• Aucun résultat trouvé

Tableau 13 : fiche synthétique de Naxos Bobine

Date d’ouverture/fermeture 1996

Structure Association Naxos Bobine

Statut du bâtiment Privé (location)

Propriétaire Régie Immobilière de la Ville de Paris

Subventions Non

Budget global 25 000 euros

Nombre de personnes Deux bénévoles

Structures impliquées/hébergées Compagnies, groupes, artistes tour à tour en résidence courte de quelques semaines

Disciplines représentées Musique, théâtre

Naxos Bobine aussi tient tout du cas particulier. Petit lieu situé dans le 11ème arrondissement

de Paris, dans la rue de la roquette, à proximité du croisement avec la rue Saint Maur, il ne se remarque pas facilement. A vrai dire, avant que Laurent, l’un des deux initiateurs, décide de peindre « Naxos Bobine » sur la devanture, il était impossible de se rendre compte de sa présence en passant dans la rue. Je pense même que si ce lieu n’était pas parisien, je ne serais toujours pas au courant de son existence. C’est en effet par le biais d’une enquête journalistique intitulée « Lieux du possible », présentant quelques lieux culturels

intermédiaires de la région parisienne, publiée par la revue La Scène87 que j’ai découvert

Naxos Bobine, les journalistes ayant réalisé ce travail ayant été eux-mêmes renseignés par le bouche à oreille.

Naxos Bobine est un petit lieu. Au niveau de la surface utilisée, il se situe à l’opposé d’expérience comme la Bifurk, l’espace autogéré des Tanneries, la friche l’Antre-Peaux ou Mains d’œuvres. Plusieurs espaces permettent tout de même de répondre à différentes fonctions. On entre d’abord dans une salle aux airs de bistrot auquel on aurait amputé le comptoir. Assez haute de plafond, elle est meublée de fauteuils, de chaises, de petites tables et d’une bibliothèque peuplée d’ouvrages glanés ça et là. Au fond, un point d’eau est accompagné d’une machine à café et d’un frigo. Le caractère, de prime abord convivial, de la pièce donne envie de prendre un livre et de s’asseoir, ou de discuter des dernières nouvelles autour d’une tasse de café ou d’un verre de bière. Le coin bureau installé en mezzanine

87

rappelle toutefois aux convives que l’endroit peut parfois être dédié à des activités un tantinet plus laborieuses.

Pour découvrir l’autre partie du bâtiment, il faut suivre les escaliers qui conduisent au sous-sol. En bas des escaliers, sur la gauche, un couloir permet d’accéder à quatre espaces privatifs, c'est-à-dire sous-loués par Naxos Bobine à d’autres acteurs, soit des artistes ou des artisans s’en servant d’ateliers, soit des associations les utilisant comme bureaux. C’est à travers ce système de sous-location que le lieu est financièrement autonome. A droite, une porte ouvre sur la salle au sein de laquelle se déroulent les résidences et représentations théâtrales ou musicales. Ce n’est pas à proprement parler une salle de spectacle, la relative promiscuité permettant surtout la proximité entre les artistes et la trentaine – au maximum – de participants du public.

Naxos Bobine88 est né en octobre 1996. Deux amis, Laurent et Y., étaient à la recherche d’une

salle pour permettre de développer les cours de théâtre du second. Dès le départ, pour les deux protagonistes, la volonté de pouvoir mettre en place d’autres activités était présente, sans avoir d’idée précise sur la question. Après une période de recherche, ils ont commencé à louer ce local, situé au 135, rue de la roquette. Sans aucun financement autre que des apports personnels, les cours de théâtre ont débuté après une période de travaux. Après l’ouverture, régulièrement, des amis ont demandé la mise à disposition du lieu soit pour un concert, soit pour une exposition et c’est ainsi que les premiers évènements publics s’organisèrent.

