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La capacité à se pourvoir en cassation

B. L’incapacité d’exercice

Il existe des hypothèses dans lesquelles les parties au procès ne peuvent former un pourvoi, ou voient leur droit limité en raison d’une incapacité d’exercice. Il convient d’étudier ces hypothèses en distinguant entre l’incapacité du prévenu (a) et l’incapacité de la partie civile (b).

a) L’incapacité du prévenu

En ce qui concerne le prévenu mineur en France, c’est soit le mineur lui-même, soit son représentant légal qui a la capacité de se pourvoir en cassation comme le prévoit l’article 24-1 et s. de l’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 sur l’enfance délinquante. À la différence de la procédure en appel, la présence des représentants légaux du mineur n’est pas assurée devant la Cour de cassation452. Il demeure que ces représentants doivent veiller à ce que la défense de l’enfant soit correctement assurée, et en conséquence, il conviendrait d’imposer que le pourvoi ou le mémoire ampliatif leur soit notifié453.

Les règles relatives aux incapacités des majeurs en France sont différentes, selon qu’il s’agisse d’un prévenu majeur sous curatelle, sous tutelle, ou qu’il soit dément, ou aliéné. Le majeur sous curatelle peut se pourvoir en cassation seul, mais le curateur est avisé de la date de l’audience454. Le curateur a ainsi un pouvoir d’assistance (article 468 du Code civil français.), c’est-à-dire qu’il n’a pas le pouvoir, en cette seule qualité, de représenter en justice le majeur en curatelle, ni d’exercer en son nom les voies de recours455. Pour le majeur sous tutelle, il doit agir ensemble avec le tuteur, mais la chambre criminelle consacre implicitement le droit du prévenu sous tutelle à se pourvoir seul en cassation456. Si le tuteur obtient

452 L. Boré, « Capacité pour agir et se défendre devant le juge pénal », JCP G 2002, I, 179.

453 Ibid.

454 Article 706-113 qui a été introduit dans le Code de procédure pénale français après la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l'homme dans l’affaire Cour E.D.H. Vaudelle/c. France, 30 Janvier 2001, req. n° 35683/97 ; Voir J. Bore, L. Bore, Op. cit., n°35.43, p. 105, voir aussi la contestation de cette solution : L. Bore, « Capacité pour agir et se défendre devant le juge pénal », JCP 2002. 1. 179.

455 Cass. crim., 1er juin 1994, 8780278, Bull. crim., 1994, n° 216.

456 Compte tenu de l'arrêt du 19 mai 1998 rendu en matière de curatelle Cass. crim.,19 mai 1998, 9781018, Bull. crim. 1998, n° 170.

l’autorisation ou s’il obtient une injonction du juge des tutelles ou du conseil de famille, il pourra exercer seul le recours contre le jugement pénal (article 475 du Code civil français).

Pour ce qui est de l’aliéné, et dans le silence de la loi, la Cour de cassation a rendu un arrêt au visa de l’article 6, paragraphes 1 et 3 de la Convention européenne des droits de l’homme et de l’article préliminaire du Code de procédure pénale, en concluant à partir de ces textes ce qui suit : «Lorsque l’altération des facultés d’une personne mise en examen est telle

que celle-ci se trouve dans l’impossibilité absolue d’assurer effectivement sa défense, il doit

être sursis à son renvoi devant la juridiction de jugement»457. Le principe ici rappelé n’est pas nouveau458, la Cour de cassation l’avait déjà affirmé depuis fort longtemps459. L’aliéné peut donc former un pourvoi en cassation, mais son pourvoi ne sera jugé que lorsqu’il aura recouvré ses facultés mentales.

Pour ce qui est de la situation juridique au Koweït, le mineur incapable ne peut former un pourvoi seul, la procédure s’effectue par le biais de son représentant légal. L’article 119 du Code de procédure pénale prévoit que « le représentant légal doit accompagner le mineur

dans toutes les phases du procès, et à défaut de représentant légal, le juge nomme une

personne qui sera chargé de le représenter si cela est nécessaire ».

