• Aucun résultat trouvé

CHAPITRE VI : ÉTUDES SPECTROÉLECTROCHIMIQUES ET ANALYTIQUES

VI.1. Études spectroélectrochimiques de l’électrooxydation des sucres

VI.1.1 Électrooxydation du glucose à pH 13 suivie par infrarouge in situ

VI.1.1.1. Études in situ lors de la voltammétrie cyclique : Technique SPAIRS

Classiquement, les voltammogrammes des réactions d’électrooxydation sont obtenues lors de la variation positive du potentiel de la borne inférieure à la borne positive puis lors de la variation négative du potentiel de la borne supérieure à la borne inférieure (ex. : 0,05 V vs. ERH

¾ ¾ ¾ ¾

¾ ®

¾variation positive 1,4 V vs. ERH¾variation¾¾¾ négative¾¾®0,05 V vs. ERH). De cette façon, les spectres SPAIR au cycle retour sont enregistrés dans la même solution au cours de la variation négative de potentiel [30]. Mais de façon rigoureuse, cette procédure présenterait des lacunes. En effet, au cycle retour, un produit déjà issu de la variation positive de potentiel et qui est encore présent dans le film peut par diffusion, s’approcher de la surface et donc modifier le spectre. Par conséquent, la méthode adoptée pour ce travail consiste à préparer fraîchement une nouvelle solution et débuter l’étude par la valeur supérieure, soit 1,4 V vs. ERH ¾¾variation¾¾ négative¾¾®0,05 V

vs. ERH ¾variation¾¾¾ positive¾¾®1,4 V vs. ERH. Les études IR ont été réalisées sur une dizaine de catalyseurs et quelques exemples sont présentés ici.

Les spectres SPAIR sur Au90Pd10/C de la Figure 56a sont obtenus à +1 mV·s-1 et ceux de

la Figure 56b à -1 mV·s-1 au cycle aller ; les courbes de polarisation correspondantes sont indiquées sur la Figure 56c (flèches en rouge) et la Figure 56d (flèches en bleu). Pour comparaison, les spectres enregistrés lors du cycle retour de la Figure 56c sont présentés sur la Figure 56e. Les spectres de la Figure 56f correspondent à ceux obtenus au cours du cycle aller sur Au60Pt40/C à +1 mV·s-1. Lorsqu’un composé disparaît, ses bandes caractéristiques sont

positives (vers le haut) ; alors elles sont négatives (vers le bas) si le composé se forme.

De prime à bord, il importe de signaler que dans tous les cas, les voltammogrammes enregistrés dans la cellule IR avec ou sans molécule réactive étaient typiques de ceux déjà obtenus dans la cellule électrochimique classique. De facto, les processus électrochimiques sont bien représentatifs des réactions mises en jeu. Au cours de la variation positive de potentiel, l’oxydation démarre très tôt sur l’ensemble des catalyseurs (E ≤ 0,3 V vs. ERH ; voire 0,1 V vs. ERH sur Pt/C) signalée par l’apparition synchrone des bandes de vibration très intenses à 1585 et 1410 cm-1 avec un écart de ± 5 cm-1 en fonction du catalyseur. Comme l’indique le Tableau 9, elles correspondent respectivement aux vibrations d’élongation symétrique ns et antisymétrique

nas de O-C-O du gluconate. La consommation du glucose est signalée par les bandes positives en

dessous de 1200 cm-1 (déformation) et 2500-2900 cm-1 (élongation). La variation de la quantité d’eau dans la fine couche d’électrolyte au cours de la réaction s’illustre par la vibration de déformation d(H2O) vers 1660 cm-1. Les mêmes bandes sont présentes au cycle retour.

181

Figure 56. Spectres SPAIR et voltammogrammes obtenus dans 0,1 M NaOH + 50 mM glucose. Au90Pd10/C à partir de la borne inférieure i.e. 0,3 V vs. ERH (+1 mV s-1, c)) : spectres du cycle

aller en a) et ceux du cycle retour en e) ; à partir de la borne supérieure i.e. 1,4 V vs. ERH (-1 mV s-1, d)) pour les spectres du cycle aller en b). f) Au

182

En commençant par la borne supérieure, l’allure du voltammogramme (graphes c) et d)) et des spectres (graphes b) et e)) change légèrement. L’objectif visé en commençant par la borne supérieure au cours d’une nouvelle expérience était la détermination précise et sans équivoque de la nature du processus qui marque le pic retour obtenu lors de la variation négative du potentiel. Ce dernier est observé dans toutes les réactions d’électrooxydation de composés organiques sur les catalyseurs abiotiques. Dans la littérature, il est expressément attribué à l’électrooxydation des intermédiaires et/ou du réactif « frais » (ici le glucose). Les spectres SPAIR enregistrés dans le sens cathodique montrent l’apparition des bandes du gluconate (ca. 1585 et ca. 1410 cm-1 avec un écart de ± 5 cm-1 en fonction du catalyseur) dès 1,35 V vs. ERH sur Au90Pd10/C et pour

l’ensemble des catalyseurs étudiés. Son intensité augmente alors qu’elle a tendance à diminuer si l’on avait procédé par le cycle retour (voir graphe e)) comme il a été observé ailleurs [30,208]. Cette augmentation est le signe d’une production de plus en plus importante du gluconate, en phase avec l’augmentation du courant visible sur les voltammogrammes, graphe d).

