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1 - L’impact de la tarification à l’activité

La généralisation depuis 2008 de la tarification à l’activité modifie profondément la logique hospitalière. Les établissements sont financés pour l’essentiel par les produits dégagés par leurs activités de soins. Il s’ensuit un effort important des établissements pour développer ces activités, qu’il s’agisse d’améliorer le codage ou d’accroître les soins produits.

Localement, les établissements développent des stratégies de croissance, qui entraînent une concurrence renforcée entre eux. Au niveau national, les tarifs sont ajustés pour contenir la hausse des volumes au sein de l’ONDAM. La baisse tendancielle des tarifs accentue la pression sur les établissements et les équipes de soins. Conjointement, la pression sur les dépenses se fait plus forte et la gestion plus rigoureuse. Les soins concentrent ainsi l’essentiel des efforts de développement des CHU, contraints chaque année d’accroître leur activité pour maintenir leur niveau de recettes.

Entre 2010 et 2015, les produits d’activité ont progressé plus rapidement que les recettes issues des missions d’enseignement, de recherche, de référence et d’innovation (MERRI) : + 14,6 % pour les produits d'activité et + 12,2 % pour les recettes MERRI13.

7 Les CHU emploient 26 2012 personnels médicaux hors sages-femmes et hors internes, en équivalent temps plein.

DREES, données 2015.

8 Les CHU emploient 266 577 personnels non médicaux et sages-femmes, en équivalent temps plein moyen annuel rémunéré. DREES, données 2015.

ATIH, Comptes de résultats principaux 2015 validés par les établissements, novembre 2016. Les données 2016 ne sont pas disponibles.

9 ATIH, données 2015, produits de titre 1 et 2 hors MIGAC et FIR.

10 CNG, rapport d’activité 2013, tome 2, données 2011, tableau n°53 : 22 793 € d’éléments variables liés notamment à la permanence des soins pour des émoluments de base annuels de 40 825 € bruts.

11 CNG, rapport d’activité 2013, tome 2, données 2011, étude auprès des établissements de santé.

12 HUS, rapport sur l'activité libérale 2015.

13 ATIH, données 2010 et 2015, comptes de résultats principaux des CHU.

Les recettes des missions d’enseignement, de recherche, de référence et d’innovation (MERRI)

En 2016, les financements MERRI, apportés par l’assurance maladie, s’élèvent à 3,5 Md€, dont la très grande majorité (73 %) est versée aux CHU. Les mécanismes d’allocation de ces financements sont analysés au chapitre II.

Depuis la mise en œuvre de la tarification à l’activité en 2004, les surcoûts entraînés par les activités d’enseignement et de recherche des hôpitaux sont financés, au sein des missions d’intérêt général et d’aide à la contractualisation (MIGAC), par les recettes des missions d’enseignement, de recherche, de référence et d’innovation (MERRI).

2 - La dégradation de la situation financière des CHU

Selon les données de l’ATIH et du ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, les trente établissements ont collecté, en 2015, 28 Md€ de produits, soit 40 % du total des produits des établissements publics de santé, reçu 2,55 Md€ de crédits MERRI, soit 9,1 % du total des produits, ont accueilli 94 173 étudiants en médecine (hors PACES et 3ème cycle) à la rentrée universitaire 2015-2016 et disposent de 5 664 hospitalo-universitaires pour les encadrer et de 36 centres d’investigation clinique (CIC) pour conduire leur recherche clinique.

Tableau n° 1 : caractéristiques hospitalo-universitaires des trente CHU

Données 2015 ou 2015/2016 (étudiants) TOTAL produits (en M€)

Source : Cour des comptes d’après données ATIH, MSS, MESRI.

14 UFR de médecine uniquement (hors PACES et hors 3ème cycle)

15 Les CHU de Montpellier et de Nîmes sont liés par convention à l’université de Montpellier, qui ne distingue pas les effectifs hospitalo-universitaires affectés dans l’un ou l’autre CHU. Une partie des 207 postes hospitalo-universitaires affectés au CHU de Montpellier est donc en poste au CHU de Nîmes. Il en est de même pour les CHU de Martinique et de Guadeloupe, liés par convention à l’université des Antilles.

16 Voir la note de bas de page n° 23.

17 Ce CIC est à Cayenne.

Sur chacune des cinq dernières années, le résultat consolidé de l’ensemble des comptes de résultat principaux18 des CHU est négatif. Le déficit cumulé est supérieur à 100 M€ en 2012 (12 CHU en déficit), puis se dégrade jusqu’à dépasser 300 M€ en 2015 (20 CHU en déficit). La situation se redresse en 2016, avec un déficit de 258 M€, qui représente cependant près de la moitié des déficits de l'ensemble des hôpitaux publics (520 M€)19. En 2016, près de la moitié des CHU reste en déficit (14 sur 30).

