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CHAPITRE 1 : DU NOUVEAU MANAGEMENT PUBLIC A L’APPARITION DES POLES D’ACTIVITE MEDICALE : RETOUR SUR L’EVOLUTION DU SERVICE PUBLIC HOSPITALIER

3 Le découpage des pôles : un enjeu clé de la coordination de l’activité

Le découpage des pôles appartenant à l’établissement, la configuration polaire varie d’une structure à l’autre en fonction du projet et de la stratégie développés par l’établissement. Il n’en reste pas moins que la DHOS et l’ANAP (2010) posent un cadre en rappelant que l’établissement se doit de donner une taille critique aux pôles et se doit d’assurer la cohérence des structures internes. Différentes logiques entrent alors en jeu quant au regroupement des activités. Vont naître des pôles à vocation généraliste, à logique d’organe, à une filière de prise en charge particulière ou encore médicotechniques (Flachère, 2015). Plusieurs choix de découpages sont alors possibles outre la prise en charge et la filière de soins, par opportunités liées aux affinités personnelles ou à la proximité géographique (Bendaira, Calmes et Glardon, 2012). Pour comprendre comment se construit le pôle, n’oublions pas toutefois que le gouvernement nomme les directeurs d’ARS qui interviennent fortement dans la nomination des directeurs, qui nomment les chefs de pôle.

Toutefois ce découpage des pôles n’est pas figé, et pour certains auteurs, il doit être un processus vivant qui s’adapte en fonction des évolutions de la prise en charge et de l’établissement. La constitution d’un projet pertinent à travers le pôle semble corrélée à la

cohérence du découpage, qui doit permettre de dépasser les considérations seules des services, le tout dans une démarche participative et transparente. La question du découpage des pôles soulève plusieurs interrogations autour de la taille spécifique des pôles, des impacts budgétaires du découpage et de la place des pôles prestataires. Quand on parle de découpage du pôle, vient assez rapidement la question de la taille que celui-ci doit avoir. En théorie, selon Bendaira, Calmes et Glardon (2012) un pôle de taille critique doit être suffisamment grand pour conduire une politique de gestion, ils parlent d’une moyenne de 200 agents en Equivalents Temps Plein (ETP). L’enjeu du pôle doit être de garantir une logique de soins, axée sur la prise en charge du patient, la filière, l’organe et le parcours de soins, or cette logique est parfois concurrencée par d’autres, d’ordre pratique ou relationnel, ce qui voue à l’échec certains découpages et entraîne des redécoupages. En effet, la pression de l’injonction législative a poussé parfois à des découpages de fortune, et les enjeux de pouvoirs pour les chefs de services et les responsables de pôles ont entraîné des résistances. Comme le rappellent Bendaira, Calmes et Glardon (2012) l’aspect relationnel entre les différents chefs de services semble déterminant dans le découpage des pôles, pour des questions d’affinités ou d’antagonismes. Une considération qui n’est pas en lien direct avec le soin et qui entraîne parfois des découpages en décalage avec la logique du projet médical.

Vient ensuite la question de l’articulation avec les politiques institutionnelles conduites par l’établissement, le pôle se rapproche-t-il du modèle de la PME ou de la filiale ? (Penaud, 2008). La création des pôles n’aboutit pas à la création de business units rassemblées au sein d’un groupe hospitalier (Channet et al., 2009). Les pôles-PME, sortes de petites entreprises indépendantes, sont pilotés à partir de leurs comptes de résultats, ce sont généralement des pôles chirurgicaux, mais ce mode de pilotage présente des limites. En effet, le pôle ne maîtrise pas tous les éléments constituant son résultat. Le pôle-PME est dans l’esprit novateur, et fortement responsabilisant, mais présente des limites pratiques. Les responsables de pôle ne disposent pas de la maîtrise des tarifs, l’augmentation de l’activité se heurte aux limites physiques de capacité d’accueil, c’est l’établissement qui est rémunéré et non le pôle directement, enfin un pôle ne maîtrise pas la chaîne d’ensemble de la prise en charge des patients. Dans le pôle-PME, la stratégie est centrée sur le seul lien entre activité et résultat économique, ce qui en réalité, à l’hôpital, a peu de sens. Penaud (2008) lui préfère donc le modèle pôle-filiale. Dans ce modèle, le pilotage est centré sur l’équilibre entre quatre axes stratégiques : la place du pôle dans un environnement donné, la qualité des processus de

CHAPITRE 2 : LES POLES D’ACTIVITE MEDICALE, REVUE DE LITTERATURE SUR L’OBJET DE RECHERCHE

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soins, la mobilisation de ressources adaptées et enfin l’équilibre financier – qui n’est pas une fin en soi mais un moyen pour le pôle de remplir ses missions. L’idée d’un modèle entrepreneurial ne garantit pas pour autant une augmentation de la performance hospitalière (Channet et al., 2009).

Si la volonté des pouvoirs publics était de décloisonner les services en les réunissant à travers les pôles, certains auteurs parlent d’un recloisonnement des pôles, ce qui se traduit par une perte en terme de transversalité (Bendaira, Calmes et Glardon, 2012).

Depuis la création des pôles, leur nombre a tendanciellement diminué, passant de 4000 en 2008 à 3458 en 2011. Cette diminution est due à certains redécoupages sur la volonté d’une plus grande cohérence avec le projet médical. Cette volonté de mieux dimensionner les pôles est notamment issue de la loi HPST de 2009 et de la demande de pilotage auprès des pôles. Tous les établissements ne sont pas passés au fonctionnement en pôles, notamment à cause du peu de recul sur cette pratique très nouvelle. En effet, 62% d’entre eux étaient en pôles en novembre 2006, et seulement 77% en 2011. Si les pôles constituent un acquis pour les établissements, ils doivent désormais définir les équilibres entre logique polaire et logique d’établissement pour assurer une cohérence institutionnelle (Bendaira, Calmes et Glardon, 2012).

La réussite du découpage passe par la conciliation de logiques de regroupement avec un suivi du fonctionnement et l’intégration du projet du pôle dans la mise en œuvre du projet médical d’établissement sans omettre l’association des personnels à la démarche, le tout en étant un processus vivant qui s’adapte aux évolutions. Par ailleurs, l’ouverture d’un nouveau bâtiment est parfois l’occasion d’un réajustement du découpage (Bendaira, Calmes et Glardon, 2012). L’IGAS recommande en 2010 une révision du découpage à échéances régulières tous les cinq ans.

Selon Channet et al., (2009), l’attention portée au découpage des pôles est primordiale car il existerait une corrélation entre la logique de découpage retenue et les difficultés de management exprimées. En effet, selon ces auteurs le management par pôles se met en place

progressivement mais reste à stabiliser. Ce qui nécessite « de réfléchir aux liens entre le pôle

et les services qui le composent, ainsi qu’à une redéfinition parfois nécessaire du découpage polaire » (Channet et al., 2009, p.18).

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