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Contrairement au modèle français, les établissements étrangers impliqués dans l’enseignement médical et la recherche n’assurent pas nécessairement l’ensemble des trois missions : certains sont spécialisés dans l’enseignement (« teaching hospital »), d’autres dans la recherche clinique (« university hospital »).

La séparation de la formation supérieure et de la recherche n’apparaît pas pertinente en France. Pour de très nombreuses disciplines scientifiques, la France a choisi de lier fortement enseignement supérieur et recherche, afin que l’enseignement supérieur soit enrichi par les dernières avancées de la recherche. En outre, ce choix serait à rebours de la politique actuelle d’« universitarisation » de la formation paramédicale et de développement de la pluridisciplinarité des enseignements.

198 Hors AP-HP et HCL pour le score SIGAPS 2015.

En matière de formation, la répartition des rôles entre l’université et le CHU doit cependant tenir compte de deux enjeux majeurs :

- la diffusion des stages hors CHU renforce la responsabilité des universités pour garantir la qualité pédagogique des lieux de stage, conduisant à considérer le CHU comme un opérateur dans le domaine de la formation au même titre que les autres catégories d’établissements de santé ; à l’échelle régionale, une coordination régionale renforcée serait nécessaire pour l’organisation des stages, entre les universités, responsables des enseignements médicaux, et l’ARS chargée de la répartition de l’offre de soins ;

- les besoins émergents en matière de formation nécessitent par ailleurs de conclure de nouvelles coopérations entre les acteurs : à l’intérieur des universités, ou à l’échelle des COMUE, la création d’un champ élargi de la santé devrait inclure les enseignements paramédicaux, de sciences et de sciences sociales ; entre l’université et le CHU, les partenariats devraient financer des investissements dans les nouveaux outils de la pédagogie médicale (simulation notamment).

Ainsi, il n’est pas proposé de remettre en cause la structuration actuelle des 30 CHU, dont l’existence est liée au conventionnement avec l’une des 34 universités réparties sur le territoire comprenant une faculté de médecine.

En revanche, concernant la recherche biomédicale, l’objectif de compétitivité internationale impose désormais la concentration des moyens au sein de grands pôles hébergeant une masse critique de chercheurs et de personnels de soutien, et des plates-formes technologiques de haut niveau. C’est pourquoi la Cour recommande de favoriser l’émergence de cinq à dix CHU à forte visibilité internationale sur le plan scientifique.

Plusieurs options sont envisageables pour y parvenir :

a) Une première proposition consisterait à transformer certains CHU en véritables hôpitaux universitaires avec une gouvernance plus fortement intégrée à celle de l’université : c’est le choix qu’ont fait plusieurs pays, notamment les Pays-Bas. Sur le plan des missions d’enseignement et de recherche, ce modèle paraît très intéressant car il implique une coordination étroite des stratégies de l’hôpital universitaire et de l’université et assure une prise en compte au plus haut niveau des objectifs d’enseignement et de recherche. En revanche, il apparaît difficilement compatible avec le statut actuel des CHU, qui sont avant tout des centres hospitaliers régionaux, dont les modalités actuelles de financement sont essentiellement basées sur l’activité de soins et sont particulièrement exigeantes en matière d’efficience et de maîtrise des dépenses. Ce nouveau type d’établissement ne pourrait pas être financé exclusivement par l’assurance maladie via la tarification à l’activité. Une autre forme de financement serait à définir, en lien avec des objectifs d’enseignement et de recherche, comme cela se fait notamment en Allemagne, où les länder et le ministère de l’éducation financent les hôpitaux universitaires, et aux Pays-Bas. L’allocation de ces moyens spécifiques pourrait tenir compte des résultats de l’évaluation par le HCERES de l’exercice de ces missions.

Le financement par le programme d’investissements d’avenir des actions IHU et des RHU représente déjà aujourd’hui une forme de financement exceptionnel pour la recherche d’excellence, mais reste actuellement limité à des structures ou à des thématiques bien identifiées. Le financement spécifique affecté aux hôpitaux universitaires d’excellence devrait être alloué pour l’ensemble de leur activité de formation et de recherche.

b) Tout en maintenant la relation de collaboration entre les CHU et les universités, une version plus limitée de cette réforme consisterait à distinguer parmi les services des CHU ceux

assurant la triple de mission de soins, d’enseignement et de recherche et qui pourraient bénéficier de financements spécifiques pour leurs missions hospitalo-universitaires.

c) Si les CHU et les universités restent dans une relation partenariale, avec des CHU qui sont avant tout des centres hospitaliers régionaux répartis sur le territoire, il apparaît à tout le moins nécessaire de revoir les modalités de financement des activités de recherche, pour mettre fin à la dilution des financements, tout en respectant l’obligation d’égalité de traitement des établissements de santé.

