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IV Une évaluation de la politique de transport à l'échelle spatiale

Cette section se propose d'évaluer la politique de transport en considé- rant sa dimension territoriale. Au-delà de l'impact de l'ore de transport dans la détermination des comportements de mobilité, le Plan de Déplace- ments Urbains insiste sur l'importance des infrastructures de transport dans la structuration et l'organisation du territoire. Parmi les objectifs avancés par le PDU, deux propositions relèvent de l'aménagement du territoire.

Premièrement, les infrastructures de transport sont envisagées comme un outil de gestion de l'espace urbain tant dans son évolution spatiale que dans la  qualité de vie  qui y est proposée. Les infrastructures routières, en orant de la vitesse aux usagers, tendent à allonger les distances parcourues (Wiel, [177]) et peuvent se traduire par une extension de la ville sur le modèle de la ville américaine. Les lignes de transport en commun de surface contribuent davantage à redonner à la ville sa dimension physique au détriment de sa dimension temporelle sur le modèle de la ville européenne.

Deuxièmement, et faisant suite à l'idée précédente, les infrastructures de transport en commun sont considérées comme un vecteur d'intégration des quartiers au sein de l'espace urbain. Améliorer la desserte du centre-ville de- puis ses quartiers périphériques constitue ainsi l'une des priorités inscrites dans le PDU. Cette amélioration vise à réduire les inégalités d'accès aux centre-ville et aux emplois entre individus résidant dans des quartiers dié- rents. Le passage de la ville pédestre à la ville motorisée [176] s'est traduit par une évolution des localisations de l'habitat et des emplois qui peut créer des inégalités entre les individus. Wenglenski [175] souligne ainsi que les indi- vidus pénalisés par les nouvelles congurations urbaines sont  ceux pour qui la mobilité reste dicile et dont la localisation est fortement contrainte .

Ces deux propositions relevant de l'aménagement du territoire seront exa- minées successivement. Nous montrerons dans un premier temps comment le tramway participe à la gestion urbaine en accompagnant l'évolution de la ville et le développement de ses quartiers périphériques tout en conservant l'idée d'une centralité unique. Nous compléterons cette analyse en étudiant l'impact du tramway sur l'homogénéisation du niveau d'accessibilité aux em- plois du centre-ville entre les actifs des diérents quartiers.

IV.1 Le tramway comme outil de gestion urbaine

En appuyant notre démarche sur une analyse en termes d'accessibilité, nous soulignerons l'inuence du tramway (et plus généralement des trans- ports en commun urbains) sur l'organisation de l'espace urbain strasbour- geois à partir de deux illustrations. Pour ce faire, nous travaillerons à partir de mesures d'accessibilité depuis l'ensemble des 1603 micro-zones, qui com- posent notre aire d'étude, vers le centre-ville (voir gure 20 pour le périmètre retenu pour le centre-ville).

Fig. 20  Périmètre du centre-ville

IV.1.1 Les transports en commun pour renforcer la centralité Les transports en commun peuvent être perçus comme un levier pour maintenir, voire renforcer la prédominance du centre-ville. On s'oriente alors vers un centre-ville qui s'apparente à un parc d'attractions urbain [48] au

sein duquel l'accès aux aménités urbaines est subordonné à l'utilisation de modes de transports collectifs et de modes  doux . Le cas de Strasbourg est typique d'un tel schéma.

La comparaison des diérentiels d'accessibilité à l'ensemble du territoire et au centre-ville entre la voiture et les transports en commun est sans équi- voque. En eet, la gure 19 illustre un niveau d'accessibilité à l'ensemble du territoire toujours meilleur pour les automobilistes. La réorganisation du réseau de transports en commun a, pour quelques zones, permis un rééqui- librage sans pour autant inverser la tendance. A l'inverse, la représentation cartographique des diérentiels d'accessibilité au centre-ville entre les deux modes (gure 21) illustre une accessibilité meilleure pour les usagers des transports en commun pour 871 zones représentant 93% de la population ac- tive en 1993 et 862 zones représentant 92% de la population active en 2005. On constate ainsi qu'en 1993, le réseau de transports en commun était su- samment performant pour entretenir l'idée d'un centre-ville dense et porteur d'aménités.

La réorganisation du réseau de transport en commun et l'arrivée du tram- way n'auraient donc servi qu'à entretenir cette centralité ? La réponse est multiple. L'arrivée du tramway n'a pas bouleversé les termes de la concur- rence modale sur l'accès au centre-ville mais, en diminuant les temps de par- cours, elle a permis de compenser la hausse des valeurs du temps et donc de maintenir un coût généralisé en transports en commun sensiblement constant (+ ou - 10%) pour 52% de la population. La gure 21 (c) illustre que, sans amélioration de l'ore de transports en commun par rapport à 1993, on au- rait observé, en 2005, un rééquilibrage de l'accessibilité au centre-ville entre les deux modes. Seuls les actifs résidant au centre auraient vu leur niveau d'accessibilité augmenter à l'inverse des actifs résidant dans des zones qui ne sont pas directement desservies par une ligne de TC mais où un temps de marche est nécessaire pour atteindre le réseau de bus. Si le tramway, associé à une réorganisation du réseau de bus, a permis des gains de temps, son impact sur les usagers est également psychologique. Nos calculs ne prennent pas en compte la diérenciation de perception du confort lors d'un trajet en bus ou en tramway. Toutefois des études menées par le London Transport (reprises par Coindet [43]) ont montré que le temps de déplacement en tramway était perçu moins long que le même temps passé dans les mêmes conditions (assis, debout . . . ) dans un bus. Par ailleurs, bien que dicile à évaluer dans notre