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Présentation du terrain : ADMIN

CHAPITRE 5 : PRESENTATION DU TERRAIN : ADMIN

III. 2.1.) Quelle différence entre manager public et manager privé

Poser la question de la différence entre manager du public et manager du privé c’est faire deux hypothèses : il existerait d’une part une forme d’homogénéité de rôle du manager privé à laquelle il serait possible de se référer (et aussi une homogénéité du manager public). D’autre part, il faudrait rechercher des différences structurelles radicales qui tiendraient au caractère public ou privé des organisations qui pourrait expliquer des différences.

Nous allons donc nous pencher rapidement sur la façon dont la littérature envisage la différence entre manager public et manager ‘privé’. Il est tout d’abord utile de noter qu’il n’est pas toujours fait référence au manager public de façon homogène : une partie de la littérature traite des managers intermédiaires et de proximité du public, mais une partie fait référence aux dirigeants, aux élus, etc. Nous laisserons de côté ces domaines de la littérature qui n’entrent pas directement dans notre sujet. Pour tracer les contours du « nouveau rôle » du manager public, nous sommes allés nous pencher sur les contours du rôle attendu du manager dans le NPM. Le NPM renvoie à des formes variées, mais repose sur une idée centrale : améliorer les performances du secteur public en s’inspirant des méthodes de management utilisées dans la sphère économique privée. (Allison, 1983)

Pichault renvoie à 4 grandes catégories d’objectifs du NPM :

 L’amélioration de l’efficacité de l’action : c’est-à-dire l’atteinte des objectifs fixés

 L’amélioration de l’efficience renvoie aux moyens mis en œuvre (qualité des processus de production, maximisation de l’utilisation des ressources, rentabilité et productivité)

 L’ouverture et l’accessibilité : c’est l’attention portée aux usagers pour satisfaire leurs besoins et répondre à leurs attentes. Ils peuvent même être considérés comme des clients. Cela amène notamment à penser l’action administrative afin qu’elle soit compréhensible par les usagers et facile d’accès.

 La responsabilisation : les organisations du secteur public doivent être transparentes et rendre compte de leur action et de leur efficacité, efficience et ouverture ;

Le New Public Management (NPM) présente l’évolution des rôles managériaux comme l’une des clés d’un meilleur fonctionnement du secteur public. Nous nous demandons donc comment le NPM envisage le rôle traditionnel de l’encadrant dans le secteur public, les dysfonctionnements que cela engendre ; puis comment est présentée la fonction managériale « idéale » venant du privé comme la solution à ces dysfonctionnements organisationnels.

Le constat est que le NPM ne décrit pas précisément ce que devrait être le rôle du manager idéal, il le décrit surtout dans sa partie « gestion des résultats, plutôt que des moyens » et « management par objectif » et renvoie surtout au modèle du « privé », qui serait un modèle explicite.

L’ancien rôle du manager public était un rôle surtout axé sur ‘commander’ (dans le sens transmettre des ordres venant de plus haut) et ‘contrôler’. Les managers publics étaient avant tout les « garants techniques de la bonne exécution des missions. Leur rôle se cantonne à coordonner le travail, à répartir les tâches entre les membres de leur organisation et à exercer un contrôle bureaucratique afin de s’assurer que leurs missions de base sont remplies correctement. (Perry & Kreamer, 1993 et Dunleavy & Hood, 1994). Leur construction identitaire se fait autour d’une valeur centrale : mise au service de l’intérêt général et des valeurs qui y sont rattachées (égalité de traitement des usagers comme dans les modalités de GRH et respect des règles).

De nombreux auteurs ont étudié les changements d’attentes auxquelles sont confrontés les managers publics. Stewart et (1990) détaillent ainsi: il est demandé aux managers de changer leur comportement et de devenir plus flexibles et adaptables. Ils doivent acquérir de nouvelles compétences, notamment de nouvelles compétences financières, une plus grande habileté à manager dans des environnements différents, une compréhension plus large de la situation des autres départements et une plus grande attention aux questions de marketing et de stratégie. Bien que considérant leur métier ainsi transformé comme plus stressant, les managers l’apprécient davantage, en raison de responsabilités accrues, de missions plus intéressantes. Pichault et Schoenaers (2012) indiquent aussi « Dans le panel

de transformations observables, il est notamment attendu des cadres intermédiaires et locaux que leur rôle traditionnel (être de bons techniciens coordonnant l’action d’une équipe dans le respect des procédures) soit mis de côté au profit d’un nouveau rôle qui les verrait devenir animateurs, leaders transformationnels ou encore coachs dans la perspective de mettre leurs équipes dans les conditions de répondre aux exigences de compétitivité du « top management ». Ces auteurs étudient notamment

les paradoxes auxquels sont confrontés les managers soumis à ces nouvelles injonctions et des stratégies qu’ils développent pour y faire face.

Cependant la littérature du New Public Management décliné dans les nouvelles attentes envers les managers reprend l’hypothèse implicite classique : il existerait un rôle managérial unique et efficace. Puisque les structures publiques doivent se rapprocher des structures privées alors le rôle managérial doit être inspiré du rôle managérial unique du privé. Les spécificités structurelles du public disparaissent. Plusieurs auteurs ont souligné cette tendance issue de la pensée du NPM à envisager de décliner ‘LE’ rôle du manager privé vers le public sans se pencher sur les questions de structure. Voire

149 le lien entre structure et manager, implicite lui aussi, serait tellement fort qu’il suffirait de changer les managers pour changer la structure : « l’idéologie managériale […] repose sur une ambiguïté mensongère : considérer que sans modifier les structures et les règles, avec l’aide de quelques outils, en diffusant de nouvelles valeurs et en se reposant sur l’encadrement, il sera possible de transformer radicalement les logiques d’action. » (Crozet et Desamarais, 2005)