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CHAPITRE II : PROTOCOLES EXPÉRIMENTAUX

II.2. Méthodes de synthèse des matériaux nanostructurés

Autrefois, l’Électrocatalyse se pratiquait avec les métaux à l’état massif. Mais très vite, les électrochimistes se sont rendu compte d’un certain nombre d’obstacles et/ou de limitations d’ordre fondamental et économique. Sur le plan fondamental, il s’agit de la difficulté à avoir un contrôle de l’activité et de la sélectivité des électrodes. De plus, la catalyse étant une science de surface, le recours à des matériaux nanostructurés permet de diminuer la quantité de catalyseur utilisé (en plus des effets électroniques) et par conséquent le coût tout en conservant voire boostant les performances catalytiques.

II.2.1 Méthode chimique : « Bromide Anion Exchange, BAE »

Comme Dr. S. Hebié l’a récemment montré dans sa thèse de Doctorat (2013, Université de Poitiers [208]), les nanoparticules non supportées fournissent uniquement des informations d’ordre fondamental en ce qui concerne leur activité intrinsèque ; et donc la sensibilité structurale. Pour des applications réelles, il s’avère essentiel d’utiliser un support qui doit posséder deux propriétés essentielles [209]. Tout d’abord, il doit avoir un fort pouvoir dispersant

3 H

2SO5 a été décrite pour la 1ère fois en 1898 par Heinrich Caro. Son pourvoir oxydant est E0 = +1,81 V vs. ESH. 4 La pyridine réduirait la fertilité masculine.

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de façon à diminuer la charge métallique tout en augmentant la surface active des catalyseurs. Cela implique une bonne surface spécifique BET (cf. § II.4.7) de l’ordre de centaines de m2·g-1. Ensuite, le support doit être un parfait conducteur électronique ; en effet il doit permettre la circulation des électrons et ainsi assurer la conduction du courant électrique. Il convient de signaler que le premier critère donne lieu aussi à un fait appelé « effet du support », c’est-à-dire de l’interaction entre les espèces chimiques présentes en sa surface et les nanoparticules qui y sont déposées, peut en résulter un effet de synergie pour augmenter les performances catalytiques du catalyseur ainsi élaboré.

Au sein de l’équipe SAMCat, le carbone Vulcan (XC 72 ou XC 72R)5 commercial est prétraité thermiquement avant son utilisation comme support des nanoparticules [24,30,97]. Ce procédé consiste à chauffer la poudre contenue dans un creuset à 400 °C sous atmosphère d’azote pendant 4 h. L’objectif clairement affiché est l’élimination des contaminants. Il s’agit en l’occurrence des espèces soufrées qui proviendraient de la phase de production industrielle [210]. Mais en 2008, au cours de la recherche des facteurs liés à la dégradation du catalyseur modèle Pt/C, Grolleau et ses collaborateurs avaient étonnamment et expressément souligné que l’aire BET du Vulcan XC 72 passait de 237 à 314 m2·g-1 après ce prétraitement. Toutefois, aucune étude n’avait été entreprise pour évaluer l’impact d’un tel changement sur les propriétés physicochimiques voire catalytiques après prétraitement. Il nous a donc apparu primordial au début de cette thèse, de procéder à une étude complète avant de l’adopter pour la suite des travaux. A partir des échantillons commerciaux et de ceux prétraités du Vulcan XC 72R et du Ketjenblack EC-600JD, nous avons montré que l’impact sur les propriétés électrochimiques des catalyseurs n’était pas non seulement moindre, mais aussi intéressant [209]. Corollairement, le carbone a subi ce prétraitement avant son emploi au cours de la préparation des nanocatalyseurs. Dans la suite, des nanoparticules métalliques M dispersées sur du carbone Vulcan XC 72R ou Ketjenblack EC 600-JD (utilisés ici) seront symbolisés par M/C ou M/KB, respectivement.

Les différents sels précurseurs et autres réactifs utilisés au cours des synthèses sont : v acide trétrachloroaurate trihydraté (HAuCl4·3H2O ; ACS reagent, ≥ 99,9 %),

v acide hexachloroplatinique hexahydaté (H2PtCl6·6H2O ; ACS reagent, ≥ 37,50 % Pt),

v tétrachloropalladate de potassium (K2PdCl4 ; Sigma-Aldrich®, 99 %),

v tétraborohydrure de sodium (NaBH4 ; Sigma-Aldrich®, 99 % ReagentPlus®),

v carbone Vulcan XC 72R (CABOT),

v Ketjenblack EC-600JD (Akzo Nobel Polymer Chemicals, Amersfoort, Netherlands), v bromure de potassium (KBr ; Sigma-Aldrich®, ≥ 99 %).

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Les propriétés physicochimiques et catalytiques (activité, sélectivité…) d’un catalyseur nanostructuré sont intimement liées à la méthode de synthèse qui lui a donné naissance. Ainsi, toute présence d’espèces organiques à la surface des nanoparticules peut affecter voire altérer ces propriétés en bloquant certains sites actifs. La méthode envisagée dans cette thèse, nouvellement initiée au sein du laboratoire et qui a déjà fait ses preuves est : la méthode par échange d’anion

bromure (Bromide Anion Exchange, BAE). Son principe de base a été largement discuté dans le

chapitre d’introduction (section I.2.2.1). Cette méthode a été optimisée en faisant varier les paramètres tels que la concentration en sels métalliques (via le volume du réacteur de synthèse), la concentration en ions bromure et la température. Les valeurs optimisés sont Cr = 1 mmol·L-1,

soit Vr = 100 mL (volume du réacteur de synthèse) ; j = 1,46 (rapport molaire entre ions

bromure et métaux) et Tr = 25 °C & 40 °C (température du réacteur de synthèse) pour la

préparation de 100 mg de catalyseur à 20 wt.% en taux de charge métallique. N. B : Tr = 25 °C

