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Modèles utilisés pour la stabilisation de domaines périodiques en laby-

1.5 Domaines magnétiques

1.5.2 Modèles utilisés pour la stabilisation de domaines périodiques en laby-

De nombreuses études ont porté sur ce type de configuration en domaines magnétiques à po- larisation alternée. Nous ferons ici un résumé des différentes étapes qui ont permis de donner une expression pour l’énergie des parois de domaines qui sont créées au sein de cette structure. Nous définirons les différents termes d’énergie à considérer pour chercher à stabiliser ce genre de configuration magnétique. Le développement des expressions ne sera pas donné ici par mesure de clarté. Nous nous contenterons de décrire dans les grandes lignes les différents cas traités et de préciser quel modèle nous avons utilisé dans le cadre de ma thèse.

Nous verrons au chapitre 5 que notre structure est en constante évolution le long d’un gradient d’oxydation, nos termes d’énergie ne sont donc pas fixes le long de notre échantillon et ils varient avec les propriétés magnétiques de la couche de Co. Ceci sera décrit en section 5.2.5, au chapitre 5.

1.5.2.1 Définition des grandeurs utiles intervenant dans les différents modèles

Nous allons définir dans ce paragraphe les paramètres à considérer pour établir les différents modèles.

– Profil d’aimantation : Le profil d’aimantation utilisé pour les cas que nous résumerons ici, a été introduit par Charles Kittel (cas II en ref. [22]). Dans ce type de structure de domaines désaimantés en labyrinthe, le profil de l’aimantation alterne entre les directions perpendiculaires +z et −z, avec une période 2L (cf fig.1.12). L’aimantation est considérée comme uniforme au sein de chacun des domaines (donc pas d’expression de domaines de fermeture, avec une composante de l’aimantation planaire proche des interfaces).

t 2L +++- - -+++- - -

- -- -

-- -- -

-

- -- -

-

+ + + + + + + + + +

x

z

y

FIGURE 1.12: Profil de l’aimantation des domaines périodiques en bandes, dans le cas d’une anisotropie uniaxiale assez forte. Représentation des charges magnétiques (pôles) induites sur les interfaces.

La distribution des "charges magnétiques" induites aux interfaces peut donc être assimilée à une fonction créneau d’amplitude ±Ms. Et l’expression du champ induit Hz ind peut être

retrouvée en réalisant le développement en série de Fourier de cette fonction créneau selon la direction x [22].

– Rapport entre les dimensions du film et les largeurs de domaines : Les dimensions du problème sont la largeur des domaines L, l’épaisseur du film de Co, t, ainsi que la largeur

des parois de domaines δω. Nous prendrons comme approximation que δω (de l’ordre de

5 − 10nm dans notre cas) est négligeable devant la période des domaines (qui est de l’ordre de 2 − 3µm, voir fig. 5.1 du chapitre 5 ou G.4 en annexe).

Nous décrirons donc les différents modèles qui ont été développés pour différente gamme du rapport t/L.

– Facteur de qualité Q et effet de µ : Dans le cas de films magnétiques présentant une anisotropie perpendiculaire, la taille et l’aspect des domaines sont fonctions du facteur de qualité [23] : Q = Ks/(tKd), avec Ksl’anisotropie de surface et Kdl’anisotropie de forme.

Dans le cas où Q < 1 , l’anisotropie de forme Kdest dominante et l’aimantation s’oriente

dans le plan de l’échantillon. Dans le cas inverse, l’orientation adoptée par l’aimantation est l’orientation perpendiculaire à la couche.

FIGURE1.13: Configuration magnétique attendue en fonction de la taille des domaines (en unité depAex/Kd) et du facteur de qualité Q du système [23,24]. MD = multi-domaines, V = Vortex,

TD = double domaines et SD = simple domaine. La configuration des échantillons que j’ai étudiée au chapitre 5 est mise en évidence (cercle vert). Il est important de noter que cette étude avait été réalisée pour un système cubique [23,24], ce qui est éloigné de notre cas d’étude de films minces, nous avons donc reporté sur la figure quelle serait l’équivalent des coupes dans le cas d’un film mince.

Dans notre cas, l’anisotropie uniaxiale est assez forte pour définir un axe facile perpendi- culaire à la couche : la déviation de l’orientation des moments magnétiques par rapport à la direction préférentielle (perpendiculaire) est alors faible. Cependant, sa valeur reste proche de l’anisotropie de forme Kd. De plus, la taille des domaines étant importante par rapport à

la longueur d’échange dipolaire (pAex/Kd), nous nous trouvons bien dans les conditions

nécessaires à l’expression d’une structure en multi-domaines (MD ) représentée en figure

1.13.

