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Une justice éducative et bienveillante pour les mineurs délinquants

CHAPITRE 4 : Quelle action privilégier en matière de délinquance juvénile ?

B) Une justice éducative et bienveillante pour les mineurs délinquants

Que faire de cette enfance délinquante, de ces « chiens perdus sans collier »195 ? Telle est la question de Gilbert Cesbron, faisant référence à son livre éponyme paru en 1954 qui raconte comment un juge pour enfant sauve un jeune de la spirale de la délinquance.

Mais avant d’aborder cette nouvelle partie sur les représentations suisses quant à l’action dans le domaine de la délinquance juvénile, revenons au système pénal des mineurs tel qu’il fonctionne en France dans les années 1950-1960, afin de bien interpréter les discours des intervenants de ce pays présents dans les archives suisses. La France s’inscrit dans les tendances occidentales, instaurant dès les début du XXème siècle un système pénal propre au mineurs (« éducation surveillée ») et développant, au lendemain de la seconde Guerre Mondiale, un véritable « complexe tutélaire » de prévention et de prise en charge éducative de la jeunesse délinquante (Bailleau, 2002, p. 406). Ainsi, marquée par la vague psychologique

195 Document n°22, 1954, radio.

du début du siècle, le « diagnostic » et le traitement de la délinquance est accompagné par des professionnels liés à ce champs (thérapeutes, psychiatres, médecins) mais le postulat d’éducabilité des jeunes délinquants devient rapidement la priorité de la justice des mineurs dans les années 1950-1960 et encourage l’éducation et la socialisation dans le cadre de familles ou de foyers ouverts plutôt qu’en établissement de détention (Bailleau, 2002).

Visiblement moins engagée dans la prospection psychologique ou psychiatrique de la délinquance des jeunes (d’après la littérature des auteurs suisses et les archives analysées dans le cadre de ce mémoire), la Suisse se caractérise tout au long du siècle par une approche paternaliste et éducative de la délinquance juvénile. Les mesures suisses face à la délinquance des jeunes sont donc semblables à celles pratiquées en France (et énoncées précédemment) dans les années 1950-1960, puisqu’alors, la plupart des pays occidentaux adoptent une approche compréhensive et éducative de la délinquance juvénile dans son traitement pénal. Il est cependant difficile de définir précisément ces pratiques et ces structures puisque, comme nous l’avons vu précédemment, chaque canton possède ses procédures et ses établissements propres en matière de justice des mineurs.

Face à cette « mouvance éducative » de la justice, il est surprenant de constater que les hommes de justice intervenants dans les archives défendent un système d’action qui réprime avec force les actes délinquants. Le juge pour enfant Roland Berger décrit par exemple l’importance du « choc » vécu par les délinquants lors de leur arrestation, qui les rend conscients de leur faute196. Il relativise l’efficacité de la législation des mineurs délinquants, qui doit être revue, mais insiste sur le fait qu’il serait difficile d’avoir un système pénal plus performant que celui qui est en place.

196 Document n°11, 1965, télévision.

Roland Berger parlant de la nécessité d’un « choc » lors de l’arrestation d’un jeune délinquant (reportage sur la délinquance juvénile suisse en 1965)197

Le policier français Jacques Ternet regrette quant à lui que les résidences surveillées pour mineurs délinquants ne soient pas plus sécurisées (laissant trop de liberté aux jeunes qui pourraient s’évader facilement) et que les lois ne soient pas assez « brutales » pour lutter efficacement contre la délinquance juvénile.

Le témoignage de ces intervenants nous montre donc que, même si le système pénal prône une justice compréhensive et réparatrice, certains encouragent tout de même des mesures dissuasives fortes, qui s’apparentent plus à la justice des mineurs d’autres pays occidentaux du début du XXème siècle. Ces mesures traduisent l’importance que ces intervenants donnent au fait de « marquer » le jeune délinquant pour le dissuader d’une éventuelle récidive. Mais elles montrent peut-être aussi une volonté d’écarter les délinquants du reste de la population pour qu’ils ne la menacent pas. D’ailleurs, il est intéressant de constater que la plupart de ceux qui recommandent une justice répressive sont sceptiques par rapport à la réinsertion de la jeunesse délinquante.

