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Partie 3 : Préconisations

1. L’acheteur pédagogue et l’intelligence émotionnelle

1.1. L’acheteur Pédagogue interne

Nous avons vu dans l’étude empirique les attentes des clients internes concernant leur service achat, ou encore, plus explicitement, sur les degrés d’importance des critères caractérisant le travail de l’acheteur. Ainsi les retours du questionnaire ont mis en évidence l’importance du relationnel aux yeux des clients internes. Le graphique de la figure 40 montre que pour 47% des clients internes le relationnel est un point indispensable dans le métier de l’acheteur et pour 46% d’entre eux c’est un critère très important. En résumé 93% des cinquante-huit personnes interrogées ont jugé ce critère majeur.

Figure 40 : Importance du relationnel de l'acheteur pour les clients internes

Nous avons vu également, en amont dans la revue de littérature concernant la collaboration « cross-fonctionnelle », que dans la collaboration interne nous pouvions identifier quatre étapes majeures dans le processus (figure 17). L’écoute de l’autre afin d’identifier son besoin et les jalons clefs de sa demande (degré d’urgence, budget, maturité de la demande etc.). La compréhension de son besoin ou de sa sollicitation qui peut être en amont d’une demande d’achat par exemple. La réaction

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qui répond à l’attente du client interne et donc qui fait face à son besoin. La satisfaction qui permet de boucler le processus et s’assurer que l’acheteur a répondu aux attentes de son client et que ce dernier est satisfait.

Toutes ces étapes vont faire appel au sens pédagogue de l’acheteur qui devra se mettre à la portée de son client et s’adapter à son niveau de besoin. En effet, une secrétaire qui se trouve être bloquée car elle n’a plus de stylo bleu pour son service ne sera pas à négliger ou ignorer. Par contre le niveau déployé pour l’écoute, la compréhension, la réaction et la satisfaction ne seront pas le même que pour répondre à l’achat d’une nouvelle machine de soudage pour un chef d’atelier par exemple. Attention tout de même car ce niveau de service n’est pas proportionnel au montant de la prestation ou de l’objet acheté mais il est plutôt lié au profil du demandeur qui va solliciter le service achat.

La figure 14 montre justement en face de chaque profil de clients internes celui de l’acheteur qui correspond. En effet, « l’expert technique » sera autonome dans la définition de son cahier des charges et parfois même jusqu’à la sélection du fournisseur. Dans ce cas précis, l’acheteur pédagogue n’aura qu’à accompagner son client interne et faciliter tous les points administratifs qui pourrait freiner le client dans sa demande. Il ne faudra en aucun cas que l’acheteur essaye, de par ses connaissances techniques, de substituer celles de son client interne. Comme dans un couple, chacun doit trouver sa place et éviter de marcher sur les pieds de l’autre.

Dans le cas du client interne type « demandeur » (voir figure 14), nous avons vu qu’à l’inverse de « l’expert technique » le cahier des charges ne sera pas rédigé ou en tout cas pas exhaustivement car ce client aura tendance à devoir sortir de sa zone de confort pour satisfaire son besoin. Dans ce cas précis, l’acheteur doit être présent plus tôt dans le processus afin de faciliter le client interne dans sa démarche : lors de la rédaction du cahier des charge par exemple. L’acheteur devra être à l’écoute du besoin de son client et devra après la phase de compréhension traduire ce besoin. Ceci avec les outils et moyens de son marché fournisseur pour y répondre au bon niveau d’exigence souhaité. L’acheteur devra tout de même laisser la place à son client dans le choix et l’arbitrage des critères qui lui seront offerts.

Dans le dernier cas du client interne type « utilisateur », l’acheteur devra accompagner de A à Z son client. Il sera dans certaines étapes son formateur notamment lors de l’utilisation de son ERP. Le caractère pédagogique prendra tout son sens dans ce cas car le client ne devra pas se sentir pris de haut ou à l’inverse

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lésé par le fait que l’acheteur soit toujours derrière lui. Ce client se souciera uniquement du résultat, à savoir que le produit réponde à ses attentes.

