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D’un point de vue œnologique, la structure de la baie est décrite en trois compartiments : la pulpe, la pellicule et les pépins. Le nombre de pépins est en moyenne de 2 par baie (Galet, 1993) mais varie sensiblement en fonction des cépages et des conditions de la fécondation. Les pépins sont situés dans les loges carpellaires de la baie délimitées par

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l’endocarpe (fine couche de cellules). Chez Vitis vinifera, les pépins sont généralement piriformes et possèdent une symétrie dorso-ventrale. La face ventrale présente deux dépressions séparées par une arête, le raphé, qui contourne la graine et se prolonge sur la face dorsale, dans la chalaze où il se ramifie. Le pépin de raisin fait partie des graines albuminées, c’est-à-dire que chaque pépin est composé d’un embryon entouré d’un albumen et d’une enveloppe externe formée de deux téguments. Le tégument externe est recouvert d’une cuticule et il est formé de 3 types de tissus (un épiderme, un parenchyme à paroi pecto-cellulosique et un tissus interne fortement lignifié). Le tégument interne est constitué de plusieurs assises cellulaires pecto-cellulosiques (Figure 34) (Ristic et al., 2005).

Figure 34. Schéma de la face ventrale a et dorsale b d’un pépin de raisin à maturité. Coupe

centrale transversale c et longitudinale d (Ristic et al., 2005).

2. Physiologie

Trois phases de modifications histologiques, entraînant des variations physico-chimiques, sont constatées au cours de la croissance et du développement du pépin de raisin. Avant tout, le nombre de pépins dépend du bon déroulement de la fécondation. Si celle-ci ne s’effectue pas dans de bonnes conditions, elle peut conduire à des baies sans pépins (apyrénie). La première phase de croissance se caractérise par l’apparence verte du pépin, en raison de la prédominance de la chlorophylle. Cette phase s’accompagne d’une augmentation

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du poids des pépins, d’un enrichissement en acides organiques, d’une accumulation de flavanols et de tanins dans l’enveloppe externe et interne du tégument du pépin (Darné, 1991). Puis, la phase de croissance ralentie, les teneurs en hormones de croissance chutent et laissent place à une hormone de stress, l’acide abscissique (ABA). L’augmentation des teneurs en ABA correspond à la levée d’inhibition des activités enzymatiques impliquées dans l’accumulation des sucres dans les vacuoles des cellules de la pulpe. Le pic de la concentration en ABA correspond à la véraison. Les baies changent de couleurs, les flavanols et les tanins du pépin atteignent alors leur teneur maximale et le début de l’oxydation des tanins est observé avec l’apparition d’une coloration jaunâtre du pépin. Ce dernier se déshydrate, ce qui engendre une perte de poids. Le tégument se lignifie et la couche externe se plasmolyse. L’oxydation des composés phénoliques présents dans le tégument conduit à la coloration brune des pépins (Kennedy et al., 2000 ; Cadot et al., 2006a). Débute alors la dernière phase de croissance qui correspond à la maturation des raisins. L’accroissement cellulaire reprend et des modifications physiologiques sont observées. La baie accumule des éléments minéraux, des acides aminés et des composés phénoliques par la voie de biosynthèse de l’acide shikimique.

3. Composition biochimique

Les pépins représentent 0 à 6 % du poids total de la baie. La composition biochimique moyenne du pépin mature est donnée dans le Tableau 38.

Tableau 38. Composition biochimique des pépins en pourcentage de poids frais (Cabanis et al., 1998). Composé % Eau 25-45 Glucides 34-36 Lipides 8-13 Polyphénols 4-10 Composés Azotés 4-6,5 Minéraux 2-4

Les principales catégories de composés phénoliques retrouvés dans le pépin sont les suivantes :

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- les acides phénoliques (Figure 35) : cette catégorie de molécules correspond aux dérivés de

l’acide hydroxybenzoïque (acide gallique) et hydroxycinnamique (acide caféique). Le composé majoritaire de cette famille de polyphénols dans le pépin de raisin est l’acide gallique. L’acide gallique est rarement présent sous sa forme libre et il est le plus souvent estérifié à un flavanol (Flanzy, 1998).

