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Étude de la contribution de l’autolyse des levures au gain de douceur observé lors de

1. Réalisation de l’autolyse des levures au laboratoire dans la modalité FA

Au cours de la MPFC, deux phénomènes se déroulent de façon simultanée : l’autolyse des levures, essentiellement présente dans le marc, et la diffusion de constituants du raisin. La modalité MPF a subi la macération post-fermentaire et a donc bénéficié de ces deux phénomènes, tandis que la modalité FA, écoulée dès l’achèvement de la fermentation alcoolique, n’a profité d’aucun d’entre eux. Afin d’établir la contribution de la libération de peptides édulcorants de la levure, une autolyse est réalisée en phase liquide, à partir de la modalité FA. Les travaux antérieurs ont montré que des différences significatives étaient observées entre un vin rouge témoin et le même vin enrichi en levures et conservé pendant 10 jours à 30 °C, c’est-à-dire dans les conditions favorables à l’autolyse des levures ; un tel traitement entraîne un gain significatif de sucrosité (Marchal et al., 2015c). Dans le cadre de ce travail, ce protocole d’autolyse a été réalisé au laboratoire sur la modalité FA des séries de la première année d’expérimentation (M1, M2, M3). Une modalité FA+L a ainsi été obtenue.

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Par rapport à la modalité FA, elle a bénéficié de la libération de peptides de levure et par rapport à la modalité MPF, elle n’a pas été au contact du marc de raisin pendant la MPFC. En comparant les modalités FA+L et MPF, il est donc possible d’étudier la contribution sensorielle des composés du raisin libérés ou modifiés pendant la MPFC, indépendamment de ceux de la levure.

2. Vérification du déroulement de l’autolyse des levures dans les modalités MPF et FA+L

Il est en effet couramment admis que c’est au cours de la MPFC qu’a lieu l’autolyse des levures dans les vins rouges (Fornairon-Bonnefond et al., 2002) puisque les conditions de température sont favorables à l’activité enzymatique et que l’essentiel de la biomasse, située dans le marc de raisin, est éliminée lors du décuvage. Toutefois, nous avons voulu vérifier que les conditions mises en œuvre dans cette expérimentation 1 vérifiaient cette opinion. Pour cela, des échantillons des trois modalités de la série M1 ont été confiés au Dr. Néréa Iturmendi de la société Biolaffort afin d’y doser les mannoprotéines de la levure. Ces macromolécules constituent en effet un indicateur du déroulement de l’autolyse. Elles peuvent être quantifiées selon un protocole fastidieux nécessitant l’isolement des macromolécules par filtrations et dialyses successives puis leur analyse par HPLC de tamisage moléculaire. Compte tenu de la longueur du protocole et des conditions d’autolyse identiques appliquées aux trois séries, une seule d’entre elles (M1) a été analysée, avec quatre réplicats pour chaque modalité. Les résultats sont traités statistiquement par une ANOVA à un facteur, suivie d’un test post hoc de Tukey. L’ANOVA présente une p-value inférieure à 0,01 ce qui signifie qu’au moins une des trois modalités présente des teneurs en mannoprotéines significativement différente des deux autres au risque de 1 %. En effet, le test post hoc de Tukey, montre la formation de 2 groupes. Le groupe a, formé par les modalités FA+L et MPF, et le groupe b, formé par la modalité FA. Ainsi, des teneurs en mannoprotéines similaires sont observées dans les modalités MPF et FA+L, tandis que la modalité FA en comporte significativement moins. Ces résultats confirment que l’autolyse des levures a eu lieu au cours de la MPFC (comparaison FA/MPF) et lors du traitement au laboratoire (comparaison FA/FA+L).

3. Comparaison sensorielle des modalités MPF et FA+L

Dans un premier temps, il est demandé au panel de dégustateurs de réaliser un test triangulaire sur les modalités FA+L et MPF. Les résultats sont présentés dans le Tableau 33. Pour les trois séries, M1, M2 et M3, des différences significatives sont observées entre les

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échantillons, plus de la moitié du panel identifiant correctement le verre différent des deux autres.

Tableau 33. Résultats des tests triangulaires de l’expérimentation 1 ; Étude de la contribution

de l’autolyse des levures au gain de douceur observé lors de la MPFC.

