• Aucun résultat trouvé

 

130. Les actes d’administration judiciaire s´insèrent dans l’arsenal mis à disposition du juge pour veiller au bon fonctionnement du service dans une juridiction et au bon déroulement de l´instance. Ils sont alors pris en application des attributions d’ordre administratif qui incombent au juge.

131. Pourtant, les actes de gestion procédurale et d’organisation juridictionnelle ont une influence assez importante sur la fonction juridictionnelle exercée par les juridictions dans la mesure où ils touchent, directement ou indirectement, les procédures en cours. Ainsi, pour garantir l’autonomie de l’acte juridictionnel et prévenir toute ingérence extérieure dans l’activité juridictionnelle, il faut que ces actes soient pris par un membre de l’ordre judiciaire. L’autonomie de l’autorité judiciaire exige également que les actes judiciaires administratifs soient exclus de tout contrôle exercé par l’ordre administratif.

C

ONCLUSION DU CHAPITRE

1

132. A partir de la fin du XIXe siècle, l’accroissement important de la demande judiciaire a conduit le législateur à remodeler la mission procédurale du juge qui se voit attribuer un rôle renforcé dans la marche du procès et doit veiller au bon déroulement de l’instance. De même, l’augmentation prodigieuse de la demande judiciaire a accru l’importance de l’administration interne des juridictions. Les actes d’administration judiciaire s´insèrent alors dans cet arsenal mis à disposition du juge pour veiller au bon déroulement de l´instance dans un délai raisonnable et pour garantir un bon fonctionnement du service au sein de la juridiction.

133. Si les Codes de procédure civile et d’organisation judiciaire français qualifient expressément certains actes pris par le juge de mesure d’administration judiciaire, le droit positif français ne présente pas de définition positive de ces actes et affirme uniquement qu’ils ne sont pas assujettis au régime juridique appliqué aux jugements, conformément aux articles 499 et 537 du Code de procédure civile. La Cour de cassation, de son côté, a donné une définition a contrario des actes d’administration judiciaire et a déclaré que ce sont des actes judiciaires non susceptibles d´affecter les droits et les obligations des parties527

.

134. Si le critère retenu par la haute juridiction judiciaire française poursuit un but légitime et permet aux parties d’exercer une voie de recours contre tout acte du juge susceptible de leur causer tort, il s’avère, maxima venia, inadéquat car il rend possible la modification de la nature juridique des actes en raison de leurs conséquences et ne tient pas compte du fait que le juge exerce des actes de natures distinctes. De plus, il est intéressant d’indiquer que la jurisprudence et le droit positif français qualifient expressément d’actes d’administration judiciaire des actes dommageables aux droits substantiels et procéduraux des parties.

        527

135. La position jurisprudentielle qui identifie la notion d’acte d’administration judiciaire au pouvoir discrétionnaire des juges est également passible de critique dès lors que le législateur français exige expressément que le juge se justifie pour prendre certains actes judiciaires d’administration (articles 90, 780, 781 et 784 CPC). Il faut aussi indiquer que le pouvoir discrétionnaire des juges englobe l’activité juridictionnelle, ce qui démontre ainsi l’insuffisance du critère proposé.

136. Une partie de la doctrine française, quant à elle, identifie les actes d’administration judiciaire aux mesures d’ordre intérieur du droit administratif528

. Pourtant, même si les deux notions sont rattachées au fonctionnement interne des services – juridictionnel et administratif, respectivement – et ne sont pas, en principe, susceptibles de contrôle, les spécificités des actes judiciaires administratifs empêchent leur assimilation.

137. Par les actes judiciaires administratifs, le juge ne dit pas le droit applicable au cas

sub judice ; les actes ne se rattachent donc ni à la juridiction gracieuse, ni à la juridiction

contentieuse. Pourtant, ces décisions sont rattachées, directement ou indirectement, à une procédure donnée. L’autonomie de l’autorité judiciaire exige ainsi qu’ils soient pris par des juges et que tout contrôle exercé par l’ordre administratif soit exclu. La spécificité des actes d’administration judiciaire réside alors dans leur nature matériellement administrative – critère fonctionnel – et dans le fait qu’ils ne sont pas détachables de la fonction de juger, l’autorité judiciaire devant s’organiser en interne et veiller au déroulement de l’instance afin d’assurer le service public de la justice dont elle a la charge.

138. Pourtant, selon la législation et la jurisprudence françaises actuelles, ces actes ne sont soumis à aucune voie de recours immédiate, ce qui empêche la contestation effective des actes d’administration judiciaires préjudiciables. L’analyse de la matière en droit judiciaire privé brésilien peut alors ouvrir une nouvelle perspective dans ce cas.

        528

DEGOFFE Michel et JEULAND Emmanuel, « Les mesures d´administration judiciaire en droit processuel : problèmes de qualification », préc., pp. 143, 145 et 164.

             

C

HAPITRE

2

L

ES ACTES D

ADMINISTRATION JUDICIAIRE EN DROIT JUDICIAIRE PRIVE

BRESILIEN

139. Même si le droit brésilien ne connaît pas la notion française de mesure

d’administration judiciaire, il est évident que l’administration de la justice brésilienne

requiert également l’accomplissement des actes judiciaires qui ont pour but le bon déroulement des instances et le bon fonctionnement du service dans les juridictions.

En effet, dans le but de promouvoir le bon déroulement de l’instance, divers actes de gestion procédurale sont pris quotidiennement par le juge brésilien et ses délégués. De plus, afin d’inciter une conduite coopérative du procès par les sujets à l’instance dans un but d’efficacité, le Code de procédure civile de 2015 autorise également que les parties – seules529 ou conjointement avec le juge – contribuent à la gestion de la procédure (Section 1).

Pourtant, comme condition préalable à l’exercice de la fonction juridictionnelle, il faut d’abord que le service public de la justice s’organise en interne. Les actes d’organisation juridictionnelle déterminent donc la répartition des services entre les juges, la composition des formations de jugement et la distribution des affaires entre les chambres/sections et les juges de compétence égale. Ces actes de nature administrative sont amplement réglementés par le système brésilien et sont susceptibles de contrôle par le Pouvoir judiciaire, l’unique ordre juridictionnel au Brésil compétent pour connaître toute lésion ou menace de lésion à un droit (Section 2).

        529

Il est utile de rappeler que la présente étude n’englobera toutefois pas les actes de gestion procédurale pris uniquement par les parties car cette recherche est restreinte à l’étude de la notion française des actes d’administration judiciaire, c’est-à-dire, des actes du juge concernant le bon déroulement de l’instance et le bon fonctionnement des juridictions. L’analyse se limitera alors aux actes processuels du juge – soit les actes unilatéraux, soit les actes conjoints du juge et des parties – concernant l’administration judiciaire ; les actes processuels qui ne concernent que les parties n’entrent donc pas dans le domaine de la thèse : V.

Outline

Documents relatifs