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Objectif de croissance du PIB et capacités productives

Les capacités productives évoluent très lentement

C. Évaluer les progrès des PMA dans la réalisation des objectifs dans la réalisation des objectifs

1. Objectif de croissance du PIB et capacités productives

Il est établi que le Programme d’action d’Istanbul ne pourra pas être réalisé sans une croissance solide du PIB. Or, l’objectif d’une croissance d’au moins 7  % par an est généralement resté inaccessible.

Il n’a jamais été atteint que par 13 PMA pendant la période 2015-2018, et les pays qui sont parvenus à maintenir ce taux au cours des années qui ont suivi sont encore moins nombreux. Depuis 2011, la croissance du PIB s’est ralentie dans les pays en développement et, dans l’ensemble, a été orientée à la baisse dans les PMA (fig.  3.5). L’ampleur des retombées de la récente pandémie de COVID-19 est incertaine, car la situation est en constante évolution.

Il reste que ce qui est apparu comme une crise de santé publique a mis en évidence la faiblesse structurelle des PMA, leur vulnérabilité aux chocs économiques et leur inaptitude à mobiliser des capacités productives pour s’adapter à la situation du marché.

Si le taux de croissance des PMA s’est rapproché sensiblement de celui des autres pays en développement, il demeure insuffisamment élevé

Figure 3.6

RNB par habitant dans les PMA et les autres pays en développement, valeur moyenne en dollars courants des États Unis

Source : Calculs du secrétariat de la CNUCED, d’après la base de données UNCTADStat de la CNUCED (date de consultation : avril 2020).

0 1 000 2 000 3 000 4 000 5 000 6 000 7 000

RNB par habitant en dollars courants des États-Unis

Autres pays en développement Pays les moins avancés

1970 1972 1974 1976 1978 1980 1982 1984 1986 1988 1990 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004 2006 2008 2010 2012 2014 2016 2018

pour permettre de résorber l’écart de revenu entre ces deux groupes de pays. Concrètement, l’écart entre les PMA et les autres pays en développement a été réduit d’un à deux points de pourcentage pour ce qui est de la croissance du PIB, mais s’est creusé, en valeur absolue, pour ce qui est du revenu, exprimé en RNB par habitant (fig. 3.6). Les taux de croissance réelle exagèrent généralement la situation conjoncturelle des pays (Scarpetta et  al., 2000), et dans le cas des petites économies, les idiosyncrasies du marché qui influent sur la croissance, cyclique et tendancielle, peuvent paralyser la prise de décisions.

Les PMA et les autres pays en développement présentent des taux de croissance tendancielle comparables (fig.  3.7), mais leurs différences de poids économique indiquent que les premiers sont de plus en plus distancés par les seconds et qu’il est manifestement nécessaire de surveiller les écarts et les variables de la croissance tendancielle. Au début des années 1970, il était évident que les PMA étaient à la traîne des autres pays en développement, mais la rapidité avec laquelle l’écart s’est creusé entre 2000 et 2018 est inédite. Dans ces deux groupes de pays, le montant moyen du RNB par habitant a presque quadruplé. Il est d’un peu plus de 1 000 dollars dans

les PMA et de plus de 6 000 dollars dans les autres pays en développement (fig. 3.6). Si les PMA veulent rattraper les autres pays en développement, il faudra qu’ils continuent de courir et que les autres marchent (Mkandawire, 2011).

a. Utilisation et efficience des capacités productives Outre des facteurs conjoncturels, des facteurs structurels tels que des changements démographiques, des écarts dans la productivité du travail et l’état de la technologie jouent un rôle déterminant dans les perspectives de croissance des pays (Scarpetta et al., 2000). Le revenu par habitant est un bon indicateur du développement économique, car il tient compte de facteurs démographiques et de la taille de l’économie (Kopf, 2018). Comme il ressort de la section B, le creusement des inégalités entre les PMA et entre ceux-ci et les autres groupes de pays en matière de croissance du PIB par habitant s’explique en partie par l’utilisation plus ou moins efficiente des capacités productives.

