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proche à partir des contraintes

III.2 Les mesures basées sur l'utilité

L'évocation des mesures basées sur l'utilité fait, en premier lieu, penser aux travaux de Ben Akiva et Lerman [16] ainsi qu'à ceux de Domencich et Mac Fadden [59]. Ces auteurs formalisent l'idée que l'accessibilité dépend de la perception qu'ont les individus des alternatives qui s'orent à eux, à partir de la théorie de l'utilité aléatoire. Bien que moins abordés dans la littérature (anglo-saxonne notamment), les travaux menés par Koenig dans le cadre de la  théorie économique de l'accessibilité urbaine  [105], [106] avaient amorcés ce raisonnement quelques années auparavant. Dès lors, après avoir présenté dans un cadre général les mesures basées sur l'utilité, nous développerons la théorie économique de l'accessibilité urbaine.

III.2.1 Présentation générale

Ces mesures, développées à partir des années 1970 grâce notamment à Ben-Akiva et Lerman [16], reposent sur la théorie de l'utilité aléatoire (Ran- dom Utility Theory). Dans ce cadre, l'accessibilité est non pas interprétée comme un volume potentiel d'opportunités mais comme le résultat du choix d'une alternative parmi d'autres, chaque individu sélectionnant l'alternative lui orant le niveau d'utilité le plus élevé. L'accessibilité est alors envisagée comme l'espérance de l'utilité maximale que retire un individu de l'alterna- tive choisie. Ainsi comme le soulignent Ben Akiva et Lermann [16], l'accessi- bilité est une mesure composite décrivant les caractéristiques d'un ensemble d'alternatives oertes à un individu telles qu'elles sont perçues par cet indi- vidu. Elle dépend donc à la fois des diérentes alternatives ainsi que de leur perception par chaque individu.

Soit Ctun ensemble d'alternatives oertes à l'individu t. A chacune de ces

alternatives, l'individu associe un niveau d'utilité et choisit l'alternative qui maximise son utilité. Ben-Akiva et Lerman envisagent le cas pour lequel l'ac- cessibilité est dérivée d'un modèle logit multinomial. L'accessibilité pourrait

donc s'écrire :

At= M axUit

avec i ∈ Ct

Toutefois, l'utilité n'étant pas connue avec certitude, elle est considé- rée comme une variable aléatoire et n'est donc pas directement mesurable. L'utilité se compose en eet de deux éléments : d'une part, la composante déterminée notée Vin, autrement dit les attributs observables concernant les

caractéristiques des individus (revenu, variables socio-démographiques) et des diérentes alternatives (mode de transport, vitesse, coût généralisé), d'autre part un élément inobservable noté in, appelé  trouble  ou  utilité rési-

duelle . Au regard de l'additivité des deux composantes de l'utilité, l'utilité Uin associée par un individu n, à une alternative i peut s'écrire :

Uin = Vin+ in

An de déterminer l'accessibilité, nous posons les hypothèses suivantes :  l'utilité résiduelle est considérée comme identique pour chaque alterna-

tive

 la composante déterminée de l'utilité et l'utilité résiduelle sont deux distributions de Gumbel7 indépendantes

Dès lors, au regard des propriétés de la distribution de Gumbel8, l'acces-

sibilité d'un individu t s'écrit :

At= E(M axUit) E(M axUit) = 1 µln X i∈Cn exp(µVit)

7La loi de Gumbel est une loi d'une variable aléatoire continue utilisée pour la dis-

tribution des valeurs extrêmes. La distribution de Gumbel de paramètres (η; µ) est don- née par F (x) = exp[−e−µ(−η)], avec µ > 0 et sa fonction de densité s'écrit f() =

µ ∗ e−µ(−η)exp[−e−µ(−η)].

8Propriété 1 : si  est une distribution de Gumbel de paramètres (η; µ), et A et B > 0

deux constantes alors A+b est une distribution de Gumbel de paramètres (Bη +a; µ/B). Propriété 2 : si 1 et 2 sont deux distributions de Gumbel indépendantes de para-

mètres (η1; µ)et (η2; µ) alors max(1, 2)est une distribution de Gumbel de paramètres



1 µln(e

µη1+ eµη2), µ. Propriété 3 : l'espérence mathématique de la distribution de Gum-

III.2.2 Atouts et limites de la mesure

Cette mesure de l'accessibilité présente l'avantage d'avoir un fondement microéconomique et d'être cohérente avec la théorie du surplus du consom- mateur. Contrairement aux mesures gravitaires de l'accessibilité qui reètent seulement l'accessibilité depuis un lieu, cette mesure prend également en compte les caractéristiques individuelles [78]. Par ailleurs, exprimée en unités monétaires, cette mesure permet d'eectuer des comparaison inter-individuelles (toutes choses étant égales par ailleurs).

