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Contre-mesure optique

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 14-19)

1. Chapitre 1 : Mise en contexte des travaux de thèse et rappels de notions de cristallographie

1.1. Les applications principales des sources lasers infrarouges

1.1.1. Contre-mesure optique

Dès le début des années 70, des systèmes pour la réalisation de contre-mesures optiques ont été développés afin de contrer les missiles autodirecteurs (ou dit « à tête chercheuse ») qui ont fait leur apparition dans cette décennie. Ces types de missiles traquent le rayonnement thermique émis par les moteurs ou réacteurs des aéronefs, qui se situe dans le domaine de l’infrarouge, afin de traquer la cible (Figure 1).

Figure 1: Signature infrarouge d'un avion de ligne commercial dans la bande 3-5 µm, montrant une forte émission thermique venant des réacteurs [4]

Les premières contre-mesures à avoir été développées consistent en des fusées lumineuses, larguées à partir des avions. Elles servent ainsi de leurres pour perturber l’autodirecteur du missile [5].

Cette technique est toujours utilisée, de par sa simplicité, sur les appareils militaires actuels tels que l’hélicoptère Tigre (Airbus Helicopters) ou l’A400M (Figure 2) [6].

14 Figure 2: Photographie d'un A400M libérant des fusées lumineuses pour leurrer des missiles

anti-aériens autodirecteurs [6]

Cependant, les fabricants d’armes ont poursuivi le développement de système de guidage des missiles, les rendant plus sensibles et plus fiables, ce qui a conduit au développement de nouveaux systèmes de contre-mesures, basés cette fois sur le brouillage du système de guidage de ces missiles et non pas basé sur l’utilisation de leurres. Ces appareils de brouillage sont généralement composés de quatre constituants principaux [4] :

- Un brouilleur, généralement basé sur une source lumineuse dont le rayonnement émis perturbe le système de guidage du missile ;

- Un traqueur de missile, composé de caméras et d’optiques pour repérer et cibler le missile en approche ;

- Un composant mécanique afin de faire pivoter les systèmes de traque et de brouillage pour cibler en permanence le missile ;

- Un système de traitement des données pour contrôler les trois précédents constituants.

Les premiers dispositifs de contre-mesure à avoir été réalisés étaient des systèmes dirigés appelés

« Directed InfraRed Counter Measure » (DIRCM). Ces derniers utilisaient une lampe dont la lumière modulée était dirigée avec un miroir sur le missile. Le rayonnement produit perturbait l’électronique au sein du système de guidage du missile et bloquait ainsi le verrouillage sur la cible. A cette époque, les missiles utilisaient principalement deux gammes de longueurs d’onde courtes, pour le domaine des infrarouges, entre 1-3 µm et 3-5 µm. Par conséquent, le système de brouillage devait être capable d’émettre un signal multi-bande afin d’être efficace [5]. De plus, les missiles de lance-roquettes tirés de l’épaule de type MANPADS (Man-Portable-Air-defense-Systems) comme le 9K32 Strela-2 en Figure 3 utilisent des fréquences de guidage dans le proche et le moyen infrarouge, confirmant l’intérêt d’avoir un système de brouillage multi-bande.

15 Figure 3: Système de missile sol-air 9K32 Strela-2 à guidage infrarouge créé dans les années 1970 [7]

Ce type de missile ne met que quelques secondes pour atteindre sa cible, nécessitant ainsi des dispositifs de contre-mesure réactifs et efficaces pour sauver l’aéronef. Cette catégorie de missiles est toujours utilisée à notre époque : son utilisation a été avérée dans le conflit qui a débuté en 2014 en Ukraine par les miliciens pro-Russes pour abattre des appareils de l’armée Ukrainienne [8].

Dans les années 70, la société Sanders Associates (devenue plus tard BAE Systems) a réalisé la mise au point d’un système de contre-mesure AN/ALQ-144 (Figure 4): composé d’un bloc de carbure de silicium chauffé qui émettait une grande quantité d’énergie infrarouge ; ainsi qu’un obturateur mécanique cylindrique permettant d’obtenir un signal pulsé synchronisé avec la rotation du réticule de verrouillage du missile. Ce signal pulsé empêchait le missile de se verrouiller sur sa cible et permettait ainsi de dévier la trajectoire du missile loin de l’aéronef.