La manière dont les ressources productives, les aptitudes entreprenariales et les liens de production sont combinés et pondérés détermine dans quelle

L’analyse de frontière stochastique est une extension de l’analyse de la production. Elle tire son origine de l’analyse des fonctions de production, de coût et de bénéfice au niveau d’une entreprise ou d’un secteur (Kumbhakar and Lovell, 2000 ; Kumbhakar et al., 2015). Étant donné les fonctions microéconomiques qu’elle fait intervenir, la frontière de production au sens macroéconomique correspond au niveau maximal de production qui peut être atteint par différentes combinaisons d’intrants (Kumbhakar et al., 2015).

yit = ƒ(Xit,ß)eƐit ≤ Yit

Où yit est la production effective d’un pays à un moment t, Xit un vecteur des huit catégories de capacités productives, Yi la production potentielle, c’est à dire le niveau maximal de production pouvant être atteint compte tenu du niveau des capacités productives, et eƐit = vit + uit le résidu. Il est présumé que la première composante du résidu, vit, présente une distribution symétrique, identique et indépendante, correspondant à une distribution aléatoire de la production avec une moyenne nulle et une variance σx et que la seconde composante, uit, présente une distribution normale tronquée. La frontière stochastique peut tenir compte de l’évolution technique et d’éléments d’inefficience technique variant dans le temps, selon les différentes hypothèses sur la relation entre l’inefficience technique et les variables explicatives (Battese and Coelli, 1995).

L’efficience est mesurée par le ratio entre la production effective et la production potentielle, selon la formule : Production effective = yit = ƒ(Xit,ß)eƐit

Production potentielle Yit Yit

Les valeurs de l’efficience vont de 0 à 1, cette dernière valeur correspondant à l’efficience maximale. Pour une étude récente de la méthode, voir les travaux de Kumbhakar et Tsionas (Kumbhakar and Tsionas, 2011).

Encadré 3.1

L’analyse de frontière stochastique en bref

mesure un pays fait preuve d’efficience dans la production de biens et de services, et peut dont progresser. Les capacités productives, qu’elles soient agrégées ou réparties en huit catégories, impliquent, pour chaque pays, un niveau maximal de production inobservable, exprimé par la formule ƒ(ICP) = Y(PIB potentiel, total ou par habitant). Le niveau de production observé n’est pas optimal s’il est inférieur au niveau de production potentielle ou juste suffisant si les capacités productives sont utilisées de manière efficiente, suivant la formule y ≤ Y = ƒ(ICP).

À un niveau donné de capacités productives peuvent correspondre différents niveaux de production, car tous les pays n’utilisent pas leurs capacités productives de la même façon. Un modèle de frontière stochastique permet de rendre compte de ces différences en appliquant à tous les pays la même technologie de production (forme fonctionnelle) et décompose les écarts par rapport à la frontière en composantes d’inefficience et de bruit (voir l’encadré  3.1) (Wijeweera et  al., 2010  ; Kumbhakar and Lovell, 2000  ; Kumbhakar et  al., 2015).

L’utilisation de techniques d’enveloppement des données pour comparer les PMA à d’autres groupes de pays présente un inconvénient, à savoir que

l’efficience est calibrée en fonction de l’élément le plus performant de l’échantillon considéré et peut varier sous l’effet de facteurs externes, qui ne sont pas pris en considération (Erkoc, 2012). Pour remédier à la situation, le modèle de frontière stochastique − dont découlent les résultats de l’analyse figurant dans le présent chapitre − comprend une variable indicatrice pour les PMA. De plus, comme le but de l’analyse est d’asseoir la politique de développement des PMA et de comparer leurs progrès avec ceux d’autres groupes de pays, il serait peu instructif d’estimer la frontière de production seulement pour les PMA.

Il est possible d’apporter deux corrections au modèle de frontière stochastique appliqué aux données individuelles combinées. L’ajout d’une variable indicatrice pour les PMA, suivant la proposition déjà mentionnée, permet de tenir compte des différences entre les pays, dans l’hypothèse où l’inefficience varie dans le temps et persiste au niveau des pays.

Une autre option consiste à adopter deux modèles de frontière stochastique, l’un pour le seul groupe des PMA et l’autre pour les PMA et les autres pays en développement, et à vérifier la cohérence des estimations obtenues au regard de l’échantillon combiné. Pour des exemples d’application de ces méthodes, voir les travaux de Guo et al. (Guo et al., 2018) et de Kumbhakar et Tsionas (Kumbhakar and Tsionas, 2011).