Ternet parle de la difficulté que représente la « récupération » des jeunes qui ont connu cette « chute sans rémission » de la délinquance, en particulier celle des jeunes filles (comparées à des « petites montres » alors que les garçons seraient des « grosses horloges » à qui il suffirait de donner un « coup de marteau » pour les refaire fonctionner)198. Plusieurs journalistes montrent également leur doute face à la réinsertion des jeunes délinquants à

197 Document n°11, 1965, télévision.

198 Document n°28, 1962, radio.

travers des interrogations récurrentes aux instigateurs et gérants de foyers de seconde chance (« combien sont récupérés ? », « pépins », « coups durs »199, « pourcentage d’échec »200, etc.).

Lors d’une interview en 1965 de l’auteur français Alphonse Boudard, sur sa jeunesse délinquante et son vécu carcéral (sujet de son livre paru deux ans plus tôt), Jean-Pierre Goretta (journaliste de la radio suisse), lui demande par exemple si après tout ce temps passé en prison, il se considère comme un « honnête homme » et s’il n’a pas l’impression d’être une exception, par rapport à la plupart des délinquants qui ne parviennent pas à se réinsérer dans la société201. A l’occasion de l’une des émissions de radio de la chronique « Tous responsables ! », Fernand Dominicé, député libéral au grand conseil de Genève manifeste son étonnement face aux liens créés entre certains jeunes de foyer et la population locale, ce qui traduit, une fois encore, un certain scepticisme par rapport à la capacité de la jeunesse délinquante, à retrouver une vie et des relations sociales saines après avoir purgé leur peine202. Boudard, bien qu’il confie sa nostalgie de sa vie de délinquant qui était plus « exaltante », va dans ce sens en expliquant qu’il a réussi à tirer parti de son expérience en prison et qu’il a pu ainsi « prendre une revanche contre le mauvais sort »203. Il démontre ainsi que c’est grâce à sa détermination qu’il a pu sortir de la délinquance et non une quelconque structure qui l’aurait accompagné dans ce processus.

En résumé, ces intervenants sont dubitatifs face aux structures de réinsertion et autres formes de foyers ouverts ou procédés éducatifs qui favorisent une réintégration des jeunes délinquants à la société, propres à la justice pénale suisse des mineurs. Ils soutiennent une justice punitive dont la priorité est d’empêcher ces jeunes de nuire, considérant que certains délinquants plus aptes et plus motivés pourront se réinsérer dans la société, mais seront minoritaires par rapport aux autres qui devront être surveillés, afin de ne pas menacer la population. Néanmoins, les interlocuteurs présentant cette opinion constituent une minorité par rapport à ceux qui s’inscrivent dans le mouvement occidental de justice pénale des années 1950, qui prône un traitement de la délinquance par des mesures d’accompagnement éducatif.

Ainsi, plusieurs intervenants français ayant connu le système pénal des mineurs avant la mouvance éducative occidentale des années 1950-1960, observent les progrès d’une justice

199 Document n°33, 1966, radio.

200 Document n°28, 1962, radio.

201 Document n°39, 1965, radio.

202 Document n°23, 1959, radio.

203 Document n°39, 1959, radio.

plus compréhensive, qui selon eux, est plus efficace. Boudard salue par exemple les efforts du système carcéral qui, à l’aube des années soixante, appuie plus les jeunes dans leur réintégration204. L’écrivain Gilbert Cesbron relève quant à lui les chiffres de la délinquance juvénile (« 14 000 enfants de justice » par an en France) qui sont en baisse, tout en insistant sur les progrès de la justice des mineurs qui est passée des « barreaux » aux « fenêtres et aux fleurs dans les dortoirs » en quelques décennies205. Son intervieweur suisse, Dominique Fabre, abonde dans ce sens, s’exclamant : « on est très loin de l’époque des bagnes pour enfants », et soulignant ainsi les progrès des structures de détention pour mineurs. Ternet, lui-même plus porté sur une justice sévère quant à la question délinquante, reconnait l’importance du rôle bienveillant et tolérant des juges pour enfants : « Ce sont des éducateurs dans le sens le plus noble du mot : dévoués, compréhensifs, indulgents »206. Le policier français témoigne ici du changement de statut du juge pour enfants propre à la transition éducative de la justice des mineurs des années 1950-1960 en Occident.

