• Aucun résultat trouvé

Observations complémentaires

Alexandre Guyaz *

C. La position de la doctrine

3. Observations complémentaires

La très abondante jurisprudence du Tribunal fédéral des assurances en ma­

tière de distorsion du rachis cervical, ainsi que les nombreux avis expri­

més par la doctrine à ce sujet appellent encore de notre part les quelques remarques et observations suivantes :

a) Le rôle des symptômes psychiques prépondérants

Un rapide survol de la jurisprudence du Tribunal fédéral des assurances en matière de traumatisme de type « coup du lapin » fait apparaître que de nom­

breux cas sont tranchés sous l’angle de la causalité adéquate au moyen des critères développés aux ATF 11 V 133 à propos des conséquences psychiques d’accidents. L’application de cette jurisprudence à ce type de lésions implique une négation pratiquement assurée de la causalité adéquate. En tout état de cause, et même si le TFA se défend de vouloir appliquer cette jurisprudence à tous les cas de traumatismes cranio­cervicaux par accélération90, force est de constater qu’elle joue en pratique un rôle majeur dans ce domaine.

Cette façon de faire revient à faire supporter à l’assuré le poids de sa prédisposition ou même de sa fragilité psychique éventuelle, alors même que le TFA a admis le principe selon lequel l’assurance obligatoire ne doit pas se limiter à protéger les assurés normalement constitués, mais doit également prendre en charge les conséquences qui ne touchent que les personnes par­

ticulièrement prédisposées. Notre Haute Cour crée ainsi expressément une exception pour les prédispositions psychiques91, instituant une différence

90 Arrêt U.164/2001 du 18 juin 2002, in RAMA 2002 U 465, p. 439 c.3a.

91 On parle souvent à cet égard de névrose de revendication : ATF 112 V 36 c. 3c. Voir sur ce point Rumo-Jungo, ch. 764 ss.

104

de traitement par rapport aux prédispositions somatiques que nous avons du mal à comprendre.

Plus précisément, la jurisprudence actuelle du TFA n’est guère satisfai­

sante en ce qu’elle considère que les troubles chroniques d’ordre psychique apparaissant quelque temps après un accident de type « coup du lapin » ne peuvent plus être rattachés à l’accident en question s’ils jouent un rôle prédo­

minant. Cela revient finalement à établir – de façon parfaitement arbitraire – une hiérarchisation parmi les différents symptômes constitutifs du tableau clinique typique92, selon qu’ils sont de nature physique ou psychique. Ce rai­

sonnement est contradictoire, car il admet de façon générale qu’un accident de ce type cause des troubles qui sont d’ordre tant psychique que physique, et que cette distinction importe peu dans le cadre de l’examen de la causa­

lité adéquate93, mais exige ensuite dans chaque cas particulier que les symp­

tômes de nature somatique jouent un rôle prédominant94.

Surtout, et même si le TFA tente de poser certaines conditions d’appli­

cation à cette pratique, celle­ci se fonde sur l’hypothèse implicite que les troubles psychiatriques ne peuvent être une conséquence de l’accident s’ils ne sont pas ou plus accompagnés de troubles de nature somatique plus ou moins objectivables. On perd ici de vue que plusieurs études ont démontré que les problèmes psychologiques des patients peuvent parfaitement être une conséquence et non la cause des symptômes de nature somatique liés au mé­

canisme du coup du lapin.

Plus préoccupant encore, il arrive au Tribunal fédéral des assurances de procéder lui­même à une interprétation de rapports d’expertise faisant état de déficits neuropsychologiques, pour considérer de sa propre autorité que ces déficits constituent une interférence psychique, et ce même en l’absence de toute expertise psychiatrique9. En raisonnant de la sorte, le TFA s’arroge des compétences médicales qu’il n’a pas et, surtout, déplace sans le dire le fardeau de la preuve sur les épaules de l’assuré, qui doit alors systématique­

ment solliciter une expertise psychiatrique dans le but d’apporter la preuve – négative – qu’il ne souffre pas ou pas de façon prépondérante de troubles de nature psychiatrique96.

