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Mariage et maternité : un tournant dans les parcours professionnels des femmes

Année Salaire de domestique résidente

3.2 Mariage et maternité : un tournant dans les parcours professionnels des femmes

La phase biographique qui commence avec la maternité correspond à un changement de rythme dans les récits, comme elle correspond à un changement de rythme dans les trajectoires professionnelles. Moment charnière, qui est celui où les femmes qui avaient entrepris ce qui pouvait s’apparenter à une « carrière » sont confrontées au paradoxe évoqué plus haut. La « norme de la bonne mère »242,

centrée sur la disponibilité permanente à l’enfant, reste très prégnante tout au long de la période étudiée. Cette norme, socio-historiquement construite, est intériorisée par les femmes en articulation avec le modèle de leur propre mère (toutes les femmes rencontrées ont déclaré que leur mère était « au foyer »). Cette « norme de la bonne mère » se révèle entre autres par une contrainte forte au retrait du marché de l’emploi au moment de la maternité.

3.2.1 La norme du retrait

Les femmes plus âgées ont intégré cette norme comme une évidence, qui s’est imposée au moment du mariage pour plusieurs, au moment de la première grossesse pour d’autres. Aucune n’a eu l’impression d’avoir le choix de continuer à travailler contre un salaire, bien que certaines aient exprimé un certain dépit face à cette situation. Huit femmes sur les neuf nées avant 1940 se sont mariées et ont eu des enfants, 5 en moyenne (voir tableau 2).

Nous autres quand on se mariait, dans notre temps… on n’allait pas retourner travailler. On aurait dû. Parce que… ça nous aurait fait du bien, ça nous aurait fait sortir de la maison, puis ça nous aurait… ça aurait donné un peu plus d’argent au ménage. […] Si t’étais pas capable de faire vivre une fille, tu la mariais pas. Ce que le beau-père disait tout le temps (Mme Lajoie, 1934).

Ah autrefois y'avait pas de négociation en c'sens là là… Quand on s'mariait, c'tait pour former une famille, pis c'tait pour rester à la maison là… C'était pas… ben moi dans les g… personnes, dans les filles que

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j'connaissais, y'a pas personne qui allait sur l'marché du travail là là… Quand on était mariée, c'était… t'étais à la maison, pis point, là. T'étais là pour avoir des… (Mme Charest, 1945)

CC : Est-ce que dans votre entourage, vous… soit dans votre famille élargie, ou dans les voisines, les amies… est-ce qu'y'avait des femmes qui étaient sur le marché du travail?

Ben j'en ai connu… sans les visiter… J'sais pu l'nom, qui restait sur la 4, pas loin d'chez nous, 5 minutes… Elle travaillait chez Pâquet elle… J'm'en rappelle pas beaucoup d'd'autres…

CC : Non, dans votre famille vous… vos sœurs…

Non, non. Après qu'elles se sont mariées elles aussi, pis ça a pas travaillé. […] moi j'comprenais pas qu'les femmes travaillaient d'même, pis fassent des gros lavages, pis… Chez nous vois-tu, on était 5, mon mari 7… ma mère, mon frère… Ça faisait 9 hein… […] quand tu fais des gâteaux, des tartes, tu fais cuire le manger… Moi j'trouvais donc que ça faisait d'l'ouvrage. (Mme Lamarche, 1924)

CC : Puis vous à partir du moment où vous vous êtes mariée là, vous avez eu vos enfants… est- ce que vous avez… occupé un autre emploi un moment donné ?

Oh non ! Mon mari était assez fier de ça de dire que j'avais jamais travaillé ! Moi… mais d'après lui, c'était quelqu'un qui travaillait à l'extérieur… pis comme j'ai jamais travaillé à l'extérieur, ben « moi ma femme a été chanceuse, elle a jamais travaillé ». Elle avait pas l'temps ! (Mme Laforce, 1914)

Les femmes plus jeunes de notre corpus ont aussi intégré cette norme. Sur les quatorze mères rencontrées nées entre 1940 et 1958, quatre seulement n’ont pas suspendu complètement leur parcours professionnel dans les années 1960, 1970 ou 1980 pour s’occuper de leurs enfants pendant au moins quelques années; de ce nombre une recevait durant cette période de l’aide sociale (elle était célibataire), et une autre a continué ses activités de gardienne d’enfants. Cependant, les femmes de la génération de l’après-guerre témoignent très différemment de cette pression au rôle maternel. Plusieurs n’y réfèrent pas en tant que norme sociale à laquelle elles se sont pliées, bon gré mal gré comme leurs aînées, mais davantage comme un choix personnel.