Figure 3.7

Taux de croissance tendancielle du PIB par habitant et du PIB réel selon le filtre de Hodrick Prescott55

5 Le filtre de Hodrick-Prescott (filtre HP) est une technique de lissage des données permettant de décomposer une série temporelle en composantes tendancielles et composantes conjoncturelles. En macroéconomie, il est utilisé pour dissocier les effets des variations à court terme associées à un cycle économique (de Jong and Sakarya, 2015).

-4 -2 0 2 4 6 8 10 12 14 16

1990 1991 1992

1993

199419951996 19971998

1999 2000 2001

2002 2003

200420052006 20072008

2009 2010 2011

2012 2013

201420152016 20172018

1990 1991 1992 1993

1994 19951996

1997199819992000 2001 2002 2003

2004 20052006

2007200820092010 2011 2012 2013

2014 20152016

20172018

Taux de croissance tendancielle du PIB par habitant (En pourcentage)

PMA Autres pays en développement

0 1 2 3 4 5 6 7 8

Taux de croissance tendancielle du PIB réel (En pourcentage)

PMA Autres pays en développement

Source : Calculs du secrétariat de la CNUCED, d’après la base de données UNCTADStat de la CNUCED (date de consultation : avril 2020).

Figure 3.8

Frontière stochastique de production, 2018

Source : Calculs du secrétariat de la CNUCED, d’après la base de données UNCTADStat de la CNUCED (date de consultation : mai 2020).

NORLUX IRL DNK QAT CHE

SGP USA

ISL FRA

HKGCYP GUM

KORSVN CZE SAU LVA HRVSVK

ROU GNQ

CHNCRI LBY VEN

TON IRQ TUV

AGO

GTM BTN TLSVUT

INDNGA LAO SDN

ZWE BGDLSO

KGZ

NPL TCD

YEM MOZ

ETH

CAF BDI

0,0 2,0 4,0 6,0 8,0 10,0 12,0

0,00 0,10 0,20 0,30 0,40 0,50 0,60 0,70 0,80

Logarithme du PIB par habitant

Niveaux d’efficience technique prévus selon les estimations de la frontière stochastique

Frontière stochastique de production, 2018

Conformément aux attentes, les pays développés et les pays en développement autres que les PMA bordent la frontière de production, tandis que les PMA sont à l’intérieur de celle-ci (fig. 3.8). L’Angola, les Tuvalu, Vanuatu et le Soudan se distinguent par leur utilisation plus efficiente des capacités productives, mais il convient de préciser qu’en l’espèce, la production est mesurée par le revenu par habitant (fig.  3.9)6. Bien qu’il existe une corrélation positive entre les capacités productives et le revenu

6 Les PMA insulaires présentent des valeurs aberrantes pour la plupart des résultats, à cause du problème habituel de l’échelle de mesure. Du fait de leur faible population, ils obtiennent de meilleurs résultats que les autres PMA dans les catégories de capacités productives pour lesquelles des variables par habitant sont utilisées. Ils obtiennent aussi de meilleurs résultats en ce qui concerne les institutions et le capital humain. Cette particularité des PMA insulaires devrait être prise en considération lorsqu’on les compare avec d’autres groupes de pays.

par habitant, l’accroissement marginal du revenu par habitant induite par une plus grande efficience unitaire dans l’utilisation des capacités productives s’infléchit rapidement pour les PMA, en comparaison avec d’autres groupes de pays. Cela tient au fait que les PMA présentent des résultats incohérents dans certaines catégories de capacités productives, qui sont des sources potentielles d’accroissement du revenu. Par  exemple, les PMA se distinguent par leurs ressources naturelles, mais l’utilisation de cette catégorie de capacités productives est faible ou compromise par des facteurs de vulnérabilité.

L’élasticité partielle négative des ressources naturelles par rapport au revenu par habitant suppose que l’accumulation de richesses sous la forme de ressources naturelles est suivie d’une progression du PIB par habitant à un rythme décroissant (tableau 3.3).

Il en va de même pour le capital humain et le changement structurel, qui présentent tous deux des

Figure 3.9

Évolution marginale du revenu par habitant, par unité d’utilisation des capacités productives

Source : Calculs du secrétariat de la CNUCED, d’après la base de données UNCTADStat de la CNUCED (date de consultation : mai 2020).