Attention tout de même car une mauvaise impression reste souvent ancrée et marque le client interne qui se rappellera que le service rendu n’était pas au rendez- vous ou pire que les humeurs étaient incompatibles. Il fera donc tout pour éviter de solliciter le service achat face à un besoin. De plus, sur un site comme dans la vie de tous les jours les informations circulent rapidement et une réputation peut vite se répandre sur l’ensemble d’un service. Selon

F.Perron (1998)

« Le consommateur qui achète régulièrement ajuste ses attentes au service rendu. Le consommateur occasionnel décrit ses attentes à partir d'un service idéal ». Nous pouvons donc dire que les critères d'évaluations évolueront en fonction de la familiarité avec le service.

Nous avons vu que l’acheteur pédagogue devait utiliser des outils différents en fonction du profil de clients internes qu’il avait en face de lui.

Taibi Kahler Process

Communication (Début années 80)

définit plusieurs profils de personnalité qui agissent sur le processus de communication entre deux personnes. Chaque personne possède une personnalité que Taibi Kahler qualifie de « base »et qui est acquise pour la vie. Mais aussi, chaque personne a une personnalité qualifié de « phase » et qui peut évoluer au cours de la vie en fonction des épreuves et évènements que nous rencontrons. Les 6 types de profils sont les suivants :

 « Empathique : Compatissant, sensible, chaleureux »,  « Travaillomane : Logique, responsable, organisé »,  « Persévérant : Dévoué, observateur, consciencieux »,  « Rêveur : Imaginatif, calme, réfléchi »,

 « Rebelle : Spontané, créatif, ludique »,

 « Promoteur : Adaptable, persuasif, charmeur ».

Si nous venons de voir que l’acheteur doit adapter son niveau de service au niveau du client interne qu’il a en face, nous pouvons voir ici qu’indépendamment, il devra aussi tenir compte du profil de personnalité de ce dernier. Il faut en effet utiliser le bon canal de communication selon si on s’adresse à un « rêveur » ou à un « travaillomane ». C’est effectivement primordial de s’accorder dans le mode d’échange et le ton que l’on emploie avec les personnes qui nous entourent car souvent on retient bien mieux la forme que le fond à situation équivalente. L’acheteur qui a un métier de service et de support se doit de maitriser ces codes et être un

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caméléon qui s’adapte à son environnement. Attention à ne pas non plus tomber dans le faux, le paraître. Nous parlons de canal de communication et non pas de rôle à jouer. Si on ne stimule pas l’intérêt ou alors si on agresse un client sans s’en rendre compte alors on n’en tirera rien et lui non plus.

Justement selon

N.Merminod et G.Paché (2016)

« L'importance est de gérer les interfaces intra-organisationnelles et humaines afin de décloisonner chaque service et profiter de la création de valeur de chacun ». C’est justement dans cet objectif là que l’acheteur doit jouer ce rôle de facilitateur, de pédagogue entre les différents services de son entreprise. Souvent le service achat apparait comme le dénominateur commun entre les services d’un site qui ne communiquent pas entre eux. En effet, toutes les demandes transitent par le service achat qui est informé souvent en amont de tout ce qui se passe sur le site avec parfois des sujets très stratégiques (externalisation d’une partie de l’activité). Il arrive donc que le service achat centralise les demandes provenant de plusieurs services qui ne se sont pas consultés et qui ont envoyé, chacun de leur côté, des demandes similaires. Le service achat aura alors le rôle de « réseau neuronal » ou d’ « artère » pour faire circuler l’information et mettre en contact les protagonistes.

Pour

A.Bichon et Al. (2010)

l’acheteur doit posséder des compétences clefs dans sa gestion des relations internes :

 « Compétences de communication interne » : Capacité à filtrer ou non des informations concernant les achats. Capacité à répondre aux questions des clients internes sur leurs demandes. Communication interpersonnelle.

 « Compétences politiques » : Identifier les jeux de pouvoir. Négociation de conflit. Défendre la fonction achat. Avoir le sens de la diplomatie.  « Compétences de contre-expertise » : Capacité à conseiller les clients

internes. Pédagogie pour expliquer les contraintes achats. Sens de la coopération et de l’écoute des clients internes. Capacité à synthétiser, capter, identifier les besoins et les traduire en cahier des charges.

 « Compétences de défense statutaire » : Connaissance sur le fonctionnement interne de l’entreprise et des procédures. Capacité à valoriser la fonction achat. Communication inter-métiers.

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 « Compétences de haut niveau » : Rôle stratégique des achats. Animation d’équipes transversales. Mobiliser un réseau de connaissance. Promouvoir et accompagner le changement.