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Chapitre III : MAGISTÈRE DE L’ÉGLISE CATHOLIQUE ROMAINE ET

SECTION 1 : CONTEXTE HISTORIQUE DE LA CONDAMNATION DE GALILÉE

A. Objet de la procédure

aux saintes Écritures. Raison pour laquelle elles prohibèrent expressément des écrits susceptibles de mettre en péril la foi catholique.463 La sanction prononcée par la Congrégation de l’Index apparaît ainsi comme une mesure préventive. Elle visait à protéger la vérité catholique contre une doctrine que les cardinaux jugeaient pernicieuse.464

§ 2. Procès de 1633 : la condamnation de Galilée

A. Objet de la procédure

Lorsque Galilée publia son livre intitulé Saggiatore (l’Essayeur) et le remît officiellement le 27 octobre au pape Urbain VIII465, il bénéficiait des faveurs de la cour romaine notamment du pape Urbain VIII et de son neveu Franscesco Barberini466. Cependant la publication, en février 1632, de son ouvrage intitulé

Dialogue467 aux éditions des presses du libraire Landini à Florence468 allait profondément affecter ce statut privilégié dont jouissait le mathématicien.469

463 Telle est d’ailleurs la pensée de Galilée lorsqu’il affirme que « l’issue de cette affaire a montré que mon opinion n’a pas été acceptée par l’Église catholique romaine. Elle a seulement fait déclarer que cette opinion n’était point conforme aux saintes Écritures. D’où il suit que les livres voulant prouver ex professo que cette opinion n’est pas opposée à l’Écriture sont les seuls prohibés. » Voir Galilée, Opere complete, t. VI, p. 131.

464 « Ideo nè ulterius hujusmodi opinio in perniciem Catholicae veritatis serpat, … » Voir Henri de L’ÉPINOIS, op. cit., p. 42.

465 Après les deux ans du pontificat de Grégoire XV (1621-1623) Maffeo Barberini fût élu pape sous le nom de Urbain VIII. Florentin d’origine, il est présenté comme un humaniste ouvert à la pensée scientifique et grand admirateur de Galilée. Voir Émile NAMER, op. cit., p. 164.

466 Franscesco Barberini, neveu d’Urbain VIII était alors promu au gouvernement du Pontife et membre de l’Académie des Lincei à laquelle appartenait Galilée et dont ce dernier bénéficiait d’un soutien indéfectible.

467 Cet ouvrage est une discussion critique des deux plus grands systèmes du monde à savoir le système de Ptolémée et celui de Nicolas Copernic. Il est écrit sous forme de dialogue entre trois personnages symboliques qui représentent d’une part les tenants des deux courants de pensée et d’autre part un auditeur averti et neutre : Simplicio défend les thèses aristotéliciennes confirmées par la tradition et la doctrine sur laquelle l’ordre du monde est établi ; Salviati est le savant, chercheur qui observe, explore le "livre de la nature" pour découvrir ses lois et son mode de fonctionnement. Sagredo est le représentant d’un homme juste, honnête et indépendant qui apprécie les arguments des deux tenants des systèmes astronomiques. Le débat entre ces trois représentants se déroule pendant quatre journées au cours desquelles chaque représentant développe les arguments de son école de pensée.

468 L’ouvrage est publié à Florence avec l’imprimatur que le Maître du Sacré Palais lui avait accordé sous condition d’une révision et valable pour Rome mais aussi avec la permission de l’inquisiteur

Dès la parution de l’ouvrage de Galilée, le pape Urbain VIII constitua une Commission spéciale de savants théologiens et d’experts scientifiques convoqués pour examiner l’ouvrage de Galilée. Leur mission consistait à déterminer si l’œuvre portait préjudice à l’intérêt de la religion. À l’issue des travaux, la Commission extraordinaire confia la cause au Tribunal du Saint-Office.

La procédure fût initiée lorsque le pape Urbain ordonna, le 18 septembre 1632, la transmission de l’original du texte manuscrit du Dialogue et de l’approbation du Réviseur au tribunal du Saint Office. Une semaine plus tard, le 25 septembre 1632, le cardinal inquisiteur et frère de Urbain VIII, Antonio Barberini adressa une citation à comparaître à Galilée par le biais de l’inquisiteur de Florence. Le 2 octobre de la même année, Galilée prît acte de la citation en signant le certificat qui attestait que la convocation devant le Saint-Office lui fut adressée par l’Inquisiteur florentin en présence du notaire et des témoins, selon les instructions déterminées par le cardinal inquisiteur, Antonio Barberini. Galilée est contraint de quitter Florence le 21 janvier 1633. Il arriva à Rome le 13 février 1633 pour comparaître devant les juges du Saint Office. Lors du procès de 1633, Galilée comparut à trois reprises devant les juges du Tribunal du Saint-Office pour trois interrogatoires : le premier en date du 12 avril 1633, le second du 30 avril de la même année et sa défense du 21 juin 1633.