La bande de vibration à 1360 cm-1 (1352 cm-1 au retour) est caractéristique de la déformation d(CH2) du carbone terminal. D’après le Tableau 9, 1360 cm-1 correspondrait à la

molécule de d-gluconolactone ou du glucuronate (une fonction carboxylate et une fonction aldéhyde) alors que 1352 cm-1 signerait plus la présence du gluconate. N’ayant pas observé la bande de vibration d’élongation spécifique de la d-gluconolactone vers 1742 cm-1 (nC=O) sur

l’ensemble des études en milieu basique, il est alors peu probable que cette bande puisse appartenir à la lactone. Or précédemment dans l’équipe (Thèse de Tonda-Mikiela en 2012 [30]), la bande à 1742 cm-1 a été observée sur des catalyseurs AuPt/C préparés avec cette méthode

BAE (non optimisée) [31] et récemment avec la Thèse de Hebié (2013) sur Au non supporté [208]. Cette absence avec les présents catalyseurs indiquerait un changement important dans la cinétique réactionnelle. Ainsi, la déshydrogénation et l’hydrolyse de la lactone intermédiaire seraient donc plus rapides empêchant sa détection par IR. L’optimisation expérimentale du protocole BAE a donc changé la cinétique réactionnelle des nanomatériaux catalytiques. Cela avait été déjà mis en exergue par les densités de courants plus élevées ainsi que les surfaces actives développées par les présents catalyseurs.

Un autre point important est l’absence d’intermédiaires à un seul atome de carbone du type COads (1900-2100 cm-1), carbonate (1396 cm-1) ou même CO2 détectable en milieu basique

(2340-2350 cm-1). Cela indique clairement qu’il n’y a pas eu de rupture de la liaison C-C. Dès le début des années 1990, il a été reporté que la rupture de la liaison C-C était possible sur les métaux à l’état massif ou modifiés par des adatomes [28,29] et récemment avec les travaux de Tonda-Mikiela [30,31] et Hebié [208] sur les nanomatériaux. Ces études montrent donc que la méthode de synthèse BAE a modifié la sélectivité des (nano)matériaux catalytiques Au-Pt-Pd.

183

VI.1.1.2. Études in situ lors de la chronoampérométrie : Technique FTIR

Au cours des travaux antérieurs visant à comprendre le mécanisme de la réaction d’électrooxydation du glycérol sur les nanomatériaux PdAgNi/C préparés par la même méthode BAE (Yaovi Holade, Master II, Université de Poitiers, 2012), une nouvelle méthode qui consistait à suivre l’évolution des bandes IR au cours de la chronoampérométrie a été proposée [217]. Une modification de celle-ci a conduit à réaliser des mesures chronoampérométriques à différents potentiels et à suivre en direct l’évolution de la réaction électrocatalytique au moyen des bandes de vibrations caractéristiques en IR. Ainsi, des potentiels fixes de 0,2 ; 0,4 ; 0,5 ; 0,6 ; 0,8 ; 0,9 ; 1 et 1,2 V vs. ERH ont pu être considérés pour obtenir des spectres dits de "IRTF". L’IRTF donne une meilleure qualité des spectres (nombre d’accumulations plus élevé). En effet, dans la méthode SPAIRS, la variation linéaire du potentiel (même à 1 mV·s-1) empêche une

longue accumulation et affecte la qualité des spectres. L’inconvénient lors de la méthode à potentiel constant est la non-détection d’un intermédiaire réactionnel si sa cinétique de disparition est très rapide. Dans ce cas, c’est la méthode SPAIRS qui est la plus indiquée. Ainsi, une combinaison rationnelle des deux techniques avec un choix adéquat des conditions expérimentales fait de la spectroélectrochimie, un puissant outil d’investigation.

Figure 57. Chronoampérométrie sur Au60Pt20Pd20/C à 0,5 V vs. ERH (a) et sur Pd/C à 0,8 V vs.

ERH (b) suivie par IR in situ dans 0,1 M NaOH + 50 mM glucose : spectres IRTF obtenus par enregistrement de spectres toutes les 3 min.

184

Les spectres IRTF en fonction du temps obtenus à 0,5 V vs. ERH sur Au60Pt20Pd20/C et à

0,8 V vs. ERH sur Pd/C sont présentés en a) et b) de la Figure 57. Les spectres obtenus pour différentes compositions de catalyseur et après 30 min sont comparés sur la Figure 58a pour 0,5 V vs. ERH et la Figure 58b pour 0,8 V vs. ERH (chronoampérogrammes sur les graphes c) et d) respectivement). Si l’intensité des bandes augmente au cours du temps (ce qui illustre une augmentation du taux de conversion), les spectres par contre montrent les mêmes bandes que ceux obtenus en SPAIRS. Cela amène à conclure à l’unicité du produit de réaction. Il faut cependant admettre que les résultats en termes de stabilité (courbes Volcano) ne sont pas superposables à ceux obtenus en chronoampérométrie classique. Cela est dû au simple fait que l’étude est réalisée en couche mince, contrainte imposée par le dispositif expérimental.

Figure 58. Chronoampérométrie suivie par IRTF in situ à 0,5 V vs. ERH (a et c) et 0,8 V vs. ERH (b et d) dans 0,1 M NaOH + 50 mM glucose.

185