Figure 4: Système de contre-mesure AN/ALQ-144 de BAE Systems [9]

Par la suite, de nouveaux systèmes de guidage ont vu le jour dans les années 90, ce qui a conduit au développement d’une nouvelle génération de contre-mesures basée sur les Oscillateurs Paramétriques Optiques (OPO) afin de contrôler plus précisément la longueur d’onde du signal utilisé pour réaliser le brouillage. Les systèmes laser classiques ne pouvaient être utilisés car il était difficile d’émettre dans les bandes 1-2 µm et 3-5 µm avec une grande puissance. Ces systèmes envoyaient des pics de forte intensité pour saturer le capteur du missile et faire perdre leur focalisation sur le signal infrarouge émis par l’aéronef, puis se coupaient pour éviter que le missile se verrouille sur le système de brouillage. En plus des critères d’accordabilité et de puissance du signal émis, les systèmes devaient être compacts et robustes pour supporter les conditions opérationnelles.

16 Les lasers à doublage de fréquence de type CO2 n’ont pu être retenus pour ces applications, car bien qu’ils puissent atteindre de grandes longueurs d’onde et de fortes puissances, les systèmes n’étaient pas assez robustes et ne sont guère accordables. C’est ainsi que les OPO se sont imposés comme technologie de choix pour les contre-mesures [5].

Une nouvelle génération de contre-mesures est apparue dans les années 2000 : « Large Aircraft Counter Measure » ou LAIRCM. Dans ce procédé, le système de traque de l’appareil détecte les missiles grâce à la lumière ultraviolette émise par les gaz d’échappements de ces derniers. De plus, les appareils sont montés sur un socle pivotant à 360° permettant un repérage et un brouillage de missile dans toutes les directions. De nombreux appareils se sont vus doter de ce système tel que les avions de l’US Air Force C-5, C-7, C-130 ou des hélicoptères de l’US Navy CH-46 et 53. La société BAE System produit le AN/ALQ-212 Advanced Threat Infrared Countermeasure à placer sous les ailes d’avion [9]. Le groupe Northrop Grumman’s, principal concurrent de BAE Systems réalisa le modèle Guardian (cf.

Figure 5), constitué d’une nacelle de 250 kg et devant être placé sous les aéronefs [10].

Figure 5: Photo d'une tourelle Guardian à faisceau dirigé, produite par Northrop Grumman's [10]

Ces dispositifs présentent cependant un fort encombrement ainsi qu’un poids et un coût élevés, limitant leur utilisation aux appareils de grandes tailles. Néanmoins, les hélicoptères et avions de plus petites tailles, qu’ils soient civils ou militaires, restent des cibles de choix pour des missiles. Il y a donc un besoin pour la réalisation de systèmes moins encombrants et moins chers pour ces appareils, justifiant ainsi les recherches dans ce domaine pour développer de nouveaux systèmes de contre-mesures. Le Pentagone a ainsi lancé le programme « Common Infrared Counter Measure » (CIRCM), qui demeure le projet phare dans ce domaine avec plus de 120 et 140 millions de dollars investis en 2014 et 2016. Les deux sociétés BAE Systems et Northrop Grumman’s se partagent majoritairement le contrat pour produire plus de 1000 unités de contre-mesures optiques [11]. Ce programme vise à étendre l’utilisation des systèmes de contre-mesures pour des aéronefs de petites tailles devant être envoyées sur zones à risque, où l’utilisation de MANPADS est possible.

17 Pour cela, les systèmes se doivent d’être plus légers et moins encombrants, tout en conservant une puissance suffisante pour réaliser le brouillage.

La technologie OPO n’est cependant pas la seule utilisable pour ces applications. En effet, d’autres entreprises se sont tournées vers les lasers à cascade quantique (LCQ) pour atteindre ces objectifs [12], car ces systèmes permettent de produire des signaux continus ou pulsés, accordables de manière à brouiller efficacement les systèmes de guidage [5]. La société Northrop Grumman’s a produit un système CIRCM basé sur cette technologie (Figure 6) [13].

Figure 6: Système de contre-mesure CIRCM basé sur un laser à cascade quantique multiwatt produit par Northrop Grumman’s [13]

La société BAE System a, quant à elle, continué à développer la technologie OPO et produit un système CIRCM basé sur l’utilisation de cristaux de ZnGeP2 (Figure 7) [14]. D’autres entreprises en dehors des Etats-Unis proposent des systèmes de contre-mesures : Selex Es (Ecosse, travaillant sur des systèmes pour avions et hélicoptères) ; Indra (Espagne, réalisant le système MANTA capable de brouiller plusieurs missiles simultanément) ; Elbit Systems Electro-Optics (Israël).

18 Figure 7: Système de contre-mesure CIRCM de BAE Systems basé sur un cristal de ZnGeP2 [14]

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 14-19)