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Méthodes expérimentales

2. Etude du frittage par MEBE

2.1. MEBE-HT in situ

Le microscope électronique à balayage utilisé lors des expérimentations in situ et ex situ réalisées dans le cadre de cette étude est un microscope environnemental (MEBE) de type Quanta 200 FEG fourni par la société FEI. Ce microscope permet, de la même manière qu’un microscope conventionnel, de travailler sous vide poussé, mais également sous vide dégradé et en mode environnemental en maintenant dans la chambre du microscope une pression élevée de gaz (air, H2O, O2 …). Le travail en mode environnemental est possible grâce à la présence

d’un système de vide différentiel positionné dans la lentille objectif qui permet de maintenir la source d’électrons et la colonne électronique sous vide poussé, tout en maintenant dans la chambre du microscope une pression élevée du gaz sélectionné. En mode environnemental, il est donc possible de travailler à des pressions pouvant atteindre jusqu’à 2400 Pa (sous vapeur d’eau) dans la chambre du MEBE [8].

La détection des électrons secondaires et électrons rétrodiffusés est réalisée en utilisant des détecteurs spécifiques en fonction du mode utilisé (vide ou mode environnemental). Lorsque la chambre du microscope est sous vide, deux types de détecteurs sont utilisés pour collecter les électrons émis par l’échantillon, le détecteur d’Everhart-Thornley pour les électrons secondaires et le détecteur solide BSED (Back Scattered Electron Detector), constitué d’un élément semi-conducteur, pour les électrons rétrodiffusés. En mode environnemental, le détecteur Everhart-Thornley ne peut pas être utilisé car il ne peut fonctionner que sous vide poussé. Aussi, l’utilisation d’un détecteur spécifique est nécessaire pour collecter les électrons secondaires provenant de la surface de l’échantillon. Le détecteur GSED (Gaseous Secondary Electron Detector) permet, grâce à un potentiel positif pouvant atteindre 500 V, d’attirer et d’accélérer les électrons secondaires émis par l’échantillon. Ces électrons disposent alors d’une énergie suffisante pour interagir avec les molécules du gaz présent dans la chambre du MEBE, ce qui conduit à leur ionisation et à la production d’électrons supplémentaires (électrons secondaires environnementaux). Ces électrons sont également accélérés et interagissent de la même manière avec les molécules de gaz. Cette réaction en cascade entre les électrons secondaires et les molécules du gaz permet d’amplifier le signal électronique de départ et d’enregistrer des images résolues et peu bruitées en mode environnemental (Figure 45-a).

Figure 45 : (a) Schéma simplifié de l’amplification du signal électronique émis suite à une réaction en cascade entre les électrons secondaires et les molécules du gaz et (b) Détecteur utilisé pour la collecte

des électrons secondaires à haute température.

Le développement de fours spécifiques pouvant être associés au MEBE permet de travailler à haute température (jusqu’à 1400 °C) directement dans la chambre du microscope. En mode environnemental, la gamme de pressions pouvant être utilisée pour enregistrer des images lors d’un traitement thermique est comprise entre 10 Pa et 750 Pa. Seuls les détecteurs permettant de collecter les électrons secondaires (Everhart-Thornley et GSED) peuvent être utilisés lorsque le MEBE est utilisé en mode haute température (Figure 45-b). En effet, les semi-conducteurs constituants le détecteur BSED étant sensible à la lumière et à la chaleur émise lors du traitement thermique, ce détecteur ne peut pas être utilisé dans ces conditions. A haute température, un seul mode d’imagerie permet donc d’observer l’évolution des échantillons.

Lors de cette étude, le suivi in situ du frittage a été réalisé en utilisant un four spécifique associé au microscope électronique à balayage environnemental qui permet de chauffer un échantillon directement dans la chambre du microscope tout en enregistrant des images [9]. L’association de ce four et du MEBE permet ainsi de réaliser des traitements thermiques jusqu’à 1400 °C, tout en contrôlant précisément la température directement au niveau de l’échantillon [10,11]. Ce contrôle est assuré par le biais d’un thermocouple placé dans le creuset du four (Figure 46), en contact direct avec l’échantillon. De cette manière, la température de frittage est contrôlée à ±5°C lors des expériences in situ [12].

