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L’organisation interne des services de la protection de l’enfance à l’intérieur des DPJ et CJ

Chapitre 1 Problématiser la détresse des intervenants en protection de l'enfance

1.4 L’organisation interne des services de la protection de l’enfance à l’intérieur des DPJ et CJ

Les modes de fonctionnement interne des services de la DPJ et des CJ sont majoritairement balisés par la LPJ et sont structurés d’une façon uniformisée sur l’ensemble du territoire québécois. Les services en protection de la jeunesse sont divisés selon les étapes d’une intervention psychosociale (demande de service, évaluation, planification de l’intervention, application de l’intervention, fin de l’intervention) et s’actualisent à partir de trois équipes de travail spécifiques et distinctes. Dans un premier temps, la trajectoire d’une situation compromettant éventuellement la sécurité et le développement d’un enfant débute par la réception et le traitement du signalement. L’équipe responsable de cette première étape de l’intervention porte le nom de « réception et traitement du signalement » ou « RTS » pour reprendre le jargon des praticiens. Les membres de RTS sont à la fois des agents de relations humaines (criminologue, psychoéducateur, sexologue, bachelier en psychologie ou en travail social et non membre de l’ordre professionnel), des techniciens en travail social et des travailleurs sociaux.

Les intervenants RTS sont responsables de déterminer si la LPJ s’applique, dans la mesure où les situations rapportées par les personnes « signalantes », c'est-à-dire les témoins directs et indirects de la situation de l’enfant, portent à croire en ce sens. En effet, la sécurité ou le développement d’un enfant est considéré comme étant compromis lorsqu’il se retrouve dans une ou des situations visées par l'article : 38 a) l’abandon; c'est-à-dire lorsque les parents sont décédés et qu’il y a absence de tuteur légal. Également l’abandon peut aussi indiquer : lorsque les parents n’assument pas les soins, l’entretien et l’éducation; 38 b) la négligence, c’est-à- dire face aux besoins fondamentaux sur le plan physique (besoins d’ordre alimentaire, vestimentaire, d’hygiène ou de logement), de la santé physique/mentale et éducative; 38 c) le mauvais traitements psychologiques, c’est-à-dire de l’indifférence, du dénigrement, du rejet affectif, de l’isolement, des menaces, une exploitation à travers un travail disproportionné par rapport à ses capacités et une exposition à la violence conjugale ou familiale; 38 d) les abus sexuels (subis ou à risque sérieux de subir); 38 e) les abus physiques (subis ou à risque sérieux de subir); 38 f) les troubles de comportement sérieux, c’est-à-dire

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lorsque l’enfant se comporte de manière à porter atteinte à son intégrité physique ou psychologique ou à celle d’autrui (d’une façon grave et continue) (Gouvernement du Québec, 2007). L’article 38.1 spécifie également que :

38.1. La sécurité ou le développement d’un enfant peut être considéré comme compromis: a) s’il quitte sans autorisation son propre foyer, une famille d’accueil ou une installation maintenue par un établissement qui exploite un centre de réadaptation ou un centre hospitalier alors que sa situation n’est pas prise en charge par le Directeur de la protection de la jeunesse; b) (paragraphe abrogé);

c) si ses parents ne s’acquittent pas des obligations de soin, d’entretien et

d’éducation qu’ils ont à l’égard de leur enfant ou ne s’en occupent pas d’une façon stable, alors qu’il est confié à un établissement ou à une famille d’accueil depuis un an (LPJ, 2006, p. 34.1).

Les intervenants RTS et ceux de l’étape suivante doivent également respecter l’article 38.2 de la LPJ (Gouvernement du Québec, 2007). L’article 38.2 de la LPJ balise la rétention du signalement, ainsi que la déclaration de la situation comme étant compromise selon la Loi, et ce, à partir de la nature, de la gravité, de la chronicité et de la fréquence des faits signalés (Gouvernement du Québec, 2007). Toujours selon cet article, les intervenants doivent également considérer l’âge et les caractéristiques personnelles de l’enfant. La capacité et la volonté des parents de mettre fin à la situation de compromission seront également examinées. Finalement, les ressources du milieu pour venir en aide à l’enfant et à ses parents viendront aussi influencer la décision de rétention du signalement (LPJ, 2006, c. 34, a. 15).

