• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE I : ÉTUDE BIBLIOGRAPHIQUE

I.2. Synthèse des catalyseurs nanométriques : État de l’art

I.2.2 Méthodes de synthèse des nanomatériaux pour l’Électrocatalyse

L’Électrocatalyse est un domaine de la catalyse hétérogène ayant comme spécificité un transfert électronique [91]. La catalyse hétérogène traite essentiellement des réactions ayant lieu entre plusieurs phases telles que solide/gaz, solide/liquide. A ce titre, les réactions qui ont lieu sont des réactions de surface qui présentent toujours une phase d’adsorption d’au moins l’un des réactifs. Un catalyseur permet de diminuer l’énergie d’activation d’une réaction suite à l’adsorption d’au moins un des réactifs sans intervenir dans le bilan réactionnel. Ainsi, en Électrocatalyse, les réactions catalytiques se font au moyen du fameux réactif courant électrique (préfixe électro-). Comme il a été évoqué précédemment, la proportion des atomes en surface est

37

en corrélation directe avec la taille des particules. De facto, l’exploration du domaine nanométrique devient une condition sine qua none pour faire face au prix sans cesse croissant des métaux nobles du groupe du platine (Pt, Pd, Au, Rh, Ru, Ir…) liés à leur rareté [92,93]. En effet, ces métaux nobles [94] sont de loin les plus actifs en catalyse hétérogène. Ainsi, la course aux méthodes de synthèse des catalyseurs nanostructurés supportés ou non, présentant des défauts de surfaces ou des orientations préférentielles ou non, clefs de la cinétique et de la sélectivité des électrocatalyseurs, a vu plusieurs voies naître depuis ces dernières années. Les paragraphes suivants s’intéressent à quelques méthodes de préparation qui ont prouvé leur efficacité en Électrocatalyse.

I.2.2.1. Méthode « Bromide Anion Exchange : BAE »

Certains spécialistes en la matière s’accordent à dire que l’Électrocatalyse est une discipline de propreté par excellence. En effet, de la préparation des catalyseurs à la mise en route des réactions chimiques, la propreté est de rigueur dans toute la chaîne. Une impureté de quelque nature que ce soit peut modifier la réactivité/sélectivité catalytique via l’accessibilité à un certain nombre de sites actifs. Ainsi, prenant en compte le fait que les réactions mises en jeu en Électrocatalyse sont des réactions de surface, la propreté de la surface de l’électrocatalyseur est un facteur clé de son activité. C’est la raison pour laquelle la surface du nanomatériau doit être débarrassée des impuretés telles que les molécules de tensioactif. Pour cela, une nouvelle voie de synthèse propre, facile et accessible dénommée « BAE : Bromide Anion Exchange » a été développée au laboratoire [31,95]. Elle consiste en l’échange anionique au bromure par encombrement stérique. Dans le cadre de mon projet de fin d’études de Master 2 Recherche réalisé au sein du même laboratoire, cette méthode a été mise en œuvre pour la synthèse de catalyseurs nanostructurés à base de palladium pour l’électrooxydation du glycérol en milieu basique. À titre d’exemple, le catalyseur Pd/C obtenu avait une taille de particules de 4 nm [95] pour une surface active de 69 m2·g-1, valeur largement supérieure à celle obtenue par Simões et al. [96,97] (28 m2·g-1). Littéralement, la dénomination de cette méthode signifie méthode par échange d’anion bromure. Cette appellation tire son origine du principe de base du BAE. En

effet, la plupart des sels précurseurs (métalliques) utilisés en synthèse des nanomatériaux sont chlorés. L’ion bromure (r(Br‒) = 195 pm) étant plus volumineux que son homologue chlorure (r(Cl‒) = 181 pm), la substitution partielle ou totale de Cl‒ par Br‒ va accentuer l’encombrement stérique autour de l’ion métallique, ce qui jouera un rôle crucial lors de la croissance des germes de NPs. Cette substitution a été observée par le changement de couleur du complexe-ion

38

[PdCl4]2‒ initialement jaune qui vire au brun, caractéristique de [PdBr4]2‒ comme l’illustre (Eq. 12) [95]. Il est connu que les ions halogénures jouent un rôle décisif sur la morphologie notamment les facettes cristallines (100) des NPs de Pd et l’anisotropie des NPs [98].

4KCl(aq) ](aq) [PdBr K 4KBr(aq) (aq) PdCl K2 4 + ® 2 4 + (Eq. 12)

D’autre part, cette méthode s’est avérée efficace pour la synthèse de nanomatériaux bimétalliques PtAu/C [30] actifs en électrooxydation du glucose dans les conditions envisagées pour cette thèse. Elle a l’avantage de ne pas nécessiter de tensioactif qui pourrait bloquer certains sites actifs du catalyseur. En effet, cet avantage réside dans le fait que l’agent tensioactif utilisé ici est sous forme ionique et de facto, est aisément éliminé de la surface des NPs au cours de la phase de lavage. En résumé, BAE est une méthode de synthèse douce, facile, propre avec d’importantes surfaces actives et très prometteuse pour la catalyse hétérogène. Sa description détaillée sera abordée dans la partie expérimentale.