Au bout d’un an, les activités théâtrales prirent fin et la question de l’équilibre budgétaire se posa, les sources financières personnelles se tarissant. A ce moment-là, décision fut prise de sous-louer une partie des espaces disponibles. Ceci, afin de dégager la contrainte économique du questionnement autour des activités du lieu. Ils auraient pu choisir de demander des subventions, ça n’a jamais été le cas. D’une part, il n’y a pas véritablement de « projet » associé au lieu, rien n’a été suffisamment formalisé pour correspondre aux grilles institutionnelles, c'est-à-dire que l’évolution du lieu, et des activités s’y déroulant, fait suite à une succession d’opportunités (les demandes extérieures) et aux différentes envies des protagonistes. Par ailleurs, les deux initiateurs continuant leur activité professionnelle, la gestion du lieu est toujours restée dans le domaine du « loisir », ce qui a induit la volonté de ne pas se soucier outre mesure des questions administratives, impliquant par là, notamment, le

88

Ce nom existait avant le lieu, il a été trouvé par les deux compères lors de la création d’une association quelques années plus tôt. Il s’agit en premier lieu d’une référence à la chanteuse d’opéra Ariana Naxos. Suite à

refus du salariat, tant pour eux que pour les artistes participant. Toutefois, au moment de l’entretien, se posait la question d’une demande de subvention, non pas pour soutenir les activités, mais pour engager des travaux de rénovation. Ainsi dégagé du problème financier, le lieu s’est orienté vers l’accueil de résidences musicales et théâtrales ou de travaux plastiques, associés à des temps publics de présentation. Ces derniers ont toujours été placés sous le signe de la gratuité, le seul rapport marchand entre le lieu et le public étant lié au bar, jusqu’au jour où les deux compères décidèrent de casser le comptoir et ne plus rien vendre. Depuis, pour le public, la consigne est d’apporter à manger et à boire, sachant que celui ou celle venant « les mains dans les poches » peut quand même passer la porte d’entrée. Le caractère convivial permis par ce fonctionnement est aussi associé aux liens d’affinités entre les différents participants, notamment les deux protagonistes et la plupart des membres du public, ces derniers étant au courant des activités de Naxos Bobine essentiellement par le bouche à oreille. Aucune communication dirigée vers le « grand public » (affiches, programmes, site web) n’ayant été mise en place, ce lieu s’inscrit surtout dans des réseaux informels de personnes, ce qui peut lui donner un caractère intimiste, voire secret, même si parfois des journalistes le découvrent et en font l’objet d’un article. Par exemple, ce n’est que neuf ans après l’ouverture que l’inscription « Naxos Bobine » est apparue sur la devanture, entraînant quelques réactions de curiosité chez les habitants du quartier.

Les activités artistiques se déroulant dans le lieu, si elles ne sont pas définies par des critères préétablis, font tout de même l’objet de choix. Tout n’est pas accepté à Naxos Bobine, mais les conditions limitent aussi les demandes extérieures. Certes, il n’y a pas de ligne esthétique définie, mais il y a une volonté qui ne s’inscrit pas dans le cadre d’une programmation mais qui se réaffirme au cas par cas. Sont en effet privilégiés les projets artistiques qui trouvent difficilement leur place ailleurs – et portés par des artistes acceptant le principe de gratuité, c'est-à-dire de ne pas être payés. Il s’agit plutôt de travaux s’inscrivant dans des démarches expérimentales, de recherche autour de la forme, qu’elle soit musicale (musiques contemporaine, électro-acoustiques) ou théâtrale (théâtre non linéaire, sans texte). Cela ne conduit pas forcément à des représentations mais plutôt à des présentations, à des tentatives destinées à être discutées par/avec le public. Ce qui remet l’accent sur la dimension relationnelle qui, en l’occurrence, dépasse le seul caractère convivial du lieu pour participer de l’expérience esthétique elle-même.

une divagation à partir du prénom Ariane et du personnage du mythe de Thésée et du Minotaure, de fil en aiguille, le terme « Bobine » s’est accolé au nom de famille de la chanteuse.

Aujourd’hui, Naxos Bobine continue de se développer sur les mêmes principes de fonctionnement. Par contre, la communication s’est formalisée, notamment à travers l’apparition d’un site web. De plus, les activités font désormais l’objet d’une programmation.