Le champ induit Hz ind par les charges magnétostatiques peut alors être calculé par une

méthode appelée méthode de l’effet µ [23]. Cette méthode permet de prendre en compte de faibles déviations éventuelles de l’aimantation par rapport à l’axe facile, en définissant

au préalable un tenseur de perméabilité ¯µ dans les trois directions de la couche.¯

Ce tenseur peut être ramené à un facteur µ dans le cas des films uniaxes, qui s’exprime

comme : µ = 1 + 1 /Q = 1 + Ms

Ms + Ha

. Ce facteur entrera dans l’expression de l’énergie de paroi de domaines.

1.5.2.2 Origine des domaines périodiques en bandes (stripes) et calculs de champ déma- gnétisant

Les termes d’énergie entrant dans l’expression de l’énergie totale du système Etont été définis

par Kittel [22] : l’énergie des parois entre domaines magnétiques Eω, l’énergie démagnétisante

liée aux charges magnétiques de la configuration en domaines Edet l’énergie d’anisotropie Eanis.

Etdoit être minimisée pour atteindre une configuration stable, ceci en trouvant le bon équilibre

entre les trois termes d’énergie.

L’aimantation étant considérée comme quasiment uniforme et perpendiculaire dans les do- maines, Eanis est considérée comme nulle. La taille des parois de domaines étant faible, il y a

que très peu de moments orientés autrement que selon l’axe facile perpendiculaire, donc le coût en énergie d’anisotropie est extrêmement faible.

L’énergie des parois de domaines en bandes peut être exprimée comme : Eω = σωS, avec S

la surface totale des parois de domaines dans le système et σω, l’énergie surfacique des parois de

domaines en J/m2. Ainsi, l’énergie des parois par unité de surface du film est : e ω =

σω t

L (en

supposant des stripes régulières et parallèles comme représenté en figure1.12).

Fox [25] met l’accent dès son introduction sur le fait que l’énergie de la structure en domaines d’un matériau ferromagnétique est très dépendante de son énergie démagnétisante. En effet, il ex- plique que cette énergie peut être contrôlée dans une large mesure par ce qu’il nomme les pôles libres ("charges magnétiques") aux extrémités du matériau, ces pôles libres induisant des dis- continuités (variation de direction) dans la composante Mz de l’aimantation. Cette interaction

ne peut jamais être négligée car elle apporte un couplage qui est toujours significatif, même s’il peut être considéré comme faible face à l’échange direct entre deux proches voisins (moments magnétiques).

Nous pourrions résumer en disant que les calculs concernant les champs démagnétisants peuvent être délicats, mais qu’il existe certaines règles que l’on peut appliquer selon les cas d’étude rencontrés. Par exemple, pour des problèmes présentant une certaine période, les trans- formations en séries de Fourier sont un choix naturel [22].

Kittel [22] traita d’abord le cas des films à forte épaisseur (t  L) en 1946. Il considéra des domaines parallèles et négligea l’énergie démagnétisante au sein du film, les charges magnéto- statiques des interfaces opposées étant trop éloignées dans le cas de films épais. Il exprima donc son énergie totale en fonction des termes d’énergie par unité d’aire, σω et σd:

et(L) = σωt/L + 2σd, (1.21)

avec σd = 0 , 85Ms2L l’énergie démagnétisante par unité d’aire pour une interface [22]. Cette va-

déduisit ainsi une dépendance L(t) telle que : L =pσωt /(1 , 7Ms2).

Deux études ont été réalisées en parallèle par la suite. Rowlands lors de ses travaux de thèse en 1956, ainsi que Màlek et Kambersky en 1958 [26] se sont placés dans une gamme d’épaisseur plus faible en évaluant la structure en domaines d’un film pour lequel t/L ≈ 1. Ils ont exprimé de manière classique l’énergie démagnétisante d’un système de domaines parallèles : en définissant le potentiel magnétostatique à chacune des interfaces et en utilisant les conditions aux bornes de leurs différentes expressions.

A l’époque, Màlek [26] décrivait déjà que dans le cas des films minces (t/L < 1), l’expression de l’énergie de paroi ne pouvait plus être sommée de manière indépendante dans l’expression de l’énergie totale car δω ainsi que l’énergie des parois étaient alors fonctions de l’épaisseur du film

lui-même. Depuis, de nombreux modèles cherchent à définir l’énergie totale de ce type de sys- tème lorsque la largeur de la paroi de domaines se trouve n’être plus négligeable [27–29]. Dans notre cas, la largeur de nos domaines étant très importante, nous nous tiendrons à l’approximation faite plus haut de considérer des parois de domaines suffisamment fines par rapport à L.

