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Les actes de gestion procédurale en droit judiciaire privé brésilien

140. S’il appartenait au juge, dans le Code de procédure civile brésilien de 1973, d’impulser ex office l’instance en assurant la direction du procès et la conduite de l´instance, l’adoption expresse d’un modèle de procès coopératif dans le codex de 2015 – qui vise à l’effectivité et au respect des volontés des parties également dans le domaine procédural –, a permis que les parties participent plus effectivement à la gestion du procès au lieu de seulement discuter la gestion procédurale faite par le juge530. De plus, en application du principe de coopération et pour promouvoir la sécurité juridique nécessaire des justiciables et l’efficience, de nouveaux outils ont été prévus dans le nouveau Code de procédure civile brésilien pour la gestion du contentieux (§ 1).

De plus, en raison de l’encombrement des juridictions et pour que le juge puisse concentrer ses efforts sur la prise de décisions juridictionnelles, le système juridique brésilien a autorisé expressément que certains actes de gestion procédurale soient pris par les greffiers, si les conditions établies par le droit positif brésilien sont observées (§ 2).

§ 1 : Les actes de gestion procédurale pris par le juge seul ou conjointement avec les parties : du traitement prévu dans le Code de procédure civile de 1973 aux règles établies dans le codex de 2015

141. Au Brésil, le prononcé de l’acte juridictionnel est normalement précédé de la prise des différents actes de gestion procédurale. Pourtant, si la gestion procédurale par le juge était consacré par le Code de procédure civile de 1973 – le juge unique en première instance et le « desembargador » ou le « ministre » rapporteur dans les cours d´appel, régionales et supérieures qui sont responsables pour le déroulement de l´instance – (A), le

codex de 2015 apporte de nouvelles techniques de gestion de la procédure et du

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GREGER Reinhard, « Cooperação como princípio processual », Ronaldo Kochen (trad.), Revista de

processo, ano 37, nº 206, abril de 2012, p. 126, in verbis : « Pour les parties, le principe de coopération ne signifie pas qu’elles doivent assumer leur procès (ihren Prozess austragen) de manière intime (Zweisamkeit) – cela serait une utopie extraterrestre, comme le critique bien Leipold et comme l’a bien explicité le défenseur le plus déterminé dudit principe, Wassermann. Bien comprise, l’exigence de coopération, au lieu de déterminer seulement que les parties – chacune soi-même – discutent la gestion adéquate du procès par le juge, fait que ces dernières y participent » (traduction libre). – DIDIER

JUNIOR Fredie, Curso de direito processual civil : introdução ao direito processual civil, parte geral e

contentieux : le juge et les parties coopèrent pour le bon déroulement de l’instance et pour l’obtention d’un procès adéquat, efficace et équitable, comme nous le verrons par la suite (B).

A. – Les actes de gestion procédurale pris par le juge dans le Code de procédure civile brésilien de 1973

142. Dans le Code de procédure civile brésilien de 1973, l’article 162 établissait les définitions de « sentença », de « decisão interlocutória » et de « despacho ». La doctrine pourtant collaborait au développement des notions des dits « pronunciamentos » judiciaires. Comme nous l’avons préalablement analysé531, la définition légale de jugement a été faite selon le contenu de l’acte judiciaire – prévus aux articles 267 et 269 du codex de 1973 – et la doctrine brésilienne a ajouté la prise en compte d’un élément téléologique – l’aptitude de l’acte de mettre fin à l’instance – comme condition nécessaire pour qualifier un acte judiciaire de jugement. La décision interlocutoire, de son côté, était qualifiée comme l’acte par lequel le juge résolvait une question incidente pendant l’instance. Le terme trouvait son origine dans l´expression inter et locutus est et correspondait ainsi à la décision prise entre le déclenchement et le dénouement de l´instance. Il faut maintenant étudier le concept de « despacho » pour identifier ensuite, entre les différents « pronunciamentos » judiciaires, ceux qui correspondent, en droit judicaire privé brésilien, à la catégorie française d’actes de gestion procédurale.

143. L´article 162, § 3º, du Code de procédure civile brésilien de 1973 donnait une définition a contrario sensu de « despacho » car le législateur affirmait que les « despachos » étaient tous les autres actes pris par le juge532 pendant l´instance, d´office ou à la demande de la partie, à propos desquels la loi n’établissait pas d’autre forme. Ainsi, le législateur de 1973 a donné une définition par exclusion du « despacho ». Comme il ne

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Les notions de jugement et de décision interlocutoire ont déjà été analysées en raison de l’opposition existente entre la notion française d’acte judiciaire d’administration et les décisions judiciaires concernant le meritum causæ – décisions au fond : V. supra, nº 45 s.

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La doctrine brésilienne critiquait pourtant cette définition car si le juge prend, pendant l´instance, des actes décisoires (des jugements, des décisions interlocutoires et des « despachos »), il prend également des actes sans aucun contenu décisoire qui ont pour but exclusif d’exécuter une décision prise au préalable (actes matériels) : V. supra, nº 47.

s’agissait pas de jugements ou de décisions interlocutoires, les « despachos » étaient conçus comme des ordres judiciaires qui disposent sur le déroulement de l´instance.

144. Si le procès était, en règle générale, déclenché par l´initiative des parties (principe dispositif), il ne demeurait pourtant pas « la chose des parties ». Une fois l´activité de la juridiction provoquée par le demandeur, le procès se développait par impulsion ex officio, et le juge en assurait la direction et la conduite de l´instance tout en veillant à son bon déroulement, indépendamment des nouvelles sollicitations des parties, conformément à l´article 262 du Code de procédure civile de 1973533.

