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Des pôles à la poursuite de différents objectifs d’efficience médico-économique

CHAPITRE 1 : DU NOUVEAU MANAGEMENT PUBLIC A L’APPARITION DES POLES D’ACTIVITE MEDICALE : RETOUR SUR L’EVOLUTION DU SERVICE PUBLIC HOSPITALIER

2 Des pôles à la poursuite de différents objectifs d’efficience médico-économique

L’objectif des pôles est de responsabiliser les acteurs au plus près du soin et de décloisonner les sphères administratives, médicales et soignantes par la création de pôles cliniques et médico-techniques (Flachère, 2015). Cette volonté de création des pôles exprimée dans l’ordonnance du 2 mai 2005 est de « médicaliser la gestion de l’hôpital en associant les

médecins, les praticiens, à la gestion des grandes orientations »10. Cette idée de gouvernance médico-administrative est réaffirmée dans la loi HPST, de juillet 2009, par la redéfinition du rôle des médecins chefs de pôle, qui ont pour mission de piloter les performances et les résultats de leur pôle (Gavault et al, 2014). Il est alors question de donner aux acteurs la capacité de décider par eux-mêmes, ce qui revient à diriger à la confiance (Vallet, 2012). Ce mouvement managérial de subsidiarité représente un réel changement de paradigme à l’hôpital (Vallet, 2012). Vallet explique que désormais, « il est nécessaire de s’adapter à des

acteurs de plus en plus sensibles à leur capacité à ne pas laisser à d’autres le soin de décider pour eux ».

L’objectif poursuivi par cette nouvelle gouvernance réside donc dans le décloisonnement de l’hôpital pour favoriser la coordination entre médecins et responsables administratifs pour donner « la priorité au pilotage médico-économique et transmettre l’autorité et les marges de

décision aux échelons les plus proches de la production des soins »11 (Flachère, 2015). Le pôle est le garant du décloisonnement à l’hôpital, avec l’apparition du médecin gestionnaire, de collaborateurs soignants et administratifs. Il crée un lieu de rencontre, de discussion et de collaboration entre des mondes souvent opposés (Domy, 2012). Le pôle devient dès lors le

« cœur de la stratégie médicale et du pilotage opérationnel de l’établissement » (DHOS,

2010, p.46). Dans un hôpital divisé entre différents mondes (Glouberman et Mintzberg,

10 www.reformes-hospitalieres.com 11 IGAS, L’hôpital, 2012

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2002), le resserrement de la contrainte budgétaire du système de santé français explique le besoin de coordination accru entre ces différents mondes.

Finalement, pourquoi a-t-il fallu changer le management à l’hôpital ? Vallet (2012) répond à cette question en expliquant que ces changements s’inscrivent dans une vision systémique des réformes de l’époque : la mise en place d’un système de certification pour développer les bonnes pratiques et la qualité des soins ; la mise en place d’un nouveau système de tarification, la T2A ; le lancement du chaînage du parcours de soins des patients, l’organisation au travers des SROS (schéma régional de l’organisation des soins) ; ou encore la rénovation des bâtiments hospitaliers. Comme la réforme du financement plonge les établissements publics de santé dans la culture du résultat, au sens comptable, financier et opérationnel, il est nécessaire d’avoir des systèmes d’information et de pilotage adaptés. Le lien entre analyse, décision et action devient donc important et va être permis par la réforme de la gouvernance hospitalière qui va créer de nouvelles voies (Penaud, 2008). La mise en œuvre des pôles constitue alors l’élément central de l’évolution du management hospitalier. Et si celle-ci est souhaitée par le législateur, elle semblait attendue par les différents acteurs hospitaliers pour favoriser l’adaptation du système hospitalier à son environnement. Toutefois, ce nouvel organisme de gestion vient transformer les structures et les relations définies entre les différents acteurs (Nobre et Lambert, 2012), puisque l’idée est d’accélérer la réactivité et la prise de décision, au plus près des nécessités du terrain, et de responsabiliser les équipes. Le pôle est donc la synthèse entre la réforme du financement et la réforme de gouvernance où la volonté est d’apporter un raisonnement nouveau autour de la responsabilité de gestion. Dès lors, la décision, même médicale, doit intégrer les impératifs de gestion (Penaud, 2008).

