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Mesure du champ d’anisotropie et déduction de l’anisotropie effective

4.2 Modification des propriétés magnétiques le long du gradient d’oxydation carac-

4.2.3 Mesure du champ d’anisotropie et déduction de l’anisotropie effective

Afin d’avoir accès à l’anisotropie sur tout l’échantillon, nous avons mesuré le champ d’ani- sotropie planaire avec plusieurs méthodes : nous avons utilisé des mesures d’effet Hall extraordi- naire (EHE ) à différentes températures, avec l’application d’un champ magnétique dans le plan du film de Co, alliée à des mesures en Kerr polaire avec un champ magnétique appliqué parallè- lement à la surface de l’échantillon, à température ambiante.

De plus, deux méthodes ont été employées en parallèle pour déduire de ces techniques le champ d’anisotropie approprié. Ces méthodes d’extraction sont décrites en annexe D. Nous avons utilisé le modèle de renversement d’un domaine unique de Stoner et Wholfart, dont le principe est énoncé au chapitre 1, ainsi que la méthode d’intégration de l’aire sous les courbes d’aimantation, dont l’explication mathématique est aussi annoncée au chapitre 1 et est précisée en annexe D.

4.2.3.1 Extraction du champ d’anisotropie µ0Ha

Les valeurs de µ0Ha groupées et moyennées selon les différentes techniques de mesures et

d’extraction utilisées, sont représentées en figure4.10en fonction de la position sur l’échantillon et de la température de mesure.

Nous avons vu précédemment et en annexes A et C, que la forte chute de Ms se manifeste

surtout à température ambiante. Pour rappel, dès 250K, la variation en position du signal Ms· t,

n’est plus due qu’à la diminution d’épaisseur de cobalt le long de l’échantillon, et la valeur de Ms

est constante en position et proche de 1 , 2 − 1 , 25MA/m (cf annexe A et section précédente). Les mesures réalisées à 240K refléteront donc bien l’évolution de l’anisotropie pour une épais- seur de ferromagnétique qui diminue, sans avoir d’effet supplémentaire induit par la diminution de Ms.

Valeur dans la zone I : De nombreuses études ont été réalisées sur l’évolution du champ d’ani- sotropie avec l’épaisseur et la tendance observée pour nos échantillons coïncide bien avec les conclusions déjà établies [90,97]. Grolier et al. [97] déduisent un champ d’anisotropie effec- tive d’environ 0 , 9 T pour une épaisseur de Co de 0 , 8nm pour des couches de type Co/Au, à température ambiante. De même, Belmeguenai et al. [90] déduisent un champ d’anisotropie qui augmente lorsque tCo diminue pour atteindre 0 , 95 T à tCo = 0 , 6 nm pour une tricouche équi-

valente à la nôtre, aussi à température ambiante. C’est très proche des valeurs obtenues dans la zone I (pour les positions entre 33 , 5 et 49mm), où tCo= 0 , 6 nm.

Évolution en épaisseur de Co et en température : La tendance qui se remarque à basses températures, est que le champ d’anisotropie augmente lorsque nous progressons vers des zones de plus forte oxydation qui présentent une plus faible épaisseur de Co, en allant de la zone I vers la zone II (de 50 vers 20mm).

Cependant, la tendance s’inverse lorsque l’on augmente la température de mesure. Pour 280 et 300K, le champ d’anisotropie semble quasiment constant le long de l’échantillon, voire même légèrement plus faible pour les zones les plus oxydées (avec un tCo plus faible). Pour rappel

µ0Ha = 2Keff/Ms, les variations de la valeur du champ d’anisotropie seront donc directement

fonctions de l’évolution de Ms, ainsi que de Keff, qui sera déduite au paragraphe suivant, le long

de l’échantillon.

4.2.3.2 Déduction de l’anisotropie effective Keff

Connaissant l’évolution de Msle long de l’échantillon, nous pouvons déduire une allure pour

l’évolution de Keff à 240 et à 300K. Ce travail d’extraction est résumé en figure 4.10. Nous y

avons représenté l’évolution de Keff le long du gradient d’oxydation pour les deux températures.

