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Partie 1 : Etat de l’art

2. Qui sont les clients internes et leurs attentes ?

2.1. Les membres de la direction

Selon

V.Allagnat & Al. (2007)

« la direction générale est le client interne le plus exigent, il faut s'intéresser aux objectifs stratégiques globaux afin de mettre en place des indicateurs en adéquation avec ses attentes ». En effet la direction d’un site répond et relaie la stratégie de l’entreprise sur son périmètre. C’est à elle que le service achat devra systématiquement rendre des comptes et surtout c’est en adéquation avec ses indicateurs de performance que le service achat devra fixer les siens. Attention tout de même à ne pas penser que tous les indicateurs de performance de la direction générale doivent être déclinés dans le service achat. En effet, et la réciproque est vraie, la direction comme les achats utilisent des outils qui leurs sont pour certains propres. Le pilotage opérationnel de chaque service incombe aux responsables des services et dans ce cadre-là, les indicateurs de performance choisis peuvent être découplés de ceux de la direction. Mais ne nous méprenons pas, la finalité des indicateurs et KPI doivent permettre au service achat de répondre à des thèmes stratégiques fixés par la direction générale.

Nous parlions dans la partie précédente de « single loop learning » et « double loop learning ». Dans ce cas précis où la stratégie vient du haut de la pyramide et que le client, représenté par la direction générale, relais la stratégie de l’entreprise, l’enjeu est justement d’avoir un échange dans les deux sens lors des revues de performance. Ce fonctionnement, pour qu’il soit pérennisé, doit être inscrit dans le processus qualité du site. Dans le cas échéant et surtout si l’entreprise est de taille conséquente (nombreuses strates = organisation verticale) le rebouclage de la base vers le haut de la pyramide ne se fera peut-être jamais.

Dans un contexte économique de plus en plus tendu, un des axes et thème majeur sur lequel la direction concentre son attention sera la contribution du service achat à la compétitivité économique en passant par le contrôle et la réduction des coûts.

Il faut savoir à ce propos qu’en 2015 les attentes des entreprises envers la fonction achat étaient les suivantes

(source : G.Carlier 2016 : Conférence -

Direction achats, Direction financière : Les clés d’une relation gagnante).

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 69 % la réduction des coûts,

 52 % le développement de nouveau produit / la conquête de nouveau marché,

 50 % d’accompagner la conquête de nouveau marché.

Il est ici intéressant de décomposer ce que nous qualifions de direction générale pour voir que le service ou la performance attendue n’est certainement pas la même selon la direction représentative que nous avons en face.

 Directeur financier : Les liens sont axés sur les résultats financiers et les échanges de flux de trésorerie qui peuvent exister entre le service achat qui représente l’entreprise et les fournisseurs. Ce client aura besoin par exemple de connaitre l’échéancier des factures fournisseurs. Les processus liants les deux entités seront primordiaux pour l’entreprise « procure to pay ».

La construction du budget sera aussi une étape importante entre le service achat et la direction financière du site. En effet le service achat consolidera avec la direction financière, les achats prévus pour l’année N+1 que ce soit d’investissement « CAPEX » ou hors investissement « OPEX ». Autre échéance qui peut amener le service achat à répondre à ce client interne, est le cas d’un audit des commissaires aux comptes. Dans ce cas le processus achat peut être audité pour pouvoir vérifier, consolider des données du bilan et du compte de résultat, faire un point sur les immobilisations et les contrats de prestations sur site.

Selon

Jean-Pierre Vignes ancien directeur des achats du groupe

Carrefour, et Stéphanie Boileau Canu, directrice administration

finances et achats du groupe SPF

, les quatre clés d’une relation achat/finance sont :

 « Le positionnement de la fonction achats ».

 « La définition de modalités de calcul des gains partagées avec les finances ».

 « La mise en place d’un processus conjoint de validation des gains, en impliquant le contrôle de gestion ».

 « La synchronisation du cycle achat et budgétaire par l’intégration des gains objectifs dans la préparation budgétaire ».