AGO

0,00 0,10 0,20 0,30 0,40 0,50 0,60 0,70

PIB par habitant

0,00 0,10 0,20 0,30 0,40 0,50 0,60 0,70

PIB par habitant

Niveaux d’efficience prévus

2011

coefficients négatifs dans l’échantillon d’estimation combiné. Les PMA ont eu du mal à développer leur capital humain, ce qui explique les faibles valeurs des variables qui composent ce sous-indice, incluant les années de scolarisation et l’espérance de vie corrigée en fonction de la santé. Quant au changement structurel, ce sous-indice est notamment composé du ratio industriel, dont la hausse, dans certains pays, est moins due à la croissance industrielle qu’à une augmentation de la part des services7. Les PMA ont progressé sur d’autres plans, comme la formation brute de capital fixe et la concentration des exportations, mais pas autant que d’autres groupes de pays figurant dans l’échantillon combiné. Il faut aussi mentionner l’incidence très négative de la variable indicatrice des PMA, qui confirme l’écart de revenu par habitant entre les PMA et les autres groupes de pays.

On se gardera de généraliser et d’affirmer que tous les PMA utilisent leurs capacités productives de manière peu efficiente. Entre 2011 et 2018, le revenu par habitant a augmenté sensiblement dans plusieurs pays tels que le Bhoutan, le Soudan et les Tuvalu.

Par contre, dans d’autres pays, comme l’Angola, le Timor-Leste et le Yémen, le revenu par habitant a

7 Le ratio industriel est le rapport entre la création de valeur ajoutée par l’industrie et les services et le PIB total. Pour de plus amples renseignements, voir l’annexe.

reculé, bien que l’utilisation des capacités productives soit devenue légèrement plus efficiente (fig.  3.9).

Compte tenu de sa situation en matière de sécurité, le Yémen est un cas particulier. Son faible revenu par habitant témoigne de l’impact du conflit sur son économie et sa population. En ce qui concerne l’Angola, le Bhoutan, le Soudan, le Timor-Leste, les Tuvalu et Vanuatu, le rendement de l’utilisation des capacités productives dépend de ressources naturelles qui sont extrêmement vulnérables aux bouleversements économiques mondiaux, aux catastrophes naturelles et aux chocs écologiques.

b. Incidences marginales des différentes capacités productives telles qu’elles sont définies dans le Programme d’action d’Istanbul

Dans le Programme d’action d’Istanbul, l’infrastructure, l’énergie, la science, la technologie et l’innovation (STI) et le développement du secteur privé sont présentés comme des capacités productives essentielles.

Les estimations de la frontière stochastique sont en accord avec les conclusions de la CNUCED selon lesquelles le développement économique profite du développement des infrastructures et la consommation d’énergie du secteur industriel est liée au niveau de revenu et au stade de développement du pays considéré. Elles montrent qu’une hausse de 1 % des infrastructures énergétiques fait progresser

le revenu par habitant de 0,12  % seulement (tableau  3.3). Il faudra donc accélérer sensiblement le développement des infrastructures énergétiques pour augmenter le PIB par habitant dans les PMA.

«  [É]lever la production d’électricité au niveau minimum nécessaire à un usage productif signifierait augmenter celle-ci d’un coefficient compris entre 3,4 et 6,8 » (UNCTAD, 2017a).

Il est entendu que les institutions, le secteur privé, les TIC et les infrastructures de transport ont aussi un rôle positif. De façon moins évidente, un changement structurel pourra avoir un effet négatif. C’est un processus long, dont le rythme est dicté par des facteurs tels que : i) la dynamique de croissance de l’économie, ii)  la découverte de nouvelles technologies ou ressources naturelles, iii) l’innovation et l’apprentissage et iv) les mécanismes du marché (Islam and Iversen, 2018). Comme indiqué au chapitre  1, les secteurs ayant le plus profité de l’évolution de la structure de la production dans les PMA ne correspondent pas à des activités économiques susceptibles de contribuer à la croissance. Il s’agit de secteurs de services qui se caractérisent par un faible niveau de rémunération, une préférence donnée au travail indépendant plutôt qu’à la création d’emplois, un caractère très informel et une instabilité du revenu (Bah, 2011). La coexistence d’un secteur agricole peu productif, mais offrant de nombreuses possibilités d’emploi, et d’un secteur des services non compétitif à faible productivité, conjuguée à un taux élevé d’informalité et à une faible intégration dans les chaînes de valeur mondiales, concourt à atténuer les effets d’un changement structurel sur le PIB réel par habitant (UNCTAD, 2018a).

2. Agriculture, sécurité alimentaire

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