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J’y pensais même quand j’étais jeune... « Moi si un jour j’ai un enfant, j’aimerais ça... l’élever. » Les personnes me disent souvent: « t’as lâché une belle job de même... », c’est vrai, j’aurais un beau fond de pension... Mais si c’était à recommencer je le referais (Mme Gauthier (1951)).

Mme Gauthier explique avoir prévu longtemps d’avance de se retirer du marché du travail pour s’occuper de sa fille. Néanmoins, son récit du contexte entourant sa décision de quitter son emploi décrit fort éloquemment la multiplicité des facteurs qui ont convergé pour éliminer les alternatives à ce choix : une grossesse difficile, un déménagement qui l’éloigne de la ville, le peu d’opportunités de garde, l’impossibilité de retourner à temps partiel, l’absence d’aide domestique de la part de son mari… Elle témoigne d’une intériorisation très forte de sa propre incapacité à concilier travail et famille (ou grossesse) : « Pis y'a des femmes qui sont fortes… faut croire j'donnais toute l'énergie au bébé… ».

Pour Mme Charest (1945), le «choix» de se retirer du marché du travail une seconde fois à son deuxième mariage est indissociable d’un contexte où elle cherche un moyen de permettre à sa fille de continuer ses études à Québec. Mme Rochette (1944), après un retour sur le marché de l’emploi lorsque son enfant est âgé de deux ans, décide de se retirer une seconde fois parce qu’elle juge inadéquat le service de garde dont elle bénéficie.

Du récit des femmes qui ont quitté le marché de l’emploi au moment de la maternité, on dégage les effets de deux injonctions contradictoires : d’une part, celle qui impose aux femmes de trouver « leur » place sur le marché du travail ― sinon de se définir une identité professionnelle ―, et, d’autre part, celle qui les enjoint à se conformer à la norme de la « bonne mère », notamment véhiculée dans la presse populaire comme l’a montré J. Sangster243. Si cette norme est centrée sur la

disponibilité, elle exige aussi des mères qu’elles fassent du bien-être de la famille et de l’enfant une priorité absolue. Dans la mesure où cette notion de bien-être de l’enfant est inséparable du « paradigme mère-enfant »244, tous les modes de garde

243 Sangster, Transforming Labour, p.16-52.

244 Selon l’expression de Liane Mozère et Irène Jonas, dans une recherche sur les rapports de genre

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alternatifs sont considérés comme des pis-aller. Au moindre pépin, les femmes sont susceptibles d’être rappelées à la maison. Le discours institutionnel et même scientifique renforce cette pression exercée sur les mères. Selon la Commission royale d’enquête sur l’égalité en matière d’emploi, dont le rapport paraît en 1984, environ 121 000 femmes canadiennes ont dû quitter leur emploi ou en refuser un en 1980 en raison de problèmes de garde245.

Les considérations économiques et normatives se côtoient dans les calculs de la valeur du maintien des mères en emploi : coût financier de la garde des enfants, maintien de la routine familiale, tranquillité d’esprit, etc. Une équation privée aux apparences rationnelles, et présentée comme telle par les participantes à l’enquête. La contingence du droit au travail des mères se manifeste de façon éclatante dans leurs récits :

Malgré que j’aurais pu retourner travailler. Quand j’ai eu mon troisième enfant, ils m’ont appelée. … Dans ma tête à moi je me disais « c’est comme changer trente sous pour une piastre ». Tu sais au niveau salaire, au niveau… faut que tu places les enfants à la garderie. Et là, là-bas, eux- autres ils t’appellent… … Avec des enfants, ça fonctionnait pas. …

