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CHAPITRE QUATRIÈME CADRE MÉTHODOLOGIQUE

2. MÉTHODOLOGIE DE COLLECTE DES DONNÉES

2.2. Instruments de collecte de données

2.2.5. L’entrevue finale

L’entrevue finale met fin à la série d’entrevues, mais également au processus de collecte de données chez le sujet. Lors de cette entrevue, les sujets sont informés de l’objet spécifique de recherche : le travail des erreurs par les nouveaux enseignants. Nous tenons toutefois à spécifier que les membres de notre échantillon n’ont pas été dupés dans ce processus. Simplement, afin d’éviter des effets de contrat de recherche21 et une adaptation excessive des actions des sujets au thème spécifique de recherche, nous n’avons pas donné tous les détails sur l’objet d’étude. Ce choix se justifie par le souci de préserver la validité, l’intégrité et la pertinence des données recueillies.

La durée de cette rencontre est d’environ 45 minutes à une heure. Cette entrevue finale est semi-structurée et comprend onze questions semi-ouvertes

21 Nous reviendrons sur cette notion de contrat de recherche, introduite d’abord par Schubauer-

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préparées avant la rencontre. Nous les présentons à l’instant et commentons ces dernières dans les paragraphes suivant leur présentation.

Q-1 Dites-moi, qu’est-ce que c’est pour vous une erreur?

Q-2 Je vais vous présenter des fiches. Sur chacune d’entre elles se trouve une stratégie d’intervention sur l’erreur. Ces stratégies proviennent, comme vous l’avez probablement deviné, de la typologie des 26 stratégies de l’erreur, un outil que vous avez travaillé dans un de vos cours de didactique de l’arithmétique lors de votre formation initiale. J’aimerais simplement que vous lisiez et ensuite commentiez chaque stratégie.

Q-3 À présent, pouvez-vous m’identifier les stratégies que vous utilisez déjà?

Quelles sont les stratégies que vous aimeriez essayer avec vos élèves? Pour quelle (s) raison (s)?

Quelle (s) stratégie (s) mettriez-vous de côté? Pour quelles raisons (s)?

Q-4 Si vous aviez une activité concernant la division à faire avec vos élèves demain, quelle (s) stratégie (s) privilégieriez-vous?

Q-5 Retour sur un cas vécu lors des séances d’observation, suivi des questions : Comment êtes-vous intervenu (e)? Est-ce que vous vous en souvenez? Si la situation se reproduisait, comment interviendriez-vous? Quelle (s) stratégie (s) pourriez-vous essayer? Q-6 Vous m’avez dit que vous aviez consulté vos notes provenant d’un

cours de didactique de l’arithmétique de votre formation initiale. De quelles notes s’agit-il? Croyez-vous que vous auriez consulté ces documents si je n’étais pas venue faire ce projet dans votre classe?

ou

J’aimerais savoir si, depuis ma première visite, vous avez consulté vos notes provenant d’un cours de didactique de l’arithmétique de

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votre formation initiale. Si oui, lesquelles? Croyez-vous que vous auriez consulté ces documents si je n’étais pas venue faire ce projet dans votre classe?

Q-7 J’ai repris un algorithme de division qui a été fait par un élève dans une des classes que j’ai visitées. Pouvez-vous, dans un premier temps, commenter la procédure? Que diriez-vous si cet élève vous demandait « Est-ce que c’est bon? »

Q-8 J’aimerais savoir si c’était la première fois que vous enseigniez la division cette année? Y a-t-il des gens qui ont influencé votre façon de traiter de la division en classe? Des gens qui vous ont donné des conseils sur la façon d’intervenir sur les erreurs de calcul dans l’algorithme de division? Y a-t-il un matériel qui vous a particulièrement influencé lorsque vous avez traité de la division avec vos élèves?

Q-9 Croyez-vous que votre perspective a changé depuis que je vous ai montré les fiches de stratégies? Dans l’affirmative, comment a-t- elle changé?

Q-10 J’aimerais que vous me fassiez part de vos impressions du cours de didactique de l’arithmétique dans lequel vous avez étudié le travail de l’erreur… Que pensiez-vous de la typologie des erreurs lorsqu’elle vous a été présentée, il y a déjà quelques années? Quelles sont, à présent, vos impressions de cette typologie?

Q-11 Enfin, pour ma gouverne personnelle, j’aimerais que vous me fassiez part de vos impressions sur votre expérience dans ce projet de recherche.

Afin d’éviter des mésinterprétations dans la formulation des questions présentées précédemment, nous tenons à ajouter les quelques justifications suivantes.

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Les deux premières questions ont pour but d’amener l’enseignant débutant à verbaliser ses propres représentations au sujet de l’erreur arithmétique et de différentes stratégies d’intervention. La provenance des stratégies est ici mentionnée puisque cet outil didactique, élaboré par Portugais (1992, 1995), fut travaillé à titre de savoir didactique par les sujets de cette étude, lorsque ceux-ci étaient en formation initiale à l’Université de Montréal. La troisième question amène l’enseignant à réfléchir sur les stratégies d’intervention qu’il emploie en classe ordinaire, celles qu’il rejette et celles qu’il considère essayer. La quatrième question l’amène à projeter une stratégie d’intervention qu’il pourrait employer dans une situation du travail de l’erreur future. Les informations recueillies par ces quatre questions sont difficilement accessibles en employant uniquement la technique de l’observation; elles permettent de corroborer les interprétations déjà établies à partir de l’observation, de constater des divergences entre les représentations de l’enseignant et ses conduites véritables ou d’obtenir de nouvelles informations

La cinquième question amène l’enseignant à se questionner sur une

situation du travail de l’erreur déjà vécue, les stratégies utilisées, les stratégies

qu’il anticiperait utiliser dans le futur. Ceci a pour but de vérifier si un travail réflexif s’est produit à partir de cette situation particulière depuis la séance d’observation et de mieux connaître les buts, intentions et anticipations de l’enseignant débutant.

