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III. TROISIÈME PARTIE : OBJECTIF ET MÉTHODE

3. MATERIEL ET MÉTHODE

3.1 Pourquoi une étude qualitative ?

Le choix d’une méthode qualitative a été guidé essentiellement par la question de recherche, qui nous pousse à comprendre des comportements et explorer les représentations des médecins généralistes vis à vis du signalement des personnes âgées maltraitées.

En effet, la recherche qualitative ne consiste pas à mesurer ou quantifier un phénomène mais plutôt à recueillir des données, verbales le plus souvent, pour les analyser de façon interprétative et inductives. [80]

La recherche qualitative a d’abord été développée par des sociologues et anthropologues dans les années 20, puis a été utilisée dans le domaine du marketing avant d’être utilisée par les chercheurs en santé à partir des années 90. [80] Longtemps considérée comme peu scientifique et rigoureuse, la recherche qualitative s’est fortement développée ces dernières années et constitue une approche particulièrement adaptée pour répondre à la complexité des situations en soins primaires.

3.2 Etude de la littérature

Une étude de la littérature a préalablement été réalisée à partir des bases numériques PUBMED, SUDOC, CISMEF et GOOGLE SCHOLAR ainsi que dans différents ouvrages disponibles dans les bibliothèques médicales, afin de dégager une problématique et comparer les résultats à ceux de notre étude. Cette recherche a duré 4 mois environ, de Novembre 2017 à Mars 2018. Par ailleurs, nous avons eu l’opportunité et la chance de rencontrer le Docteur

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Elisabeth LEPRESLE, référente au sein de l’association ALMA Paris et philosophe, qui nous a transmis de précieuses informations et permis d’échanger sur le sujet.

3.3 L’échantillonnage

Nous avons choisi comme population d’étude les médecins généralistes, ayant une activité libérale dans un cabinet, seul ou en groupe, ou dans une maison de santé. Ce choix s’explique par le fait que les médecins de soins primaires sont des témoins privilégiés des maltraitances des personnes âgées vivant au domicile, demeurant parfois leur seul contact extérieur.

Par ailleurs, en raison d’une contrainte de temps, interroger les médecins nous a paru plus rapide que des entretiens avec des personnes âgées, présentant parfois des troubles cognitifs ou psychiatriques.

Les généralistes ont été contactés au hasard, par téléphone ou mail, à partir des pages jaunes puis au fur et à mesure du déroulement de l’enquête, grâce à des contacts transmis par les médecins interrogés, nous avons pu poursuivre notre échantillonnage par une technique dite « boule de neige ». La durée estimée de l’entretien, entre 20 et 30 minutes, était toujours précisée aux professionnels, afin de leur permettre de prévoir un créneau horaire suffisant pour assurer un échange dans de bonnes conditions.

Quelques questions courtes étaient posées avant de débuter l’entretien, afin de caractériser l’échantillon : âge, sexe, mode d’exercice, nombre de visites à domicile (VAD) par semaine, formation en gériatrie ou sur la maltraitance des personnes âgées, collaboration avec un réseau de soins. Toutefois, l’échantillon ne peut pas être représentatif dans une étude qualitative. [81]

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3.4 Recueil des données

Nous avons choisi de réaliser des entretiens semi-dirigés, en face à face, en s’appuyant sur les méthodes de la sociologie compréhensive.

Nous avons opté pour des entretiens individuels plutôt que des focus group, car ils permettent d’aborder plus facilement des sujets délicats comme la maltraitance, qui induisent une implication émotionnelle forte de la part de l’informateur. [80]

Nous nous sommes déplacés le plus souvent sur le lieu d’exercice des médecins, afin de faciliter le recrutement des participants. L’un d’entre eux a préféré nous recevoir à son domicile et un autre médecin, maître de stage universitaire, nous a reçu à la faculté Paris VII où elle exerce. L’horaire de notre rencontre était choisi par le médecin, en fonction de ses disponibilités.

Préalablement à la réalisation des interviews, un guide d’entretien, disponible en Annexe 1 (p193), a été conçu à partir des données existantes de la littérature. Le guide d’entretien n’est pas une structure rigide mais plutôt un outil souple permettant de guider la conversation et n’oublier aucune thématique. [81] Ainsi, toutes les questions ne sont pas formulées de la même manière dans tous les entretiens et nous avons dû nous adapter au discours des informateurs. Ce guide a été d’ailleurs légèrement modifié après avoir été testé au cours de deux entretiens exploratoires, qui ont toutefois été conservés pour l’analyse de données en raison de leur grande richesse d’informations.

Ainsi, la question portant sur les difficultés rencontrées par les généralistes face à la situation de potentielle maltraitance a été supprimée car les informateurs les mentionnaient spontanément. La question concernant la temporalité du signalement a été rajoutée car cette problématique est apparue comme majeure au fil des entretiens.

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Les entretiens ont été enregistrés à l’aide d’un dictaphone puis retranscrits intégralement par écrit, de façon anonyme. Les éléments de communication non verbale ont été notifiés en italique. Le consentement du médecin était systématiquement recueilli par oral avant le début de l’entretien.

Concernant le déroulement des entretiens, nous avons tenté de rompre la hiérarchie entre l’enquêté et l’enquêteur, pour se rapprocher d’un style conversationnel entre deux individus égaux [81], tout en conservant un cadre professionnel. Nous avons adopté une attitude d’écoute empathique mais active, afin de découvrir les catégories de pensée des médecins, en exprimant parfois nos émotions et opinions, afin de favoriser l’engagement de l’informateur. [81]

Ainsi, le sociologue Jean Claude Kaufmann, dans son ouvrage « L’entretien Compréhensif », explique que « l’enquêteur qui reste sur sa réserve empêche donc l’informateur de se livrer » et préconise de « rire voire de s’esclaffer, de complimenter, de livrer brièvement sa propre opinion...parfois même de le critiquer et de manifester son désaccord ». [81]

3.5 Analyse des données

Après avoir retranscrit intégralement les entretiens par écrit, nous avons fragmenté chacun d’entre eux manuellement, en attribuant à chaque fragment ou verbatim, une unité de sens, correspondant à une idée. Puis ces unités de sens ont été regroupées sous formes de sous catégories, pour en dégager de grandes thématiques. Le codage axial a été réalisé avec le logiciel Word, en réalisant des copier-coller dans la sous-catégorie correspondant à l’unité de sens véhiculée par chaque verbatim.

La production de concepts théoriques est donc réalisée à partir du terrain, ce que l’on appelle la « Grounded Theory », ou théorie fondée sur le terrain. Les hypothèses élaborées suite à

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l’étude de la littérature se frottent au matériau concret obtenu sur le terrain, ce qui permet de faire émerger de nouvelles hypothèses et pistes de réflexion.

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