Puis t’arrives fatiguée, puis… tu vas chercher les enfants, ils sont aussi fatigués... Ça fait que je me suis dit que c’était pas une bonne idée. De toute façon j’aurais pas été prête tout de suite tout de suite …. Alors j’ai laissé tomber finalement… (Mme Gilbert, 1946)

Mon plus vieux à ce moment-là il avait … 4 ans et demie 5 ans, il se faisait garder, puis il y a une de mes voisines qui m’a dit… elle dit « Francine, Stéphane il est pas heureux là… je le vois l’après-midi il est dehors puis il pleure ». Ça fait que j’ai donné ma démission puis je suis retournée à la maison. … J’en avais parlé avec mon mari… “oui oui, il dit, reste à la maison avec lui”. (Mme Rochette, 1944)

petite enfance et rapports de genre : l’exemple des auxiliaires de puériculture en France »,

Recherches féministes, 19, 2 (2006), 63-84.

245 Canada, Rapport de la Commission royale d’enquête sur l’égalité en matière d’emploi, Ottawa,

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[C]'est sûr que là le deuxième… avec… vu qu'on déménageait, l'assurance chômage nous donnait un an d'salaire. Quand tu déménages, tu t'en vas ailleurs, y donnent… t'as droit à un an. Faque… pis Guillaume avait 6 mois quand chus partie, l'autre avait 2 ans. Pis on arrivait dans une place qu'on connaissait pas, faque… pis Jacques y'était souvent parti, y'était sur l'urgence, qu'y'appelaient là…. faque y'était souvent parti. Faque y dit… « tu vas toujours être pris avec les enfants, pis les faire garder, pis tout ça, pis aller travailler… tsé c'est toi qui va courir », bon. Faque y dit « si tu veux rester à la maison », faque j'ai resté à maison. J'ai élevé les enfants à maison, j'ai resté… j'te dirais…. 13-14 ans. (Mme Poulin, 1958)

Le recours à la notion de « libre-choix » pour expliquer le retrait des femmes du marché du travail, tend à invisibiliser les pressions matérielles et symboliques exercées sur elles (par le mari, l’entourage, le marché de l’emploi, les politiques publiques, les médias) pour qu’elles se conforment à cette norme de la bonne mère, niée comme telle246. Ainsi, lorsqu’en 1978 le Comité interministériel sur les services

d’accueil à la petite enfance mène une étude sur les préférences des parents en matière de services de garde, il s’appuie sur un sondage réalisé strictement auprès des mères. Évacuant les pères de l’étude, les résultats de la consultation permettent alors de « prouver » l’intériorisation de la norme par les femmes, la réduisant du même coup à une question de choix personnel pour celles-ci : «Les résultats d’un sondage247 sur les besoins de garde d’enfants indiquent que plus des trois-quart des

femmes qui ont répondu (78%) croient que «le rôle d’une femme qui a au moins un jeune enfant est de rester à la maison et de s’occuper de son foyer». Cette opinion varie selon l’âge (74% chez les 18-24 ans et 92% chez les 45-54 ans) et selon la

246 Un discours néo-traditionaliste qui revient dans les médias populaires et sous la plume de

certaines féministes au tournant des années 2000 (par exemple : Jean-François Chicoine et Nathalie Collard, Le bébé et l’eau du bain : Comment la garderie change la vie de nos enfants, Montréal, Québec Amérique, 2006, 513 p.).

247 Québec, Étude sur l’évolution des besoins en services de garde (Octobre 1976), Québec,

Ministère des Affaires sociales, Direction de la planification, Service des études socio-économiques, 1977. Cette étude est basée sur un échantillon de 942 personnes.