Graphique n° 1 : résultat consolidé des comptes de résultat principaux des CHU depuis 2012 (en M€)

Source : données ATIH

Cette situation renforce la pression pour développer l’activité et rationaliser l’organisation des soins. Elle pèse aussi sur la capacité d’autofinancement qui permet aux établissements de financer leurs investissements et de rembourser leurs emprunts.

La capacité des CHU à financer les investissements mesurés par leur part dans les produits globaux, c’est-à-dire le chiffre d’affaires, est en diminution. L’encours de la dette représente plus de la moitié de leurs capitaux permanents, soit un niveau sensiblement supérieur à l’ensembles des établissements publics de santé.

18 Le compte de résultat principal retrace les opérations d’exploitation des établissements de santé, à l’exception de celles concernant les activités mentionnées à l’article R.6145-12 du code de la santé publique (unités de soins de longue durée, établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, institut de formation en soins infirmiers, etc.).

19 Situation financière des hôpitaux publics, ATIH, mai 2017.

-107,0

-179,6

-199,3

-318,3

-257,9

2012 2013 2014 2015 2016 (proj)

Résultat (en M€)

Tableau n° 2 : effort d’investissement et taux d’endettement des établissements publics de santé et des CHU

2012 2013 2014 2015

Effort d'investissement des EPS rapporté au chiffre

d’affaires 8,8 % 7,6 % 7,1 % 6,6 %

Effort d'investissement des CHU rapporté au chiffre

d’affaires 8,3 % 7,9 % 7,5 % 6,8 %

Taux d'endettement des EPS rapporté aux capitaux

permanents 49,6 % 49,8 % 50,0 % 50,5 %

Taux d'endettement des CHU rapporté aux capitaux

permanents 58,4 % 58,5 % 59,4 % 59,6 %

Source : données DREES

Il est cependant difficile d’en apprécier les conséquences sur les investissements en recherche et en formation, qui ne sont pas suivis de façon distincte en comptabilité. Certains équipements sont par ailleurs utilisés aussi bien pour les soins que pour la recherche et l’enseignement.

3 - Les effets sur l’effort de recherche

Dans ce contexte financier tendu, les équipes hospitalo-universitaires mettent en avant un risque de mise en concurrence des activités de soins, d’enseignement et de recherche qui peut se traduire par une allocation des moyens prioritairement aux soins. La situation paraît cependant plus contrastée.

Au plan national, les crédits MERRI ont effectivement pu apparaître comme une variable d’ajustement au bénéfice des soins. En 2015 l’enveloppe des crédits MERRI a été diminuée de 80 M€ au bénéfice du financement de l’activité de soins. Ces crédits ont été affectés au calcul des tarifs des séjours, venant atténuer leur baisse. L’ensemble des établissements a ainsi bénéficié de la réduction de l’enveloppe des crédits MERRI bénéficiant principalement aux CHU. Comme l’a relevé la Cour en septembre 2017 dans son rapport annuel sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale20, l’ONDAM « hospitalier », qui englobe notamment ces recettes MERRI et les produits de l’activité de soins des établissements de santé, a en outre fait l’objet de régulations à hauteur de 446 M€ visant à respecter le plan triennal d’économies 2015-2017 de l’ONDAM global.

Les CHU de l’échantillon affichent leur volonté de préserver l’effort consacré à la recherche clinique, y compris lorsqu’ils sont confrontés à une situation déficitaire. Ainsi, en 2016, bien qu’ils soient en contrat de retour à l’équilibre et doivent réaliser des économies sur les activités de soins, les Hôpitaux universitaires de Strasbourg (HUS) ont consacré 400 000 € à un appel à projets en recherche clinique interne. Compte tenu de la prise en compte de critères d’activité scientifique pour l’allocation des crédits MERRI, la recherche représente désormais pour les établissements un enjeu stratégique mais également financier.

20 Cour des comptes, Rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale, chapitre II : L’objectif national de dépenses d’assurance maladie : en 2016, un objectif atteint au prix de nombreux biais ; en 2017 et au-delà, des économies effectives à rechercher et à accentuer, p. 89. La Documentation française, septembre 2017, 729 p., disponible sur www.ccomptes.fr

C - Une lente adaptation de la gouvernance aux enjeux de la recherche et