& 40 °C signifie que la température est de 25 °C avant l’étape de l’ajout de l’agent réducteur et de 40 °C juste après celle-ci pour la suite de la synthèse [211]. L’avantage majeur de cette

méthode est sa simplicité de mise en œuvre et l’ampleur de la qualité des résultats qu’elle donne. Sans l’usage de molécules organiques, la méthode BAE ainsi optimisée permet d’obtenir en moins de 24 h, des nanomatériaux catalytiquement très actifs avec un rendement de synthèse de plus de 90 %, minimisant ainsi les pertes en métal.

La Figure 7 résume le principe de fonctionnement de la méthode BAE. Classiquement, pour préparer 100 mg de catalyseur à 20 wt.%, les sels précurseurs sont initialement dissous avec Vr = 100 mL d’eau ultra pure dans un réacteur de synthèse de capacité 500 mL. Ensuite, le

réacteur est placé dans un cristallisoir contenant de l’eau déjà thermostatée à 25 °C au moyen d’une plaque à double fonction chauffage/agitation magnétique. Après dissolution, homogénéisation et équilibre thermique (typiquement 10 min), une masse convenable de KBr (agent surfactant) déterminée via la constante j = n(KBr)/n(métaux) = 1,46 est ajoutée et un temps

d’observation de 10 minutes est imposé. À ce stade, des observations qualitatives doivent être faites comme le changement potentiel de la couleur de la solution. Les changements notables dans le cas des catalyseurs monométalliques sont illustrés sur la Figure 7. Cette étape est décisive pour avoir un environnement stérique important autour de l’ion complexe métallique afin de contrôler la croissance des nanoparticules métalliques après la phase de réduction. Des mesures de spectres UV-visible ont été réalisées pour mieux comprendre ces changements de couleurs ; les résultats seront discutés plus tard dans ce manuscrit [212]. Avant d’effectuer la réduction des ions métalliques, une quantité de support carboné (80 mg pour avoir 20 wt.%), est ajoutée à la solution et le tout est transféré dans un bac d’eau pour l’homogénéisation aux ultrasons pendant 45 min afin d’obtenir une bonne dispersion.

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Figure 7. Dispositif expérimental optimisé pour l’élaboration de nanomatériaux par la méthode de synthèse « Bromide Anion Exchange, BAE ».

Puis, la réduction des ions métalliques dissous dans la solution aqueuse est réalisée par ajout en large excès du réducteur après avoir transféré de nouveau le réacteur de synthèse dans l’eau thermostatée. Dans le cas des catalyseurs ne contenant pas de palladium, 15 mL de NaBH4

à 0,1 mol·L-1 sont ajoutés, soit n(NaBH4)/n(métaux) ≈ 15. Puisque NaBH4 fournit in situ H2, l’acide L-

ascorbique (AA : 0,1 mol L-1 avec n(AA)/n(métaux) = 7) a été choisi comme réducteur pour éviter

l’absorption de l’hydrogène par les nanoparticles de Pd dont l’affinité est très bien connue [213- 215]. À la fin de l’ajout de l’agent réducteur, la température du réacteur est élevée à 40 °C pour faciliter la cinétique de la réduction qui est très lente avec l’AA en comparaison avec l’agent réducteur NaBH4. Finalement, après une durée de 2 h, le mélange contenant les nanoparticules

finement dispersées sur le carbone est filtré sous vide sur Büchner en utilisant un filtre normal Millipore du type 0,22 µm GSWP (Fischer-Bioblock). Le filtre GVWP, destiné aux solvants organiques, peut aussi être utilisé. La couleur du filtrat constitue la première analyse qualitative sur la réduction ou non des ions métalliques. En effet, un filtrat limpide est le signe d’une réduction totale. Dans le cas contraire, il reste encore des ions métalliques en solution. Au cours des différentes synthèses envisagées dans ce travail, le filtrat était toujours limpide. Au moins trois rinçages à l’eau ultra pure est nécessaire pour éliminer toutes les espèces ioniques encore piégées. Le filtre récupéré (à la fin dans un pilulier) est séché à 40 °C à l’étuve pendant au moins 12 h de façon à éliminer toute trace d’eau dans la poudre catalytique. Le catalyseur obtenu sera

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alors noté par exemple Au90Pd10/C en composition atomique. Des dizaines de catalyseurs à base

de AuxPtyPdz ont été préparés : les nombres entiers naturels x, y et z (tel que x + y + z = 100)

représentant la composition atomique en or, en platine et en palladium, respectivement.

II.2.2

Autres alternatives : Utilisation des méthodes physiques

Au cours de cette thèse, l’activité électrocatalytique de nanomatériaux métalliques de type PdxAuy obtenus par la méthode d’ablation laser [108,109] a été considérée. Ces

nanoparticules obtenues en solution aqueuse sans molécule organique, sont exemptes de toute contamination. L’autre approche concerne le procédé radiolyse [106,216] qui permet la préparation des nanomatériaux bimétalliques allant du simple alliage aux structures cœur- coquille, supportés ou non et actifs en électrooxydation de nombreux composés organiques [106,216]. Ces différents résultats ne sont pas discutés dans le présent manuscrit.