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manager : une fonction et des activités stables

encadré 1 : les huit chefs chez Taylor

I.4) Max Weber, une fonction managériale minimale en bureaucratie

Dans les années 20, Max Weber, un sociologue allemand, va montrer l’avènement d’une nouvelle forme d’organisation, qu’il présentera comme « l’idéal type » bureaucratique. Fondée sur les savoirs et les procédures formalisées, elle semble être le modèle d’entreprise le plus rationnel pour permettre le développement de la société industrielle et l’essor de la grande entreprise. La fonction dirigeante est alors séparée de la propriété des moyens de production. (Weber, 1922). Il existe des théories de la bureaucratie au XIXème et au XXème siècle, mais nous souhaitons nous pencher sur la conception du rôle du chef wébérienne dans une bureaucratie est basée sur le concept de domination rationnelle-légale, parce qu'elle va rester une référence importante pour de

45 nombreux auteurs de gestion. L'idéal wébérien de la bureaucratie va alors être une organisation reposant sur des règles et des lois et une hiérarchie claire et forte, permettant de répartir l'autorité. Chaque niveau hiérarchique vérifie que ses niveaux subordonnés appliquent les règles édictées. Les règles sont strictes, stables et peuvent être apprises, elles sont connues de tous. C'est une conception très particulière du chef puisque dans sa forme la plus pure, le supérieur s'efface derrière la règle. C'est un ensemble de règles, établies de façon précise, connues, écrites qui domine et le chef vérifie son application. Ainsi, le supérieur ne se fait pas obéir, les individus obéissent aux règles.

« le détenteur légal type du pouvoir, le « supérieur », lorsqu’il statue, et partant lorsqu’il ordonne, obéit pour sa part à l’ordre impersonnel par lequel il oriente ses dispositions. »

(Weber, 1971)

« Tout véritable rapport de domination comporte un minimum de volonté d’obéir, par conséquent un intérêt, extérieur ou intérieur, à obéir » (supra)

Le modèle type du chef relève de trois types de domination qui peuvent être plus ou moins combinées : statutaire, traditionnelle et charismatique :

« Dans le cas de la domination statutaire, on obéit à l’ordre impersonnel, objectif, légalement

arrêté, et aux supérieurs qu’il désigne, en vertu de la légalité formelle de ses règlements et dans leur étendue, dans le cas de la domination traditionnelle, on obéit à la personne du détenteur du pouvoir désigné par la tradition et assujetti (dans ses attributions) à celle-ci, en vertu du respect qui lui est dû dans l’étendue de la coutume. Dans le cas de la domination

charismatique, on obéit au chef en tant que tel, chef qualifié charismatiquement en vertu de la

confiance personnelle en sa révélation, son héroïsme ou sa valeur exemplaire, et dans l’étendue de la validité de la croyance en son charisme. » p.222

La domination légale repose sur un certain nombre de concepts, notamment celui de « l’autorité constituée » clairement définie quand :

« Un domaine de devoirs d’exécution délimité objectivement en vertu du partage de cette exécution

Avec l’adjonction de pouvoirs de commandement requis à cette fin

Et une délimitation précise des moyens de coercition et des hypothèses de leur application ».p.224

« Des types très importants de domination rationnelle appartiennent, du point de vue formel, par leur chef à d’autres types (charismatique héréditaire : monarchie héréditaire ; charismatique : président plébiscitaire) ; d’autres sont, du point de vue matériel, en grande partie rationnels, mais se situent (gouvernement de cabinet) entre la bureaucratie et le charisme ; d’autres encore sont dirigés (ministère de parti) par les chefs (charismatique ou bureaucratique) d’autres groupements (partis).

Le type de direction administrative, rationnelle et légale est susceptible d’application universelle et il est le plus important dans la vie quotidienne. Car avant tout, dans la vie quotidienne, la domination est administration ». p.225

Chez Weber, il est donc tout à fait notable que la façon dont le chef va exercer son autorité va conduire à faire évoluer la caractérisation de l’activité.

Le type pur de la domination légale est la direction administrative bureaucratique, applicable pour la fonction publique, mais aussi aux entreprises économiques de profit. La totalité de la direction administrative est composée de personnes n’obéissant qu’aux devoirs de leurs fonctions, dans une hiérarchie de fonctions clairement établies, dont le périmètre de responsabilité est clairement délimité. Ces personnes sont nommées selon leur qualification professionnelle attestée par un diplôme, leur fonction fait l’objet d’un contrôle, ils sont rémunérés en fonction de leur rang hiérarchique, l’avancement se fait à l’ancienneté ou selon les prestations de service, selon le jugement de leurs supérieurs. C’est le modèle typique du chef dans la bureaucratie où ce sont des caractéristiques objectives qui déterminent son statut, dont découle son pouvoir, pouvoir d’ailleurs lié à sa fonction et qui consiste à faire appliquer les règles.

Weber aborde cependant le principe de la collégialité et du partage du pouvoir. Ainsi une domination bureaucratique doit être limitée par des autorités constituées, distinctes de la hiérarchie bureaucratique par un droit propre, et qui possèdent :

 Le contrôle et la confirmation éventuelle de l’observation des règlements

 Le monopole de la création de tous les règlements, ou de ceux qui déterminent la liberté de décision des fonctionnaires

 Surtout le monopole d’octroi des moyens nécessaires à l’administration (p.184)

On touche là à un point tout à fait particulier : l’auteur laisse entendre que les règles doivent être produites par une autorité constituée autonome. On retrouve donc l’idée qu’il existe des instances qui produisent des règles et qui sont sorties de la ligne hiérarchique. Cependant, nous n’avons pas trouvé davantage d’explications sur cette idée dans l’œuvre de Weber. Cette idée est pourtant très logique : si la ligne hiérarchique voit son rôle limité à l’application des règles, ils ne peuvent pas être également producteurs de ces règles si l’on tient compte de la logique du système wébérien qui repose sur un système impersonnel et parfaitement équitable.

On peut faire l’hypothèse que ces règles sont définies par les instances dirigeantes, ou bien par le législateur en ce qui concerne les entreprises et les administrations publiques. Cependant, il est évident que ces entités ne décrivent pas finement les règles de fonctionnements à appliquer.

47 D’autant que Weber ajoute une difficulté supplémentaire dans l’interprétation : ’il ajoute que la collégialité est un obstacle aux décisions précises, claires et rapides. Elle est en général mise en place pour affaiblir le détenteur du pouvoir. (p.284).

Pour résumer la conception du chef dans l’œuvre de Weber, on retiendra qu’elle repose sur une hiérarchie qui est un système vertical et gradué de relations subordonnées. Chaque position dans la hiérarchie désigne un domaine de responsabilité précis, aux contours stricts, un degré de pouvoir clair renvoyant à des prises de décisions précises. Enfin l'accès aux ressources dépend du grade occupé. Les contours de chaque fonction sont clairement définis. Un individu peut entrer dans une fonction, y compris une fonction hiérarchique que s'il remplit des conditions claires, objectives et transparentes, telles que la réussite de concours ou l'ancienneté.

Ce modèle va souvent être cité comme référence pour l'univers du public, car il permettrait de mettre en œuvre les objectifs de neutralité et d'égalité intrinsèque au service public. Néanmoins, c'est la forme de base de fonctionnement de nombreuses entreprises privées également. De nombreux auteurs ont montré combien cette organisation, réinventée sous différents modèles (par exemple la post-bureaucratie) bien que massivement critiquée continue de structurer la conception de nombreuses entreprises.

I.5) D’autres auteurs se concentrent sur une fonction spécifique prépondérante dans le rôle