Dès lors, nous sommes d’avis que les critères de choix entre les deux mé­

thodes d’évaluation du lien de causalité adéquate devraient à tout le moins

92 Voir plus haut, p. 11.

93 ATF 117 V 364 c. 5d aa.

94 Müller (Kausalzusammenhang, p. 154) semble être du même avis lorsqu’il souligne que la jurisprudence en question soulève un problème d’égalité de traitement entre les deux types de troubles, troubles entre lesquels l’art. 7 LPGA ne fait pourtant aucune distinction.

95 Arrêt U.60/2006 du 19 septembre 2006 c. 4.2.2.

96 Voir également la critique de Thöny, p. 22.

Lésions cervicales : enjeux pour la victime être sensiblement assouplis. Il doit en effet appartenir au juge d’examiner concrètement et dans chaque cas dans quelle mesure la névrose de reven­

dication, qui par hypothèse a relégué au second plan les autres éléments du tableau clinique typique, n’est finalement pas une conséquence immédiate de ce tableau, ou plus précisément de ses éléments somatiques. Cela implique que l’on examine si, en soi, les troubles constitutifs du tableau clinique ty­

pique ont suffi à déclencher une telle névrose ou si, au contraire, celle­ci ne constitue que le simple développement de troubles préexistants qui consti­

tuent une maladie indépendante dépassant la simple faiblesse psychologique.

Par ailleurs, le juge ne saurait présumer du caractère psychosomatique de certains troubles, lequel caractère ne peut à nos yeux être retenu que moyen­

nant une constatation formelle dans le cadre d’une expertise psychiatrique répondant aux exigences jurisprudentielles en la matière.

b) La répartition des accidents en 3 catégories

Le TFA est parti du principe que la causalité adéquate devait, en matière de traumatisme de type « coup du lapin » comme pour les suites psychiques d’un accident, être examinée non pas en fonction des lésions effectivement subies, mais sur la base de l’événement accidentel lui­même et des circonstances qui l’entourent97. Partant, il a repris sans autre la classification des accidents en fonction de leur gravité objective, telle que développée deux ans plus tôt en matière de troubles psychiques consécutifs à un accident.

Il conviendrait cependant de s’interroger à ce stade de la réflexion sur la pertinence d’une telle classification, ou plus précisément des critères de cette classification, en ce qui concerne les distorsions cervicales. En d’autres termes, la question se pose de savoir si, dans ce domaine particulier, il n’existe pas des critères objectifs précis qui permettraient de mieux identifier les ac­

cidents susceptibles en général de causer des atteintes durables à la santé.

Ainsi, il ne s’agirait plus exactement de déterminer le degré de gravité (faible, moyen ou élevé) d’un accident, mais d’établir dans quelle mesure il présente des risques d’atteinte durable à la santé en liaison avec un mécanisme de type

« coup du lapin », tout en maintenant le principe des trois catégories.

Une telle façon de faire permettrait sans doute d’éviter l’incertitude ma­

nifeste du TFA, qui peine parfois à trancher si un accident ayant causé un traumatisme de type « coup du lapin » est un accident banal ou de gravité moyenne. Il n’est en effet pas rare qu’il laisse tout simplement cette question ouverte98. Il va sans dire qu’une telle pratique nuit à la crédibilité du système et peut amener le justiciable à douter de son caractère équitable.

97 ATF 117 V 364 c. 5d bb.

98 Arrêt du 24 juin 2003 in RAMA 2003 U 489, p. 360 c. 4.2 ; arrêt U.289/2004 du 23 décembre 2005 c. 4.2.

106

Nous l’avons vu99, il existe un certain consensus dans le milieu médical et celui de la biomécanique pour admettre qu’un certain nombre de facteurs sont effectivement susceptibles, en cas de traumatisme de type « coup du lapin », de causer une atteinte durable à la santé du patient. Certains d’entre eux sont facilement identifiables et pourraient sans autre être pris en compte pour déterminer la gravité d’un accident, ou plutôt l’importance du risque intrinsèque qu’il présente. Il s’agit en premier lieu de la différence de vitesse subie par la victime (delta­v), de l’âge100, d’une position particulière au mo­

ment du choc, ainsi que de l’absence d’appuie­tête correctement réglé. Selon nous, la présence de l’un ou l’autre de ces éléments devrait amener le juge à qualifier le risque présenté par l’accident comme au minimum moyen, voire moyen à la limite des risques élevés. Ce risque devrait être qualifié d’élevé lorsque deux ou plusieurs de ces éléments sont réunis.

