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Méthodologie d’enquête sur les processus de la légitimation éducative des expositions itinérantes pour l’ÉDD

ancrée dans l’histoire de l’éducation formelle

II. Méthodologie d’enquête sur les processus de la légitimation éducative des expositions itinérantes pour l’ÉDD

1. Les entretiens auprès de fonctionnaires impliqués dans ces processus

Pour connaître les processus de légitimation éducative, nous avons interrogé dix-sept cadres de l’Éducation nationale, identifiés pour leurs rôles, même ponctuels, vis-à-vis d’expositions devenant, par leurs actions, des ressources pédagogiques en ÉDD. L’identification des personnes pertinentes n’a pu être complète qu’après la constitution du corpus d’expositions, que nous décrirons dans la troisième partie (cf. page 262). Mais notre participation à des rencontres nationales116

en tant que cadre ressource à l’échelle académique nous a rendu cette étape plus aisée. Notre échantillon a été constitué selon quelques principes. Chaque personne interrogée l’était « en tant que membre d’une communauté ou d’un groupe » (Blanchet, Gotman 2007, p. 36) c’est-à-dire ici en tant que membre de l’Éducation nationale. Cependant, nous n’avons pas cherché l’exhaustivité, inscrivant plutôt notre démarche dans l’optique suivante : « plus que de constituer un échantillon [sous entendu représentatif], il s’agit plutôt de bien choisir ses informateurs. » (Kaufmann 2007, p. 44). Il était par contre important pour nous de balayer, par le choix des personnes interrogées, les différents cas de figures possibles conduisant le média exposition à devenir éducatif pour l’ÉDD.

Selon la typologie de Gérald Boutin (2011), le type d’entretiens menés est à classer parmi celui à questions ouvertes, dans lequel les questions sont préparées à l’avance en fonction de thèmes. Même si la formulation exacte n’est pas toujours la même, l’enquêté est guidé mais ses réponses sont libres. On désigne aussi ce type d’entretien par semi-directif. Comme nous l’avons déjà soulevé dans la première partie (cf. page 74), notre posture n’a pas été sans nous

poser quelques problèmes axiologiques dans la mesure où certaines personnes interrogées sont nos supérieurs hiérarchiques directs.

Sur cette relation entre enquêteur et enquêtés, qui est caractérisée par une différence de position sociale et dans laquelle le premier peut largement influencer ou impressionner le second, les écrits méthodologiques généraux sont relativement lacunaires car « les chercheurs qui réfléchissent explicitement aux relations entre enquêteurs et enquêtés s’intéressent […] plutôt à des agents en situation de fragilité, due à des décalages de position, de marginalité ou d’échec » (Chamboredon et al. 1994, p. 115). En témoigne la dernière édition du livre de Gérald Boutin (2011) qui, dans un des rares chapitres que l’on peut trouver dans cette catégorie d’ouvrages consacré aux « dimensions éthiques » de l’enquête, détaille les postures à adopter dans les cas d’entretiens d’enfants, d’adolescents et de personnes âgées et insiste sur la nécessité de sauvegarder les droits et la sensibilité des personnes mais élude que, pour certains terrains, il faille parfois « s’imposer aux imposants » (Chamboredon et al. 1994) pour pouvoir mener à bien l’enquête. Cette expression signifie non pas qu’il faille impressionner l’enquêté dans un simulacre d’égalité de statut social, mais qu’il s’agit d’être particulièrement soigneux pour obtenir la rencontre et garder la maîtrise de l’entretien, qui parfois, peut être largement dirigé par celui qui a l’ascendant social117

. Dans les faits, les rapports hiérarchiques n’ont été exprimés que dans de rares cas, laissant la place à un échange simple, habité par la haute conscience professionnelle et le souci du service public d’éducation de nos interlocuteurs. Mais lorsque les différences hiérarchiques ont surgi, il nous a parfois été utile de nous en « laisser imposer », en encourageant l’enquêté à s’installer dans une forme de domination professionnelle, car dès lors nous devenions « la jeune fille » (expression employée par un enquêté) qu’il fallait instruire.