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scolarité (86% pour les graduées du primaire et 66% pour les graduées du collège ou de l’université).»248

Cependant, même si le discours du « choix personnel » est celui qui revient le plus dans le récit des femmes nées après la Seconde Guerre, l’autoritarisme marital n’est pas pour autant absent de certains d’entre eux. Dans quelques cas, c’est davantage la coercition que le choix qui ressort des récits, même si les deux notions cohabitent souvent. Ces souvenirs sont évoqués avec amertume par les femmes, sans qu’il soit possible de déterminer avec certitude si ces sentiments sont contemporains des faits racontés ou plutôt suscités a posteriori par la remémoration :

[Un] moment donné c'est quand les enfants ont toutes été partis d'la maison là… ben là j'ai dit que je r'tournerais sur le marché du travail, pis y l'a pas pris. Non, c'tait un homme pourvoyeur! C'tait leur… leur fierté autrefois…. Mon premier mari aussi là, c'tait lui qui apportait l'argent à la maison, c'tait une fierté pour eux-autres… Une femme qui travaille là, elle est indépendante. Quand elle est indépendante…[…] C'tait une menace pour leurs egos, de savoir que leur femme elle travaille pis elle a d'l'argent. Ça fait que… un jour y m'a dit que… parce que ça allait pas bien là… que y m'couperait les vivres. Pis… y m'dit ça avant d'partir pour aller travailler. C'fait que moi l'lendemain matin… ben, même pas l'lendemain là… après qu'y a été parti, j'ai r'gardé dans l'journal, toutes les emplois disponibles, pis là j'ai téléphoné à un certain endroit, pis là j'ai… j'ai donné… y m'a dit « oui, on a besoin d'personnel.. », là j'ai rentré dans une usine où on faisait des brochettes. (Mme Charest, 1945)

[J']ai rencontré mon mari là. Et… j'ai tombé enceinte, j'ai eu mon premier enfant, pis à partir de ce moment là, lui y'a commencé la violence psychologique, c'est-à-dire que… « C'parce que j'avais oublié d'te l'dire, moé là mon programme c'est la femme à la maison pis elle élève l'enfant ». Alors… J'suis allée à la maison, jouer à la maman pendant plusieurs années. Après ça j'ai eu des jumeaux. Alors… Et puis… […] Premièrement j'étais… j'étais en colère beaucoup. D'être prise à la maison. Mais… tsé…. j'avais pas un sou, c'est lui qui contrôlait tout tout tout. Pis au bout de 12 ans, ben j'ai pris mon courage à deux mains, pis j'ai divorcé. (Mme Gosselin, 1948)

248 Québec, Rapport du Comité interministériel sur les services d’accueil à la petite enfance, Québec,

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[J]'me suis mariée. Après ça j'ai arrêté de travailler un bon bout d'temps. […] Ben j'aurais aimé avoir un travail à temps partiel, mais mon mari voulait pas que j'travaille. « T'es bien chez nous, t'as une maison, occupe- toi en, occupe toi de ton enfant ». […] Après quand mon fils a eu 5 ans… j'ai travaillé, j'ai recommencé à travailler, ici justement, tout près d'ici, […] dans les… le temps d'l'impôt. […] On m'a rappelée pour me donner… y voulaient quasiment me garder à l'année en plus, mais… mais mon mari voulait pas que j'travaille. C'était quasiment une bataille tous les jours, les deux mois que j'ai travaillé là. (Mme Pilote, 1945)

Pour C. Omnès, qui a étudié le cas des ouvrières françaises, « l’attachement traditionnel des milieux populaires à la famille et à la séparation des rôles au sein du couple aide sans doute les femmes à consentir au retour au foyer. Mais l’aspiration à l’emploi n’en demeure pas moins intacte. Là est la rupture fondamentale avec les générations antérieures au baby-boom »249. Dans notre enquête, cette « aspiration »

prend la forme d’un tiraillement lié à une conscience plus ou moins forte des risques associés à l’abandon de leur vie professionnelle. La plupart des femmes rencontrées, assez rapidement après leur retrait du marché du travail, ont cherché à retrouver un certain pouvoir financier.