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A travers ces différentes actions, le directeur financier apparait comme « un gardien » dans la définition de

Webster E. Frederik Jr., Wind

Yoram (1972)

. Ceci car il peut avoir à contrôler des flux d’informations vers le service achat notamment lors de l’exercice budgétaire. Il sera très peu concerné par le rôle « d’utilisateur » sauf si son service fait appel à une prestation externe pour réaliser un audit par exemple. Nous pouvons par contre avoir à travailler pour lui pour des fournitures ou consommables mais à ce moment-là nous pouvons imaginer qu’un acheteur délégué fera la demande voir même la commande à sa place. Par contre il sera à minima « influenceur » et surtout « décideur » car faisant parti des membres du comité de direction son avis sera à prendre en compte lors d’instances d’arbitrage pour la validation des demandes d’achat dépassant un certain montant.

 Direction des ressources humaines : Par définition les liens seront plus axés sur le côté ressources humaines des équipes. En effet, le service achat ne substitue pas le rôle des ressources humaines. Mais par contre il fixe avec eux différents contrats comme les contrats intérimaires, certaines prestations intellectuelles, les formations ou la logistique lors de mutations internes ou externes (déménagements etc.).

Il est intéressant de voir dans ce type de relation que le service achat peut jouer le rôle de conseiller, d’intermédiaire pour mettre en œuvre une demande du service des ressources humaines. Par exemple dans un contrat de restauration sur le site de l’entreprise concernée qui emploie des salariés depuis un certains nombres d’années et pour lesquels certains avantages ou positionnement doivent obligatoirement être pris en compte en cas de changement de prestataire. L’échange sera alors bénéfique bilatéralement, à savoir que le service achat formalisera le résultat des négociations avec le Comité d’Entreprise dans le contrat et de l’autre côté le service RH donnera les données d’entrée au service achat pour éviter de passer outre une loi, un usage.

Parfois la relation est encore plus complexe à gérer sous couvert de la confidentialité par exemple. Un exemple concret où une activité est externalisée. L’acheteur signe un accord de confidentialité et doit garder toutes les informations pour lui et le service des ressources humaines pendant l’étape de consultation et autres échanges. Il est facile d’imaginer

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la position délicate lors de la contractualisation avec le sous-traitant sans que les salariés soient informés. Nous pouvons donc voir la subtilité du positionnement du service achat et la multiplicité de profils pour des clients internes dans une même entreprise.

Là encore suivant la définition de

Webster E. Frederik Jr., Wind

Yoram (1972)

la direction des ressources humaines apparait comme « gardien » puisque nous avons vu dans l’exemple précédent qu’elle peut contrôler un flux d’informations. Pour les mêmes raisons que le « directeur financier » son rôle est aussi celui « d’utilisateur », « d’influenceur » et surtout « décideur ».

Direction d’exploitation (de fabrication) : Bien souvent sur un site de

production c’est la direction qui pilote le processus principal du site. Cela signifie que souvent son influence est la plus importante car ne pas lui donner priorité rime souvent avec arrêt potentiel de production et donc non-respect de livraison client ou coût de non qualité.

D’après

Frédérique Perron

« Le consommateur qui achète régulièrement ajuste ses attentes au service rendu. Alors que le consommateur occasionnel décrit ses attentes à partir d'un service idéal, son critère d'évaluation évolue en fonction de la familiarité avec le service. » Dans la plupart des cas, les liens entre le service achat et la direction d’exploitation sont assez étroits. Nous pouvons affirmer que les attentes seront en phases avec les missions antérieures menées. D’où l’importance, en tant que service support, de répondre présent aux sollicitations car ceux sont elles qui vont sponsorisées l’utilité du service et faire en sorte que les clients internes viendront le solliciter de nouveau.

La direction d’exploitation n’apparait pas essentiellement comme « gardien ». A l’inverse son rôle est plutôt celui « d’utilisateur » afin de permettre à la production de remplir ses objectifs et de contenter les clients finaux. Enfin pour les même raisons que précédemment la direction d’exploitation aura les rôles « d’influenceur » et surtout de « décideur ».

