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Outre-mer

Dans le document LES RAPPORTS DU CONSEIL D ETAT (Page 165-169)

Collectivités territoriales

3.3. Analyse d’une sélection d’arrêts des cours administratives d’appel et de des cours administratives d’appel et de

3.3.19. Outre-mer

Le régime foncier des îles Wallis et Futuna est totalement régi par la coutume et le droit civil ne trouve pas à s’y appliquer. Deux habitants de Wallis ont demandé au tribunal administratif de Wallis-et-Futuna à être indemnisés du préjudice qu’ils estimaient subir du fait de l’implantation de poteaux électriques sur des terrains dont ils revendiquaient la propriété. Ces demandes, au-delà des cas d’espèce,

posaient une question essentielle pour les communautés de ces deux îles, relative au droit applicable aux ouvrages publics, tous implantés sur des terres coutumières.

Le tribunal administratif a été amené à appliquer le droit coutumier qui, par essence, est un droit oral et qui, à Wallis comme à Futuna, n’a jamais fait l’objet de transcription écrite. En l’absence d’un corpus de règles écrites, il s’est fondé sur les travaux de M. Rau, qui a exercé en qualité de magistrat à Wallis et a rédigé une thèse de doctorat en droit qui reste à ce jour l’unique étude d’ensemble du statut civil personnel wallisien. Il a déduit de cette analyse, en s’appuyant, en outre, sur la procédure suivie par l’administration, que les requérants ne démontraient ni avoir la qualité de propriétaires des terrains d’assiette des ouvrages concernés, ni disposer d’un intérêt suffisant qui leur aurait permis d’engager la responsabilité de l’administration. Il a, en conséquence, rejeté leurs conclusions indemnitaires (TA de Wallis-et-Futuna, 25 octobre 2016, Mme Malia S. et M. Afalaato K., n° 1560023 et 1560024).

3.3.20. Police

Tranquillité publique

La Cour administrative d’appel de Nantes a été saisie par la Ligue des droits de l’Homme d’un appel contre le jugement du 29 avril 2014 par lequel le tribunal administratif d’Orléans avait rejeté sa demande tendant à l’annulation d’un arrêté du 6 décembre 2013, par lequel le maire de Tours avait, pendant une période allant jusqu’aux 15 janvier 2014 et comprenant donc les fêtes de fin d’année, interdit l’occupation abusive et prolongée de certaines rues et places du centre ancien et commerçant de la commune par toute personne, accompagnée ou non de sollicitations ou quêtes à l’égard des passants, accompagnées ou non de chiens, même tenus en laisse, lorsque cette occupation était de nature à entraver la libre circulation des personnes, la commodité de passage et la sûreté de ces rues et places. La Cour a fait droit à cette requête et a annulé l’arrêté du maire de la commune. La Cour a fait application des principes résultant des articles L. 2212-1 et L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales concernant les pouvoirs de police du maire, principes impliquant que, s’il appartient au maire de prendre les mesures nécessaires pour assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques, les interdictions édictées à ce titre doivent être strictement proportionnées à leur nécessité. La Cour a procédé au contrôle du respect de ces principes. L’arrêté du maire était motivé par quelques incidents isolés ayant conduit à des plaintes d’habitants ou de commerçants du quartier et relatifs à la présence de personnes sans domicile fixe, parfois accompagnées de chiens. Mais la Cour a relevé que les services de police n’avaient pas mentionné de violences effectives à l’égard des personnes ni de troubles significatifs pour l’ordre public et elle a estimé que les quelques faits relatés de sollicitations ayant entraîné les interventions des services de la police municipale ne pouvaient, à eux seuls, être de nature à justifier la nécessité d’une mesure d’interdiction. La Cour a donc, au vu des pièces produites par le maire pour justifier sa décision, jugé que le maire de Tours ne pouvait légalement prononcer l’interdiction de l’occupation prolongée

des rues du centre historique et commercial de la ville pendant la période des fêtes de fin d’année en l’absence de menace suffisamment grave pour l’ordre public justifiant la nécessité d’une telle mesure (31 mai 2016, Ligue des droits de l’Homme c/ Commune de Tours, n° 14NT01724). Le pourvoi en cassation formé contre cet arrêt n’a pas été admis par le Conseil d’État par décision du 16 décembre 2016 (n° 401927) – Arrêt ayant fait l’objet d’un communiqué de presse.

Assignation à résidence

Par deux arrêts du 20 juin 2016, la cour administrative d’appel de Paris, saisie de recours dirigés contre des mesures d’assignation à résidence prononcées dans le cadre de l’état d’urgence déclaré, en vertu de la loi du 3 avril 1955 modifiée, après les attentats commis à Paris le 13 novembre 2015, a jugé que le ministre de l’intérieur n’était pas tenu de mettre en œuvre la procédure prévue par les articles L. 121-1 et L. 121-2 du code des relations entre le public et l’administration permettant à tout administré de présenter des observations préalablement à la prise d’une décision individuelle défavorable le concernant. Elle a en effet estimé que cette procédure contradictoire n’avait pas à être respectée s’agissant de mesures ainsi édictées dans le cadre exceptionnel de l’état d’urgence (M. B., n° 16PA01209 et M. l., n° 16PA01210).

