratégies adéquates pour atteindre ses objectifs. Différentes recherches soulignent les effets positifs du Bilan de Compétences sur l’image de soi et sur l’estime de soi.

A partir de l’échelle de Warr et de Jackson, Ferrieux et Carayon (1998) montrent que le bilan de compétences a un effet positif sur l’estime de soi et de ce fait sur la capacité à mieux communiquer, à s’auto-évaluer et à mieux s’investir dans les activités de recherche d’emploi. Les travaux de Gaudron, Bernaud et Lemoine (2001) vont dans le même sens. A partir d’une méthodologie longitudinale (la première du genre sur le bilan de compétences), Gaudron et al. (2001) évaluent les effets du bilan de compétences sur différentes variables liées notamment à l’estime de soi et à l’image de soi. Ils émettent entre autre, l’hypothèse selon laquelle, « le bilan de compétences aura pour effet […] une meilleure estime de soi, une plus grande richesse du soi (images de soi)… » (p. 490). Les différentes dimensions de l’estime de soi (estime de soi générale, personnelle, sociale, totale) ont été évaluées à partir d’une adaptation française de l’échelle de Battle1. Quant à l’analyse de l’image de soi, elle a porté sur : les savoir-faire, les savoir-être, les intérêts professionnels, les compétences utiles et celles à développer.

Les résultats de ces recherches montrent que le bilan de compétences a des effets positifs sur l’estime de soi et sur l’image de soi. Ces effets restent stables (6 mois après) pour l’estime de soi, mais ont tendance à régresser avec le temps pour les variables : savoir-faire,

1. Cultural free self-esteem inventory de Battle, 1992

savoir-être de l’image de soi. Selon les auteurs, il y aurait deux explications possibles à cette régression : la reprise d’une activité qui rendrait ces aspects moins utiles ou l’effet « de lassitude ou de désimplication lorsque l’activité n’a plus la même signification » (p. 501).

4.2.2 Les sentiments d’efficacité personnelle et le pouvoir d’agir

La théorie sociale cognitive conçoit le fonctionnement psychologique comme « une interaction continue et réciproque entre les déterminants personnels, comportementaux et environnementaux » (Bandura, 1980, p. 177). Les activités cognitives jouent un rôle essentiel dans ce déterminisme réciproque qui repose sur un processus d’interprétation et de régulation. Les sentiments d’efficacité personnelle (SEP) font partie de ces mécanismes de régulation. Ce sont « les jugements que les personnes font à propos de leur capacité à organiser et réaliser des ensembles d’actions requises pour atteindre des types de performances attendues, ainsi que les croyances à propos de leurs capacités à mobiliser la motivation, les ressources cognitives et les comportements nécessaires pour exercer un contrôle sur les événements de la vie » (Bandura, 1986, 1989, cité par François, 2002, p.

521). Cette représentation positive de ses capacités constitue pour l’individu une source de motivation, d’efficacité et de persévérance dans l’action. Le maintien de cette motivation dépend de la satisfaction liée au fait d’atteindre certains objectifs. En effet, « lorsque des objectifs sont fixés à un degré irréalistement élevé, la plupart des performances semblent décourageantes. Des efforts importants qui aboutissent à des échecs répétés affaiblissent les attentes en matière d’efficacité et réduisent la motivation à accomplir l’activité en question » (Bandura, 1980, p. 151). De même, des objectifs trop faciles « ne présentent pas un défi suffisant pour éveiller beaucoup d’intérêts » (p. 153). Par contre, des objectifs

« modérément difficiles » constituent la meilleure stratégie pour maintenir un « niveau d’efforts élevé » (p. 153).

La notion d’agency, que nous proposons de traduire par : pouvoir d’agir1, se rapporte à

« l’individu agent de son comportement » (François, 2007, p. 62). C’est la capacité qu’a l’individu d’agir non seulement sur son environnement mais sur lui-même à travers « la réflexion qu’il applique à lui-même, à ses comportements, à leurs résultats, à son

1. On utilise parfois en français le néologisme : agentivité

environnement » (François & Langelier, 2000, p. 176). Le sentiment d’efficacité personnel est un constituant majeur de ce pouvoir d’agir.

François et Botteman (2002) s’appuient sur différents travaux empiriques et théoriques pour montrer la pertinence de la théorie sociale cognitive pour la pratique du bilan de compétences1. Les processus conceptualisés par cette théorie sont évalués dans les études sur les effets du bilan de compétences à travers des variables telles que :

- l’augmentation des possibilités d’action propres ; - le sentiment de contrôle ;

- l’employabilité psychologique ; - la connaissance de soi ;

- les sentiments d’efficacité personnelle à l’égard de ses propres conduites, etc.

François et Botteman (2002) constatent que plusieurs études françaises sur les effets du bilan de compétences mettent en évidence un rehaussement des sentiments d’efficacité personnelle. Ces auteurs citent notamment des études (enquête par entretien) réalisées au Centre Interinstitutionnel de Bilan de Compétences (CIBC) de la Charente Maritime (Bellamy, 1998), les travaux de François et Langelier (2000) etc. Les résultats de ces études montrent que les investigations multidimensionnelles mises en œuvre par le bilan, l’engagement de l’individu dans le projet de bilan, l’analyse de ses compétences, procurent un gain de sentiment de contrôle. La pratique du bilan amène donc l’individu à une

« représentation plus exacte ou plus réaliste de ses capacités et de ses chances de succès dans ce qu’il entreprend » (François & Botteman, 2002, p. 529).

Une étude longitudinale réalisée par Gaudron, Bernaud et Lemoine (2001) évaluent entre autre, l’impact du bilan de compétences sur les différentes dimensions de cette connaissance de soi : réflexion sur soi, clarté de l’image de soi, clarté du projet professionnel. Les

1. Ces auteurs citent notamment Sadri et Robertson (1993) qui ont confirmé par une méta-analyse, la corrélation entre les sentiments d’efficacité personnelle (SEP) et les performances de l’individu. Ils font également référence au modèle des facteurs personnels, contextuels et expérientiels développé par Lent, Brown et Hackett (1994, 1996, 2002). Ce modèle est une adaptation de la théorie sociale cognitive aux « processus dynamiques intervenant dans la formation des intérêts, le choix des carrières et dans le parcours professionnel » (François, 2002, p. 523). Les SEP est ici considéré comme médiateur du développement des intérêts professionnels, des choix de carrière et des niveaux de performance. Cet impact des sentiments d’efficacité personnelle (SEP) sur les intérêts professionnels et les processus décisionnels a été évalué par Taylor et Betz (1983), Taylor et Popman (1990). Ces études ont montré que « les personnes ayant peu de confiance dans leurs capacités à réaliser efficacement les opérations nécessaires à un choix de carrière, obtenaient aussi des scores d’indécision vocationnelle plus élevés » (François & Botteman, 2002, p. 524)

résultats de l’étude montrent une nette progression de l’auto-connaissance et ceci de façon stable (6 mois après le bilan). Le bilan de compétences a donc des effets positifs sur le contenu de la représentation de soi qui progresse vers une plus grande précision. Cette pratique de conseil permet « d’enrichir le contenu de soi et offre à l’individu de meilleurs éléments de réflexion et de décision quant à son horizon professionnel » (Gaudron et al., 2001, p. 501).

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 105-109)

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