 Direction technique (maintenance, projets, utilités etc.) : Une direction technique est elle-même, par définition, en support de la direction d’exploitation. Il va donc sans dire que les enjeux des réponses à ses

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besoins sont au moins aussi importants que ceux de la direction d’exploitation. Par définition, c’est aussi là que la documentation technique et la définition des cahiers des charges prend toute son importance puisqu’elle va être garante de la maintenance ou du déroulement des grands projets sur un site d’exploitation. Nous pouvons donc imaginer que les sollicitations vont être fortes et surtout techniques mais les besoins pourront être aussi de l’ordre de l’achat de composants que de prestations intellectuelles d’assistance à maitrise d’ouvrage ou maitrise d’œuvre. Les enjeux seront très certainement aussi de réaliser des contrats site voir groupe selon la taille de l’entreprise. Par exemple mutualiser ou définir une politique de maintenance ou encore les besoins pour les utilités à savoir eau, électricité, gaz, facility management13.

Comme pour la direction d’exploitation, la direction technique n’apparait pas essentiellement comme « gardien » mais son rôle est plutôt celui « d’utilisateur », « d’influenceur » et de « décideur ».

L’objet de cette partie étant de montrer les différentes interactions qui peuvent exister entre un service achat et une direction, nous avons vu à travers ces exemples que les attentes sont parfois différentes même si le besoin reste le même à savoir suite à l’expression d’un besoin (pièces, services, prestations) la réponse en qualité, coût et délai.

Bruel (2007)

définit les achats comme « la fonction responsable de l’acquisition des biens et services nécessaires au fonctionnement de toute entreprise, ou de manière plus développée, la fonction de toute entreprise responsable de sourcer (rechercher) et acquérir des produits, services et prestations demandées par les clients internes, dans les meilleures conditions de coûts, de qualité, de service et d’innovation, tout en maîtrisant les divers risques encourus à court et moyen terme ». Bien évidemment les exemples et projections sur les directions présentées ci- avant peuvent être réalisés sur des sites qui ne sont pas de production comme des sièges sociaux ou administratifs, des établissements publics (hôpitaux, écoles, territoires etc.). L’essentiel étant de retenir que toute activité comporte un processus principal qui pour être réalisé fait appel à plusieurs fonctions supports.

Michael

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Facility management : Services généraux en français, cette prestation consiste pour une entreprise à faire appel à un sous-traitant qui va réaliser un ensemble de services comme par exemple : la gestion du courrier, les achats de fournitures, la gestion de l'entretien des bâtiments, des espaces verts, gestion des locaux techniques etc.

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Porter (2003)

image ainsi « la chaine de valeur d’une entreprise ». Il distingue ainsi 2 types d’activité :

 Activités de base,  Activités de soutien.

Figure 12 : Chaine de valeur, Porter (2003)

Les activités de base regroupent les fonctions suivantes :

 La logistique entrante : Constitution des stocks de matières premières ainsi que les transports et les réceptions avant production,

 Les opérations : C’est la production,

 La logistique sortante : Constitution des stocks et distributions des produits finis,

 Le marketing ventes : Elaboration de l’offre client, publicité, promotion, force de vente, prix et circuit de distribution,

 Les services : SAV, installation.

Les activités de soutien regroupent les fonctions suivantes :

 Infrastructure de l’entreprise : Direction Générale, comptabilité, finance, qualité,

 La gestion des ressources humaines : Recrutement, formation, rémunération,

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 Achats : Donne la possibilité aux activités de base d’obtenir les ressources nécessaires à la réalisation de leurs objectifs.

A travers cette chaine de valeur nous pouvons voir la transversalité de la fonction achat au sein d’une entreprise et ce que cela va impliquer aux interfaces. Nous avons vu que le positionnement en tant que fournisseur de la direction place le service dans des échanges qui peuvent être hautement stratégiques. Les besoins d’une direction ne se limite pas à des prestations ou à du matériel. L’acheteur devra porter les rôles plus complexes de « risk manager14 », acteur de source de compétitivité (design to

cost15, make or buy16 etc.) à travers ses performances financières mais aussi capter

l’innovation et les idées à l’extérieur de son environnement.

En résumé les attentes de la direction sont directement liées à la stratégie de l’entreprise telle que nous l’avons présenté dans la partie précédente « La performance Entreprise Vs performance service achat ». Bien évidemment si nous faisons un zoom de la direction corporate d’un grand groupe à la direction site, nous nous apercevrons que les objectifs deviennent opérationnels pour pouvoir les décliner par spécialité de chaque site.

Maintenant que nous avons abordé les attentes de la direction en tant que client interne, penchons-nous vers les prescripteurs en mettant en évidence leurs attentes.