Une augmentation de cette valeur avec le degré d’oxydation (dans la zone II) à basse température (240K) est notée. Cela concorde bien avec les observations faites pour µ0Ha à 240K et le fait

que Ms soit constant en position pour cette température. Par contraste, une légère décroissance

de Keff est observée pour les zones de sur-oxydation à température ambiante. Ici, comme Ms

diminue, µ0Ha devrait fortement augmenter. Or ce rapport reste quasiment constant à 280 et à

300K, nous avons donc bien une compensation de cette chute de Ms par une diminution de la

valeur de Keff. Les interfaces étant modifiées et la Tcdes zones oxydées se rapprochant de plus

en plus de la température ambiante, cette perte de signal magnétique vient prendre le dessus sur l’évolution de Keff attendue uniquement pour une chute de tCo(décrite à 240K).

FIGURE 4.10: Champ d’anisotropie en fonction de la position sur l’échantillon et de la tempé- rature de mesure. (positions et zones équivalentes à celles utilisées dans la section précédente - champs d’anisotropie déduits avec les techniques d’extraction les plus précises, adaptées aux zones).

Valeurs de Keff déduites des mesures de champ d’anisotropie le long de l’échantillon pour diffé-

rentes températures (J/m3).

Valeurs de l’anisotropie de surface Ks le long de l’échantillon pour différentes températures

Keff varie en fonction de l’aimantation Ms, intervenant dans l’expression de Kd (constante

dipolaire définie au chapitre 1, en section 1.3.3), ainsi qu’en fonction de la constante d’anisotro- pie de surface Ks et de l’épaisseur du film t (rappelons que : Keff =

Ks

t − Kd, cf chapitre 1, section 1.4.1). La valeur de l’aimantation étant considérée comme constante à 240K, nous pou- vons déduire que la variation du champ d’anisotropie, observée en position, est due uniquement à la variation de l’épaisseur du film et à la variation de la constante d’anisotropie de surface Ks, si

elle a lieu. A l’inverse, à 300K, la variation de Keff observée est une combinaison de la variation

d’épaisseur de Co, de la variation de l’aimantation, donc de Kd, ainsi que de celle de l’anisotropie

de surface.

4.2.3.3 Déduction de la constante d’anisotropie de surface Ks

Nous pouvons déduire de Keff une évolution pour la valeur d’anisotropie de surface Ks. Pour

ce faire, nous avons négligé la composante de contribution volumique d’anisotropie uniaxiale magnétocristalline (cf chapitre 1, section 1.4.1 et [4]). Ainsi Ks(J/m2) = Keff · t + Kd· t (avec

Kd=

1 2µ0M

2

s) a été extrait. Notons que la valeur d’anisotropie de surface déduite ici représente

la somme des valeurs d’anisotropie de surface pour les deux interfaces de notre tricouche (P t/Co et Co/Al2O3 ou Co/Al). Son évolution à 300 et à 240K est représentée en figure4.10.

A 300K, nous y retrouvons une valeur maximale de l’anisotropie de surface dans la zone I (sur une gamme de position de 34 à 43mm) où l’oxydation de l’interface est optimale et l’orientation de l’aimantation est alors très perpendiculaire. Nous remarquons aussi une légère diminution de cette valeur pour les positions correspondantes à la zone "sous-oxydée" (à partir de 43mm), qui peuvent correspondre à une oxydation de l’interface moins poussée, donc à une anisotropie de surface modifiée en partie par la présence de liaisons de type Co − Al − O.

Enfin, nous notons que la chute de cette valeur vers la zone II dite de "sur-oxydation" arbore une allure assez parabolique à 300K. Un ajustement de type parabolique est donc réalisé pour cette courbe et sera donné en conclusion du chapitre. Il permet une interpolation de la valeur de Ksconnaissant la position sur l’échantillon, à température ambiante (pour des positions de 24 à

49mm).

A 240K, la variation de la valeur de Ks est principalement due à la variation d’épaisseur

de Co et à la modification de l’interface et n’est que très faible. Les valeurs déduites sont plus importantes qu’à 300K pour toute la gamme de positions.