3.2.2 Réseau de femmes et prise en charge des enfants

À la fin des années 1960, le bureau de la main-d’œuvre féminine du ministère fédéral du Travail mène une étude sur les modes de garde des enfants dont la mère est en emploi, et dont les résultats seront largement repris par la Commission Bird, comme nous l’avons rapporté plus haut250. Malheureusement, les données ne

permettent pas de saisir la façon dont s’articulent les différents modes de garde. Il ressort néanmoins de ce portrait quelques éléments fort évocateurs. D’abord, il appert que l’implication du père est moins importante quand les enfants sont petits,

249 Omnès, « Les trois temps », p.396-397.

250 Canada, Les mères au travail. Au Québec, les sociologues Roy et Tremblay, dans leur étude

menée en 1959 sur les conditions économiques des familles salariées canadiennes-françaises ont introduit dans leur questionnaire une question sur le mode de garde des enfants dont la mère travaille. Malheureusement, les auteurs n’ont pas cru bon rapporter cet aspect des résultats dans leur rapport (Tremblay et Fortin, Les comportements économiques de la famille.)

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et qu’elle décline à mesure que le temps de travail de la mère augmente. Ce déclin, en apparence paradoxal, laisse supposer que d’autres ressources que le père sont sollicitées pour prendre la relève auprès des enfants lorsque la mère s’absente pour son travail. En ce qui concerne la rémunération des gardiennes, bien que les données reposent sur des suppositions questionnables (étrangère= payée, famille= non payée), il ressort qu’une large majorité d’enfants sont gardés «généralement sans rémunération»251. La proportion d’enfants gardés contre rémunération

augmente à chaque tranche de revenu de la femme (de 20% lorsque la mère gagne moins de 1000$, le pourcentage grimpe à 28%, à 37%, puis se stabilise à 36% pour les travailleuses du premier quintile de revenus), et l’implication varie pareillement pour les hommes, mais dans l’autre sens (28% des enfants dont la mère gagne moins de 1000$ sont gardés par leur père, cela descend à 23%, 15%, 17% pour les autres tranches de revenu). La variation est cependant beaucoup plus faible pour ce qui est de l’implication des autres membres de la famille ou de la maisonnée, qui tourne autour de 18 à 20% quel que soit le revenu de la mère. Dans toutes les professions, la majorité des femmes ne paie rien pour la garde des enfants (de 57% pour celles qui exercent une profession libérale ou technique à 86% pour celles actives dans le secteur de la vente). Ces chiffres, en plus d’être un indicateur de la prédominance et la stabilité des réseaux féminins pour la prise en charge des enfants, et du fait que les hommes sont peu présents dans ce marché, montrent que le recours à une aide extérieure est directement relié, non pas au statut socioéconomique de la famille comme unité, mais bien davantage à la capacité de la femme de déléguer une partie du travail domestique à même son propre revenu. Les résultats de notre enquête reflètent tout à fait ces constats, et mettent à jour le rôle des femmes dans les processus d’ajustement continuel entre les sphères domestique et marchande, à la manière d’un huilage constant de la machine qui produit et reproduit les conditions de la vie. Comme Kempeneers, nous constatons que « les femmes, par le biais des modalités du travail qu’elles accomplissent tour à tour ou simultanément d’un côté et de l’autre, se trouveraient à assurer la jonction,

251 Canada, Les mères au travail, p.43.

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posée comme une nécessité pour la cohérence relative du système, entre les besoins constamment modifiés de la production et de la reproduction. »252 Nichés

dans le quotidien, les échanges de services s’établissent entre femmes, dont le lien d’emploi est suspendu pour certaines, intermittent ou particulièrement contraignant pour d’autres. Ces arrangements peuvent prendre des formes très diversifiées : de ponctuels à réguliers, plus ou moins rémunérés, plus ou moins formalisés, ils sont directement reliés à la disponibilité des femmes qu’on dit « au foyer ».

Dans ce temps là d’abord il n’y avait même pas de garderie. Mais par contre c’était facile de trouver des gardiennes. […] Dans notre quartier à nous autres, les mères étaient presque toutes à la maison. Puis elles avaient toutes 2-3 enfants. Puis quand j’avais besoin d’une gardienne, c’était très facile… (Mme Rochette, 1944)

Au hasard des récits, alors que les femmes racontent comment elles se sont « organisées » pour concilier emploi et responsabilités familiales, ressortent ici et là