Le modèle le plus complet a été déduit par Kooy et Enz [30] en 1960. Au cours de leurs travaux, ils ont généralisé l’expression de l’énergie démagnétisante à toutes les gammes d’épais- seur, et ont ajouté à l’expression de Et le terme d’énergie Zeeman Ez à prendre en compte lors

de l’application d’un champ magnétique perpendiculaire. Ce modèle a été la base de nombreux travaux [31–33].

L’effet de µ a aussi été développé dans leurs travaux, même s’il est négligé pour l’expression finale. Cet effet sera généralisé par la suite par Draaisma [33].

Dans le cas de domaines désaimantés avec une rémanence nulle, et en considérant le cas simplifié où µ = 1 (forte PMA), ils déduisent une expression pour l’énergie démagnétisante de ce type de système : Ed= 8KdL/π3 ∞ X n=1,3,5... n−3  1 − exp −πnt L  . (1.22)

Ceci, toujours en utilisant le profil d’aimantation en créneau défini au début de cette section, qui est décomposé en série de Fourier.

Ensuite, un travail de comparaison des énergies de deux types de structures a été réalisé à la fois par Yafet et Gyorgy [27] (1988) et d’un autre côté par Czech et Villain [34] (1989). Ils cher- chaient à définir quelle structure était la plus stable entre la configuration en bandes parallèles ou la configuration de type "échiquier". Leurs conclusions se sont trouvées être différentes. Cela a conduit à l’étude de Kaplan et Gehring [35] en 1993 dont le modèle a servi de base à celui que nous avons utilisé dans le cadre de cette thèse.

Leur travail a consisté à analyser numériquement l’expression de l’énergie démagnétisante de Kooy [30] (1.22) en passant d’un modèle discret de décomposition en sommes finies, à un modèle continu d’intégration du profil d’aimantation.

De par leur travail numérique, Kaplan et Gehring [35] ont pu appuyer la thèse de Yafet [27], qui annonçait une énergie plus faible pour le système en bandes, et ont aussi pu fournir un mo- dèle analytique pour exprimer de manière directe la taille des domaines attendue pour un film ultra-mince.

L = 0 , 955 t exp πD0 t



avec D0 = σω/2 Kd, la longueur caractéristique du système [23].

Nous avons représenté en figure1.14le profil attendu pour L(t) selon les différentes gammes d’épaisseurs et les différents modèles considérés. Il est facilement notable que les profils attendus sont très différents selon la gamme d’épaisseur considérée. Le modèle défini par Kittel s’appli- quant pour les fortes épaisseurs est une fonction monotone de l’épaisseur du film. Alors que les modèles de Kooy et Enz, ainsi que de Kaplan et Gehring présentent un minimum local et deux régimes différents selon la valeur d’épaisseur.

FIGURE 1.14: Période des domaines en fonction de l’épaisseur du film. Les grandeurs sont nor- malisées par D0. Les expressions sont rappelées pour les trois modèles.

Nous préciserons au chapitre 5 quel modèle nous avons utilisé pour décrire la structure obte- nue dans notre système.

Chapitre 2

État de l’art : effets de champs électrique et

stabilisation de skyrmions

Nous présenterons dans un premier temps un résumé des études de contrôle du magnétisme par champ électrique, puis nous développerons dans une seconde partie un bref historique concer- nant l’observation et la manipulation de skyrmions. Nous insisterons tout particulièrement sur le contexte de leur nucléation à l’aide d’un champ électrique. Nous devons noter ici, que l’état de l’art concerne les travaux réalisés au début de ma thèse. Les travaux réalisés en parallèle au cours de ces trois ans seront indiqués au fur et à mesure dans les chapitre 4 et 5.

2.1

Modifications des propriétés magnétiques : mises en évi-

dence expérimentales

Le contrôle du magnétisme par champ électrique (cf fig. 2.1) est un vaste domaine de re- cherche de nos jours. Cela est dû au fait qu’il pourrait engendrer un très fort impact dans le développement de dispositifs à basse consommation d’énergie pour la spintronique. Nous choi- sirons d’en décrire deux : la MRAM (pour Magnetic Random Access Memory en anglais) et la mémoire de type racetrack pour laquelle la manipulation de skyrmions pourrait être une avancée. Ces dispositifs n’ayant pas été au centre de mon travail d’étude, ils seront brièvement présentés.