L’effet purement dû à une modification de l’interface est accessible dans la zone I à épaisseur fixe (pour des positions supérieures à 33 , 5mm, cf fig.4.11). Ici, l’épaisseur du Co est constante et nous remarquons que Ksreste globalement constant à 240K et à 300K. Ensuite, pour la zone

II(positions inférieures à 33 , 5mm), l’effet de la diminution de tCo ainsi que de la modification

de l’interface4 s’expriment. Nous avons donc une cassure de pente quant à l’évolution de Ks et

de Ks/t à partir de cette position (cf fig.4.11). Pour une valeur de Ks constante en position, une

augmentation du rapport Ks/t lorsque t diminue est attendue : c’est ce que nous observons dans

la zone II pour T = 240K, mais qui n’est pas observé à 300K (cf fig.4.11).

Ces évolutions très différentes pour Ksà 300K et à 240K sont dues au fait qu’à 300K, la Tc

de notre échantillon est de plus en plus proche de la température de mesure (300K) et les effets s’en trouvent donc accentués. La variation de Ms, donc de Kd, vient amplifier ces variations à

300K. La cassure de pente n’est donc plus du tout la même entre les deux températures pour les

FIGURE 4.11: Evolution des signaux déduits pour Ks/t (en J/m3) et pour Ks (en J/m2) en

fonction de la position sur l’échantillon et de la température de mesure. La conversion position - épaisseur deCo est aussi représentée.

positions inférieures à 33 , 5mm (cf figure4.10et4.11). Pour comprendre les différences obser- vées entre les deux températures, nous pouvons noter que Keff étant fonction du rapport Ks/t, sa

variation est plus faible lorsque t et Ksvarient avec le même signe, ce qui est le cas à 300K où

Keff diminue assez peu du fait de la diminution de ces deux facteurs dans la zone sur-oxydée.

Nous devons noter que notre travail d’extraction des valeurs de Ks à partir des valeurs dé-

duites pour Keff est basé sur une approximation. En effet la gamme d’épaisseurs dans laquelle

nous nous trouvons est trop faible pour pouvoir définir de manière correcte le terme d’ani- sotropie de volume rentrant initialement dans l’expression de l’anisotropie effective (Keff =

KV − Kd+ Ks/t = Kv + Ks/t, avec KV le terme d’anisotropie magnetocristalline volumique

du cobalt). Nous avons mentionné plus haut que, dans notre travail, la contribution volumique était uniquement due au facteur de forme de l’échantillon, soit : Kv = −Kd. Nous avons aussi

vu au chapitre 1 que le terme magnetocristallin peut être négligeable selon la structure de cobalt obtenue lors du dépôt [4]. Il est donc plus difficile de lui donner une valeur précise dans ce cas de régime ultra-mince polycristallin (déposition par pulvérisation). En effet, nous nous trouvons dans la gamme d’épaisseur pour laquelle nous pouvions observer une valeur de pente nulle en traçant Keff · t(t). Cette zone a été mise en évidence en figure 1.6 du chapitre 1. La manière de

vérifier cette approximation (Kv = −Kd) aurait été d’extraire la pente de la partie linéaire de

Keff · t(t), celle-ci correspondant directement au terme Kv (cf chapitre 1), puis de la comparer à

nos valeurs de Kd. Nous ne pouvons donc pas vérifier cette approximation dans notre cas, car nos

épaisseurs sont trop faibles pour mettre en évidence cette partie linéaire de la courbe (représentée en figure 1.6).

Pour conclure, nous avons donc une idée plus précise de l’évolution des paramètres magné- tiques de notre échantillon en fonction du degré d’oxydation à l’interface du Co. Nous établirons

un premier exemple du diagramme de phase magnétique en fonction de la position sur l’échan- tillon en conclusion de ce chapitre. Nous rappellerons aussi les évolutions de certains de ces paramètres magnétiques de la tricouche tout le long du gradient d’oxydation.

Avant cela, nous allons rapidement mentionner les résultats de l’étude parallèle qui a été me- née sur cet échantillon et qui consiste à mesurer la vitesse de propagation de parois de domaines en fonction de la position sur l’échantillon. Au début de ma thèse, nous cherchions à estimer la variation d’anisotropie effective de notre système de manière fine. Nous avions donc imaginé déduire son évolution en étudiant les vitesses de propagation de paroi de domaines, dont la loi de vitesse est fonction de Keff en régime de reptation.