Modalités FA+L/MPF

Série M1 M2 M3

Nombre de bonnes réponses /30 juges 17 15 19

Significativité α 1 % 5 % 0,1 %

De la même manière que précédemment, afin de vérifier la nature de cette différence, il est demandé au panel de noter l’intensité de la douceur et de l’astringence perçue. Les résultats sont traités par une ANOVA (Tableau 34).

Tableau 34. Résultats des profils sensoriels de l’expérimentation 1 ; Étude de la contribution

de l’autolyse des levures au gain de douceur observé lors de la MPFC Descripteur

Douceur

Série M1 M2 M3

Modalité FA+L MPF FA+L MPF FA+L MPF

Moyenne des intensités a 1,5 2,7 1,7 2,9 1,3 2,7

ANOVA p-value 0,0332* 0,013* 0,021*

Descripteur Astringence

Série M1 M2 M3

Modalité FA+L MPF FA+L MPF FA+L MPF

Moyenne des intensités a 2,6 1,8 3 1,8 2,2 1,9

ANOVA p-value 0,023* <0,001*** 0,404 NS

a

Moyenne des notations des dégustateurs sur une échelle de 0 à 7.

NS : Non Significatif ; Significatif au risque de 5 % (*), de 1 % (**) et de 0,1 % (***).

Pour le descripteur « douceur », toutes les ANOVA montrent des différences significatives entre les modalités FA+L et MPF de chaque série, avec une p-value inférieure

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à 5 %. Les moyennes des notes attribuées sont plus élevées dans les modalités MPF que dans les modalités FA+L. Pour le descripteur « astringence », les différences observées sont significatives pour les séries M1 et M2 et non significatives pour la série M3. En outre, les notes attribuées par les juges révèlent une astringence moindre dans les modalités MPF des séries M1 et M2.

C. Discussion

La mise en œuvre d’une expérimentation en conditions réelles, dans trois propriétés, sur deux millésimes et à partir de six parcelles a permis d’établir un gain de sucrosité et une diminution d’astringence des vins rouges au cours de la MPFC. Or, l’autolyse des levures a lieu au cours de cette étape, et ce phénomène est justement connu pour augmenter la sucrosité et réduire l’astringence, respectivement par la libération de peptides sucrés (Marchal et al., 2011a) et de polysaccharides interagissant avec les composés phénoliques (Escot et al., 2001 ; Carvalho et al., 2006 ; Poncet-Legrand et al., 2007).

Une étude réalisée au laboratoire a permis d’isoler la contribution sensorielle de l’autolyse. Les modalités FA+L et MPF ont toutes les deux subi ce processus biochimique, mais seule la modalité MPF a bénéficié du contact des parties solides du raisin pendant la MPFC. Dans des conditions similaires, une saveur sucrée plus intense avait déjà été observée dans la modalité FA+L que dans FA. Dans ce travail, la comparaison sensorielle FA+L/MPF révèle encore davantage de sucrosité dans la modalité MPF. Ce résultat démontre que le gain de sucrosité observé pendant la MPFC résulte d’une part de l’autolyse des levures mais également du contact du vin avec le marc de raisin. Deux hypothèses peuvent expliquer ce fait : la libération de molécules édulcorantes du raisin ou la transformation de composés du vin en substances gustativement actives. Dans les deux cas, ce travail établit la contribution du raisin à la saveur sucrée des vins secs et démontre ainsi une intuition partagée par certains vinificateurs depuis longtemps.

La même étude a également porté sur la perception de l’astringence et les résultats semblent moins nets. En effet, des écarts sont observés entre FA+L et MPF pour les séries M1 et M2 tandis que pour la série M3, il semblerait que l’autolyse soit essentiellement responsable de la diminution de la perception astringente. Ces résultats sont cohérents avec des études précédentes évoquant le rôle de l’autolyse via la libération de polysaccharides de la levure susceptibles d’interagir avec les composés phénoliques (Escot et al., 2001 ; Carvalho et

al., 2006 ; Poncet-Legrand et al., 2007). Ils peuvent également être expliqués par la

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et al., 2015), qui pourrait avoir lieu dans les deux modalités de notre étude. En revanche, les

différences observées pour les séries M1 et M2 semblent suggérer un rôle des parties solides du raisin, éventuellement dans la refixation de tanins du vin ou la libération de composés interagissant avec les substances astringentes.

IV. Étude de l’effet de la durée de MPFC sur le goût ; cas d’une propriété de Pessac-Léognan dans le millésime 2015