La pratique actuelle du Tribunal fédéral des assurances classe en général dans la catégorie des accidents de gravité moyenne à la limite des accidents bénins les collisions par l’arrière (Auffahrkollisionen)101, ce qui implique que les critères utilisés pour examiner le lien de causalité adéquate devront être plus nombreux et revêtir une intensité particulière pour que ce lien puisse être admis. Par ailleurs, notre Haute Cour tient bel et bien compte de cer­

tains des éléments précités, et notamment d’une position particulière au mo­

ment du choc (admise néanmoins de façon restrictive), de la corpulence et de l’absence éventuelle d’un appuie­tête, mais en principe uniquement afin d’examiner si le critère de la gravité ou la nature particulière des lésions phy­

siques est réalisé102. Il existe cependant à notre connaissance au moins une exception récente, dans le cadre de laquelle le TFA a examiné des éléments de nature biomécanique, y compris la position du lésé au moment du choc, déjà au stade de la classification de la gravité de l’accident103. Cette façon de faire n’est cependant pas nouvelle en ce qui concerne le critère du delta­v104, auquel la jurisprudence se réfère régulièrement pour qualifier un accident de bénin lorsque ce delta­v est inférieur à 10 km/h et que l’accident n’a pas de conséquences immédiates sur l’état de santé10.

99 Voir plus haut, p. 7.

100 Schmitt et al., p. 249, admettent qu’un cas ne peut plus être considéré comme standard sur le plan de la biomécanique lorsque la victime est âgée de plus de 50 ans pour les femmes et de 55 ans pour les hommes.

101 Arrêt du 15 mars 2005 in RAMA 2005 U 549, p. 237 c. 5.1.2, y compris les références.

102 Arrêt du 15 mars 2005 in RAMA 2005 U 549, p. 238 c. 5.2.3. Voir également les arrêts U. 488/2005 du 20 octobre 2006 c. 3.2.2, U.82/2004 du 14 mars 2005 c. 3.2, U.323/2000 du 5 septembre 2001 c. 5b, celui 24 juin 2003 in RAMA 2003 U 489 ,p. 357 c. 4.3 et celui du 16 janvier 1998 in RAMA 1998 U 297, p. 245 c. 3c.

103 Arrêt U.174/2003 du 10 novembre 2004 c. 5.3.

104 Voir notamment les arrêts U.14/2005 du 29 mai 2006 et U.144/2003 du 23 février 2005 c. 4.1.3.

105 Arrêt U.144/2003 du 25 février 2005 c. 4.1.3, y compris les références ; arrêt U. 228/2005 du 16 mars 2006 c. 2.3.

Lésions cervicales : enjeux pour la victime Il convient de préciser encore que cette classification remaniée ne doit pas conduire à un schématisme absolu dans l’examen de la causalité adé­

quate. Ainsi, il sied de maintenir, à titre exceptionnel, la jurisprudence selon laquelle l’existence d’un lien de causalité adéquate peut être examinée même en cas d’accident bénin, au moyen des critères développés pour les accidents de gravité moyenne, lorsque l’accident en question a des conséquences im­

médiates qui ne sont manifestement pas indépendantes de l’accident106. Cette soupape de sécurité est sans doute nécessaire pour éviter des décisions arbi­

traires qui ne feraient qu’ajouter à la souffrance de l’assuré107.

c) Les critères utilisés pour l’appréciation de la causalité adéquate C’est également parce qu’il nous apparaît nécessaire que la jurisprudence colle au plus près à la réalité des traumatismes de type « coup du lapin » que nous estimons que certains des sept critères utilisés par la jurisprudence pour ce genre d’accident devraient être purement et simplement abandonnés. Parmi ces critères, nous visons avant tout ceux liés aux circonstances dramatiques ou au caractère particulièrement impressionnant de l’accident, ainsi qu’à la gravité ou à la nature des lésions physiques.

Le premier d’entre eux n’a aucun sens dans le cadre des lésions non ob­

jectivables du rachis cervical, qui interviennent par définition dans le cadre d’accidents peu impressionnants. Il n’est d’ailleurs pour ainsi dire jamais re­

tenu en pratique108. Le maintien de ce critère, dont on comprend par contre toute la pertinence à propos des conséquences psychiques d’un accident, n’a pas d’autre effet que de restreindre sans motif réel l’admission de la causalité adéquate en matière de distorsions cervicales.