En outre, la vie en foyers relativement ouverts (où les relations avec l’extérieur sont encouragées) dans lesquels les jeunes sont encadrés par des adultes jouant le rôle d’éducateur est largement soutenue par les adultes intervenants des archives de cette époque.

Le foyer parisien des « Epinettes » du père Jaouen en est un exemple207. Le prêtre présente dans son interview en 1966 les atouts de ce foyer qui s’emploie à redonner à ses pensionnaires une confiance en leurs capacités d’action positive, à leur trouver un travail auprès d’employeurs « normaux » (et non un emploi de réinsertion) et qui les encourage à créer des liens avec l’extérieur (accueil d’autres jeunes dans le foyer etc.). Il le différencie ainsi des maisons de corrections ou centres de redressement français (centres fermés) qui stigmatisent selon lui les jeunes délinquants qui s’y trouvent et les coupent du monde, leur procurant ainsi de trop faibles opportunités de réintégration d’une vie normale, de regain d’estime de soi et de confiance à l’égard des adultes. Jaouen relève également l’importance de l’accompagnement d’un adulte qui ne doit pas être un policier (ou un équivalent au regard du jeune) mais une personne en qui il peut faire confiance et qui ne risque pas d’utiliser cette confiance contre lui. C’est aussi ce qu’il reproche aux centres de détention pour mineurs.

204 Document n°39, 1959, radio.

205 Document n°22, 1954, radio.

206 Document n°28, 1962, radio.

207 Document n°33, 1966, radio.

Le directeur de foyer suisse, Jean Caviezel, présente lui aussi, en 1965, les atouts des foyers de semi-liberté, qui constituent une forme de « communauté familiale » grâce aux éducateurs qui jouent le rôle d’adulte, de père référent et de modèle, à qui ils peuvent se confier208. Un jeune de foyer suisse209 manifeste d’ailleurs sa satisfaction à l’égard de la relation de camaraderie qu’il entretient avec les adultes du foyer, contrairement au schéma courant « éducateurs-élèves ». Il montre aussi une certaine confiance en sa capacité de se réinsérer dans la société grâce à l’expérience « d’entraide » vécue dans cet établissement210. Ces foyers sont donc engagés dans la réinsertion professionnelle, tentant de réintégrer les jeunes délinquants à la société par le travail.

Jeune de foyer suisse effectuant une formation professionnelle en vue de se réinsérer (ce film accompagne les paroles de l’adolescent)211

En bref, on prône de plus en plus une prise en charge des adolescents délinquants qui tente de recréer un cadre familial rassurant, où une place important est donnée à l’expression de chacun212 et qui promeut des possibilités d’apprentissage213 et de professionnalisation en vue d’une réinsertion efficace.

Ayant participé à la réorganisation et à l’élaboration de lois sur la formation professionnelle et le travail des mineurs à Genève, Raymond Uldry, défend quant à lui, l’idée

208 Document n°11, 1965, télévision.

209 Nom non présent dans les archives de la RTS.

210 Document n°3a, 1968, télévision.

211 Document n°3a, 1968, télévision.

212 Document n°23, 1959, radio.

213 Document n°13, 1967, télévision.

que le milieu du travail est propice à la réinsertion de la jeunesse en rupture214. En effet, le milieu professionnel constituerait, d’après lui, un espace dans lequel le jeune cultive ses compétences pratiques, les travailleurs l’accueillant comme l’un des leurs et lui enseignant les

« traditions de travail ». Cet environnement représente selon Uldry, un cadre rassurant qui permet au délinquant de reprendre confiance en lui et en ses capacités. En vogue dans les années 1950-1960 en Suisse comme ailleurs, la formation professionnelle est donc aussi envisagée comme un moyen de réadaptation de la jeunesse délinquante au monde des adultes.