Les « despachos » étaient donc définis comme les actes du juge concernant le déroulement de l´instance et ils n’étaient pas susceptibles de recours, conformément à l’article 504 du codex de 1973. Il s’agissait donc d’actes de gestion procédurale, comme l’affirme la doctrine, in verbis :

« Les “despachos” sont des “pronunciamentos” judiciaires dont le but est de permettre le déroulement de l’instance et le mouvement de la procédure. Contrairement aux “pronunciamentos” décisoires (interlocutoire et jugement), ils n’ont pas comme finalité de résoudre des questions, mais uniquement de faire avancer le procès. Les “despachos” ne peuvent pas être considérés comme des actes décisoires proprement dits. Même s’il y a un certain contenu décisoire, celui-ci est négligeable et non significatif car sa finalité, comme déjà dit, ne résout pas les questions » (traduction libre)534.

Durant la direction du procès et pour le bon déroulement de l’instance, le juge peut prendre plusieurs « despachos ». Par ledit acte de gestion procédurale, par exemple, il invite les parties à exercer le contradictoire et à indiquer les preuves qu’elles veulent produire pour soutenir leurs prétentions535, demande la régularisation de la représentation

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V. supra, nº 46. 534

JORGE Flávio Cheim, DIDIER JUNIOR Fredie e RODRIGUES Marcelo Abelha, A terceira etapa da

reforma processual civil : comentários às Leis nº 11.187 e 11.232, de 2005 ; 11.276, 11.277 e 11.280, de 2006, São Paulo : Saraiva, 2006, p. 201.

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Cour supérieure de justice, Deuxième chambre, « Agravo Regimental no Recurso Especial » nº 1406234/PR, Ministre rapporteur : Mauro Campbell Marques, date du jugement : 10/11/2015, date de la publication : 19/11/2015.

ad litem536, détermine la jonction ou la disjonction d´instances537, fixe les délais et la date d´audience538 tout en conduisant l´instance selon la procédure établie par la loi539.

A propos des rôles joués par les sujets du procès dans le Code de procédure civile de 1973, la doctrine a souligné l’isolationnisme du juge pour la prise de décisions sur la conduite de l’instance qui, généralement, ne dépendait pas de la contribution active des parties. Il appartenait uniquement au juge d’observer le traitement égalitaire des parties, de veiller à la célérité procédurale, de préserver la dignité de la Justice et d’essayer de concilier les parties540.

145. A l’égard des différents « pronunciamentos » judiciaires, la majorité de la doctrine et de la jurisprudence brésiliennes, soumises au Code de procédure civile de 1973, utilisaient le critère du préjudice pour distinguer les « despachos » des décisions interlocutoires. Ainsi, si l´acte provoquait des préjudices aux parties et ne mettait pas fin

        536

Cour supérieure de justice, Troisième chambre, « Agravo Regimental no Agravo em Recurso Especial » nº 684704/MS, Ministre rapporteur : Marco Aurélio Bellizze, date du jugement : 23/06/2015, date de la publication : 30/06/2015.

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Cour supérieure de justice, Deuxième chambre, « Agravo Regimental no Agravo de Instrumento » nº 239377/SP, Ministre rapporteur : Nancy Andrighi, date du jugement : 6/04/2000, date de la publication : 15/05/2000.

538

Cour supérieure de justice, Troisième chambre, « Recurso Especial » nº 828373/SP, Ministre rapporteur : Castro Filho, date du jugement : 17/08/2006, date de la publication : 11/09/2006.

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La doctrine indique d’autres exemples de « despacho », in verbis : « Les “despachos” sont les

commandements suivants : manifestation des parties (sur une question) ; de l’agent comptable ; du défendeur afin qu’il se manifeste sur la demande de désistement de l’action ; de l’auteur pour qu’il se manifeste sur le mémoire en réponse du défendeur, etc. » (traduction libre) : NERY JUNIOR Nelson e

NERY Rosa Maria de Andrade, Código de Processo Civil comentado e legislação extravagante, préc., p. 451.

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V. ZUFELATO Camilo, « Análise comparativa da cooperação e colaboração entre os sujeitos processuais nos projetos de novo CPC », in FREIRE Alexandre, DANTAS Dierle, DIDIER JUNIOR Fredie, MEDINA José Miguel Garcia, FUX Luiz, CAMARGO Luiz Henrique Volpe e OLIVEIRA Pedro Miranda de (org.), Novas tendências do Processo Civil – estudos sobre o projeto do Novo Código de

Processo Civil, Salvador : JusPodium, 2013, p. 10, in verbis : « D’après l’actuel CPC (de 1973), le dirigisme judiciaire du procès est marqué par une conception de grand isolationnisme du juge pour la prise de décisions sur la conduite de l’instance qui, généralement, ne dépend pas de la contribution active des parties. Il appartient uniquement au juge d’observer le traitement égalitaire qui doit être accordé aux parties, de veiller à la célérité procédurale, de préserver la dignité de la Justice, et d’essayer de concilier les parties – art. 125. Il convient de noter qu’il n’y a pas de prévision d’un rôle central à être joué pour les autres sujets du procès dans la conduite de l’instance » (traduction libre). – Cependant, ceci ne peut pas

être interprété comme l’absence de prérogative des parties dans le déroulement de l’instance car le Code de procédure civile de 1973 permettait la réduction des délais dilatoires (article 181), la suspension du procès (article 265, II) et le renvoi de l’audience à une date ultérieure (article 453, I) par les parties : V. infra, nº 158. 

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