La sixième question nous permet de savoir si l’enseignant se réfère ou non aux savoirs didactiques étudiés en formation initiale, c’est-à-dire aux outils travaillés dans ses cours de didactique de l’arithmétique. Ceci nous permet de voir si cela constitue un élément venant marquer le travail de l’erreur, mais aussi de vérifier si la présence de l’observateur, dans la classe ordinaire, a eu un effet dit de

contrat de recherche. Celui-ci est expliqué plus loin dans le présent chapitre (cf.

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La septième question a pour but de présenter, à nos trois sujets, une

situation du travail de l’erreur créée pour les besoins de ce dispositif particulier. Il

s’agit d’une procédure algorithmique comprenant une forme d’erreur mixte, soit deux erreurs issues de la typologie de Brun et Conne. Puisque la situation n’est pas rattachée au contexte de la classe ordinaire, cette question permet surtout d’observer l’activité de diagnostic de l’erreur. Une fois l’erreur repérée, l’enseignant suggère une stratégie d’intervention, sans pouvoir la mettre en œuvre puisqu’il n’y a pas d’élève auprès duquel il peut agir. L’analyse des données recueillies par cette septième question nous permet de valider d’autres données obtenues ultérieurement, mais nous amène aussi à faire de brefs liens de rapprochement entre les sujets.

Les huitième, neuvième et dixième questions se rapportent particulièrement à l’identification d’éléments (internes ou externes à la situation) pouvant marquer la réalisation du travail de l’erreur chez le nouvel enseignant. L’ensemble des informations recueillies à l’aide de ces questions est concilié aux données provenant des séances d’observation et des autres entretiens, afin de repérer la présence possible de variables (autres que l’erreur) pouvant être prises en compte dans l’activité d’intervention sur l’erreur. Par ailleurs, la dernière question permet d’obtenir des informations complémentaires concernant l’expérience personnelle du nouvel enseignant.

Au terme de cette présentation, nous tenons à mentionner que nous sommes consciente du fait que cette dernière entrevue se rapporte occasionnellement aux représentations que possèdent les membres de notre échantillon au sujet du travail de l’erreur. Certaines d’entre elles pourront, lors de l’analyse, être croisées avec les données obtenues par l’observation de la pratique. Nous considérons que les autres déclarations permettent de complémenter et d’enrichir nos résultats de recherche. Si cet outil de collecte de données semble se distinguer, précisons que chacun de nos instruments a une visée distincte. C’est

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d’ailleurs leur complémentarité qui constitue la force de notre dispositif de recherche. Comme le souligne Tremblay :

[…] l’utilisation simultanée ou successive de plusieurs instruments dans

une même étude est non seulement utile, mais nécessaire. Les instruments, possédant des propriétés structurales particulières, fournissent des lectures de la réalité selon certains angles. Puisqu’il est extrêmement difficile d’évaluer avec précision la portion de réalité perçue et reflétée par un instrument donné, l’utilisation de plusieurs instruments sera nécessaire.

(1968, p. 111-112) 2.2.6. Les limites associées aux instruments de cueillette des données Mentionnons que les inconvénients des méthodes de cueillette des informations, comme l’observation et l’entrevue, ont été rapidement mentionnés lors de leur présentation plus tôt dans le présent chapitre (cf. supra, p. 145 et 146). Par conséquent, nous ciblons particulièrement les limites des instruments de collecte des données conçus spécifiquement pour le présent projet.

La principale limite de nos instruments de cueillette des données risque plutôt d’être liée aux aspects cognitifs de cette recherche. Malgré les démarches entreprises, il reste que nous ne sommes pas « dans la tête » du nouvel enseignant. L’inférence d’un schème-travail de l’erreur, par la description des mécanismes cognitifs qui sous-tendent cette activité professionnelle, demeure une tâche délicate du point de vue de la méthodologie. Par conséquent, nous avons pris de multiples précautions, comme les triangulations et les tests de fiabilité ou de stabilité, afin d’éviter les attributions excessives, les inférences mal fondées et les interprétations gratuites ou trop courtes22. Nous attestons que notre traitement et notre analyse des données sont effectués sous le contrôle d’une méthode rigoureuse et d’un cadre de référence explicite. Rappelons d’ailleurs que nous nous appuyons précisément sur la théorie des champs conceptuels puisqu’elle permet de révéler l’implicite des connaissances dans l’organisation des conduites

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et ainsi de mettre en relief le travail de conceptualisation réalisé in situ par l’enseignant (cf. supra, p. 99).

Enfin, soulignons brièvement que la présence de problèmes techniques concernant l’enregistrement des séances sur bande vidéo ou des entrevues sur bande audio est une éventualité à considérer. Nous recueillons des données dans un milieu où participent activement des enfants. Des problèmes techniques d’enregistrement reliés aux instruments audio-visuels ou causés par ceux-ci représentent une limite inévitablement envisageable.