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CHAPITRE 1 : DU NOUVEAU MANAGEMENT PUBLIC A L’APPARITION DES POLES D’ACTIVITE MEDICALE : RETOUR SUR L’EVOLUTION DU SERVICE PUBLIC HOSPITALIER

6 Un grand travail de redéfinition des rôles imposé par une nouvelle organisation interne

6.3 Le cadre de santé, coordinateur des activités paramédicales

Le chef de pôle est assisté dans ses missions d’un cadre de santé supérieur de pôle. Le cadre de santé de pôle coordonne les activités paramédicales et encadre les cadres de santé de proximité de l’ensemble des unités qui constituent le pôle. Ce cadre est soumis à deux types d’autorité : fonctionnelle et hiérarchique. Il est sous l’autorité fonctionnelle du chef de pôle mais reste sous l’autorité hiérarchique du directeur des soins et est nommé collaborateur par le chef d’établissement après proposition du chef de pôle. Le cadre de santé se trouve alors dans une situation inédite de responsabilité puisqu’il passe d’une logique d’application des décisions à une logique de responsabilité où il est le décisionnaire au niveau du pôle, ce qui constitue un changement important (Flachère, 2015). En effet la DGOS (2008) voit dans le cadre de santé comme un manager de pôle, aux côtés du chef de pôle.

La DGOS (2008) spécifie les grands domaines d’activité du cadre de santé : • La gestion des ressources humaines paramédicales au niveau du pôle

• L’organisation des soins et des activités du pôle

• La déclinaison du projet de soins institutionnel au niveau des équipes

• La mise en œuvre de la démarche qualité et de l’évaluation des pratiques professionnelles au niveau du pôle

Ce cadre constitue ce que l’on appelle le trio de pôle avec le cadre administratif et le chef de pôle. Il est particulièrement impliqué dans le management des pôles et de leur organisation, dans la mise en œuvre des politiques d’établissement et de pôle. Ce qui les conduit à participer activement en ce qui concerne les soins, l’élaboration du projet de pôle, la contractualisation, et l’analyse et les décisions médico-économiques (Flachère, 2015). Il joue un rôle fondamental d’anticipation des besoins des patients, et contribue à changer les associations normatives et à coupler les nouvelles pratiques avec d’anciennes (Gavault et al, 2014). Toutefois, la loi HPST laisse de côté le détail des missions du cadre de santé de pôle, qui est pourtant un membre essentiel du pilotage du pôle. La création des pôles d’activité s’est accompagnée de celle de cadre de santé de pôle. Si, avec la loi de 2005, le chef de pôle était

assisté dans ses fonctions par un cadre administratif et un cadre de santé de pôle, la loi HPST ne rend plus obligatoire la collaboration du chef de pôle avec un cadre de santé et un cadre administratif. Dans les faits le cadre de santé reste le collaborateur privilégié du chef de pôle (Flachère, 2015).

Le cadre de santé du pôle reste spécifique, il est supposé travailler en binôme avec le chef de pôle et s’autonomiser de la direction des soins et être responsabilisé sur des aspects gestionnaires nouveaux (Flachère, 2015). Ce qui pose là encore la question de l’appropriation du rôle de cadre de santé. Toutefois, cette appropriation semble facilitée car l’encadrement soignant a compris que le pôle lui permet de gagner en autonomie par la délégation aux pôles de la nomination des cadres supérieurs (Bendaira, Calmes et Glardon, 2012). De surcroît, selon Guy Vallet, ce sont les cadres supérieurs de santé qui sont les grands gagnants de la mise en place des pôles, puisqu’ils sont désormais en charge du quotidien du patient, et sont garants du système (2012). Ainsi, les cadres de santé semblent favorables aux pôles (Gavault

et al, 2014).

On note d’ailleurs, chez les cadres, la création d’une entité collective qui reste hétérogène face à la mise en œuvre des réformes (Divay et Gadea, 2008). Cependant, une grande part de la mise en place de la nouvelle gouvernance étant laissée aux établissements, il n’existe pas de pratiques standard, ni même d’uniformisation des pratiques. Ainsi, dans la littérature s’intéressant à l’évolution du travail des cadres de santé le positionnement nouveau de ces acteurs fait débat. Pour certains auteurs l’activité de gestion formalisée (gestion de projet, information des tableaux de bord) est considérée comme occupant un temps croissant, ne laissant pas de place pour « penser le travail » (Detchessahar et Grevin, 2009). Pour d’autres, c’est l’activité de résolution de problème à court terme qui reste l’activité principale, l’activité de gestion formalisée se retrouvant au second plan du travail et des préoccupations des cadres (Coulon, 2011). Si de nouvelles compétences en gestion et organisation des flux de biens et personnes sont développées, il n’en reste pas moins que ce sont les compétences traditionnelles de soins qui légitiment les acteurs du soin (Dumas et Ruiller, 2013). D’ailleurs Bouret (2008) montre que les activités de conception des cadres, consistant à « penser le travail », sont pratiquées en « temps caché », ce qu’il qualifie de travail « invisible ». Il semble alors que la gestion soit une activité cachée du soignant ce qui soulève une question plus large sur l’identité de ces soignants face à la gestion. Pour certains auteurs il s’agit d’une

CHAPITRE 2 : LES POLES D’ACTIVITE MEDICALE, REVUE DE LITTERATURE SUR L’OBJET DE RECHERCHE

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fragilisation identitaire (Pouvourville, 2010) ou au contraire d’un renforcement de l’identité professionnelle (Rivière et al., 2013), ou encore, d’autres font état du faible impact sur l’identité des médecins (Valette & Burellier, 2014).

Le tournant gestionnaire que connaît l’hôpital aujourd’hui aurait selon certains auteurs un impact important et négatif sur le travail des cadres de santé (Detchessahar et Grévin, 2009). Les méthodes de management auraient un impact délétère pour le personnel soignant (Grévin, 2012). Les cadres de santé seraient conduits à délaisser l’encadrement de terrain au profit de l’alimentation de machines de gestion impersonnelles et lointaines. Un constat souligné par Divay et Gadea (2008) ainsi que Dumas et Ruillier (2011). Pour d’autres, comme Coulon (2011) l’activité principale des cadres de santé est au contraire bien l’organisation des soins et non pas le contrôle de gestion. Ce qui rejoint l’idée que les injonctions à la gestion que subissent ces cadres sont contraires à leurs valeurs (Rivière et al., 2013).

6.4 Le cadre administratif, un conseiller de gestion en devenir, aux profils hétérogènes

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