Par ailleurs, le paramètre clef qui a constitué, pour la plupart des entretiens, la condition sine qua non de leurs tenues a été le respect absolu de l’anonymat. En effet, tous les enquêtés sont des fonctionnaires, parfois avec de hautes responsabilités, et donc tous sont soumis au devoir de réserve. Même si nous insistions sur la portée institutionnelle et donc officielle des propos que nous cherchions à recueillir, la parole ne s’est libérée qu’avec cette exigence. Dans la présentation de nos résultats, nous ne désignons donc les enquêtés que par un numéro (tableau

117 Par exemple, toutes les rencontres ont été demandées par voie écrite (mail) dans un langage soutenu et en veillant à utiliser

des formules de politesse déférentes. Ceci ne signifie pas qu’il faille faire autrement pour d’autres types d’enquêtés, mais qu’ici c’est un préalable indispensable, compte tenu des rapports hiérarchiques. De même, toutes les questions étaient écrites sur un carnet que nous montrions ostensiblement comme gage de notre sérieux, méthode conseillée par les auteurs Hélène Chamboredon et al. (1994).

11) en face duquel nous avons inscrit leurs fonctions, que nous avons définies de manière large, à dessein. Enfin, le journal d’enquête (Beaud, Weber 2010) s’est révélé un outil méthodologique très utile car nous avons pu y poser nos impressions personnelles avant et après chaque entretien, relater ses conditions, les attitudes des enquêtés et les références des panneaux que nous leur avions montrés ou sur lesquels ils avaient particulièrement réagi. Les dix-sept personnes ont été interrogées à l’occasion de onze entretiens individuels et de deux focus group (un réunissant deux personnes et l’autre trois). À l’occasion d’un entretien individuel, une autre personne est intervenue ponctuellement, sollicitée par l’enquêté pour un complément d’informations. Par rapport à l’échantillon que nous avions prévu au départ, trois personnes ont été ajoutées, car désignées par d’autres, et trois personnes n’ont pas pu être interrogées. Parmi ces dernières, deux n’ont pas donné suite à nos nombreux mails de relance et un cadre s’est fait représenter par son collaborateur direct, seule personne qui, par ailleurs, a refusé d’être enregistrée et dont l’entretien s’est réalisé par téléphone. Les autres personnes interrogées l’ont été en présentiel, entre trente minutes et deux heures, en fonction de leurs disponibilités. Les conditions des entretiens n’ont pas toujours été celles escomptées. Nous n’avions pas prévu au départ de focus group par exemple, mais nous nous sommes adaptée aux circonstances et à la manière dont ces rencontres ont été accordées par les enquêtés. Dans le cas des focus group, les informations obtenues n’ont pas pour autant été fondamentalement différentes de celles issues des entretiens individuels et nous avons pu, au contraire, observer sur certains sujets des renforcements de positionnements institutionnels dus à l’effet de groupe.

Le tableau 11 présente les fonctions des enquêtés dans la hiérarchie de l’Éducation nationale et leurs implications dans les processus de légitimation éducative des expositions itinérantes en ÉDD, pour lesquels trois cas sont possibles. Premièrement, ils ont été directement impliqués dans la coproduction d’expositions avec une autre structure, ce que nous identifions a priori par la présence d’un logo correspondant à un échelon national ou local de l’institution. Deuxièmement, ils sont intervenus dans la sélection et la mise à disposition des expositions dans les réseaux de diffusion de l’Éducation nationale. Troisièmement, ils ont participé à la publicisation des expositions via les voies de communication officielles c’est-à- dire les sites institutionnels.

Numéro d’identification

Fonctions dans l’Éducation nationale

Implication dans la légitimation éducative des expositions itinérantes pour l’ÉDD EN 1 Membre d’un comité de pilotage en

ÉDD Publicisation sur un site institutionnel

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