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1.5 Domaines magnétiques

2.1.1 Contexte de la spintronique

La spintronique, ou électronique de spin, est décrite comme le fait d’exploiter à la fois la charge de l’électron, et son moment magnétique intrinsèque, ou spin. Dans les métaux de tran- sition utilisés en spintronique, il existe un couplage entre les propriétés de conduction et les propriétés magnétiques des matériaux. Ce couplage est à l’origine de nombreuses applications de la spintronique (disques durs, capteurs,...).

MRAM : Les technologies nouvelles de mémoires magnétiques ultra-denses et ultrarapides de type MRAM sont l’une des technologies les plus prometteuses issues de la spintronique qui pour- raient devenir des mémoires universelles alliant à la fois une grande densité et une grande vitesse. Leur unité de base est une jonction tunnel magnétique (MTJ , pour Magnetic Tunnel Junction en anglais) dont deux états de résistance distincts (haut ou bas) permettent le stockage de l’infor- mation. Celui-ci est dépendant de l’orientation relative de l’aimantation des électrodes ferroma- gnétiques. Une MTJ se compose de deux couches ferromagnétiques séparées par une barrière

isolante très fine (généralement, un oxyde). Une des couches présente une orientation d’aiman- tation bloquée dans une direction et est utilisée comme électrode de référence. La deuxième, la couche libre, présente une direction d’aimantation qui peut être retournée. Les électrons peuvent traverser la barrière par effet tunnel et leur probabilité de passage dépend de l’orientation relative de l’aimantation des deux couches magnétiques : c’est la magnétorésistance tunnel. Il y a donc deux états de résistance différents pour des aimantations parallèles ou anti-parallèles.

La manipulation de l’aimantation de la couche libre peut se faire de différentes manières, dont celle consistant à appliquer un champ magnétique local, ou encore celle consistant à injecter dans la MTJ un courant électrique polarisé en spin qui peut induire un retournement de l’aimantation par transfert de spin (STT ). Cette dernière méthode est utilisée actuellement pour la fabrication des STT − MRAM .

Pour des raisons de stabilité thermique, il est nécessaire que la couche libre possède une forte anisotropie magnétique, ce qui permet à l’aimantation de rester bloquée dans la direction sou- haitée, et donc de conserver l’information stockée. Or, une large anisotropie induit également une grande barrière d’énergie à dépasser pour le renversement de l’aimantation et donc une forte consommation de courant. Une STT − MRAM présente donc l’avantage de n’avoir recours à aucun champ magnétique extérieur supplémentaire. Cependant, de fortes densités de courant sont encore requises pour induire ce renversement d’aimantation lors du procédé d’écriture. Un des défis actuels dans ce domaine consiste à réduire ces valeurs de courant critique de retournement de l’aimantation de la couche libre, sans pour autant perdre cette stabilité thermique.

Le succès de la technologie MRAM issue de la spintronique repose donc sur le fait d’être capable de piloter l’aimantation de manière efficace et peu coûteuse. L’idée du contrôle de l’ai- mantation par un champ électrique a donc vu le jour. De plus, en vue de concevoir des dispo- sitifs fonctionnels, de nombreux critères doivent être respectés comme par exemple leur fonc- tionnalité à température ambiante. Ces effets de champ électrique pourraient permettre, pour les STT − MRAM par exemple, d’abaisser la barrière d’énergie temporairement lors de l’écriture tout en gardant une bonne stabilité thermique pour le stockage de l’information à long terme. Mémoire de type racetrack et mouvement de domaines/skyrmions : La mémoire de type ra- cetrack a été proposée par S. Parkin en 2008 [36] et se base sur les mouvements des parois de domaines magnétiques1pour la rétention d’information. Elle est inspirée des mémoires à bande,

mais dans ce cas-ci, l’information stockée se déplace dans la bande, sans déplacement physique de celle-ci. Les avantages sont donc nombreux car une toute autre configuration est envisagée par rapport aux mémoires commercialisées de nos jours. Ce serait un dispositif entièrement solide, ne se dégradant pas à l’utilisation. La lecture et l’écriture de l’information se feraient sans recourir à un déplacement mécanique, contrairement aux disques durs commercialisés de nos jours. Une plus grande durée de vie, ainsi qu’un gain en rapidité pourraient être envisagés.

Nous verrons en section 2.1.3.5 comment Schellekens et al. [37] ont démontré le contrôle de la vitesse des parois de domaines avec l’application d’un champ électrique. Ils ont proposé un prototype de mémoire racetrack utilisant localement une application de tension qui permettrait de diriger la paroi dans une orientation donnée, dépendante du signe de la tension appliquée (voir figure 5 en ref. [37]). Nous pourrions imaginer remplacer les parois de domaines par d’autres configurations micromagnétiques, comme les skyrmions, au sein des prototypes de type race- track. Ceci dans le but d’augmenter la densité et la rapidité d’écriture : les skyrmions sont des

Moment magnétique Température de Curie Vitesse de propagation des domaines

300K 300K

V=0

V=0

Anisotropie magnétique Coercivité

FIGURE 2.1: Paramètres magnétiques qui peuvent être affectés par l’application d’un champ électrique. Figure adaptée de [47] et de [48]

objets généralement très petits (échelle nanométrique) dont la vitesse de déplacement est bien plus forte que celle d’une paroi de domaines. Leur déplacement à l’aide d’un courant a déjà été prouvé et ne sera pas à l’étude de cette thèse. Nous nous concentrerons sur leur création, de manière contrôlée, à l’aide d’un champ électrique.