Dans la section ci-après, seront abordées certaines méthodes qui ont « révolutionné » l’Électrocatalyse, bien que faisant l’objet de critiques sur l’accessibilité aux sites actifs.

I.2.2.2. Méthode microémulsion dite « water-in-oil »

La méthode microémulsion dite de « water-in-oil » est une méthode chimique de synthèse des NPs initiée par Boutonnet et al. [99] en 1982. Ils avaient préparé des particules de Pt, Pd, Rh et Ir de taille comprise entre 3 et 5 nm. Par définition, le terme microémulsion signifie une fine émulsion obtenue par agitation de deux liquides non-miscibles dont la stabilité thermodynamique est assurée par la présence d’un tensioactif (définition tirée de la référence [24] à la page 19). D’année en année, le développement thermodynamique et l’optimisation des paramètres expérimentaux de cette méthode voient le jour [100,101]. La Figure 6a montre la formation de micelles. Sur ce schéma, l’origine de la dénomination anglo-saxonne « water-in-oil » est clairement montrée. En effet, la formation des micelles inverses induit une structure microscopique où les molécules d’eau (« water » en anglais) sont piégées par les têtes hydrophiles de la phase organique composée d’huile (« oil » en anglais) : « water-in-oil » indique l’eau dans l’huile. Selon Ericksson et al. [101], la réduction des cations métalliques peut se faire par deux voies. Soit par préparation d’une seconde microémulsion — de même composition que celle contenant les ions métalliques — contenant l’agent réducteur, soit par ajout direct de l’agent réducteur à la microémulsion qui contient déjà les sels métalliques précurseurs. La Figure 6b illustre la formation des NPs selon la première procédure.

39

Figure 6. a) Structure microscopique de la microémulsion en fonction de la température à concentration constante en tensioactif [101]. b) Formation de nanoparticules métalliques [100].

L’optimisation de cette méthode a conduit aux paramètres expérimentaux suivants : v le rapport molaire n(eau)/n(tensioactif), ω est égal à 3,8 [102],

v la concentration de sels métalliques dans la solution aqueuse est de 0,1 mol·L-1 [102], v la fraction volumique de Brij® 30 dans la microémulsion est de 16,5 % [102],

v le rapport molaire entre l’agent réducteur et le sel métallique est de 15 [24,97], v la synthèse est menée à température ambiante [24,97].

Nonobstant ces résultats, cette méthode reste discutable à cause du tensioactif Brij® 30 qui n’est pas entièrement éliminé de la surface des NPs métalliques.

I.2.2.3. Autres méthodes de synthèse

D’autres méthodes ont vu le jour : entre autres, la méthode polyol [103], l’historique méthode de Bönnemann développée en 1994 [104], ou d’autres encore [34,71]. Depuis quelques années, les méthodes physiques jadis destinées aux applications en Physique commencent par intéresser l’Électrocatalyse. Ainsi, le groupe de H. Remita au Laboratoire de Chimie Physique de l’Université Paris-Sud à Orsay élabore des nanostructures à partir d’un procédé appelé radiolyse [105,106]. Initiée par Belloni et al. [107] en 1998, la radiolyse permet d’obtenir des catalyseurs bimétalliques allant du simple alliage aux structures cœur-coquilles et actifs en électrooxydation de nombreux composés organiques [105,106]. Une autre voie de synthèse de NPs en solution aqueuse intéressante pour les électrochimistes est la voie d’ablation par laser [108,109]. Ainsi, Imbeault et al. [109] ont montré que les NPs AuxRh100-x étaient bien actives vis-à-vis de

40

En Électrocatalyse, la première tâche consiste en l’élaboration des catalyseurs, lesquels aujourd’hui sont fait de nanostructures. La seconde phase du travail de l’électrochimiste est la recherche du combustible. Dans le cadre de ce projet de thèse visant à concevoir et optimiser une hBFC utilisant les sucres issus de la biomasse comme combustible, les réactions d’électrooxydation de ces sucres seront étudiées. Il s’avère donc intéressant de passer en revue ces différents combustibles tout en mettant un accent particulier sur les dernières avancées au niveau de leurs réactivités dans des conditions expérimentales similaires aux nôtres. Ainsi dit, la revue bibliographique des réactions d’électrooxydation catalytiques du glucose, fructose, lactose et du saccharose sera abordée au § I.4. Mais auparavant, les techniques d’immobilisation des enzymes, autres catalyseurs potentiels, sont abordées.