En dépit de leurs  atouts , les mesures basées sur l'utilité nécessitent un besoin important de données en termes de localisation mais surtout de comportement des individus ainsi que des alternatives qui s'orent à eux. De plus, ces mesures semblent diciles à interpréter et ce, d'autant plus lorsque les individus présentent des fonctions d'utilité diérentes. Enn, certains au- teurs comme Sweet [161] soulignent le problème du manque de diérenciation entre l'élément résistant et l'élément moteur du déplacement.

Les travaux menés par Ben-Akiva et Lerman à partir de la théorie des choix discrets ne sont pas les premiers à être publiés. Ils s'appuient sur les propositions faites par Koenig en 1974 dans le cadre de la théorie économique de l'accessibilité urbaine. Koenig développe dans sa théorie une mesure de l'accessibilité à partir de l'utilité que les individus associent à chaque alter- native.

III.2.3 La théorie économique de l'accessibilité urbaine comme exemple de modèle de choix discret

Koenig développe la théorie économique de l'accessibilité urbaine à par- tir d'hypothèses relevant de la théorie micro-économique du consommateur [105]. Il considère ainsi que l'individu associe une utilité brute à chaque des- tination dont il a connaissance. L'utilité brute  caractérise en termes éco- nomiques l'intérêt intrinsèque que l'individu attribue à la destination pour y exercer l'activité souhaitée : travail, achat, loisirs. . . . Concrètement, si l'on se place dans le cadre de l'accessibilité aux emplois, l'individu asso- cie à chaque possibilité d'emploi oert un revenu brut annuel ainsi que la probabilité qu'il a d'être engagé et des variables subjectives (convenances personnelles, intérêt du travail . . . ). L'utilité brute d'une destination est une variable aléatoire de loi de distribution exponentielle négative. En eet, la

probabilité de trouver un revenu égal à x décroît rapidement lorsque x aug- mente. Parallèlement à cette utilité brute, l'individu associe à chaque desti- nation (par exemple, lieu d'emploi) un coût généralisé du déplacement étant données les particularités de sa situation. On peut dénir le coût généralisé d'un déplacement comme la somme du prix monétaire du voyage et du temps généralisé pondéré par la valeur moyenne du temps ressenti par l'usager. Dès lors, à chaque destination l'individu associe une utilité nette, diérence entre l'utilité brute et le coût généralisé du déplacement.

Des hypothèses concernant le comportement de l'usager d'une part, et la distribution probabiliste de l'utilité brute, d'autre part, peuvent être dé- duits les résultats suivants. L'utilité nette moyenne que peut retirer d'un déplacement un individu résidant dans la zone i s'écrit :

Ui = x0logAi avec Ai = n X j=1 Ejexp −cij x0

Ej le nombre d'emplois et x0 un paramètre

A partir de cette théorie, il est possible de déterminer la probabilité Pj

pour que la destination qui procure la meilleure utilité à l'individu se trouve dans la zone j, autrement dit la probabilité de choix d'une destination j par un individu. Cette probabilité prend la forme d'un modèle de choix discret à utilité aléatoire : Pj = Ejexp −cij x0 Pn k=1Ekexp −cij x0

Ek appartenant à J, l'ensemble des zones de l'aire d'étude

On retrouve d'ailleurs, par ce résultat, la formule du modèle gravitaire, ce qui renforce l'hypothèse d'une distribution gravitaire du trac.

Ce modèle dérivé de la théorie économique de l'accessibilité urbaine peut être interprété comme un modèle logit multinomial où l'utilité que retire un individu de son déplacement dans la zone j, pour satisfaire un besoin donné est :

uji = c0ln(Ej) − cij + ij

La théorie économique de l'accessibilité urbaine peut être considérée com- me un cas particulier de mesures basées sur l'utilité individuelle. Associée à sa composante gravitaire pour la calcul de l'accessibilité, elle a été princi- palement utilisée dans le cadre de la planication urbaine et constitue selon son auteur une  clé de voûte des modèles de prévision de trac . Les me- sures gravitaires, les mesures basées sur les contraintes et celles intégrant l'utilité individuelle ont vu le jour entre 1950 et 1980. A la n des années 90, Miller tente d'associer ces trois approches dans le cadre des mesures spatio- temporelles de l'accessibilité.