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La notion d’intérêt à se pourvoir

Pour avoir un intérêt à agir, il est nécessaire d’avoir été mêlé à tout le procès pénal, ainsi par exemple, doit être déclaré irrecevable le pourvoi d’une partie civile non appelante488. Il faut également que la décision fasse grief au demandeur489, autrement dit, qu’il ait un intérêt à la faire casser490.

L’intérêt à se pourvoir en cassation est « l’intérêt juridique que la partie requérante

souhaite directement revendiquer lors de la formation de la procédure du pourvoi en

cassation pour se protéger contre la décision qui lui fait grief »491. Il revêt une spécificité qui le distingue clairement de l’intérêt comme condition de l’action en justice. Cette spécificité se caractérise par la présence d’un grief subi par le demandeur492. Ce grief existe dès lors que le jugement contesté viole l’un de ses droits. C’est pour cette raison que le pourvoi en cassation n’est pas accepté sur la base d’une erreur ou d’une nullité grevant la décision ou la procédure si cette erreur ou annulation ne fait pas grief au droit du demandeur au pourvoi ou à ses intérêts493, comme le prévoit expressément le texte de l’article 567 du Code de procédure

488 Cass. crim., 24 mai 1960, Bull. crim., n°277.

489 J. Pradel, Op. cit., n° 990, p. 888.

490 R. Merle, A. Vitu, Op. cit., n° 859, p. 1008.

491 M. Hamoudi, Théorie de l’intérêt à se pourvoir en cassation en matière pénale, Alexandrie, Librairie de la nouvelle université, 2010, p.73. ; S. Guinchard, C. Chainais, F. Ferrand., Op. cit., n° 128, p.144.

492 D.-J. Baudrit Carrillo, Op. cit., p. 61.

pénale français : « Le pourvoi en cassation ne peut être formé que par le ministère public ou

par la partie à laquelle il est fait grief ».

La législation procédurale koweïtienne n’a rien prévu de spécifique au pourvoi en cassation au sujet de la nécessité de prouver l’intérêt à agir. Les règles qu’il convient d’appliquer sont celles qui concernent l’intérêt à agir de manière générale494. La jurisprudence s’est contentée de confirmer cette condition. Ainsi, nous pouvons donner pour exemple une décision jurisprudentielle qui prévoit que « les motifs du pourvoi en cassation ne sont

recevables que s’ils présentent un caractère personnel au demandeur du pourvoi et si ce

dernier justifie d’un intérêt à se pourvoir en cassation »495.

Nous pouvons ajouter à cela que l’intérêt à se pourvoir en cassation se caractérise par son importance et par la précision qu’il requiert, à la différence des autres voies de recours. En effet, ici, le juge de cassation se borne à rechercher l’intérêt à agir dans les éléments qui lui sont produits et qui étaient présents devant le juge de l’appel. Cet intérêt existe lorsqu’il apparaît que la correction d’une erreur de droit ou que la nullité procédurale est susceptible de profiter d’une quelconque manière au demandeur du pourvoi en cassation496. Par conséquent, l’intérêt ne consiste pas uniquement en la modification de la décision contestée, mais doit aussi concerner le contenu effectif de cette décision. Il ne s’agit aucunement d’un signe externe, étant donné que la Cour de cassation statue sur le pourvoi en cassation en se fondant sur le contenu de l’arrêt attaqué497.

Le fait de considérer l’intérêt à se pourvoir en cassation comme une condition essentielle de l’acceptation du pourvoi, en droit koweïtien entraîne son irrecevabilité lorsque cet intérêt ne peut être justifié. De plus, le motif de défense basé sur la non-existence de l’intérêt est d’ordre public et peut être soulevé par n’importe laquelle des parties au procès ou par le juge lui-même. Il peut aussi être soulevé à n’importe quel stade du procès498.

494 F. Alnaser Allah, A. Alsamak , Op. cit., p. 730.

495 Cass. pénale 14 Octobre 2003, n° 21/2002.

496 R. Obied, Op. cit., p. 10.

497 M. Alnowaibit, Op. cit., p. 757.

Le demandeur au pourvoi en cassation doit être personnellement concerné par l’atteinte à ses droits, et avoir un intérêt à ce que son droit soit reconnu ou son préjudice indemnisé. Ce caractère personnel attaché à l’intérêt à agir nous pousse à nous interroger, aux côtés de la condition d’intérêt, sur l’indivisibilité et l’indépendance de la nature de la condition de qualité à se pourvoir en cassation, et du lien qui existe entre ces deux notions.

En France, la doctrine pénale s’est penchée sur la question pour essayer de la résoudre et d’opter pour un seul sens, même si la doctrine en matière de procédure civile expose clairement les difficultés d'appréhension de la notion d'intérêt, ainsi que son caractère très proche de la notion de qualité pour agir499. De la même façon, en matière de procédure pénale, il existe des incertitudes dans l’identification de l’intérêt et de la qualité pour agir, notions qui ont été transposées dans le contentieux répressif500.

La doctrine civiliste et commercialiste justifie sa position en disant que la « qualité » est essentiellement une description de quelques-unes des caractéristiques de l’intérêt, étant donné que celle-ci est personnelle et directe. C’est comme si la qualité devenait une partie intégrante de l’intérêt, tout comme la règle générale englobe la règle spéciale. Alors que l’intérêt doit être légal, personnel et direct, sérieux et réel, la qualité demeure l’expression de deux caractéristiques seulement propres à l’intérêt : ses caractères personnel et direct. C’est pour cette raison que certains juristes estiment que seule la condition de l’intérêt est requise pour l’acceptation d’un pourvoi en cassation.

Quant à la Cour de cassation, elle a aussi montré quelques hésitations dans les décisions d’irrecevabilité qu’elle a rendues. Dans la majorité des cas, elle le fait sans préciser si elle se fonde sur l’absence de qualité ou d’intérêt. Mais lorsque qu’elle précise le fondement, il apparaît que le pourvoi est irrecevable pour absence de qualité à agir du demandeur en cassation501.

499 M. Hamoudi, Théorie de l’intérêt à se pourvoir en cassation en matière pénale, Alexandrie, Librairie de la nouvelle université, 2010, p.73 ; C. Ambroise-Castérot, v° « Action civile », Rép. pén. procéd. pén., Dalloz,

2012, n° 173.

500 C. Ambroise-Castérot, v° « Action civile », Rép. pén. procéd. pén., Dalloz, 2012, n°176.

L’intérêt revêt un caractère personnel lorsque c’est la personne qui a subi le préjudice et qui peut tirer un avantage du pourvoi en cassation qui agit. Ainsi, le demandeur du pourvoi ne serait pas admis à invoquer le préjudice causé à un tiers502. De même, il a été décidé qu’une personne étrangère au procès ne pouvait pas se pourvoir en cassation, même si elle a été, par erreur, mise en cause dans la procédure503.

La notion d’intérêt étant précisé, il est important de s’assurer de la présence des caractères que doit revêtir cet intérêt.

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