Le second n’est pas davantage pertinent dans un contexte où le TFA admet de partir du principe que les très probables lésions ne peuvent être détectées au moyen des techniques médicales habituelles. C’est dire que les lésions physiques particulièrement graves seront rares dans un tel contexte.

Il en va de même des lésions de nature particulière, dont on a montré ci­

dessus qu’elles ne devraient pas inclure celles découlant d’une position parti­

culière du lésé au moment du choc. En effet, cette circonstance doit être prise en compte dans le cadre de la qualification de l’accident, et il apparaît par ailleurs légitime de ne pas retenir en application de ce critère le diagnostic

106 Arrêt du 16 janvier 1998 in RAMA 1998 U 297, p.243 ; arrêt du 24 juin 2003 in RAMA 2003 U 489 c. 4.2.

107 Murer (p. 15) relève à cet égard qu’un système relativement schématique présente l’avantage d’éviter de longues, incertaines et coûteuses procédures. Certes, mais le sentiment d’injustice que peut ressentir un assuré face à une décision négative prise sans un examen approfondi de sa situation personnelle a également des conséquences sur sa santé et un coût pour la société.

108 Jäger, p. 299.

108

de distorsion cervicale en tant que tel109. Finalement et surtout, la position de l’assuré au moment du choc n’est pas en soi une lésion, mais uniquement un facteur susceptible, selon le cours ordinaire des choses, de favoriser une lésion.

d) Le rôle des expertises biomécaniques

La question de la différence de vitesse (delta­v), et de façon générale l’ensemble des éléments mis en avant par les expertises biomécaniques, fait l’objet d’une controverse récurrente, certains auteurs estimant que ce type d’expertise de­

vrait être examiné par le juge déjà au stade de la causalité naturelle110. La jurisprudence a écarté à plusieurs reprises cette proposition, estimant que ces analyses peuvent au mieux être prises en compte dans le cadre de l’examen de la causalité adéquate, dans la mesure où elles sont susceptibles d’apporter des indices utiles quant à la gravité de l’accident111. Le TFA motive cette position par le fait que, même en cas de collision apparemment anodine, l’existence d’une lésion au rachis cervical causant une atteinte à la santé ne peut pas être d’emblée exclue sur le plan médical112. Cela ne l’empêche pas par contre de tenir compte, dans certains cas, d’une expertise technique ou biomécanique conjointement avec les autres éléments de faits, notamment de nature médicale, dans le cadre d’une appréciation globale de la causalité naturelle113.

Plus récemment, le Tribunal fédéral des assurances a affirmé qu’il ne faut pas déduire de sa jurisprudence dans ce domaine que la violence du choc est sans importance pour la détermination de la causalité naturelle. En l’espèce, l’assuré avait déjà été victime de toute une série d’accidents antérieurs, si bien que le Tribunal a estimé, en se fondant sur ces circonstances, le dossier mé­

dical et la violence du choc, que le lien de causalité naturelle ne pouvait plus être admis avec un degré de vraisemblance prépondérante114. En raison de ce contexte bien particulier, et au vu d’un arrêt ultérieur extrêmement clair sur

109 Telle est la position constante du TFA à cet égard : arrêt du 15 mars 2005 in RAMA 2005 U 549, p. 238 c. 5.2.3, y compris les références.

110 Berger, p.31 ; Chappuis, p. 216 ; Steinegger, p. 493 ; Locher, p. 44. A l’inverse, Senn s’op- pose avec véhémence à la prise en compte de ce type d’expertises, dont il estime qu’elles ne sont pas fiables : Unfallanalyse, pp. 625 ss. ; voir aussi le même auteur, Harmlosigkeitsgrenzen, p. 274 ss.

111 Voir notamment les arrêts RAMA 2003 U 489 du 24 juin 2003, p. 357 c. 3.2, U.144/2003 du 25 fé-vrier 2005 c. 4.1.1, U.228/2005 du 16 mars 2006 c. 2.3 et U.14/2005 du 29 mai 2006 c. 3.1.