- les flavonoïdes : les principaux flavonoïdes situés dans le pépin sont les flavan-3-ols (Kennedy et al., 2000) (Figure 35), tels que la catéchine et l’epi-catéchine. Les flavanols sont présents sous forme libre ou estérifiée à l’acide gallique et sont les unités monomériques constitutives des formes polymérisées, les tanins condensés, tels que les procyanidines (Rebello et al., 2013) (Figure 35). Ils sont généralement présents sous forme de dimères ou de trimères (Fuleki et al., 1997 ; Yilmaz et al., 2004) ainsi qu’à des degrés de polymérisation supérieurs (Hayasaka et al., 2003 ; J. Shi et al., 2003a ; Kalili et al., 2013). Les proportions des unités constitutives des tanins sont différentes entre la pellicule et le pépin. Les tanins des pépins ne sont constitués que de procyanidines et sont caractérisés par un taux de galloylation plus élevé (Moutounet et al., 1996 ; Brossaud et al., 1999) et un degré de polymérisation moyen (DPm) plus faible (Prieur et al., 1994 ; Souquet et al., 1996) que les tanins de pellicules.

Figure 35. Squelettes des structures chimiques des acides phénoliques (a), des flavan-3-ols (b) et des tanins condensés (exemple d’un dimère de type B) (c).

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Les teneurs des pépins de raisin en flavonoïdes ont été largement étudiées (Oszmianski

et al., 1989 ; Ricardo da Silva et al., 1991 ; Escribano-Bailon et al., 1992 ; Santos-Buelga et al., 1995 ; Fuleki et al., 1997 ; V. A. P. De Freitas et al., 1999 ; Gabetta et al., 2000 ;

Kennedy et al., 2000 ; Gény et al., 2003 ; Guendez et al., 2005). Les gammes de concentration des principaux composés phénoliques, mesurées sur des pépins à maturité, sont reportées dans le Tableau 39. Ces concentrations sont données à titre indicatif mais peuvent varier selon l’état de maturité des pépins (Ristic et al., 2005) et en fonction des cépages (Fuleki et al., 1997 ; Xu et al., 2010).

Tableau 39. Concentrations en composés phénoliques reportées par Fuleki et al. dans des

pépins à maturité de plusieurs cépages (Fuleki et al., 1997).

Composé Concentration (mg/100g de pépins)

(+)-catéchine 21 à 244 (-)-épi-catéchine 23 à 284 Procyanidine B1 3 à 62 Procyanidine B2 9 à 106 Procyanidine B3 0 à 71 Procyanidine B4 2 à 149 Procyanidine B1-3-O-gallate 0 à 74 Procyanidine C1 0 à 10 Procyanidine T2 0 à 76

Dans la baie, les tanins de pépins sont plus abondants que les tanins de pellicules. Bien que les tanins de pépins soient moins extractibles que ceux des pellicules, ils représentent une proportion importante des tanins du vin (Kennedy, 2008).

4. Localisation tissulaire des composés majoritaires

A l’exception des composés glucidiques qui se répartissent dans tous les tissus du pépin, les protéines et les lipides sont exclusivement localisés dans l’albumen. Ce dernier est protégé par le tégument du pépin, qui présente un aspect rigide composé en grande partie de lignine. Ce composé est présent uniquement au niveau du tégument intermédiaire chez le pépin de raisin (Cadot et al., 2006a) et est responsable de la dureté de la graine. Selon Cadot

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échanges gazeux avec le milieu extérieur et une protection vis-à-vis des insectes et champignons (Cadot et al., 2006a).

Les composés phénoliques du pépin, acides phénoliques, flavanols et tanins, sont majoritairement présents au niveau du tégument interne et du tégument externe jusqu’à la cuticule (Amrani Joutei et al., 1995 ; Cadot et al., 2006a ; Rustioni, 2016). Une faible proportion de ces composés (6 %) a également été localisée dans l’albumen (Xu et al., 2010). Thorngate et Singleton ont localisé les tanins de pépins des variétés Pinot noir et Cabernet-Sauvignon dans la couche externe des cellules du tégument, alors que la plupart des flavan-3-ols monomériques sont situés dans l’enveloppe externe et interne du tégument. Les concentrations des flavan-3-ols monomériques semblent varier selon les cépages. Par exemple, des teneurs plus élevées sont mesurées dans les pépins du Pinot noir que dans ceux du Cabernet-Sauvignon (Thorngate et al., 1994). Plus récemment, des coupes histologiques de pépins de Cabernet franc ont montré que la présence de flavanols est liée aux changements des parois cellulaires du tégument externe des pépins (Minana Castello et al., 2006).

Les polyphénols étant des métabolites secondaires, leur quantité et leur répartition dans le pépin dépendent en grande partie du terroir, du millésime (conditions climatiques et de culture), du cépage ainsi que du degré de maturité des pépins (J. Shi et al., 2003a).

B. Facteurs influençant la composition et la qualité organoleptique du vin