Lors de ces expériences, les échantillons préparés suivant le protocole décrit dans le paragraphe précédent sont directement transférés dans le creuset du four associé au MEBE (Figure 47-a). Puis, une montée rapide en température, à environ 40°C/min, est réalisée jusqu’à un palier isotherme qui correspond à la température à laquelle est menée l’expérience, typiquement entre 800°C et 1300°C (Figure 47-b). La montée rapide en température permet de limiter les modifications morphologiques des échantillons avant d’atteindre la température de travail choisie pour le suivi du frittage. Toutefois, au cours de cette montée en température, un palier intermédiaire a été réalisé afin d’assurer la conversion thermique des précurseurs utilisés. Par exemple, pour les précurseurs de CeO2, la température a été maintenue constante à 700°C

pendant 30 min afin d’assurer la transformation complète des oxocarbonates de cérium en oxyde de cérium.

Figure 46 : (a) Vue schématique du four associé au MEB : 1 – porte échantillon, 2 – isolant thermique, 3 – thermocouple associé au four, 4 – module de chauffe, 5 – enveloppe métallique et (b) Vue schématique

Figure 47 : Procédure de suivi in situ du frittage par MEBE-HT : (a) transfert du support dans le four associé au MEBE et (b) Rampe de montée en température et image de la chambre du microscope à une

température de 1100 °C.

Différentes conditions de traitement thermique ont été testées afin de déterminer les conditions expérimentales optimales permettant d’obtenir des images bien résolues sans dégrader l’échantillon (pas d’effet du faisceau d’électrons, pas de pollution externe, etc.). Dans le cas de CeO2 et de ThO2, les expériences in situ ont été réalisées sous air dans une gamme de pression

comprise entre 200 Pa et 250 Pa. Pour CeO2, le travail sous air permet de conserver le cérium

au degré d’oxydation IV durant le traitement thermique, le rapport O/Ce dans ces conditions de traitement thermique étant en effet compris entre 1,995 et 2 [13,14]. Le thorium n’ayant qu’un

seul degré d’oxydation stable, Th(IV), l’atmosphère de traitement thermique ne peut pas influencer son comportement redox [15]. Les expériences in situ ont été réalisées, comme pour CeO2, sous air entre 200 Pa et 250 Pa. En revanche, lors du frittage des microsphères d’UO2,

les expériences ont été menées sous atmosphère réductrice pour éviter l’oxydation de l’U(IV) en U(VI) (formation de U3O8) [16]. Dans ce cas, les traitements thermiques ont été réalisés sous

hélium (ou He + 4% H2) à des pressions comprises entre 30 et 50 Pa.

Lorsque la température visée est atteinte, les images MEBE, en mode électron secondaire, sont enregistrées de manière continue avec une fréquence de 2 à 60 images par minute suivant la vitesse de balayage considérée. Pour obtenir des images de bonne résolution à haute température, le détecteur spécifique GSED est utilisé pour collecter l’émission électronique d’intérêt (électrons secondaires) [17]. De plus, durant le traitement thermique, les images MEBE sont enregistrées sur une même zone de l’échantillon, ce qui permet de suivre l’évolution en continu d’un système unique durant toute l’expérience.

Cependant, lors d’expériences menées in situ par MEBE-HT à des températures supérieures à 1150°C, une diminution sensible de la résolution des images enregistrées est observée [1]. Cette dégradation s’explique par l’augmentation progressive de la production d’électrons thermiques lorsque la température de travail augmente [10,18]. Cet effet conduit à la diminution de la collection des émissions électroniques d’intérêt par rapport à celle des électrons thermiques, et

par là-même à la dégradation de la qualité des images enregistrées. Au-delà d’une certaine température, il devient donc difficile d’enregistrer des images avec la résolution nécessaire permettant de quantifier les modifications morphologiques qui ont lieu au cours du frittage. Dans le cadre de cette étude, où l’enregistrement d’images bien résolues à très fort grandissement (entre 80000х et 160000х) est recherché, cette température est typiquement comprise entre 1200 et 1250°C.