• Aucun résultat trouvé

Notion de secret protégé

A. Limitations relatives aux secrets

1. Notion de secret protégé

La notion de secret protégé est, à quelques nuances près, identique selon ces trois dispositions4 • Toutes concernent les secrets de fabrication

4 Manfred RE.!œINDER, Gegenstand und Voraussetzungen des vertraglichen Konkur·

renzverbots im Arbeitsrecht, M~langes Berenstein, Lausanne 1989, p. 285 ss, 293; Olivier WENIGER, La protection des secrets ~onomiques et du savoir· faire,

th~se Lausanne 1994, p. 144 s.; pour !Ire précis, il faut relever, à l'instar de GEISER, que la notion de secret de l'art. 32la CO est plus large que oelle figurant dans la LCD ou dans le CP, car elle comprend aussi des faits relevant de la sphère personnelle et fmanci~re de l'employeur (cf. Thomas GEISER, Die Treuepflicht des Arbeitnehmers und ihre Schranken, th~se Bâle 1983, p. 243 s.).

ou les secrets d'affaires (désignés aussi sous l'expression de «secrets commerciaux"S) et attribuent le même sens à ces termes.

Les secrets de fabrication ont pour objet les connaissances techni-ques de l'entreprise, tels les procédés, le savoir-faire, les formules, soit, d'une manière générale, tous les moyens qui confèrent à l'activité de l'employeur un niveau technique et économique lui permettant de se maintenir et de se développer face à la concurrence6. Les secrets d'affaires ou secrets commerciaw: concernent plutôt le fonctionnement économique de l'entreprise. En font notamment partie les listes de clients7, les sources d'approvisionnement ou les débouchés de l' entreprise8•

Pour être qualifiées de secrètes, ces connaissances doivent encore remplir certaines conditions.

n

faut ainsi:

qu'elles ne soient ni de notoriété publique ni facilement accessibles;

que l'employeur ait un intérêt légitime à en protéger l'exclusivité;

et enfm que l'employeur n'entende pas les divulguer. La volonté de garder un fait secret n'a pas besoin d'être expresse, si elle peut se déduire des circonstances9.

Par exemple, les préparatifs de fusion ou d'absorption de sociétés en matière de délits d'initiés sont considérés comme des secrets d'affaireslO•

En revanche, des informations connues de tous les membres d'un secteur d'activité, une technique que tout visiteur d'une entreprise peut s'approprier, ainsi qu'un modèle figurant dans un prospectus ne

L'art. 162 CP parle de secret commercial et non de secret d'affaires. Toutefois, le concept est le même (Robert Roth, La protection pénale de l'employeur centre la déloyauté de l'employé, in Le droit du travail en pratique, vol. 9, Zurich 1995, p.27 ss, 40).

Pierre !:.NOE!., ContraIS de drcit suisse, Berne 1992, p. 285; HONSEUlVoorl WIEGAND, Kommentar zum schweizerischen Privatrecht, Obligationenrecht J, Bâle

1992, ad art. 321a n' 6.

FF 1967 II p. 309.

En ce qui concerne la notion de secret d'affaires issue des dispositions concernant le contrai de travail, cf. ENGEl., op. cil. note 6, p. 285; HONSEU./Voor/WIEGAND,

REHBINDER, Gegenstand und Voraussetzungen, op. cil. note 4, p. 293; WENlOER,

op. cit. note 4, p. IS et 144 ss.

10 AlF 109 lb 47 consid. 5c p. 56.

11 WENIOER, op. cil. note 4, p. 147.

b) Secret que le travailleur a lui-même découvert

Ce n'est pas parce que le travailleur a lui-même découvert un élément qui peut être qualifié de secret, qu'il peut en disposer librement à la fm de son activité. En effet, encore faut-il détenniner à qui appar-tient le droit d'utiliser ce secret. La réponse à cette question figure aux articles 332 et 332a CO, ainsi que dans les lois de propriété intellec-tuelle applicables. Selon l'art. 332 al. 1 CO par exemple, les inventions que le travailleur a faites dans l'exercice de son activité au service de l'employeur et conformément à ses obligations contractuelles appar-tiennent à l'employeurl2. Il en va de même des droits exclusifs d'utilisation du logiciel créé par le travailleurl3. Sans entrer dans les détails, il convient de retenir que si l'employeur peut exercer seul les droits d'utilisation de la découverte, alors le travailleur est soumis à l'obligation de garder le secret à l'égard de son ancien employeur, indépendamment du fait qu'il est lui-même à l'origine de cette découverte.

c) Distinction avec l'expérience professionnelle

L'expérience professionnelle n'entre pas dans le concept du secretl4.

En principe, le travailleur est donc libre d'utiliser les connaissances et l'expérience qu'il a acquises chez son précédent employeur pour améliorer sa situation économique. Il est toutefois souvent difficile de déterminer précisément ce que le travailleur a acquis par son expé-rience et ce qui relève du secret de son employeurl5.

Si le travailleur a été formé à une teèhnique de fabrication qui n'existe que dans une seule entreprise, on aura tendance à considérer qu'il s'agit d'un secretl6. En revanche, les connaissances qui peuvent être acquises dans toutes les entreprises de la même branche font partie de l'expérience professionnelle du travailleurl7. Cette distinction va donc dépendre des circonstances, mais elle est souvent malaisée.

12 S1REIfFivON KAENEL, Arbeitsvcrtrag, Leitfaden zum Arbeitsvertragsœcht, Se M.

Zurich 1992, p. 297.

13 Selon l'article 17 de la Loi fédérale du 9 octobre 1992 sur le droit d'auteur (RS 231.1), _L'employeur est seul autorisé à exercer les droits exclusifs d'utili-sation sur le logiciel créé par le travailleur dans l'exercice de son activité au service de l'employeur et conformément à ses obligations contractuelles».

14 SJ 1989 p.684; GE1SER, op. cit. note 4, p.242; WENIGER, op. cit. note 4, p. 150.

15 ENGfl., op. cit. note 6, p. 286; RElmERGISClIMIDT, Strafrecht III, 50 éd. Zurich 1994, p. 254.

16 ATF 103 N 283 consid. 2c p. 285; GUnter SnA'ŒNWERlll, Schweizerisches Strafrecht, Besonderer Teil l, 5e éd. Berne 1995, p. 406 s. n' 4.

17 SJ 1989 p. 684.

2. Comportements non autorisés

Du point de vue du travailleur, les articles 321a al. 4 CO, 6 LCD et 162 CP interdisent tous, sous une tenninologie différente, la révélation ou l'utilisation du secre(18.

La révélation est conçue dans un sens large. Il suffit que le secret soit transmis à des personnes n'y ayant pas accès pour que l'on consi-dère qu'il a été révélé. Quant à l'utilisation, elle peut se faire à son propre profit ou au profit d'un tiersl9 .

Il en découle que le travailleur qui copie un fichier confidentiel de son employeur sur son ordinateur personnel, sans l'exploiter ni le divulguer, ne viole pas son obligation de secret20. Un tel acte peut cependant tomber sous le coup d'autres dispositions. Nous pensons en particulier à l'art. 143 CP qui vise la soustraction de données, mais il faut alors que le travailleur ait un dessein d'enrichissement illégitime.

Ce n'est pas le fait de cbercber à connaître indÜment certaines informations qui est visé par les dispositions protégeant le secret21 . Seul l'article 4c LCD concernant l'incitation à trahir les secrets pourrait s'appliquer au travailleur qui prend contact avec ses anciens collègues, afm de leur proposer de découvrir les secrets de leur employeur22 .