La mise en œuvre des pôles n’est autre qu’un processus de mutation organisationnel dans une perspective stratégique (Nobre et Lambert, 2012). En effet, les pôles ont un rôle majeur à jouer dans la mise en place, et l’évaluation de la stratégie, parce qu’ils constituent les entités opérationnelles de cette stratégie, ils sont force de proposition dans le cadre d’une cohérence d’ensemble contrôlée par le conseil exécutif (Penaud, 2008). Le but, rappelons-le, a été d’associer les acteurs du terrain pour qu’ils prennent part à la réussite des réformes. Derrière l’idée de subsidiarité il est question d’imaginer que le « N » est capable de faire mieux que le « N+1 » parce qu’il est plus proche du terrain et moins sujet à la question de l’asymétrie

d’information (Vallet, 2012). Un nouveau dialogue de gestion s’installe, qui permet de mettre en œuvre ce principe de subsidiarité. Par ailleurs, en cas de décision centralisée nécessaire, la gouvernance polaire doit tout de même permettre un raccourcissement réel des circuits de décision et des arbitrages rapides rendant au plus vite aux chefs de pôles leur autonomie dans le cadre des délégations de gestion. La gouvernance déconcentrée doit conduire à une responsabilisation des acteurs, par une gestion au plus près du terrain. Elle légitime les décisions prises au niveau des pôles en associant les responsables médicaux et soignants, et en évitant les écueils d’une gestion trop centralisée (Domy, 2012). Cette transformation suit certains postulats : la délégation et la décentralisation de la prise de décision, l’instauration d’un pilotage médico-économique et la responsabilisation des acteurs (Nobre et Lambert, 2012).

La nouvelle organisation sanitaire doit permettre aux professionnels de santé de se repositionner par une responsabilisation des acteurs autour d’une plus grande efficacité de gestion, à la recherche d’une performance globale (Penaud, 2008). En matière d’organisation du soin, le pôle doit permettre d’orchestrer le circuit du patient autour de filières de prise en charge. Le pôle va pouvoir assurer la communication entre les services en son sein, mais également avec les autres pôles et ainsi établir des filières de soins. Une communication qui devrait garantir un enchaînement des étapes de prise en charge et une meilleure qualité de service, à travers une action coordonnée (Domy, 2012). En effet, l’équilibre financier n’est pas l’objectif final de l’hôpital, mais un moyen pour remplir ses missions, c’est l’expression des pratiques, des organisations et du management. Il est d’abord question d’une amélioration de la qualité des soins dans un schéma stratégique cohérent, axé sur le positionnement dans un environnement donné, la qualité des processus, la disposition de ressources adaptées (la formation des professionnels, la disponibilité des équipements), et enfin, la qualité des ressources (Penaud, 2008).

Le pôle a également pour objectif de devenir le facilitateur de la constitution d’une identité collective et d’une communauté d’intérêts, à un niveau inférieur que celui de l’établissement, plus proche du quotidien (Domy, 2012). Ainsi, l’objectif de la délégation de gestion était d’associer les médecins à la gestion. Du moins, cette notion était présente dans la réforme du 2 mai 2005, avant de s’estomper avec la loi HPST de 2009. Reste l’idée d’associer les chefs de pôle à la gestion des ressources de leurs pôles, avec la possibilité d’engager des dépenses

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en fonction de la délégation de signature que le directeur d’établissement accordera (Bendaira, Calmes et Glardon, 2012).

Si les objectifs de la création des pôles semblent clairs, et sont entendus par de nombreux acteurs, la mise en place de ces organisations reste très hétérogène. En effet, comme nous l’avons évoqué, le déploiement de ces unités reste à la discrétion des établissements qui développent des logiques diverses. On retient que l’idée de regroupement de services répond à plusieurs logiques (De Pourvouville, 2010) :

• un effet d’échelle, qui permet la mutualisation des ressources humaines et des lits

• un encouragement à la coordination des services pour les rendre plus cohérents et optimaux • une logique de transfert de la responsabilité des équilibres financiers sur les équipes médicales

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