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1.1. Cadre théorique

1.2.4. Opérationnalisation méthodologique

Je propose enfin d'expliciter les détails de l'opérationnalisation méthodologique de la recherche entreprise, soient l’échantillon utilisé, les méthodes d’enquête déployées, et le modèle d’analyse adopté.

1.2.4.1. Échantillonnage

Commençons par évoquer l'échantillonnage de l'enquête, puis les raisons qui fondent sa pertinence. Concrètement, la population visée par l'enquête est celle physiquement présente dans le district de Sa Pa, divisée dans plusieurs sous-groupes de cet ensemble, nommés dans l'ordre décroissant du degré d'attention accordée : (1) un premier sous-groupe est composé des guides de

trek Hmong et des propriétaires Hmong de homestay, ainsi que des membres de leurs familles ; (2)

le deuxième sous-groupe rassemble les autres acteurs Hmong du tourisme dans la localité choisie : vendeurs, passants, … ; (3) enfin le dernier sous-groupe concerné par la recherche est constitué des autres acteurs plus ou moins directement liés aux activités touristiques à Sa Pa : autorités, vendeurs et résidants Kinh, mais aussi expatriés vivant et/ou travaillant dans le district. L’échantillon sélectionné lors de l’enquête ethnographique est pertinent pour la recherche entreprise puisqu’il constitue « une petite quantité de quelque chose pour éclairer certains aspects généraux du problème » (Pirès, 1997:122). De plus, j’ai utilisé un échantillon à cas multiples, visant la recherche de représentativité des points de vue. À la fois homogène et contrasté, il permet de « dégager une compréhension riche pour un groupe donné d'individus » et il suggère que « la discussion impliquera une comparaison » (Savoie-Zajc, 2007:104).

34 1.2.4.2. Méthodes d’enquête

Ensuite, je voudrais expliquer plus en détail les techniques d'enquête que j’ai déployées pour cette ethnographie. Commençons par l'observation participante, clé d'une bonne ethnographie anthropologique. En effet, l'observation fine née d'une bonne insertion est bénéfique à l'ethnographie au sens où elle permet d’apprendre les aspects explicites et tacites de la routine des informateurs et de leur culture (DeWalt & DeWalt, 2011:1) ; elle permet d'atteindre une familiarité profonde grâce à une bonne intégration (Goffman, 1973:130) ; enfin, elle permet de tirer parti d'une compréhension indicible, plus vaste que l’ensemble des notes de terrain, qui donne à l’ethnographie une richesse inaccessible autrement (Sluka & Robben, 2007:8). Des entretiens ont également été mis en place afin de constituer des données. Dans la forme, ces entretiens vont de l'entretien semi- dirigé à l'entretien libre, réalisés avec carnet de note. L’utilisation d’un canevas plutôt qu’une grille a permis de « déclencher une dynamique de conversation plus riche que la simple réponse aux questions, tout en restant dans le thème» (Kaufmann, 1996:44). Les entretiens ainsi mis en place ont permis de récolter « (a) des informations sur le monde (sur le réel de référence) ; (b) des informations sur le point de vue de l'interlocuteur sur le monde ; (c) des informations sur la structure communicationnelle de l'entretien » (Olivier de Sardan, 2008:58), toutes utiles pour l'enquête. Enfin des procédés de recension ont été utilisés afin de recueillir « tous les artefacts qui fixent les données » (Cefaï & Barnes, 2003:29). En début de recherche, ces procédés ont permis d'établir des « fonds de carte » pour « situer les acteurs principaux » ; vers la fin de la recherche ils ont servi à « vérifier des intuitions, [à] fournir des éléments plus "objectivables", [à] amasser des preuves et des confirmations » (Olivier de Sardan, 2008:68). Au final, ces techniques d’enquêtes m’ont permis d’amasser un corpus de données composé de douze séquences d’observation pure, treize séquences d’observation participante, treize entretiens semi-directifs, ainsi que de nombreuses conversations informelles.

1.2.4.3. Modèle d’analyse

Le modèle d’analyse structurant ce mémoire est inspiré des conseils prodigués par Raymond Quivy et Luc Van Campenhoudt (1988). Comme ils le suggèrent, le travail analytique derrière ce mémoire propose d’associer des concepts à des phénomènes à travers un corpus d’hypothèses ouvertes. Or, ce travail analytique est la dernière étape d’une construction de la recherche réalisée en trois étapes : phase exploratoire ; collecte des données ; analyse. Dans la

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phase exploratoire, les concepts exposés dans la première partie du Chapitre 1 (les représentations ethniques, la modernisation, le tourisme ethnique, et la résistance infrapolitique) sont systémiques, c’est-à-dire que « [leur] construction se caractérise par la rigueur déductive et synthétique » (Quivy & Campenhoudt, 1988:124). En tant que tels, j’ai pu leur associer des indicateurs, comme « manifestations objectivement repérables et mesurables des dimensions du concept » (Quivy & Campenhoudt, 1988:114), qui m’ont permis d’orienter la collecte des données vers des éléments pertinents pour la recherche.

Toutefois, l’enjeu dans la phase analytique est d’adapter ces concepts aux réalités du terrain, afin de générer des concepts opératoires isolés « construit[s] empiriquement à partir d’observations directes » (Quivy & Campenhoudt, 1988:124). Pour ce faire, j’utilise une méthode empirico- inductive, qui repose sur l’émanation d’interprétations théoriques enracinées dans le terrain (Olivier de Sardan, 2008:22), afin de formuler des hypothèses ouvertes sur la base de données empiriques récoltées au cours de l’enquête. Ces hypothèses se présentent sous deux formes : certaines caractérisent « l’anticipation d’une relation entre un phénomène et un concept capable d’en rendre compte » ; tandis que les autres impliquent « l’anticipation d’une relation entre deux concepts ou, ce qui revient au même, entre les deux types de phénomènes qu’ils désignent » (Quivy & Campenhoudt, 1988:128). La première forme d’hypothèse concerne ainsi les liens qui peuvent être tissés entre les indicateurs observés sur le terrain (par exemple la mise en récit par un guide de

trek de la vie quotidienne des Hmong) et les concepts opératoires isolés (par exemple les

représentations ethniques produites par les guides de trek Hmong). La deuxième forme d’hypothèse survient plus tard dans l’analyse et permet de relier plusieurs concepts opératoires isolés (par exemple les représentations ethniques produites par les guides de trek Hmong avec les formes de résistance infrapolitique construites pour faire face à la modernisation du district). Afin de garantir l’adéquation empirique du modèle d’analyse proposé, ces hypothèses doivent être falsifiables, c’est-à-dire « [qu’elles doivent] pouvoir être testée[s] indéfiniment et donc revêtir un caractère de généralité, et ensuite, [qu’elles doivent] accepter des énoncés contraires qui sont théoriquement susceptibles d’être vérifiés » (Quivy & Campenhoudt, 1988:137). Une fois tous ces éléments assemblés, il devrait être possible de configurer un modèle d’analyse permettant d’apporter des réponses relatives à la problématique choisie comme fil rouge de ce mémoire.

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