Les trois interrogatoires au cours desquels Galilée est confronté aux juges du Tribunal du Saint Office permettent de mettre en lumière l’objet et les raisons de

de Florence. Cependant il est reproché à Galilée d’avoir publié son ouvrage à Florence plutôt qu’à Rome sans honorer les indications romaines et sans tenir compte des conditions qui accompagnaient l’imprimatur accordée par Rome et par l’Inquisiteur de Florence.

469 Nous soulignons le contexte politique marqué par la guerre de Trente Ans et la lutte contre "l’hérésie protestante" et tout courant innovateur pour comprendre l’attitude des autorités ecclésiastiques. Cf. Émile NAMER, op. cit., p. 197.

Mais parmi les principaux reproches que le Maître du Sacré Palais adressait à Galilée figurent ceux-ci : L’usage de l’Imprimatur de Rome sans avoir accompli les conditions requises et qui accompagnaient son autorisation ; Galilée avait transgressé l’ordre selon lequel il fallait aborder la question de la mobilité de la terre en terme d’hypothèse et non en absolu ; il parle indûment de l’existence du flux et du reflux des marées comme preuve réelle du mouvement de la terre et de la stabilité du soleil ; Il a frauduleusement caché le précepte établi en 1616 par le Saint Office qui lui prescrivait d’abandonner l’opinion selon laquelle le soleil est le centre du monde et la terre se meut entièrement, aussi il ne devait ni soutenir, ni enseigner, ni défendre par la parole et par écrit, sous peine des poursuites par Saint Office : Un précepte qu’il avait accepté et s’était engagé de respecter sa promesse. Voir Henri de L’ÉPINOIS, op. cit., p. 44-45.

sa mise en examen. Dès le premier interrogatoire, le lien avec les motifs du procès de 1616 sont établis.

Le premier interrogatoire du 12 avril 1633, après quelques questions de procédure, établit le lien avec le procès de 1616. Il est demandé à Galilée de s’expliquer sur les motifs et l’objet (la raison) de sa rencontre avec les cardinaux Robert Bellarmin, Araceli, Eusebio et d’Ascoli du Saint Office. Ensuite l’interrogatoire s’oriente sur l’existence d’un précepte que lui avait notifié le cardinal Bellarmin et qui lui ordonnait de ne point défendre, ni enseigner la doctrine copernicienne. Une autre raison apparaît lors de ce premier interrogatoire : Galilée aurait dissimulé au Maître du Sacré Palais l’existence du précepte qui lui avait été imposé par la Sainte Congrégation en 1616. Enfin, lors de son examen, Galilée nia avoir soutenu ou défendu l’opinion de la centralité du Soleil et de la mobilité de la terre dans son livre. Une négation que les examinateurs de son livre allaient aisément contredire à partir des citations issues de son œuvre.

Confronté à cette erreur que contredisait l’examen de son livre, Galilée reconnût et confessa, au cours du deuxième interrogatoire du 30 avril 1616, le caractère faible des arguments contre la doctrine copernicienne. Il reconnût que certains passages prêtaient à penser qu’il argumentait en faveur de la théorie copernicienne d’autant plus que ses arguments contre cette théorie apparaissaient insuffisants et peu efficaces.470 Aux yeux des autorités romaines, son œuvre est une défense du système copernicien.

Dans sa dernière confrontation en date du 21 juin 1633, Galilée précisait sa ligne de défense : en publiant le Dialogue, son intention visait à exposer et à expliquer les motifs naturels et scientifiques qui permettent de postuler en faveur de l’un ou de l’autre système. 471 Il voulait ainsi montrer qu’aucune de ces théories n’était scientifiquement établie.Par conséquent, la tâche revenait aux scientifiques de mener librement des recherches et d’apporter des arguments scientifiques

470 Il affirmait «qu’en plus d’un endroit, un lecteur, non prévenu de mon intention, pourrait penser que les arguments que j’entendais réfuter ne l’étaient pas de façon suffisante et efficace. » Cf. Émile NAMER, op. cit., p. 216.

convaincants pour enrichir les débats scientifiques et contribuer aux progrès de la science.