Lorsque le signalement est retenu par l’équipe RTS, la deuxième étape consiste en l’évaluation (sur le terrain) et l’orientation de la situation (équipe évaluation-orientation ou équipe E-O). Depuis la Loi 21, les travailleurs sociaux sont majoritairement les membres de l’équipe E-O (certains professionnels bénéficient d’une clause « grand-père ; c'est-à-dire une clause d'antériorité qui maintenant les droits acquis, en raison de leur ancienneté et de leur présence dans cette équipe avant l’application de la Loi 21).Toujours selon Loi 21 et ses dispositions, les travailleurs sociaux sont responsables de procéder à l’évaluation de la situation et faire une analyse dynamique et systémique de l’ensemble des faits liés à la situation de l’enfant (OTSTCFQ, 2012). De plus, cette analyse est appréciée selon les données socioculturelles, les conditions de vie en termes de facteurs d’exclusion ou

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d’inclusion sociale, d’oppressions ou d’opportunités dans l’accomplissement des rôles sociaux et de participation citoyenne (OTSTCFQ, 2012).

Quant à l’orientation de la situation de maltraitance rapportée, il existe trois décisions possibles en vertu de la LPJ. La première décision possible est la fermeture du dossier, en raison de faits non fondés ou encore de faits fondés, mais pour lesquels les parents prennent les mesures nécessaires. Toutefois, advenant que le risque de compromission s’avère fondé, la mise en œuvre des mesures judiciaires (décision 2) ou volontaires (décision 3) auprès de l’enfant et sa famille est adoptée. Ce type de décision entre le mode judiciaire et volontaire dépend principalement du niveau de reconnaissance des faits par le parent et leur désir de mettre fin à la situation de compromission (Gouvernement du Québec, 2007). Dès lors, le travailleur social implique dans les services nécessaires au rétablissement d’une situation de compromission, l’environnement de l’enfant et les partenaires du réseau (OTSTCFQ, 2009). Subséquemment, l’octroi des services est régulièrement effectué par plusieurs organismes en inter collaboration (ex. milieux scolaires, centres de la petite enfance, centres de réadaptation, organismes communautaires, centres d’hébergement, services psychosociaux privés et spécialisés selon la problématique).

Finalement, lors de la troisième étape, il faut savoir que les DPJ s’insèrent à l’intérieur de la structure des Centres jeunesse, bien qu’elles soient distinctes et seules mandataires de la LPJ. Ainsi, lorsque la santé et le développement d’un enfant sont déclarés comme étant compromis par l’équipe E-O (appartenant tout comme RTS à la DPJ), le transfert du dossier de l’enfant est automatiquement effectué auprès de la troisième équipe nommée « application des mesures » ou « AM ». L’équipe AM, contrairement aux équipes RTS et E-0, est sous la direction des services professionnels des différents Centres jeunesse au Québec. Pour ce motif et puisque seule la DPJ est mandataire de la LPJ, un intervenant portant le titre de « réviseur » en provenance de la DPJ sera assigné au dossier de l’enfant et s’assurera ainsi de l’évolution et des prises de décisions subséquentes quant au suivi de l’enfant, et ce, jusqu'à la fin du traitement où la situation ne sera plus compromise en regard de la LPJ (Gouvernement du Québec, 2007). L’équipe d’intervenants sociaux de l’application des mesures, dont plusieurs membres sont également des travailleurs sociaux, est quant à elle

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responsable d’offrir les services jugés nécessaires à l’enfant déterminés par les régimes volontaires ou judiciaires. En résumé, nous pouvons donc constater que les travailleurs sociaux (des DPJ et des CJ) sont au cœur de toutes les étapes d’intervention liées à une situation rapportée de maltraitance infantile.

1.5 Les difficultés émotionnelles chez les intervenants en protection de