3.3.21. Procédure

Principe d’impartialité

La cour administrative d’appel de Lyon était saisie d’une affaire dans laquelle le même magistrat a d’abord statué sur une demande de référé suspension (art. L. 521-1 du code de justice administrative), qu’il a rejetée en raison de l’irrecevabilité de la demande au fond, en détaillant les raisons de cette irrecevabilité. Ultérieurement, se fondant sur les mêmes motifs, il a rejeté cette même demande au fond comme manifestement irrecevable (art. R. 222-1-4° du code de justice administrative).

Pour la cour, il a, ce faisant, préjugé le litige. Par suite, il ne peut pas se prononcer sur le fond sans méconnaître le principe d’impartialité (cf. CE, Sect., 12 mai 2004, Commune de Rogerville, n° 265184 ; CE, Sect., 26 novembre 2010, Société Paris Tennis, n° 344505 ; CE, 10 décembre 2004, Ministre de la défense, n° 263072, B) (CAA Lyon, 2 août 2016, M. R., n° 15LY01533, C+) – Affaire signalée dans ALYODA Rev.jurisp. 2017 n° 1 avec conclusions du rapporteur public.

Actes faisant grief

Le tribunal administratif de Bastia s’est prononcé sur le caractère d’acte faisant grief à une demande par laquelle une collectivité territoriale saisit le préfet afin d’être autorisée, en application des dispositions de la loi du 29 décembre 1892, à pénétrer dans une propriété privée afin d’y réaliser des opérations nécessaires à l’étude de projets de travaux publics. Aux termes de l’article 3 de la loi du 29 décembre 1892 relative aux dommages causés à la propriété privée par l’’exécution des travaux publics : « Lorsqu’il y a lieu d’occuper temporairement un terrain, soit pour en extraire ou ramasser des matériaux, soit pour y fouiller ou y faire des dépôts de

terre, soit pour tout autre objet relatif à l’exécution de projets de travaux publics, civils ou militaires, cette occupation est autorisée par un arrêté du préfet, indiquant le nom de la commune où le territoire est situé, les numéros que les parcelles dont il se compose portent sur le plan cadastral, et le nom du propriétaire tel qu’il est inscrit sur la matrice des rôles ». Ainsi, la demande par laquelle une collectivité territoriale saisit le préfet afin d’être autorisée, en application des dispositions de la loi du 19 décembre 1892, à pénétrer dans une propriété privée afin d’y réaliser des opérations nécessaires à l’étude de projets de travaux publics présente le caractère d’une mesure préparatoire qui n’est pas susceptible de faire l’objet d’une contestation immédiate, mais dont la légalité pourra être contestée à l’appui d’un recours exercé contre l’arrêté préfectoral portant autorisation d’occupation temporaire (12 mai 2016, M. Eric J et Mme Agnès J-B., n° 1300912).

3.3.22. Responsabilité de la puissance publique

Essais nucléaires

Par un arrêt du 15 décembre 2016, rendu après avis du Conseil d’État en date du 17 octobre 2016, la cour administrative d’appel de Paris s’est prononcée pour la première fois sur l’application, à l’égard des caisses de sécurité sociale, de la loi du 5 janvier 2010 instituant un régime spécial d’indemnisation des victimes des essais nucléaires français auxquels il a été procédé, dans le passé, notamment en Polynésie française. Ce régime étant fondé sur la solidarité nationale et non sur la mise en cause de la responsabilité de l’État, elle a jugé qu’une caisse de sécurité sociale ne pouvait obtenir, sur le fondement de cette loi, le remboursement par l’État des frais médicaux exposés au profit des victimes de ces essais nucléaires. Si une telle caisse peut en revanche exercer un recours à l’encontre de l’État dans les conditions de droit commun d’engagement de la responsabilité administrative, la cour a relevé que cette responsabilité ne saurait toutefois être retenue qu’en cas d’existence d’un lien de causalité direct et certain entre les préjudices subis par les victimes et les faits incriminés (Caisse de prévoyance sociale de la Polynésie française, n° 15PA01889).

Recours du co-auteur d’une faute contre l’administration

Par un arrêt du 10 mai 2016, la Cour administrative d’appel de Versailles a jugé que lorsque la faute de l’administration et celle d’un tiers ont concouru à la réalisation d’un même dommage, le tiers co-auteur qui a indemnisé la victime peut se retourner contre l’administration, en vue de lui faire supporter pour partie la charge de la réparation, en invoquant la faute de celle-ci, y compris lorsqu’il a commis une faute inexcusable au sens de l’article L. 452-1 du code de la sécurité sociale. Toutefois, dans le cas où le tiers co-auteur, en l’espèce la société Eternit, a délibérément commis une faute d’une particulière gravité, il ne peut se prévaloir de la faute que l’administration aurait elle-même commise en négligeant de prendre des mesures de nature à l’empêcher de commettre le fait dommageable (Ministre du travail, de l’emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social c/

Société ECCF, n° 15VE00383) – Pourvoi en cassation n° 401376 le 11/07/2016.

Dans le document LES RAPPORTS DU CONSEIL D ETAT (Page 165-169)