112 Arrêt du 24 juin 2003 in RAMA 2003 U 489, p. 357 c. 3.2.

113 Voir par exemple l’arrêt U.371/2002 du 4 septembre 2003 c. 3.1.1, qui examinait la question sous l’angle de la fin de la causalité naturelle, qui avait été admise pour les trois premières années suivant l’accident.

114 Arrêt U.264/2004 du 16 juin 2005 c. 3.4 et 3.6.

Lésions cervicales : enjeux pour la victime ce sujet11, cette décision ne semble pas augurer d’un changement de jurispru­

dence sur ce point.

A nos yeux, les expertises techniques et biomécaniques relèvent néces­

sairement de la causalité adéquate. De l’aveu même de leurs partisans et de ceux qui les pratiquent, ces expertises ont pour seul objectif de déterminer si des lésions durables peuvent dans un cas précis être expliquées par le dé­

roulement concret de l’accident116. En d’autres termes, il s’agit de savoir si l’accident en question est en soi propre à causer un résultat du type de celui qui s’est produit. Il s’agit donc bien de causalité adéquate. Certes, par l’inter­

médiaire du degré de vraisemblance prépondérante, l’examen de la causalité naturelle peut inclure également un certain jugement de valeur. Mais comme ces expertises ne portent par hypothèse que sur le déroulement de l’accident lui­même, elles ne peuvent en soi permettre de déterminer si cet accident constitue selon toute vraisemblance une condition sine qua non des lésions qui ont suivi. Seul l’examen du dossier médical, et plus particulièrement de l’anamnèse de l’assuré, permet de répondre à cette question117. Précisons en­

fin qu’on doit se garder de confondre une expertise biomécanique et le juge­

ment de valeur qu’elle contient avec les éléments de faits sur lesquels elle se fonde, à commencer par la violence du choc. Ce sont ces éléments seulement que le TFA a parfois pris en compte dans l’examen de la causalité naturelle.

e) Le rôle de l’expertise médicale

Ce débat sur la fragile limite entre causalité naturelle et adéquate est l’occa­

sion pour nous de mettre en avant une problématique extrêmement impor­

tante en pratique, soit celle du rôle de l’expert médical et de sa perception de ces deux concepts, qui sont en soi de nature strictement juridiques.

Il n’est pas rare en effet que l’expert médical, interpellé sur la question de la causalité naturelle, se prononce en réalité sur la causalité adéquate, dans ce sens où il n’examine plus strictement si, sans l’accident assuré, l’atteinte à la santé serait survenue ou non de la même façon, mais émet un jugement de

115 Arrêt U.14/2005 du 29 mai 2006 c. 3.1.

116 Berger, p. 28 ; Niederer et al., p. 1535.

117 C’est d’ailleurs le raisonnement que tient le TF en droit de la responsabilité civile (arrêt 4C.222/2004 du 14 septembre 2004 c. 2.2 non publié in ATF 131 III 12) : le juge ne viole pas le droit à la contre-preuve du défendeur s’il refuse la mise sur pied d’une expertise biomécanique en considérant, en partie par une appréciation anticipée des preuves, qu’une telle expertise n’est pas à même de remettre en cause les faits qu’il estime établis avec un degré de vraisemblance prépondérante sur la seule base du dossier médical. La portée de cet arrêt quant à la force pro-bante de ce type d’expertise est néanmoins litigieuse : Müller (Kausalzusammenhang, p. 147), Bühler (p. 72) et Siedler (Beweisfragen, p. 82) partagent notre lecture de cette décision, alors que Berger (p. 32) estime pour sa part que le TF a simplement respecté l’appréciation souve-raine des faits par les premiers juges.

110

valeur sur la question de savoir si en principe un tel événement est de nature à causer un tel résultat, un peu comme le ferait un expert biomécanique118. Nécessairement, un médecin chargé d’étudier les causes d’une atteinte à la santé va donner son avis en se basant sur le cours ordinaire des choses, d’où un risque important qu’il glisse subrepticement du fait au droit119.

Cette confusion peut être lourde de conséquences pour l’assuré, quelle que soit la lésion dont il est victime. Dans les cas de distorsions du rachis cervical, une mauvaise compréhension de la notion de causalité naturelle

Cette confusion peut être lourde de conséquences pour l’assuré, quelle que soit la lésion dont il est victime. Dans les cas de distorsions du rachis cervical, une mauvaise compréhension de la notion de causalité naturelle