Ouverture

Dans une perspective plus actuelle, il peut être à présent intéressant de se risquer à appliquer le schéma-type des mécanismes sociaux élaboré au long de ce mémoire à notre société contemporaine.

La croissance fulgurante des technologies de l’information et de la communication depuis les années 1990 a conduit à une mutation importante dans les modes de vie. Il s’agit bien d’une révolution des mœurs puisqu’elle a engendré un accès décuplé à l’information, une accélération considérable du temps, ainsi qu’un accroissement important des relations virtuelles entre êtres humains. On va même jusqu’à parler d’une « ère de la communication ».

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Mais depuis la fin des années 2000, cette nouvelle ère s’est accompagnée d’une crise financière, transformée depuis en crise économique. A ceci s’ajoute la prise de conscience récente d’une menace écologique de grande ampleur. On peut donc émettre l’hypothèse d’une crise sociale caractérisée par une perception des limites de la société de consommation et du système économique néolibéral.

Cependant, contrairement à d’autres époques, les angoisses sociales occidentales ne semblent pas focalisées sur la jeunesse, mais sur différents groupes et événements (en particulier le terrorisme et la crise économique connue par la plupart des pays occidentaux). Il s’agit donc plutôt d’une inquiétude générale face à une instabilité sociale menaçante. Il semble donc que, malgré un contexte similaire, le schéma ne se répète pas aujourd’hui de la même manière, puisque nous n’assistons pas vraiment à une opposition entre jeunes et adultes. Néanmoins, il est possible que nous n’ayons pas encore assez de recul pour l’observer…

En effet, si l’on s’intéresse plus particulièrement à la jeunesse actuelle, on peut augurer qu’elle connait une forme de « crise d’appartenance » telle que le décrit le professeur Didier Pingeon (2010, p. 144). Ces adolescents sont confrontés à une société adulte qui ne les accueille pas vraiment, comme le montrent l’ampleur du chômage des jeunes et l’affaiblissement de la reconnaissance des diplômes.

En regard de la société des années 1950-1960, nous pouvons observer qu’une majeure partie des adultes aujourd’hui en Occident n’a connu que le système néo-libéral mettant en avant les loisirs, la consommation et l’individualisme. Ces adultes se différencient de ceux des archives qui, pour beaucoup, avaient intériorisé des valeurs traditionnelles (travail, famille) qu’ils ont tenté d’inculquer aux jeunes de l’après-guerre, souvent maladroitement certes, mais dans une perspective relativement paternaliste. Or, cette transmission de la tradition, bien qu’elle restreigne la liberté de la jeunesse et qu’elle mérite peut-être d’être remise en question, avait l’avantage d’inclure la jeunesse dans la société adulte et de lui donner une place, une identité, un rôle. Ce sentiment d’appartenance à une collectivité induite par les adultes semble plus rare de nos jours en Occident, à part au sein de certaines communautés (culturelles, sportives, spirituelles, etc.).

De plus, la crise sociale actuelle peut engendrer une certaine résignation de la part des adultes. Désabusée, une partie d’entre eux ne croirait plus en la société telle qu’elle existe et transmettrait sans engouement ou avec cynisme les « valeurs » qui la caractérisent.

Le jeune d’aujourd’hui serait donc confronté à des adultes souvent désillusionnés, qui lui proposeraient des modes de vie peu inclusifs (loisirs, consommation) ne favorisant plus son rattachement à un groupe par lequel il serait accueilli et reconnu. Ceci expliquerait pourquoi une partie de la jeunesse actuelle ferait le choix d’adhérer à des communautés souvent extrémistes, qui prônent des valeurs et une identité forte, procurant un sentiment d’appartenance. Ceci éclairerait également les comportements de certains jeunes (souvent isolés) qui utiliseraient les moyens virtuels ou la drogue comme vecteurs d’évasion, face à une réalité austère et une société peu attractive.

Mais dans la situation actuelle, nous choisissons d’émettre l’hypothèse qu’il existe une jeunesse idéaliste qui, même si elle est encore peu visible, se rassemblerait peu à peu autour d’une tentative de sortie de l’impasse économique, écologique et sociale que nous connaissons.

Nous achèverons ce mémoire en citant le poète André Breton (1988) : « C’est dans la douce évasion nommée avenir, évasion toujours possible, que se résorbent les astres penchés jusque-là sur notre détresse ».

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ANNEXE 1 : Corpus des sources