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CHAPITRE QUATRIÈME CADRE MÉTHODOLOGIQUE

3. MÉTHODOLOGIE DE TRAITEMENT ET D’ANALYSE DES DONNÉES

Cette partie du quatrième chapitre est consacrée à la présentation des différents aspects se rattachant au procédé du traitement et de l’analyse des données. Nous présentons, en premier lieu, l’analyse des protocoles et explicitons, en second lieu, l’analyse des entretiens. Il s’agit de deux techniques d’analyse préconisées dans le domaine de la didactique des mathématiques. Par la suite, nous exposons nos méthodes de réduction des données. Nous terminons cette troisième partie du quatrième chapitre en exposant diverses précautions méthodologiques prises en fonction du traitement et de l’analyse des données.

Nous tenons à mentionner que, dans le cadre de cette étude descriptive, nous structurons notre analyse en respectant l’ordre précis qui suit :

1. Analyse des protocoles d’observation 2. Analyse des entretiens

Après avoir analysé chaque sujet, il nous sera possible de mettre en relief les concordances et discordances entre ces membres de notre échantillon. Nous expliquons notre démarche dans les pages qui suivent.

3.1. Analyse didactique des protocoles d’observation

Le traitement des données recueillies par notre dispositif de recherche repose, d’abord et avant tout, sur l’analyse didactique des protocoles d’observation. Développé par les chercheurs œuvrant dans différents domaines, ce

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moyen a d’abord été construit, validé et diffusé comme une méthode de recherche par Brun, dans les années 80.

Un protocole est une transcription exhaustive des paroles et des actions constituant une interaction entre différentes personnes; c’est un document écrit qu’il est possible de consulter à volonté. Il y est soutenu que :

Le protocole est une description qui peut prendre différents sens selon la

position prise par l’observateur : soit en tant qu’expressions de la pensée (il a dit ceci donc cela veut dire…) ou soit en tant que termes de l’échange (comme dans un système). Le travail d’analyse de protocole repose donc sur une activité à la fois inférentielle et déductive.

(Portugais, 1995, p. 90) L’analyse didactique des protocoles est une approche préconisée dans le domaine de la didactique des mathématiques; nous l’employons spécifiquement pour traiter et analyser les données recueillies à partir de notre dispositif de recherche. En d’autres mots, notre analyse didactique s’effectue à partir de la transcription exhaustive des paroles et des actions constituant une interaction entre le maître débutant et l’élève, dans un contexte de la classe ordinaire.

3.1.1. Le découpage du protocole en unités analysables

Pour considérer dans son ensemble le protocole d’une séance d’observation, il est plus avantageux de diviser cette dernière en segments. En didactique, il est entendu que « pour appréhender rigoureusement un protocole, il

est utile de déterminer des unités analysables donc de recourir au découpage du protocole en épisodes de longueurs variables » (ibid., p. 91).

Un moyen d’opérationnalisation de cette analyse devient la segmentation du corps du protocole en épisodes. Ceci peut se faire selon différents critères. Dans le présent projet de recherche, nous nous sommes d’abord appuyée sur les critères suggérés par Brun dans les années 80 et repris ensuite par Portugais dans les années 90. Ces didacticiens identifient soit les points de rupture (changement

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de tâche d’élèves, de traitement), soit les transitions (redondances, mêmes points de vue, mêmes expressions, mêmes termes) dans le déroulement du protocole.

3.1.1.1. L’analyse de l’échange didactique en situation du travail de l’erreur

Nous avons donc découpé les protocoles en épisodes, en considérant, comme point de rupture les changements de tâches, soit l’exécution d’un algorithme de division particulier, ou le changement d’élèves. Toutefois, nous avons rapidement remarqué que ce découpage ne nous permettait pas de cibler facilement les situations du travail de l’erreur. Ceci s’explique surtout par le fait que nous ciblons le nouveau maître dans le cadre de sa pratique professionnelle quotidienne, soit la classe ordinaire; notre dispositif est donc marqué par une certaine impondérabilité. À titre d’exemple, citons les nombreuses interjections des jeunes élèves ou le nombre d’interventions, didactiques ou non, formulées par l’enseignant lors d’un même épisode. Il est donc fréquent de retrouver des données se situant avant ou après la situation d’enseignement précise, n’ayant aucun lien avec le travail de l’erreur. Par ailleurs, il est possible de retrouver deux situations distinctes où le maître intervient sur deux erreurs différentes dans un seul et même épisode.

Par conséquent, à la suite de ce premier découpage, nous en avons effectué un second, afin de cibler les situations du travail de l’erreur. Les épisodes sont donc établis en respectant le procédé prédéterminé de l’analyse de l’échange didactique, nous permettant de repérer les moments d’importance dans le déroulement d’une séance d’enseignement. Nous considérons objectivement le système didactique en évitant une interprétation des conduites non fondées sur des éléments observables du protocole. Puisque la prise en compte d’une unité d’analyse particulière ne doit aucunement susciter des significations divergentes (Brun et Conne, 1990), le critère choisi pour déterminer les coupures entre les épisodes est la situation du travail de l’erreur en elle-même. Il s’agit de la situation problématique « réelle » rencontrée par l’enseignant, au cours de laquelle

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il intervient sur la procédure erronée d’un élève. Elle débute lorsqu’une erreur est diagnostiquée par l’enseignant et se termine, idéalement, lorsque l’élève a pris conscience de l’erreur. Toutefois, d’autres aboutissements sont également possibles et dépendent des choix et actions de l’enseignant débutant24. Ainsi,

chaque situation du travail de l’erreur représente en soi un micro-épisode.