L’accompagnement par un adulte dans ce processus de réintégration est une autre solution proposée dans un reportage sur les blousons noirs parisiens215. On y présente une déléguée bénévole à la liberté surveillée (tribunal pour enfants) en charge de la réinsertion de quelques jeunes de bande ayant été jugés pour leurs délits. Le journaliste suisse, Georges Kleinmann, commente le reportage et décrit ainsi la situation : « On récupère de la ferraille, des vieux chiffons pour faire du papier, cette femme, Diane, a essayé de récupérer du blouson noir ». Un patron de bar interviewé, parle d’une « épée de Damoclès » qui menaceraient ces jeunes s’ils « quittent leur place pour une bêtise quelconque »216. Une fois encore, à travers ces remarques, on perçoit les réserves émises par certains adultes quant à la capacité des jeunes délinquants à se réinsérer. Néanmoins, le reportage montre que dans l’ensemble, des efforts sont faits par ces jeunes garçons pour ne pas retomber dans la délinquance et ils semblent profiter de l’occasion qui leur est donnée de réintégrer un mode de vie considéré comme « normal ».

214 Document n°11, 1965, télévision.

215 Document n°1b, 1961, télévision.

216 Document n°1d, 1961, télévision.

Patron de bar parlant des blousons noirs sous tutelle qui doivent bien se comporter (extrait français du reportage sur les blousons noirs de 1961)217

Face à ce que beaucoup considèrent comme le nouveau grand problème de société qu’est la délinquance des jeunes, il est donc manifeste que la plupart des adultes des années 1950-1960 prônent plus largement des méthodes éducatives (voire rééducatives) que des mesures autoritaires. Ce qui rassemble également ces différentes méthodes est la présence d’un adulte de référence capable, d’une part, de comprendre le jeune, de ne pas le juger pour ses actes passés et de montrer sa confiance en ses capacités à se réintégrer. D’autre part, l’adulte doit agir comme modèle moral et offrir un cadre rassurant et un environnement sécurisant. Cette approche de la rééducation des jeunes délinquants se rapproche d’ailleurs de la vision de l’éducation des adolescents que propose Zumbach, dans la conclusion des émissions « Tous responsables ! » sur la jeunesse en rupture218. Il énonce les « deux valeurs complémentaires » dont l’adolescent a besoin pour grandir et qui peuvent parfois décontenancer les parents tant elles peuvent paraitre antinomiques : l’autonomie et la sécurité.

La qualité de la rééducation serait donc largement déterminée par le comportement de l’adulte référent, qu’il soit prêtre, tuteur, éducateur, juge ou animateur. On parle de leur personnalité qui doit être forte de « doigté », de « persévérance », de « compréhension » et de

« générosité »219. Mais ce que l’on estime essentiel chez l’adulte qui accompagne ces jeunes

217 Document n°1b-c, 1961, télévision.

218 Document n°24, 1959, radio.

219 Document n°26, 1959, radio.

est généralement son aptitude à créer un lien de confiance fort avec eux220 et sa foi en leur capacité à se réintégrer221. Dans le cadre de son expérience au service des loisirs, Charly Légeret parle ainsi de l’effet bénéfique sur les jeunes que peuvent avoir des animateurs qui ont suivis des études de travailleur social : « À l’instant où nous avons un aîné qui croit à ce qu’il fait, qui en a la conviction profonde, on n’a pas de problème avec la jeunesse »222. L’écrivain Gilbert Cesbron va plus loin en répétant que c’est l’amour qui sauve un enfant de la délinquance et que c’est le principal trait qui doit caractériser l’adulte qui participe à sa réinsertion223.

Nombreux sont les émetteurs des émissions de télévision et de radio des années 1950-1960 qui prônent des solutions éducatives et/ou professionnelles d’accompagnement pour lutter contre la délinquance des jeunes et les réintégrer au mieux et au plus vite à la société.

Quelques intervenants des archives relèvent cependant des carences dans les moyens mis en œuvre par la justice des mineurs et semblent considérer que des efforts en termes de structure et d’accompagnement de la jeunesse délinquante sont encore nécessaires (sans pour autant changer fondamentalement de système). Selon les personnes, il s’agit de modifications plus ou moins importantes mais qui vont généralement dans le sens de l’intervention d’un ou de plusieurs adulte(s) de référence engagé(s) dans le « sauvetage »224 du jeune délinquant.