En ce qui concerne les majeurs incapables, l’article 118 du Code de procédure pénale koweïtien est en accord complet avec l’arrêt de la Cour de cassation française étant donné qu’il distingue entre deux cas. Le premier cas est celui où le prévenu est présenté au médecin légiste qui juge que celui-ci n’a pas la capacité à se défendre à cause de la folie ou de la maladie mentale qui l’affecte. Dans ce cas, la juridiction sursoit à statuer jusqu’à ce que le prévenu retrouve ses capacités pour pouvoir se défendre. Le second cas se rencontre lorsque la Cour juge que la folie du prévenu était présente avant que le crime ne soit commis ou était concomitante à ce crime. Dans ce cas, la non-responsabilité du prévenu doit être constatée et la Cour statue dans ce sens sans devoir surseoir à statuer. Elle peut aussi statuer en déclarant

457 Cass. crim., 11 juil. 2007, 0783056, Bull. crim., 2007, n° 185.

458 E. Vergès, « Les poursuites exercées contre une personne privée de ses facultés mentales », observations sous Cass. crim., 11 juil. 2007, Revue pénitentiaire et de droit pénal, 2007-4, p. 895.

l’innocence du prévenu pour n’importe quelle raison qu’elle juge suffisante sans que le prévenu ne soit forcé de se défendre.

Voyons maintenant ce qu’il en est des règles portant sur l’incapacité de la partie civile.

b) L’incapacité de la partie civile

En ce qui concerne le mineur partie civile en France, son représentant légal peut agir en cette qualité et se pourvoir en cassation. En l’absence de représentant légal, un administrateur ad hoc peut alors être désigné, et aura seul la qualité pour former un pourvoi en cassation au nom du mineur460. La désignation d’un administrateur ad hoc peut résulter soit de l’article 388-2 du Code civil français, soit de l’article 706-50 du Code de procédure pénale français. Elle peut être considérée comme étant une atteinte très importante, même si elle est limitée dans le temps, à l’autorité parentale, effectuée dans le cas de violence et maltraitance intrafamiliales ou par des proches de la famille461.

En ce qui concerne les majeurs, il convient de distinguer le cas du majeur sous curatelle et celui du majeur sous tutelle. Le cas du majeur sous curatelle est délicat dès lors qu’il va dépendre de l’étendue de la mission du curateur. C’est en fonction de cette mission du curateur que le majeur sous curatelle aura une plus ou moins grande liberté de former seul un pourvoi. À titre d’illustration, la Cour de cassation a considéré que le pourvoi n’était pas recevable du fait que le régime de la curatelle interdisait au majeur sous curatelle d’engager toute procédure judiciaire sans l’assistance de son curateur, et que le demandeur n’avait donc pas la capacité pour agir seul en justice462.

En outre, l’article 468 alinéa 3 du Code civil prévoit que « cette assistance [du curateur] est également requise pour introduire une action en justice ou y défendre », quelle que soit la nature de cette action. Ainsi, si un majeur sous curatelle veut intenter une action en

460 Cass. crim., 16 juin 1992, 9280414, Bull. crim., 1992, n° 236.

461 E. Simonneau-Fort, « Le point de vue de l'avocat », in colloque L'autorité parentale et ses juges, Faculté de droit de Montpellier le 27 mai 2004, Ch. Albiges (dri.) , p. 149.

justice, l’assignation doit être délivrée en son nom et au nom du curateur à peine de nullité463. Le cas du majeur sous tutelle est plus simple, puisque n’ayant pas la capacité d’agir en justice, il n’est pas recevable pour former seul un pourvoi en cassation. Il ne peut le faire que par l’intermédiaire de son tuteur464.

Le droit koweïtien ne fait pas de distinction entre les mineurs et les majeurs incapables au regard du droit de former un pourvoi en cassation465. Dès lors, les mineurs, les majeurs sous tutelle et sous curatelle ne peuvent agir que par le biais de leur représentant légal. Il est aussi possible au représentant légal de désigner un avocat à sa place466.

La formation du pourvoi en cassation contre une décision sur l’action publique prend donc en compte des règles relatives à la capacité, notamment lors du décès d’une partie ou lors d’une incapacité. Il sera judicieux d’examiner ces règles au regard du pourvoi en cassation contre une décision rendue sur l’action civile.

§ 2 : Le pourvoi contre la décision rendue sur l’action civile

De la même manière que pour le pourvoi en matière d’action publique, il existe, en ce qui concerne le pourvoi contre la décision rendue sur l’action civile, des exigences relatives à la capacité des parties. À cet égard, il est utile de soulever la question des effets sur l’action civile du décès du demandeur (A). Il convient ensuite de traiter des incapacités d’exercice lorsque la décision est rendue en matière civile (B).