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Chapitre 5 Méthodologie

5.10 Limites de la méthodologie

Le petit nombre de sujets (n=17) ne nous permettra pas de tirer des conclusions d'ordre général. Dans le cas de notre recherche, il est préférable d’observer ce qui se passe à titre individuel, sujet par sujet.

 La tâche

Le choix d’un type de tâche ne rend pas compte du langage préfabriqué dans son ensemble. En effet, la tâche de narration choisie limite le choix des séquences que l’on pourrait trouver dans d’autres tâches orales comme l’interaction, la discussion sur un sujet d’actualité ou des tâches qui nécessitent de produire des discours autres que narratifs tels que le discours descriptif, argumentatif, explicatif. Le type de tâche conditionne le type de séquences produites, en particulier les séquences lexicales. On ne peut trouver que des séquences liées au sujet, ce qui limite forcément le répertoire. Cela étant, on ne peut rendre compte de l’immense variété des séquences. La comparaison entre les deux tâches peut néanmoins être intéressante pour le chercheur. Cependant, dans une étude très intéressante, Forsberg et Fant (2010 : 64) montrent qu’une interaction peut être une tâche difficile même pour des utilisateurs de la L2 très avancés. Ces chercheurs constatent que les sujets non-natifs testés produisent moins de SP et sont moins fluents dans la tâche de dialogue (Boss) que les natifs alors que les résultats dans les deux groupes, à part une légère divergence dans les SP lexicales, sont similaires dans la tâche narrative (Charlie).

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Comme le dispositif choisi implique la production d’un certain type de SP, nous n’avons aucune séquence discursive situationnelle comme chez Forsberg (2006) du type je m'appelle,

j'ai X ans, etc. Cordier (2013) dans sa thèse soumet ses sujets à quatre tâches différentes :

l’interview, le dialogue entre deux sujets sur un sujet d’actualité, une tâche où l’apprenant donne son opinion sur deux sujets d’actualité, ainsi qu’une tâche narrative. Ses cinq sujets, un groupe homogène, tous de niveau avancé, ont été soumis à ces quatre tâches avant et après un séjour de six mois en immersion dans le pays de la langue cible (la France). Elle ne fait appel à aucun groupe contrôle. Comme Cordier le fait remarquer, la tâche narrative est la tâche la moins productive en termes de séquences préfabriquées de type référentiel, comparée aux autres tâches où les apprenants ne sont pas contraints par un support et se sentent plus libres. Si effectivement le choix de la tâche influe sur la production et la liberté d’utiliser une grande variété de SP, notre objectif est plutôt de montrer comment les sujets utilisent les séquences dans une narration, par exemple je pense que qu’ils transforment à la troisième personne il

pense que. D’autre part, ils mettent en place des stratégies d’évitement ou de remplacement

lorsque le mot n’est pas connu, et emploient souvent des groupes « préfabriqués » qui compensent leur méconnaissance du lexique. Par exemple, le sujet OL qui ne connaît pas le mot « abeille » le remplace par la SP « petit jaune » sur le modèle de petit garçon. De même chez AK, un de nos sujets de niveau 1, l’utilisation de « tant pis » sert à exprimer un sentiment de déception. Ne connaissant sans doute pas le vocabulaire approprié, il utilise trois fois cette même SP.

 Hétérogénéité du groupe Langues diverses

Un groupe homogène, c’est-à-dire ayant une même L1 facilite la tâche du chercheur. La diversité des langues maternelles de nos sujets ne nous permet pas d’analyser les SP déviantes en regard avec la L1. Par exemple, le sujet italophone produit *reste étonné pour être étonné, sans doute parce qu’en italien on dit rester étonné. Il aurait été cependant intéressant de comparer de façon systématique les erreurs de tous les sujets selon les expressions de leur L1. Niveau d’étude

Nos sujets n’ont pas tous le même parcours universitaire ou professionnel. Nos sujets d’Albi sont doctorants ou en stage pour une année. Les sujets de Toulouse, s’ils ont terminé leurs études au lycée n’ont pas tous un diplôme universitaire, et certains qui ont terminé leurs études (PR) travaillent ou sont en recherche d’emploi. En revanche, ils sont tous inscrits au DEFLE et suivent des cours de français.

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 Jugement des natifs

Le recours au jugement des natifs aurait pu être fait de manière systématique ; nous avons fait appel au jugement de deux juges natifs avertis qui avaient pour tâche d'examiner les productions et les séquences relevées. Notre travail n’étant pas un travail strictement liinguistique nous avons préféré croisé, comme nous l’avons dit par ailleurs, un certain nombre de traits d’identification.

 La motivation

Si nous n’avons eu aucun mal à tester nos sujets, il se trouve que nous constatons pour certains d'entre eux une baisse de la motivation lors du deuxième enregistrement. Certains sujets ont produit des narrations très courtes qui ne nous permettent pas de généraliser les résultats. Cependant, on peut se demander s’il n’est pas normal que quelques sujets se trouvent dans cette situation. Deux explications sont possibles : cela peut être effectivement le résultat d’une baisse de la motivation pour certains sujets ou alors la volonté de mieux faire en étant plus créatif (précis) pour d’autres.

Comme nous l’avons expliqué au début de ce chapitre, notre objectif était de voir ce qui se passe chez des apprenants n’ayant eu aucun enseignement spécifique des SP, alors qu’ils sont soumis à une tâche narrative et qu’ils avaient d’ailleurs toute liberté de donner leur opinion. Si nous sommes consciente qu’ils ne peuvent pas produire certaines SP, nous trouvons intéressant de montrer comment les apprenants arrivent à pallier le manque lexical face à une narration imposée et quelles stratégies ils utilisent.

 Les types de séquences

Les SP lexicales produites sont en rapport avec la tâche. Nous trouvons donc un certain type de séquences (lexicales) en rapport avec le sujet de la narration, comme les séquences construites avec « petit » ou la séquence lexicale « en bois » puisque dans la BD, les « personnages » sont un petit enfant (petit garçon) et un petit cheval « en bois ». On note l'utilisation récurrente des syntagmes avec petit aussi bien chez les LNN que chez les LN. « petit » n'est pas toujours utilisé avec le sens de diminutif et même quand il pourrait l’être rien ne nous l’indique clairement. Aussi avons-nous considéré tous les syntagmes avec cet adjectif comme des séquences préfabriquées. De même nous constatons chez nos sujets non-natifs un type de séquences discursives sur-employé « et après » pour structurer les différentes étapes chronologiques du récit. Ils s’appuient fortement sur cette SP discursive à la

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différence des natifs où l’on n’en trouve qu’une seule occurrence (CA, film). Les natifs utilisent plus de séquences idiomatiques et plus variées, ce qui semble normal compte-tenu du statut de nos sujets.

Ce chapitre consacré à la présentation de notre méthodologie, clôt notre première partie théorique et annonce la partie dédiée à la présentation des résultats ainsi qu’à leur analyse.

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