La présidente de la commission officielle des visiteurs de prisons genevoises225 qui intervient dans une émission télévisée généraliste en 1967 déplore par exemple la pénurie de locaux fermés destinés à la jeunesse délinquante et le manque d’encadrement de celle-ci226. Elle considère que la réintégration des jeunes en rupture pourrait être accrue par une plus grande mobilisation d’adultes professionnels : « Lorsqu’on sauve un jeune, on évite une récidive, et je pense qu’en s’occupant davantage des jeunes, on arriverait à diminuer le nombre des délinquants graves ». Dans la même perspective, Zumbach (déjà mentionné) critique la justice suisse qui n’offre pas suffisamment d’établissements spécialisés dans le

220 Document n°26, 1959, radio.

221 Document n°36, 1968, radio.

222 Document n°36, 1968, radio.

223 Document n°22, 1954, radio.

224 Document n°22, 1954, radio.

225 Nom non présent dans les archives de la RTS.

226 Document n°13, 1967, télévision.

traitement de certains troubles comportementaux, ce qu’une meilleure coordination fédérale pourrait permettre227.

La présidente des visiteurs de prisons genevoises parlant du manque de moyens de la justice (émission d’actualité romande de 1967)228

En conclusion, les discours des intervenants témoignent d’un enthousiasme assez généralisé pour le traitement paternaliste et éducatif de la délinquance juvénile, qui est caractéristique des années 1950-1960 pour l’Occident et représentatif du système pénal des mineurs tel qui est envisagé en Suisse depuis sa création (début du XXème siècle). On parle beaucoup des foyers pour mineurs, mais aussi de l’importance des professionnels adultes (éducateurs, juges, etc.) et du milieu professionnel, considérés comme propices à la réintégration des jeunes délinquants à la société. Cependant, on peut remarquer qu’aucun interlocuteur ou presque ne parle des placements familiaux. Ceci s’explique peut-être par le fait que les institutions sociales et éducatives sont au centre de cette ère du « tout éducatif ».

En témoignent d’ailleurs la manière dont beaucoup d’intervenants « sacralisent » les travailleurs sociaux : le vocabulaire employé pour parler de leur action (« sauvetage »,

« persévérance », « conviction », « générosité ») donne l’impression que l’on décrit des héros, forts de bonté et de courage. Cet engouement pour le travail des instances sociales relèguerait au second plan la considération d’autres acteurs tels que les familles d’accueil. Quant aux prisons, à part de rares cas, elles sont généralement fortement remises en question car

227 Document n°24, 1959, radio.

228 Document n°13, 1967, télévision.

considérées comme peu adaptées aux mineurs, à leur éducation et à leur réinsertion, même si elles tentent elles-aussi d’évoluer dans ce sens.

Ainsi, contrairement à la plupart des pays occidentaux pour qui la délinquance juvénile est le sujet numéro un dans les années 1950-1960, la Suisse est autant portée sur la délinquance que sur les comportements considérés comme « déviants » de la jeunesse.

Précisons que cette « déviance » apparait plutôt comme un fait perçu par la population, alors que la délinquance représenterait une anticipation alarmiste de la réalité suisse.

En conclusion, face à ces deux problèmes de société que sont la délinquance et la

« déviance » de la jeunesse, l’action helvétique consiste majoritairement en une démarche préventive. La Suisse va, en effet, développer (et ce particulièrement durant les années 1960) un mouvement d’encadrement de la jeunesse, considéré comme moyen de protéger la jeunesse de certaines mœurs nuisibles de la nouvelle société (visée similaire aux mouvements de jeunesse de l’entre-deux-guerres dans le reste de l’Occident), de forger des liens entre générations par l’intervention des adultes (spécificité suisse), et d’empêcher qu’elle verse dans la délinquance. Quant à la jeunesse délinquante, et ainsi que dans les autres pays occidentaux, elle est elle-aussi encadrée dans la mesure du possible par des adultes (souvent éducateurs) bienveillants qui essayent de la comprendre et de favoriser sa réinsertion dans la société.

CHAPITRE 5 : Critique et remise en question des représentations et de l’action en