C’est pourquoi la Cour recommande de réformer le mode d’allocation des financements MERRI :

- Afin de rapprocher les modes de financement de la recherche dans les CHU de ceux pratiqués dans la recherche publique, la part des recettes MERRI réservée au financement des appels à projets et des structures de recherche devrait être accrue de manière significative. Cette mesure nécessite de procéder à un rééquilibrage entre les différentes composantes des recettes MERRI, tout en veillant à préserver l’équilibre budgétaire des CHU. Cette évolution intégrerait une révision du modèle de détermination des financements affectés aux structures de soutien (DRCI, CIC) visant à concentrer ces moyens sur les CHU les plus intensifs en recherche.

- Dans l’attente de cette réforme, afin d’éviter la dilution des recettes MERRI et de les concentrer sur les CHU les plus actifs en recherche, il serait nécessaire de modifier sans délai les modalités de répartition de ces crédits, notamment en relevant les seuils d’éligibilité, en renforçant le contrôle des déclarations des établissements, en étant plus strict sur le périmètre des personnels publiants pris en compte et en rendant les scores SIGAPS et SIGREC plus discriminants au regard de la qualité des travaux de recherche.

La Cour recommande de confier à ces cinq à dix CHU une responsabilité de tête de réseau. Cette orientation ne doit pas conduire à leur réserver l’activité de recherche mais à en améliorer l’organisation entre établissements dans une approche graduée : si certains moyens (plates-formes techniques de haut niveau, moyens de soutien spécialisés) doivent être concentrés au sein des CHU têtes de réseau, ceux-ci doivent cependant rester à même de soutenir les actions de recherche des CHU partenaires ou des établissements de santé de leur territoire. Compte tenu des enjeux du continuum recherche fondamentale-recherche clinique, ces cinq à dix CHU ont vocation à être implantés au sein des métropoles régionales, là où sont présents les organismes de recherche et les universités intensives en recherche. Ces CHU pourraient reprendre les compétences assurées jusqu’ici par les GIRCI et jouer ainsi leur rôle de tête de réseau. Au-delà des objectifs de performance, le modèle d’allocation des moyens devrait intégrer des objectifs de coopération afin qu’ils jouent effectivement leur rôle de soutien des établissements partenaires.

___________________ CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS __________________

Depuis soixante ans, le modèle des CHU a montré son efficacité mais son organisation actuelle doit impérativement évoluer pour répondre aux nouveaux enjeux de la formation médicale et de la recherche. Cette évolution doit répondre à des logiques différentes, mais complémentaires, entre ces deux domaines.

En matière de formation, la Cour ne propose pas de remettre en cause la structuration actuelle des trente CHU, dont l’existence est liée au conventionnement avec l’une des

trente-quatre universités comprenant une faculté de médecine, mais elle recommande de généraliser les parcours à partir des CHU vers les autres établissements de santé et la médecine de ville.

L’évaluation des enseignements doit être étendue à la formation pratique des étudiants et des internes. Enfin, l’affectation des postes hospitalo-universitaires doit prendre plus fortement en compte la dimension nationale et l’évolution des disciplines.

En matière de recherche biomédicale, l’organisation des CHU doit évoluer afin de rester compétitive et visible sur le plan international. La Cour préconise de favoriser l’émergence de cinq à dix CHU à visibilité internationale pouvant jouer le rôle de tête de réseau. Les crédits MERRI doivent être réformés afin de rapprocher les modes de financement de la recherche dans les CHU de ceux pratiqués dans la recherche publique. Si certains moyens (plates-formes techniques de haut niveau, moyens de soutien spécialisés) doivent être concentrés au sein des établissements les plus performants, ceux-ci doivent cependant être en capacité de soutenir les actions de recherche des CHU partenaires ou des établissements de santé de leur territoire.

La Cour formule en conséquence les recommandations suivantes :

Au ministère des solidarités et de la santé et au ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation :

- organiser les parcours de formation à partir des CHU vers les autres établissements de santé et la médecine de ville en s’appuyant sur les groupements hospitaliers de territoire (GHT) en vue de définir des parcours de formation en cohérence avec les parcours de soins ;

- améliorer le pilotage de la révision des postes hospitalo-universitaires en prenant plus fortement en compte sa dimension nationale et l’évolution des disciplines.

Au ministère de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation et au HCERES :

- renforcer l’évaluation des formations médicales en étendant les évaluations du HCERES à la formation pratique des étudiants et des internes.