L’analyse du micro-épisode nous permet de décortiquer, affirmation par affirmation, le travail de l’enseignant débutant. Ceci est effectué dans le but de décrire comment l’enseignant s’y prend afin d’amener son élève à prendre conscience de son erreur : quels sont les réactions de l’enseignant, les relances, les indices verbaux et non verbaux utilisés, etc. Si la plupart de ces actions constituent des « actes de langage » (Zaragosa 2006, p 103), il ne faut pas omettre les signes non verbaux. En s’inspirant des travaux de Zaragosa, précisons que nous tentons d’appréhender « l’enjeu dans l’interaction didactique qui s’est effectuée

entre un enseignant et des élèves à un moment donné, enjeu qui nécessite de la part de l’enseignant une adaptation à la situation; nous sommes dans la lecture du réel » (ibid., p. 97).

L’analyse de la situation du travail de l’erreur nous permet surtout de cibler le travail d’intervention sur l’erreur. Ainsi, il nous est possible d’identifier la ou les stratégie(s) déployée(s) à partir des choix, décisions et actions mis en œuvre par le novice dans cette situation d’enseignement particulière. Rappelons qu’un comportement isolé n’est pas un indicateur spécifique d’une stratégie particulière; il est nécessaire de considérer, dans leur ensemble, les actes coordonnés ou les moyens divers mis en place en fonction d’intentions didactiques particulières. Une conduite peut prendre différents sens selon la situation, les intentions du maître ou l’approche adoptée. Par conséquent, nous avons évité

24 Ainsi, il est possible que la fin d’une situation du travail de l’erreur soit marquée par la fin du

travail d’intervention sur l’erreur (et ce, peu importe la raison). Ceci est observable lorsque l’élève n’a pas repéré son erreur et que le maître novice cesse son intervention pour entreprendre une autre activité (changement de tâche). En ce sens, si le travail de cette erreur n’est pas repris dans le cadre du dispositif de recherche, nous pouvons considérer que cette situation d’enseignement particulière s’est terminée.

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d’identifier un comportement à une stratégie, mais plutôt l’interpréter en fonction de la situation. De ce fait, si nous décortiquons chacune des interactions entre l’élève et son enseignant, nous considérons que ces actes de langage s’inscrivent dans un ensemble que représente la situation du travail de l’erreur. « C’est le lien

qui se crée entre les actes de langage [et/ou les autres signes non verbaux] qui permet une intercompréhension entre les locuteurs »; c’est la cognition qui

émerge de la situation d’intervention de l’erreur « qui permet une référence

cognitive partagée entre le médiateur et les apprenants » (ibid., p. 103)25. D’ailleurs, nous gardons à l’esprit que cette situation d’enseignement s’inscrit elle- même dans un épisode particulier et lors d’une séance d’observation spécifique.

Cette démarche d’analyse permet, selon nous, de mieux exposer le travail de l’erreur réalisé dans un contexte de pratique professionnelle et, conséquemment, de décrire la complexité de la réalité enseignante. Il nous est alors possible de relever les particularités liées à chacune des situations d’intervention rencontrées par le novice, leur importance n’étant pas nécessairement perceptible dans l’étude d’un épisode en entier. Cette forme d’analyse, plus détaillée, nous assure ainsi de mieux documenter les phénomènes didactiques ayant un intérêt dans le cadre de notre étude.

En effectuant un découpage des protocoles d’observation en micro- épisodes, notre méthodologie de traitement des données se distingue de celle privilégiée dans les travaux de Brun, Conne ou Portugais (1990; 1995). Réitérons que les épisodes constituent des unités d’analyse vastes, ne permettant pas de cibler spécifiquement les situations du travail de l’erreur. Le fait de cibler les sections pertinentes des épisodes se révèle très bénéfique pour des fins d'analyse, par rapport à l’objet de recherche; il nous est alors possible d’enrichir grandement les données obtenues.

25 Rappelons que, dans ce travail, nous ciblons plus particulièrement l’activité conceptuelle du

maître novice qui agit sur la cognition de l’élève par la mise en œuvre d’une stratégie d’intervention sur sa procédure erronée.

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3.1.2. La visée de l’analyse didactique des protocoles

Grâce à l’analyse des protocoles des séances d’enseignement observées, nous nous intéressons à l’élaboration des choix didactiques effectués par le nouveau maître dans sa pratique quotidienne se rapportant au travail de l’erreur. Nous poursuivons donc les visées suivantes :

− Décrire les activités de diagnostic et d’intervention sur l’erreur effectuées par l’enseignant débutant en classe ordinaire.

− Décrire les diverses organisations de la conduite du maître novice en situation d’enseignement spécifique.

− Valider ces descriptions par la recherche d’indices de cohérence interne pour un même protocole (comparaison des conduites observées lors de divers épisodes d’un même protocole pour en montrer la consistance) et la recherche d’indices de cohérence externe à ce protocole (comparaison des conduites identifiées avant et après la séance d’observation via les entretiens).

Sachant que l’analyse particulière d’un protocole peut montrer une diversité de conduites dont la compatibilité demeure plus ou moins apparente, nous postulons l’existence d’une cohérence interne des actions posées par le maître débutant en situation du travail de l’erreur. L’atteinte de ces visées est donc essentielle afin de soutenir l’idée d’un schème-travail de l’erreur chez les

maîtres novices. Nous tenons à réaffirmer que nos analyses de protocoles

d’observation sont placées sous le contrôle de notre cadre de référence basé sur la théorie des champs conceptuels. Rappelons que cette méthode constitue le principal moyen employé pour traiter et analyser les données obtenues dans la classe ordinaire.

3.2. Analyse des entretiens

L’analyse des entretiens n’est pas un procédé distinct en soi; il demeure sous le contrôle de l’analyse du protocole de la séance d’observation en question. Le va-et-vient entre les deux procédés valide, par triangulation, les interprétations